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Inversion du sens de rotation toroïdale avec la densité : TCV

2.4 Quelques résultats expérimentaux sur la rotation

2.4.4 Inversion du sens de rotation toroïdale avec la densité : TCV

Un changement du sens de la rotation toroïdale a été observé sur le tokamak TCV (R =

88cm, a = 25 cm, Bϕ ∼ 1.45T) lorsque la densité électronique devient supérieure à un

certain seuil. Cette observation est présentée dans [Bortolon 06], puis étudiée de façon plus approfondie dans [Duval 08]. Elle concerne des plasmas ohmiques, en mode L, en appui limiteur ou diverteur. Le type d’appui change le sens de la rotation dans les conditions “normales” de densité (contre-courant dans le cas limiteur, co-courant dans le cas divertor) ; la rotation s’inverse dans les deux cas lorsque neest supérieure au seuil. En-dessous, la vitesse de rotation vérifie une loi d’échelle du type Vϕ(0) ∝ −Ti(0)/Ip en configuration limiteur.

La figure 2.5a est issue de la référence [Bortolon 06], il peut y être remarqué qu’une aug- mentation modeste de ne suffit à inverser le signe de Vϕ sur l’ensemble du plasma. Les profils de température électronique et Carbone changent peu de part et d’autre de la transition. Celle-ci est rapide (environ 100ms) et semble plutôt affecter le centre du plasma : la rotation au bord change peu. Le courant plasma doit être supérieur à une valeur minimale (290kA) pour que l’inversion de Vϕ puisse avoir lieu ; il en résulte un facteur de sécurité au bord rela-

tivement peu élevé : qa ∼ 3 [Duval 08]. De plus, la forme du plasma influe la possibilité ou

non d’une telle transition ; celle-ci n’étant pas observée à faible ellipticité et triangularité. Les mécanismes à l’origine de cette bifurcation sont actuellement encore mal compris. La possibilité d’un changement de régime de la turbulence dûe à l’augmentation de la collisiona- lité est suggérée dans [Bortolon 06]. L’inversion du sens de rotation peut parfois être précédée de l’apparition d’un mode MHD m/n = 2/1 (visible à la figure 2.5b), dont la rotation est

dans le sens contre-courant. Un lien de causalité avec l’inversion de Vϕ est suspecté mais

difficile à mettre en évidence. Ces résultats seront évoqués lors de la discussion du chapitre 7.

(a) [Bortolon 06]Profils radiaux de densité électronique, température électronique et de l’ion Carbone, et fréquence toroïdale (positive dans le sens co-courant) avant (lignes continues) et après la transition. Plasmas en mode limi- teur.

(b) [Duval 08] Spectrogramme montrant l’apparition d’un mode

MHD (m/n = 2/1) un peu avant l’inversion de Vϕ (vers t = 1.2s), lors d’une décharge en mode limiteur. L’évolution de Vϕ

est montrée par le décalage en fréquence de la raie Carbone en bleu (co-courant si λCX > 529.06 nm).

Fig. 2.5: [Bortolon 06, Duval 08] Inversion du sens de la rotation toroïdale dans le tokamak

Chapitre 3

Le tokamak Tore Supra, diagnostics et

méthodes

Tore Supra (IRFM, CEA Cadarache) est un grand tokamak de rayon R0 = 2.36m et

petit rayon a = 0.72m. Ses premiers plasmas datent de 1988. Il est équipé de bobines de champ toroïdal supraconductrices, ce qui lui donne la possibilité de réaliser des décharges de longues durées, jusqu’à 6 minutes (en décembre 2003). Dans ce chapitre, les principales caractéristiques de Tore Supra sont présentées. Plusieurs diagnostics utilisés au cours de l’étude sont également brièvement décrits, à l’exception de la réflectométrie Doppler présentée au chapitre 4.

3.1

Caractéristiques générales de Tore Supra

Sur Tore Supra, le champ magnétique toroïdal est crée par 18 bobines supraconductrices constituées d’un alliage Niobium-Titane, et refroidies à 1.8K par un bain d’Hélium super- fluide. Le champ magnétique toroïdal peut atteindre jusqu’à 4.2 T au centre du plasma ; pour un usage courant celui-ci est toutefois limité à 3.85 T. Il peut être maintenu à la même valeur pendant toute une journée expérimentale.

Le système de champ poloïdal se compose d’un solenoïde central servant à induire le courant plasma et de 8 circuits contrôlant l’équilibre (forme, position du plasma,...) . Les conducteurs sont en cuivre, à la différence du système de champ toroïdal.

