• Aucun résultat trouvé

Interprétation des résultats du modèle biprobit

Chapitre 4 – Résultats

4.2 Interprétation des résultats du modèle biprobit

Puisqu’il existe une corrélation élevée entre le choix des participants relatifs à la fréquence de rétroaction et à l’horizon d’investissement, un modèle biprobit a été calculé pour prédire l’effet des variables sur la probabilité de choisir simultanément un faible niveau de rétroaction et un long horizon d’investissement pour au moins une période.

Faible rétroaction Long horizon d’investissement Paramètres β Déviation standard P > |Z| Paramètres β Déviation standard P > |Z| Aversion à l’ambiguïté -0.70 0.22 0.00 -0,61 0.22 0.01 Aversion à la perte -0.07 0.02 0.00 -0.03 0.03 0.33 Sensibilité (gain) 0.05 0.29 0.85 0.43 0.43 0.32 Sensibilité (différence) 1.58 0.24 0.00 1.25 0.21 0.00 Croyances à priori -0.07 0.09 0.44 -0.18 0.12 0.13 Nouvelle information 0.10 0.09 0.28 0.09 0.12 0.42 Âge -0.31 0.32 0.33 -0.50 0.30 0.10 Femme 0.51 0.41 0.22 0.60 0.40 0.13 Étude en économique -0.66 0.63 0.30 -0.59 0.56 0.30 Étude en génie -0.97 0.42 0.02 -0.18 0.46 0.69 Ordre HML -1,28 0.35 0.00 -0.49 0.22 0.03 Ordre LMH -0.55 0.39 0.15 -0.10 0.44 0.82 Capacité de calcul 0.22 0.11 0.04 0.47 0.14 0.00

Profil de compagnie négatif 0.23 0.29 0.43 0.30 0.39 0.44

Interaction Profil négatif et Sensibilité (différence)

-0.90 0.47 0.06 -0.27 0.52 0.61

Tableau 5. Impact des variables indépendantes sur la probabilité de choisir F3 ou F5 et H3 ou H5 Le Tableau 5 montre les résultats obtenus grâce au modèle biprobit. Tel qu’attendu, un haut niveau d’aversion à l’ambiguïté aurait un effet négatif significatif sur la probabilité de choisir un long horizon d’investissement et de rétroaction pour au moins une période.

Pour ce qui est de l’aversion à la perte, on remarque qu’un coefficient élevé aurait un effet négatif sur la probabilité de choisir un faible niveau de rétroaction et une longue période d’investissement. Encore une fois, ce résultat ne correspond pas à l’hypothèse qui avait été formulée selon laquelle les individus ayant une grande aversion à la perte pourraient préférer de plus longs horizons d’investissement afin d’être moins confrontés à la perte.

42

Par ailleurs, le paramètre de sensibilité au risque montre que les individus dont la fonction de valeur serait plus courbée dans le domaine des pertes que des gains auraient une probabilité significativement plus grande choisir un faible niveau de rétroaction et un long horizon d’investissement. La courbure plus prononcée dans le domaine des pertes indiquait une plus grande sensibilité aux gains extrêmes (éloignés du point de référence) qu’aux pertes extrêmes.

Effets marginaux des variables

Le tableau 6 montre les effets marginaux des variables sur la probabilité de choisir, pour au moins une période, un long horizon d’investissement et une faible rétroaction (à gauche), ou un court horizon d’investissement et un haut niveau de rétroaction (à droite).

𝑌1= 1 𝑒𝑡 𝑌2= 1

Choisir un long horizon d’investissement et de rétroaction

pour au moins une période

𝑌1= 0 𝑒𝑡 𝑌2 = 0

Choisir un court horizon d’investissement et de rétroaction

pour 30 périodes

Effet marginal P > |Z| Effet marginal P > |Z|

Aversion à l’ambiguïté -0.24 0.00 0.28 0.00 Aversion à la perte -0.01 0.33 0.03 0.00 Sensibilité (gain) 0.17 0.31 -0.02 0.85 Sensibilité (différence) 0.46 0.00 -0.51 0.00 Croyances à priori -0.07 0.13 0.03 0.43 Nouvelle information 0.04 0.43 -0.04 0.27 Âge -0.20 0.01 0.12 0.33 Femme 0.24 0.13 -0.20 0.21 Étude en économique -0.23 0.28 0.26 0.30 Étude en génie -0.07 0.69 0.38 0.02 Ordre HML -0.19 0.02 0.51 0.00 Ordre LMH -0.04 0.82 0.22 0.15 Capacité de calcul 0.18 0.00 -0.09 0.03

