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3.3 Imagerie multimodale OCT plein champ/microscopie de fluorescence à illumination

3.3.1 Introduction – microscopie confocale à illumination structurée

Nous avons identifié au paragraphe 3.1 la nécessité d’enrichir la quantité d’informations pertinentes apportées par une image OCT Plein Champ à visée de diagnostic précis du cancer, plus particulièrement en termes de contraste, puisque la résolution typique de la technique est a priori intrinsèquement suffisante pour résoudre les structures d’intérêt nécessaires au diagnostic. En particulier, la capacité de visualiser les noyaux ainsi que les contours cellulaires associés est un besoin régulièrement identifié par les cliniciens ayant participé aux études pré- cliniques présentées au Chapitre 2, de manière à permettre une caractérisation complète de la tumeur, en se basant au maximum sur les critères d’analyse utilisés en histologie – ce qui facilite potentiellement le temps d’adoption de la méthode.

A ce titre, les efforts produits visant à combler ce besoin doivent se focaliser sur l’amélioration du contraste des noyaux cellulaires. Il apparaît alors naturel de chercher à développer un instrument multimodal, combinant l’OCT Plein Champ à une modalité dotée d’une grande spécificité, en particulier capable de donner un très bon contraste sur ces structures. L’imagerie de fluorescence, du fait de la grande quantité de marqueurs existants incluant des marqueurs nucléaires, est un candidat naturel à cette combinaison.

Un grand nombre de publications présentent plusieurs approches instrumentales permettant une combinaison OCT/imagerie de fluorescence [43, 51-54]. La grande majorité de ces travaux reposent sur l’utilisation de l’OCT spectral, limitant intrinsèquement la résolution transverse des images produites (typiquement 10µm), et ne permettant donc pas de résoudre le noyau au sein de la cellule. Très peu proposent une résolution compatible avec la discrimination des noyaux cellulaires [43] : le montage proposé le permettant est basé sur la combinaison de l’OCT Plein Champ avec l’imagerie de fluorescence à 2 photons, mais cette méthode présente plusieurs limitations ne permettant pas d’envisager simplement son utilisation à des fins de diagnostic du cancer :

 L’imagerie de fluorescence à 2 photons ne fournit pas de contraste spécifique des noyaux cellulaires, mais produit, lorsque appliquée aux tissus biologiques, un signal émis par l’autofluorescence de quelques protéines comme l’élastine, limitant le contraste aux structures correspondantes majoritairement fibreuses.

Sa nature endogène est cependant un vrai atout, de même que sa capacité à produire des coupes optiques.

 La mise en œuvre instrumentale de l’imagerie de fluorescence à 2 photons est basée sur une reconstruction de l’image après balayage 2D de l’échantillon point par point. Cette mise en œuvre est par nature très différente de l’OCT Plein Champ et rend la combinaison des 2 méthodes complexe. En outre l’utilisation de sources telles que les lasers femtosecondes augmente le coût et l’encombrement à terme de cette approche.

Remarque : il convient ici de citer les nombreux travaux réalisés en microscopie confocale, qui présente la particularité de pouvoir produire un contraste de réflectance (relativement similaire à l’OCT) et de fluorescence (avec agents de contrastes) en utilisant le même dispositif, ainsi que de permettre une coupe optique [56-61]. Nous ne développons pas ici ces travaux, puisque ce chapitre est focalisé sur l’amélioration de l’OCT Plein Champ. De manière générale, l’OCT Plein Champ présente des avantages significatifs sur la microscopie confocale, présentés au paragraphe 1.3.6.

