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3.3 Analyse théorique : interfaces

3.4.3 Interprétation et perspectives

Dans un contexte socio-économique, plusieurs interprétations des résulats sont envisa- geables . La compactification des amas d’agents similaires rencontrée quand l’environne- ment devient hostile (grande valeur de D) peut faire penser au “renforcement” des liens entre individus via un réseau associatif que des sociologues ont observé, par exemple, dans quelques quartiers de Chicago [WT07]. Des liens forts peuvent prévenir d’un exode massif du à un manque d’attractivité de l’environnement.

En ce qui concerne les interfaces complètes de lacunes, obtenues pour certaines valeurs des paramètres de contrôle, elles séparent des groupes d’une façon qui rappelle la ségré- gation socio-spatiale matérialisée par des murs, commes à Johannesburg [Esc06]. Dans le modèle, on observe la formation de frontières avec un réseau homogène sans aucune infrastructure ou autres frontières physiques. D’une manière évidente, des limites maté- rialisées (routes, parcs, rivières . . .) peuvent influer sur la présence de ségrégation : (Ex : boulevard périphérique de Paris [Esc06]). Comment ces frontières physiques affecteraient- elles les résultats présentés ? Dans le domaine de paramètres où les frontières de lacunes apparaîssent, on peut s’attendre à ce que la dynamique de ségrégation prenne avantage de telles structures préexistantes, et que ces frontières prennent part aux limites sociales. Dans d’autres régimes, même si les frontières physiques peuvent faciliter l’émergence d’une interface, elles ne conduiront pas nécessairement à des frontières sociales. Il serait par conséquent intéressant de réaliser des études empiriques afin de voir sous quelles conditions une frontière physique s’impose également en tant que frontière sociale. Nous n’aborderons pas plus ce point par la suite.

Dans le modèle présenté dans ce chapitre, deux points importants doivent être relevés. (i) L’ouverture du réseau a été réalisé via l’introduction d’une notion d’attractivité, mais celle-ci est globale et ne dépend pas de la position dans le réseau. (ii) De plus, si un agent repère un site avec une utilité satisfaisante, rien ne contraint son installation, il peut se positionner sur le site vacant sans condition supplémentaire. Si l’on souhaite approcher un modèle réaliste à partir du modèle de ségrégation de Schelling, deux notions essentielles en sont donc absentes : (i) attractivité relative des positions et (ii) accessibilité. D’une manière générale, il convient de préciser qu’il semble nécessaire de s’éloigner du modèle de ségrégation de Schelling maintenant qu’il nous a permis de comprendre les phénomènes que ce type de modèle pouvait faire émerger et de constater également quelles étaient les limites de celui-ci.

Chapitre

4

Modèle de marché du logement urbain

Dans ce chapitre, nous présentons des données sur les transactions im- mobilières de la ville de Paris desquelles nous tirons, dans un premier temps, quelques observations. Comme attendu, la tendance globale de l’évolution des prix de transaction est une décroissance en partant du centre. De plus, la variance des prix de transaction s’avère plus élevée au centre qu’à la périphérie, ce qui suggère une plus grande concurrence au centre. Ayant dégagé quelques tendances générales sur les transac- tions immobilières, un modèle multi-agent est développé afin de simuler la dynamique du marché de logement. Il permet en particulier de repro- duire les faits stylisés mentionnés concernant les données. Ce modèle simule des transactions immobilières entre agents hétérogènes (par leur revenu) dans une ville où les espaces ont différents niveaux d’attracti- vité. L’attractivité d’une zone se décompose en un terme stationnaire intrinsèque à la zone (lié à la distance au centre, aux aménités . . .) et un terme dynamique relatif à la perception de l’agent qui regarde la zone. Les simulations numériques montrent un bon accord avec le ré- gime stationnaire caractérisé analytiquement, rendant ainsi le modèle tractable et utilisable comme bon point de départ pour modéliser le marché du logement. Enfin les résultats du modèle sont confrontés aux données empiriques.

Les dynamiques urbaines sont régulées par les préférences de choix résidentiels, liées elles-mêmes au degré d’attractivité du lieu. Comme il a été observé dans le modèle de ségrégation de Schelling en version ouverte, l’attractivité de la ville est effectivement un facteur décisif dans la dynamique d’installation des agents. Cependant, comme la littéra- ture abondante sur la dynamique de choix résidentiel le suggère [GA06, BOH02, Pre86], les critères d’attractivité sont multifactoriels. En ce sens, l’attractivité des lieux résiden- tiels est hétérogène du point de vue spatial et du point de vue des agents. De plus, la dynamique d’installation des individus repose sur une logique socio-économique, contrai- gnant ainsi l’organisation effective des ménages à l’intérieur d’une ville. Ces contraintes

liées aux préférences et aux capacités foncières des individus, font naître des quartiers aisés ou défavorisés résultant en la spécialisation sociale des espaces urbains.

Nous proposons de développer un modèle qui prend en compte les facteurs précités tout en s’éloignant du modèle de ségrégation de Schelling. (i) Dans ce modèle, le posi- tionnement d’un agent sur un site donné ne sera pas systématique, même si le site lui procure un voisinage satisfaisant. Les agents se distingueront par leur capacité d’achat et des prix seront associés aux sites vacants. Les agents se déplaceront alors en confrontant leur capacité d’achat et les prix des sites. Ces paramètres introduisent ainsi une notion d’accessibilité. (ii) L’attractivité de l’environnement urbain D est une notion globale dans le système ouvert. Mais suite aux remarques précédentes, on la considérera hétérogène sur le réseau afin de refléter la présence de plus ou moins de services dans les différentes zones. Dans cette optique, des niveaux différents d’attractivité seront attribués aux sites en fonction de leur positionnement sur le réseau. Les attractivités dépendront aussi de l’observateur, dans l’esprit de Schelling.

4.1 Contexte d’étude : transactions immobilières de la

ville de Paris

Paris est une métropole au rayonnement international et constitue une plaque tour- nante où les flux migratoires sont intenses. Son offre universitaire, son marché de l’emploi, son dynamisme économique en font une zone à forte densité de population. Paris appa- raît donc comme un bon exemple d’étude du marché immobilier et peut, par ailleurs, donner un aperçu général du fonctionnement des villes européennes. Avant de s’attaquer à la modélisation, nous nous intéressons aux principales caractéristiques des transactions réelles. Nous disposons d’un échantillon des transactions immobilières de la ville de Paris fournie par la Chambre des Notaires. Cette base de données contient des éléments sur les transactions dans Paris de 1990 à 2003 : prix, surface, situation géographique des biens, catégories socio-professionnelles des acheteurs et vendeurs . . .. Nous nous concentrerons sur les données de l’année 2003 qui sont les plus récentes dont nous disposons. Nous avons pris soin de mettre de côté les données aberrantes ou ne faisant pas référence à un logement (garage . . .).