Profil de compagnie négatif 0.06 0.65 -0.04 0.72

Tableau 6. Effets marginaux des variables indépendantes sur les variables indépendantes

Choix de longs horizons

Les résultats du modèle biprobit montrent que les personnes ayant un haut niveau d’aversion à l’ambiguïté ont une plus faible probabilité (−24 %) de choisir, au moins pour une période, un faible niveau de rétroaction et un long horizon d’investissement. Cela correspond aux résultats attendus à la lumière de la littérature existante et des deux modèles présentés précédemment.

43

Tel que mentionné plus tôt, l’aversion à la perte aurait un effet négatif sur la probabilité de choisir un faible niveau de rétroaction et une longue période d’investissement. Toutefois, l’effet marginal (−1 %) n’est pas important en comparaison avec les autres variables et l’effet est non significatif.

Par ailleurs, le paramètre de sensibilité au risque montre que les individus dont la fonction de valeur serait plus courbée dans le domaine des pertes que des gains auraient une probabilité significativement plus grande choisir un faible niveau de rétroaction et un long horizon d’investissement. Il est pertinent de noter que l’effet marginal est assez élevé puisqu’une augmentation d’une unité de la variable augmenterait la probabilité de choisir de longs horizons de l’ordre de 46 %.

La littérature avait soulevé certains effets liés à l’âge sur l’aversion à la perte myope. On remarque que le fait d’être âgé de plus de 27 ans (âge médian) aurait un négatif sur la probabilité le choisir un long horizon d’investissement et une faible fréquence de rétroaction. L’effet, qui semblait plus marqué dans le cas du choix d’investissement, n’était toutefois significatif dans aucun des deux modèles probit alors qu’il jouerait ici un rôle significatif sur la probabilité de choisir simultanément un long horizon d’investissement et de rétroaction.

Il semble également que l’ordre de présentation des conditions ait une répercussion sur les paramètres préférés puisque le fait d’avoir participé aux traitements selon l’ordre HML6 ou LMH7 diminue respectivement la probabilité de choisir de longs horizons de 19 % et 4 %. On peut en déduire que le fait de participer au traitement selon l’ordre MLH8 augmenterait la probabilité de choisir de longs horizons de rétroaction et d’investissement.

Finalement, les résultats montrent qu’être un homme9 et avoir de bonne capacité de calcul seraient associés, en moyenne, à une plus faible probabilité de choisir simultanément un long horizon d’investissement et de rétroaction. Ces résultats pourraient notamment être dus à un plus grand intérêt porté au suivi de l’investissement et à un plus grand sentiment de contrôle de l’investissement chez les gens ayant de meilleures connaissances du marché d’investissement et des statistiques.

6 F1H1 – F1H3/5 – F3/5H3/5 7 F3/5H3/5 – F1H3/5 – F1H1 8 F1H3/5 – F3/5H3/5 – F1H1

44

Choix de courts horizons

Le tableau 6 montre également les effets marginaux des variables sur la probabilité de choisir simultanément de courts horizons d’investissement et de rétroaction pour 30 périodes. Sans surprise, les variables ont un effet contraire sur cette probabilité. Ces effets sont d’ailleurs semblables en termes d’amplitude à ce qui a été observé dans le cas des préférences pour de longs horizons.

On remarque toutefois que l’âge aurait un effet moins important (12 %) sur la probabilité de choisir de courts horizons d’investissement et de rétroaction. De plus, cet effet n’est pas significatif, alors qu’il l’était dans le cas précédent.

Par ailleurs, le fait d’avoir participé à l’expérience selon l’ordre HML ou LMH aurait un effet marginal beaucoup plus important sur la probabilité de choisir de courts horizons (respectivement 51 % et 22 %). Ce résultat renforce l’idée qu’il est important d’expérimenter chacune des conditions avant d’exprimer ses préférences puisque l’expérience vécue aurait vraisemblablement un impact sur celles-ci.

Finalement, on remarque que les capacités de calcul auraient un impact moins important sur la probabilité de choisir de courts horizons (−9%).

