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3.3 Détection de l’intention d’un changement de voie

3.3.4 Module de détection de l’intention du conducteur basé sur la logique

3.3.4.1 Introduction à la logique floue

La logique floue décrit une forme de raisonnement approximatif qui s’apparente à celui de l’humain. L’idée a émergé de la théorie de Lotfi Zadeh des ensembles flous présentée dans un article en 1964 [194]. Dans [195], le raisonnement approximatif ou le raisonnement flou est défini comme étant le processus par lequel une conclusion est déduite à partir d’un ensemble de prémisses imprécises. Zadeh a introduit le concept de variable linguistique, variable dont

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les valeurs sont des mots et non des chiffres ce qui donne la possibilité de calculer avec des mots [196]. Cette technique représente un outil puissant qui a permis de contrôler des proces-sus complexes voire non linéaires [197] sans disposer de modèles mathématiques complexes et sans une connaissance approfondie des équations les régissant. Tandis qu’avec les techniques de contrôle classiques c’est le système ou le processus à contrôler qui est modélisé, un contrô-leur basé sur logique floue met l’accent sur la modélisation du comportement de l’opérateur humain.

La logique floue trouve tout son intérêt lorsqu’il y a une tolérance pour l’imprécision qui pourrait être exploitée pour obtenir plus de flexibilité, de robustesse, un coût réduit et un meilleur rapport à la réalité [196].

En 1974, Mamdani dans [198] a été le premier à démonter avec un exemple pratique l’efficacité de cette technique. Il a démontré qu’avec un contrôleur très simple basé sur la logique floue il était possible de contrôler un moteur à vapeur. C’est au Japon que la logique floue a connu une période florissante où de nombreux développements ont été réalisés [199]. Le contrôle avec la logique floue a fait ses preuves sur le métro de Sendai, où cette technique a été employée pour régir tous les aspects d’accélération, de freinage et d’arrêt. Elle a été employée brillamment pour contrôler et manœuvrer un véhicule à l’aide d’instructions orales [200]. Nous citerons également son utilisation dans les domaines aéronautique [201] et ferroviaire [202]. En utilisant la logique floue, des travaux récents ont permis de formaliser simplement différents aspects du contrôle d’un véhicule notamment le contrôle longitudinal et la fonction ACC et Stop & Go [203] ainsi que le contrôle latéral pour le maintien de voie et les changements de voie [204]. Elle a été utilisée également pour détecter un risque de collision frontale et enclencher un système d’évitement d’obstacles [205]. Outre la commande, la logique floue a été utilisée dans diverses applications temps réel notamment pour la prise de décision [206], la fusion de données [207] [208] la reconnaissance de formes [209]. Un système temps-réel utilisant la logique floue pour la supervision de l’état de vigilance du conducteur a été proposé dans [210].

Principes et vue générale L’univers de discours d’une variable floue représente le do-maine des valeurs admises pour cette dernière. L’univers de discours est partitionné en ensembles pouvant se chevaucher qu’on appelle des ensembles flous. A chaque sous-ensemble correspond une valeur linguistique qui donne une représentation approximative de la valeur réelle de la même manière qu’une personne voyant passer une voiture à 130km/h et sans même avoir la valeur exacte de sa vitesse pourrait la décrire comme une vitesse élevée. « Élevée » dans ce cas de figure est la valeur linguistique attribuée à la vitesse. Il est donc possible de choisir un nombre arbitraire de valeurs linguistiques et les sous-ensembles flous correspondant qui divisent l’espace de discours de chaque variable (par exemple rapide ou

lent) pendant que l’appartenance à chaque terme est représentée par une fonction d’appar-tenance particulière. Ceci correspond au partitionnement flou comme l’illustre la figure 3.6 pour la vitesse latérale vy.

Figure 3.6 – Partitionnement d’une variable continue vy

Les fonctions d’appartenance peuvent avoir différentes formes et permettent de définir un degré d’appartenance entre 0 et 1 pour chaque sous-ensemble flou.

On définira la fonction d’appartenance à un sous-ensemble flou A dans un univers de discours X comme la fonction µA(x) associant à chaque élément x de X une valeur dans l’intervalle des nombres réels [0, 1].

µA: X → [0, 1]

Ainsi le sous-ensemble flou A dans X peut être représenté comme suit :

A = {(x, µA(x))|x ∈ X} (3.20)

Parmi les formes les plus répandues pour définir les fonctions d’appartenance d’un sous ensemble flou on trouve les fonctions triangulaires, trapézoïdales, gaussiennes et sigmoïde. De façon similaire à l’algèbre classique, les opérations telles que l’égalité, l’inclusion, l’inter-section, l’union et le complément sont également définies pour les ensembles flous.

Contrairement à la logique classique où une proposition d’appartenance à un ensemble n’admet que deux valeurs "vraie" ou "fausse", en logique floue elle peut être partiellement vraie et partiellement fausse à la fois.