Le courant plasma est induit par le circuit A (sur la figure 3.1a), via un circuit magnétique en fer saturé. Le flux total disponible est limité par les valeurs extrêmes acceptables pour le courant traversant A : ±40kA. La valeur maximale de courant plasma atteignable est

(a) Schéma simplifié du système poloïdal. (b) Intérieur de Tore Supra : princi- paux appuis et antenne (source www.fusion- magnetique.cea.fr)

Fig. 3.1: Le tokamak Tore Supra

de 2 MA, mais en pratique celle-ci est limitée à 1.5 MA afin de minimiser les risques de dommages causés par une disruption.

Le contact plasma/ surfaces matérielles s’effectue au niveau d’un des limiteurs. Sur Tore Supra, trois différents appuis sont possibles, visibles sur la figure 3.1b . Le principal limiteur, axi-symétrique, est le Limiteur Pompé Toroïdal (ou LPT), refroidi activement et capable

de supporter des flux de chaleur de 10 MW/m2. L’appui peut également s’effectuer sur les

anneaux de garde côté intérieur, et sur le Limiteur de Protection d’Antenne (LPA) côté

extérieur. Ces deux éléments, le LPA en particulier, ne sont pas capables d’absorber des flux de chaleur aussi importants que le LPT.

Quatre systèmes de chauffage additionnels sont installés sur Tore Supra :

– le chauffage à Fréquence Cyclotronique Ionique ou FCI : trois antennes peuvent délivrer une puissance maximale d’environ 12MW (4MW/ antenne). La gamme de fréquence est 40-80MHz.

– le chauffage à fréquence hybride basse ou LH : s’effectue à 3.7GHz. Jusqu’en 2009, deux antennes étaient capables de délivrer respectivement 2MW et 4MW de puissance. Une nouvelle antenne capable de d’injecter 3 MW a été installée à la place de l’antenne de 2MW, à l’occasion d’un arrêt des opérations entre Décembre 2008 et Octobre 2009. – le chauffage à Fréquence Cyclotronique Electronique ou FCE : 800kW peuvent être

injectés par 2 gyrotrons.

– l’Injection De Neutres ou IDN : délivre une puissance relativement faible en comparaison avec les systèmes FCI et LH. Son utilisation est orientée vers un usage diagnostic,

notamment pour la Spectroscopie d’Echange de Charge. Les particules neutres sont accélérées à des énergies comprises dans la gamme 50-80keV. La puissance maximale pouvant être injectée est proche de 800kW.

Ripple

Le nombre fini de bobines toroïdales N (=18 sur Tore Supra) est à l’origine d’une on- dulation de la composante Bϕ. Celle-ci est caractérisée par le coefficient de ripple δ =

(Bmax − Bmin)/(Bmax + Bmin) (où les indices min et max réfèrent à une variation avec

l’angle ϕ) :

Bϕ =

B0R0

R (1 − δ cos Nϕ) ≃ B0(1 − ǫ cos θ − δ cos Nϕ)

Le coefficient de ripple n’est pas uniforme sur une section du plasma. Il est maximal du côté faible champ, au niveau de la frontière externe du plasma. Cette caractéristique est en général vraie sur la plupart des tokamaks. Sur Tore Supra, la valeur de δ au point de coordonnées (R, Z) peut être approximée par [Defrasne-note] :

δ ≈ a1 exp(a2r′+ a3r′2) (3.1)

avec a1 = 2.2 × 10−4, a2 = 5 m−1, a3 = 1.6 m−2. La longueur rs’obtient à partir de

(r, θ) (coordonnées polaires centrées ici sur R0 = 2.42 m, centre de la machine avant la

configuration CIEL) par la relation suivante (avec b1 = 0.376 m et b2 = 0.26 m−1) : 

b2r′2 = 0.5 + r b2 cos θ + b1b2(0.5 + r b2 cos θ + b1b2)2− b22 r2+ 2r b1 cos θ + b21 1/2

Les lignes de niveaux du coefficient ripple δ (exprimé en %) sont montrées à la figure 3.2. Du côté faible champ, δ atteint jusqu’à 7% au niveau du LPA (R = 3.14m, Z = 0), contre 0.5% au niveau des anneaux de garde (R = 1.58m). Le ripple au bord vaut 5% pour un

plasma “classique”, centré en R0 = 2.36m et de petit rayon a = 72 cm. La valeur minimale

de 0.02% est atteinte au point (R = 2.04 m, Z = 0). Enfin le ripple au centre de la machine

R0 = 2.36 m vaut 0.11%.

Notons que le coefficient de ripple sur Tore Supra est très élevé en comparaison avec les autres tokamaks. Par exemple, δ < 0.08% sur JET et δ < 1% sur JT-60.

0.05 0.1 0.5 0.5 1 1 2 2 4 4 6 6 R (m) Z (m)

Carte coefficient ripple δ (%)

1.5 2 2.5 3

−0.5 0 0.5

Fig. 3.2: Contours du coefficient de ripple δ(%) sur une section poloïdale de Tore Supra.