Il aurait été intéressant de mesure les effets marginaux sur la probabilité de choisir simultanément un long horizon d’investissement et une grande fréquence de rétroaction. Malheureusement, la grande corrélation des choix et le trop faible nombre d’observations ne permettaient pas le calcul de ces effets marginaux.

45

Conclusion

Un des objectifs de cette étude était de placer les individus en contexte d’ambiguïté afin d’obtenir un environnement plus représentatif des conditions réelles d’investissement. Par ailleurs, cette expérience visait à placer les sujets dans un contexte où ils pourraient expérimenter chacune des conditions avant d’indiquer leurs préférences.

L’expérience a effectivement permis aux participants d’expérimenter chacune des conditions avant d’effectuer un choix, ce qui n’avait pas été pris en compte par Fellner et Sutter (2009). Cette manipulation a permis de s’assurer que les participants étaient bien conscients de l’effet des pertes subies au long de l’expérience. À la lumière des résultats, il est difficile d’identifier l’effet de l’aversion à la perte sur le choix des participants. Ce biais engendrerait un faible effet négatif sur la probabilité de choisir un long horizon d’investissement, alors qu’on aurait pu s’attendre à un résultat contraire. Toutefois, l’effet marginal était minime (−2 %) en comparaison à celui d’autres variables. D’autre part, l’effet d’ordre étant confirmé, on peut en conclure que l’expérience vécue module également les préférences dans un contexte d’investissement. Il faut donc être prudent dans l’élaboration de celle-ci afin de contrôler les conditions pour bien capter l’effet des variables d’intérêt.

Par ailleurs, cette étude a permis de déterminer que l’aversion à l’ambiguïté joue un rôle important dans les préférences observées chez les participants. Ce biais semble pousser les individus à choisir de courts horizons d’investissement, ainsi qu’une grande fréquence de rétroaction afin de mettre rapidement à jour leurs anticipations sur la loterie à laquelle ils ont affaire. On remarque d’ailleurs que l’effet de l’ambiguïté surpasse largement celui de l’aversion à la perte, qui n’aurait qu’un faible rôle à jouer sur les préférences quant aux paramètres d’investissement.

Ce résultat est étonnant, puisque la littérature s’est énormément penchée sur le rôle de l’aversion à la perte, alors que peu d’expériences ont étudié cette question dans un contexte d’ambiguïté. Fellner et Sutter (2009) ont tenté de diriger les choix des participants pour un horizon d’investissement et de rétroaction plus long, puisque ces paramètres semblaient mener à des investissements significativement plus risqués. Or, Bellemare, Kröger et Sossou (2019) ont étudié ces mêmes observations que ceux présentés dans ce mémoire, et ont trouvé que la fréquence optimale d’évaluation d’un portfolio correspondait à une haute

46

fréquence d’information pour 70 % des participants. En effet, ceux-ci bénéficiaient d’un retour plus fréquent de l’information en raison de l’effet dominant que l’aversion à l’ambiguïté sur celui de l’aversion à la perte. À la lumière de ces résultats, il serait pertinent de remettre en question les résultats obtenus en absence du contexte d’ambiguïté et de concentrer les expérimentations sur un contexte permettant d’étudier l’effet de l’ambiguïté sur les décisions d’investissement des participants.

Finalement, la définition de la variable dépendante utilisée ici permet de prendre en compte les individus qui ont choisi ces paramètres pour un nombre limité de périodes. Toutefois, cela a également pour effet d’inclure tous les individus ayant fait un choix mixte dans l’événement 𝑌 = 1 et de limiter 𝑌 = 0 aux individus ayant choisi de courts horizons pour toutes les 30 périodes, ce qui peut soulever un enjeu dans la mesure où les gens font un choix mixte ont possiblement des caractéristiques distinctes. Cela demande une interprétation prudente les résultats.

Afin d’adresser cet enjeu, une nouvelle expérimentation devrait être menée, dans laquelle le choix mixte n’est pas permis. D’ailleurs le grand nombre de choix possibles relativement au nombre de sujets observés rend difficile l’interprétation des préférences.