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p : V estVL(A) (3.21)

Avec V une variable qui prend sa valeur dans l’univers de discours X et VL(A) la valeur linguistique correspondant au sous ensemble flou A. Le degré de vérité de la proposition

p pour l’entrée V = v est exprimé en fonction de la fonction d’appartenance µA du sous ensemble A comme suit :

V(p) = µA(v) (3.22)

Figure 3.7 – Exemple d’une proposition floue et déduction du degré de vérité

Comme l’illustre l’exemple sur la figure 3.7, le degré de vérité de la proposition

(p : vy est positive) pour une vitesse vy = 0.5 a un degré de vérité V(p) = µpositive(0.5) = 0.5.

Une proposition floue peut être obtenue par la composition de propositions élémentaires. Elle peut être constituée de la conjonction de propositions floues élémentaires :

p : (V1 est A1) et . . . et (Vn est An) Sa valeur de vérité est alors définie par :

V(p) = min{µA1(V1), ..., µAn(Vn)} (3.23)

D’autre part une proposition peut être constituée de la disjonction de plusieurs proposi-tions élémentaires :

Le degré de vérité de la proposition issue de la disjonction est donné par :

V(p) = max{µA1(V1), ..., µAn(Vn)} (3.24)

La base du raisonnement flou réside dans les règles floues. Ces dernières sont construites à partir de la composition de propositions élémentaires (p1, . . . , pn) appelées prémisses dont l’implication mène à la conclusion c qui est également une proposition floue de la forme «

Y est VL(B) ».

Les règles s’expriment sous la forme :

R : Si (p1 conjonction . . . pn) alors c (3.25) En mettant p la proposition floue issues de la composition des propositions élémentaires (p1, . . ., pn) la règle floue devient

R : Si p alors c

Équivalent à :

R : Si (V est VL(A)) alors (Y est VL(B)) (3.26) D’une manière générale, l’implication floue définit la liaison entre les prémisses et la conclusion. Elle permet de définir le degré de vérité de la règle floue et ainsi d’obtenir le degré d’appartenance de la conclusion. Ainsi, l’implication I définit la fonction d’appartenance

µR(v, y) de la règle R pour tout (v, y) de V × Y à partir de la fonction d’appartenance µA(v) intervenant dans la prémisse p et µB(y) intervenant dans la conclusion de la règle :

I : [0, 1] × [0, 1] → [0, 1]

µR(v, y) = I(µA(v), µB(y)) (3.27)

Il existe plusieurs fonctions pour l’implication floue. La fonction d’implication de Mamdani est parmi les plus usuellement utilisées. Elle est exprimée comme suit :

Im= min{µA(v), µB(y)} (3.28)

Lors de la conception d’un système d’inférence flou, il est très rare de faire usage d’une seule règle d’inférence. En effet, le savoir expert qu’intègre un système flou se décline sous forme d’un ensemble de règles. Dans ce cas il est nécessaire de faire l’inférence sur plusieurs

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règles. On dit d’une règle qu’elle est active à partir du moment où son degré de vérité est non nul. Par conséquent il est possible que plusieurs règles soient actives simultanément et conclure sur des conclusions de degrés de vérités différents et éventuellement contradictoires. A ce moment, le raisonnement sur plusieurs règles réside dans l’agrégation des conclusions et leur degré de vérité.

L’ensemble Ri de NR règles définies pour une prémisse ayant NP sous-ensembles flous et une conclusion répartie sur NC sous-ensembles flous est représenté sous la forme :

Ri : Si (V est VL(Aij)) alors (Y est VL(Bik))

avec : i ∈ {1, .., NR}, j ∈ {1, . . . , NP} et k ∈ {1, . . . , NC} (3.29) En retenant la méthode de Mamdani pour l’agrégation, la fonction d’appartenance de la conclusion finale après agrégation de l’ensemble de règles pour une valeur d’entrée V = v0 est donnée par :

µc(y) = max

i=1,NR

Ri(v0, y)) (3.30)

Comme l’illustre l’eq (3.30), à l’issue du processus de l’inférence floue nous obtenons une fonction d’appartenance. Le traitement qui permet de définir une correspondance entre ce résultat et la grandeur continue en sortie du système de raisonnement flou est appelé Défuzzification. Plusieurs méthodes de défuzzification existent. La méthode du centre de gravité est très utilisée avec le système d’inférence floue de Mamdani. Dans ce cas, la valeur continue en sortie correspond à l’abscisse du centre de gravité de la surface sous la fonction d’appartenance de la conclusion µc(y). Elle est exprimée par l’équation suivante :

ycg=

R

yy.µc(y)dy

R

yµc(y)dy (3.31)

Ainsi, lorsque les variables d’entrée et de sortie sont partitionnées et la base de règles établie, un système d’inférence flou est entièrement défini lorsqu’on choisit la méthode de la conjonction, de la disjonction, de l’implication, de l’agrégation et de la défuzzification.

Un exemple de l’inférence min-max de Mamdani est fourni dans la figure (3.8). Pour cet exemple deux règles sont définies :

R1 : Si (V1 est VL(A11)) et (V2 est VL(A12)) alors (Y est VL(B1))

Figure 3.8 – Exemple d’une inférence sur deux règles floues