Pour répondre au besoin clinique, la combinaison de l’OCT Plein Champ avec l’imagerie de fluorescence « conventionnelle », c’est-à-dire basée sur l’utilisation d’agents de contraste exogènes spécifiques des noyaux, semble plus appropriée. Parmi les diverses mises en œuvre instrumentales en imagerie de fluorescence, la microscopie de fluorescence par illumination structurée (Structured Illumination Microscopy ou SIM [16-17,55]) est particulièrement adaptée à une combinaison avec l’OCT Plein Champ :

 Cette technique permet de produire des coupes optiques (optical sectioning), ce qui la rend pertinente pour l’imagerie des milieux biologiques diffusants, par réjection du signal (de réflectance ou de fluorescence) issus du volume situé hors de cette section optique

 La technique est une technique de microscopie confocale plein champ, et donc permet d’obtenir des images de réflectance et de fluorescence, puisqu’à l’inverse de l’OCT elle ne nécessite pas de conserver les propriétés de cohérence de la lumière émise par les photons issus de la section optique considérée

 En tant que méthode d’imagerie plein champ, la technique ne nécessite pas de balayage du plan d’imagerie point par point, mais permet d’acquérir l’ensemble des points en parallèle à l’aide d’un détecteur matriciel, de la même manière que l’OCT Plein Champ. Cette mise en œuvre instrumentale suggère donc de pouvoir mettre en commun une partie des voies optiques, et donc un montage simplifié

 De même, puisque la technique ne nécessite pas de balayage, il n’est pas nécessaire d’utiliser des sources à forte cohérence spatiale (sources fibrées par exemple), et il est donc possible d’utiliser des sources de faible cohérence spatiales comme des lampes ou des LEDS, de manière similaire à l’OCT Plein Champ, ce qui là encore laisse entrevoir une combinaison simplifiée

La mise en œuvre la plus simple de la technique SIM consiste en l’utilisation d’un masque 2D de transmission, tel que par exemple une mire de Ronchi constituée d’une succession de motifs linéaires binaires, ou encore une mire sinusoïdale [16-17, 62]. Cette mire est conjuguée avec le plan d’imagerie (plan focal de l’objectif de microscope), et modulée transversalement à l’axe optique dans la direction perpendiculaire au motif linéaire de la mire, de manière à décrire au moins une période de la mire pour une séquence de modulation élémentaire. Ce plan d’imagerie est conjugué avec le détecteur matriciel (caméra CCD ou CMOS), de manière à acquérir plusieurs images du plan d’intérêt, constituées de la superposition de la grille avec l’objet, pour plusieurs positions de la grille lors de la modulation. La réjection du signal hors de la section optique repose sur la perte de contraste rapide par défocalisation pour les fréquences spatiales élevées, c’est-à-dire des détails de l’image, comme illustré à la Figure 45. Ainsi la mire imagée est nette uniquement dans la profondeur de champ de l’objectif. Une combinaison d’au moins 3 images (I1, I2, I3) correspondant à un déphasage de de la grille de 0, 2π/3 et 4π/3 – c’est-à-dire des images de la grille sans recouvrement – permet d’obtenir une coupe optique par réjection du signal hors focus. Dans le cas d’une émission de fluorescence provenant de l’objet d’intérêt, cette sélection des photons modulés dans la profondeur de champ reste valable.

Figure 45 : Sectioning optique par illumination structurée. a, b, c: simulation de l’effet du defocus sur les fréquences spatiales illustrant le flou plus rapide sur les détails les plus fins d’une image; d: représentation schématique d’un masque 2D projeté sur un échantillon volumique illustrant le principe de la coupe optique réalisée ; e, f: image de fluorescence conventionnelle (e) et par Illumination

Structurée (f) de cellules dont la membrane a été marquée (Quantom Dots) illustrant la capacité de coupe optique de l’Illumination Structurée.

Le calcul de différences de paires d’images permet de se débarrasser du signal hors focus constant et des images de la mire, selon la formule élémentaire suivante [62] :

I1 I2

 

² I1 I3

 

² I2 I3

²

IS      

Remarque : nous cherchons ici uniquement à réaliser une coupe optique compatible avec l’imagerie de fluorescence à l’aide d’une mise en œuvre simplifiée lorsque combinée avec l’OCT Plein Champ. Nous n’utilisons ainsi pas le possible gain de résolution, pouvant surpasser la limite de diffraction, de la méthode SIM [63] qui supposerait une mise en œuvre instrumentale plus complexe pour un intérêt limité, puisque nous avons vu aux chapitres précédents que l’obtention de la résolution la plus élevée possible ne constituait pas une priorité pour les applications de diagnostic visées.