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Chapitre I : Mémoires à changement de phase et mécanismes de défaillance

I. Introduction aux technologies des mémoires

I.1 Mémoires à semi-conducteurs

Suite au développement du marché de l’électronique et de la diversité de ses applications, les systèmes électroniques sont devenus complexes et les composants mémoires en sont devenus un des principaux éléments.

Les mémoires à semi-conducteurs représentent la technologie prépondérante actuellement commercialisée par les plus grands groupes industriels. Elles utilisent le stockage de charges comme mécanisme de stockage d’information et se divisent en deux grandes catégories : les mémoires volatiles et les mémoires non-volatiles [1] [2]. Les mémoires volatiles doivent leur nom au fait qu’en l’absence d’alimentation électrique l’information encodée est perdue. Les principaux avantages de ce type de mémoires sont des temps d’accès en lecture et des temps de programmation très courts (1 à 10 ns). A l’inverse, les mémoires non-volatiles retiennent l’information indépendamment de toute alimentation électrique extérieure. Cependant, la programmation de tels dispositifs est bien plus lente (de la microseconde à la milliseconde). Concernant les technologies volatiles actuelles, les mémoires DRAM présentent de très bonnes performances avec un temps de fonctionnement très court, une consommation électrique moyenne et une endurance très élevée. De plus, elles présentent une plus grande densité d’intégration que les mémoires SRAM et donc un plus faible coût. Elles possèdent de nombreux domaines d’application ; elles sont utilisées notamment comme mémoires vive des ordinateurs, tablettes, etc. Quant aux mémoires SRAM, elles sont essentiellement utilisées dans les mémoires tampons et les mémoires caches des ordinateurs.

En ce qui concerne les mémoires non-volatiles, la technologie à grille flottante nommée Flash domine le marché avec près de 95% des revenus [3]. Les cellules mémoires Flash peuvent être organisées en matrices mémoires selon deux architectures distinctes qui scindent les mémoires Flash en deux catégories [4]:

- Les mémoires Flash NOR sont utilisées pour le stockage de codes d’instruction des systèmes d’exploitation des téléphones portables, cartes mères ou microcontrôleurs. - Les mémoires Flash NAND sont utilisées pour stocker une grande quantité de données. Pour répondre aux exigences du marché de l’électronique, ces deux catégories des mémoires Flash doivent augmenter leur capacité de stockage et diminuer leur coût de fabrication. Ces challenges ont pu être relevés par la technologie Flash via la miniaturisation de ses composants. Cependant, cette miniaturisation laisse aujourd’hui entrevoir ses limites. En effet, pour des cellules de petites dimensions, on est confrontés à des limitations électriques telles que la réduction du nombre d’électrons stockés, des effets de couplage entre cellules adjacentes ainsi que des limitations liées au placement et à l’interconnexion des cellules entre elles. Ainsi, la fiabilité de ces cellules mémoires diminue lorsque leur taille diminue et la réduction de leur coût est limitée. [5]

Pour s’affranchir des limitations de la technologie Flash, une des stratégies adoptées consiste à changer de mode de stockage de l’information via la conception de nouveaux types de mémoires dites « mémoires alternatives ».

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Dans ces nouvelles mémoires « émergentes », il ne s’agit plus de stocker des charges dans la grille flottante d’un transistor mais d’utiliser les matériaux et leurs propriétés intrinsèques comme des composants à caractéristiques variables. [6]

I.2 Mémoires non volatiles émergentes

De nos jours, il existe deux grandes catégories de mémoires : les mémoires à stockage de charge décrites précédemment qui sont des mémoires Front-end et les nouvelles mémoires émergentes qui sont des mémoires Back-end. Ces dernières sont de type ReRAM (Resistive RAM) et reposent sur la commutation réversible entre deux états stables de résistance. Elles sont basées sur des dispositifs à deux terminaux dans lesquels le matériau actif est pris en sandwich entre deux électrodes.

Les mémoires résistives se déclinent en quatre catégories : les mémoires FeRAM (Ferroelectric RAM), les mémoires MRAM (Magnetic RAM), les mémoires résistives filamentaires et les mémoires à changement de phase (PCRAM). [7]

- Les mémoires ferroélectriques (FeRAM) utilisent deux états stables de polarisation d’un matériau ferroélectrique.

- Les mémoires magnétiques (MRAM) utilisent deux états stables d’orientation magnétique présents dans un empilement de couches ferromagnétiques.

- Les mémoires résistives filamentaires sont de deux types: les mémoires résistives à pont conducteur (CBRAM) et les mémoires résistives à base d’oxyde (OxRAM). Elles sont généralement constituées d’une couche active placée entre deux électrodes conductrices. Par l’application d’un stress en tension ou en courant sur la couche active via les électrodes, il y a la formation (ou la destruction) d’un filament conducteur connectant ces électrodes. Ceci va entraîner la commutation réversible entre un état hautement résistif et un état faiblement résistif. [8]

- Les mémoires à changement de phase sont basées sur la transition rapide et réversible du matériau à changement de phase entre un état cristallin faiblement résistif et un état amorphe hautement résistif. Ces mémoires représentant l’objet de travail de cette thèse, elles seront décrites en détail dans la suite du manuscrit. [9]

La Figure 1 représente une classification des différents types de mémoires les plus communément utilisés, décrites précédemment.

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I.3 Comparaison des technologies de mémoires émergentes

Les différentes mémoires émergentes présentées précédemment ne sont pas au même stade de maturité technologique et se caractérisent chacune par des avantages et des inconvénients. Dans l’état actuel de la recherche, les mémoires de type FeRAM et MRAM présentent des difficultés d’intégration ainsi qu’un potentiel de miniaturisation limité. Cependant, elles peuvent être optimisées afin de répondre à des cahiers de charges très spécifiques et utilisées pour des marchés de niche.

Concernant les mémoires résistives filamentaires, CBRAM et OxRAM, malgré le manque de maturité de ces technologies, elles présentent un très bon potentiel. En effet, elles se caractérisent par des petites dimensions, une consommation faible, une capacité élevée ainsi qu’une facilité de fabrication et un bon potentiel de miniaturisation. Cependant, la variabilité de leurs performances et le manque de compréhension physique globale de leurs mécanismes de fonctionnement freine le développement de ces technologies.

Il en résulte que toutes ces nouvelles technologies n’ont pas encore les potentialités pour remplacer les mémoires à semi-conducteur et pour devenir des mémoires « universelles » combinant à la fois la non-volatilité des mémoires Flash et les performances des mémoires DRAM.

Les mémoires à changement de phases quant à elles présentent des caractéristiques très prometteuses :

Une taille de cellule réduite, directement liée aux progrès de la lithographie.

Un temps de lecture et d’écriture inférieur à 100 ns soit entre 500 et 1000 fois moins que pour les mémoires Flash.

Une durée de rétention de 10 ans à plus de 85°C et une endurance de 109 cycles, correspondant aux spécifications attendues pour les applications grand public.

Stockage de plusieurs bits par cellule permettant d’augmenter la densité d’information stockée sans augmenter le nombre de cellules.

Grâce à ces différentes performances, les mémoires à changement de phase PCRAM sont considérées comme l’une des technologies les plus prometteuses pour les futures générations de mémoires non-volatiles, aussi bien par les groupes de recherche universitaires que par les plus grandes firmes de l’industrie du semi-conducteur. De plus, cette technologie étant la plus mature dans le monde des mémoires résistives, elle a été mise en production et utilisée dans des téléphones portables dès 2011. Aujourd’hui, des développements sont en cours pour des nœuds technologiques plus avancés.

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