Nous aurions d’ailleurs pu retirer les participants ayant choisi simultanément de longues périodes sans rétroaction et de courts horizons d’investissement en raison de la nature irrationnelle de ce choix. En effet, il est difficile d’expliquer le choix d’un horizon d’investissement à chaque période alors que les sujets n’obtiennent aucune nouvelle information durant trois ou cinq périodes. Rappelons également que les participants n’ont pas eu l’occasion d’expérimenter un traitement dans lequel l’horizon d’investissement était fixé à une période et la fréquence de rétroaction à trois ou cinq périodes. Afin d’augmenter la validité de l’étude, nous pourrions ne pas permettre aux participants de sélectionner ce choix dans une expérience ultérieure.

Ces conditions permettraient plus facilement d’étudier l’impact des variables indépendantes importantes sur les préférences.

47

Bibliographie

Allais, M., & Hagen, O. (1979). Expected Utility Hypotheses and the Allais Paradox. Theory

and Decision Library 21.

Barberis, N., & Thaler, R. (2003). A survey of behavioral finance. Handbook of the

Economics of Finance, pp. 1053-1128.

Bellemare, C., Krause, M., Kröger, S., & Zhang, C. (2005). Myopic loss aversion : information feedback vs investment. Economics Letters, 319-324.

Bernatzi, S., & Thaler, R. (1995). Mopic loss aversion and the equity premium puzzle.

Quaterly Journal of Economics, 110, 73,92.

Cokely, E. T., Galesic, M., Schulz, E., Ghazal, S., & Garcia-Retamero, R. (2012, Janvier). Measuring Risk Literacy: The Berlin Numeracy Test. Judgment and Decision Making,

7(1), 25-47.

Daniel, B. (1738). Sommer as new exposition on the measurement of risk. Econometrica, 23- 26.

Ellsberg, D. (1961). Risk, Ambiguity, and the Savage Axioms. Quarterly Journal of

Economics, 75, 643-669.

Fellner, G., & Sutter, M. (2009). Causes, consequences and cures of myopic loss aversion - An experimental investigation. The Economic Journal, 119 (537), 900-916.

Glatzle-Rutzler, D., Sutter, M., & Zeileis, A. (2015). No myopic Loss aversion in adolescents? - An experimental note. Journal of Economic Behavior & Organization, 169-176.

Gneezy, U., & Potters, J. (1997). An Experiment on Risk Taking and Evaluation Periods.

The Quaterly Journal of Economics, pp. 631-645.

Haigh, S., & List, J. (2005). Do Professionnal Traders Exhibit Myopic Loss Aversion? An Experimental Analysis. Journal of Finance, 60, 523-534.

Iturbe-Ormaetxe, I., Ponti, G., & Thomas, J. (2016). Myopic Loss Aversion under AMbiguityand Gender Effects. PLos ONE 11(12): e0161477. doi:10.1371/journal.pone.0161477.

48

Kahneman, D., & Tversky, A. (1979). Prospect Theory : An Analysis of Decision under Risk.

Econometrica, 47(2), pp. 263-291.

Kahneman, D., & Tversky, A. (1984). Choices values and frames. American Psychologist,

39(4), 341-350.

Keren, G., & Gerritsen, E. M. (1999). On the robustness and possible accounts of ambiguity aversion. Acta Psychologiga, 103, 149-172.

Köbberling, V., & Wakker, P. P. (2005). An index of loos aversion. Journal of Economic

Theory, pp. 119-131.

Langer, T., & Weber, M. (2005). Myopic prospect theory vs. myopic loss aversion : how general is the phenomenon? Journal of Economic Behavior and Organization 56, 25- 38.

Langer, T., & Weber, M. (2008). Does commitment or feedback influence myopic loss aversion? An experimental analysis. Journal of Economic Behavior & Organization

67, 810-819.

Levin, I. P., Mary, S. A., & Daniel, C. P. (1988). The interaction of Experimental and Situational Factors and Gender in a Simulated Risky Decision Making Task. Journal

of Psychology, 112(2), 173-181.

Mehra, R., & Prescott, E. C. (1985). The equity premium, a puzzle. Journal of Monetary

Economics, 15, 145-161.

Thaler, R., Tversky, A., & Kahneman, D. (1997). The effect of myopia and loss aversion on risk taking : an experimental test. The Quaterly Journal of Economics, 112(2) , 647- 661.

Tversky, A., & Kahneman, D. (1992). Advances in prospect-Theory - Cumulative representation of uncertainty. Journal of Risk and Uncertainty, 5 (4), 297-323.

Von neumann, J., & Morgenstern, O. (1947). Theory of games and economic behavior. Princeton: Princeton University Press.

49

Documents relatifs