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Les interactions mésostabilisantes

Dans le document 4Chapitre 4 (Page 38-47)

4.2 Identification des interactions méso- et thermostabilisantes L’objectif de cette deuxième partie, n’est plus de considérer et d’étudier un type

4.2.2 Les interactions mésostabilisantes

Les protéines issues de (micro-)organismes psychrophiles sont capables d’assumer leur fonction biologique à des températures proches de 0°C et parfois même à des températures négatives. Ces protéines doivent trouver un compromis délicat entre stabilité et flexibilité afin d’être suffisamment flexibles pour accomplir leur action tout en conservant leur structure native [46,161,176,177,181,182,184,185,248]. Bien que l’étude de ces protéines puisse être passionnante, notre base de données ne contient que très peu de protéines psychrostables. La température de fusion la plus faible de notre base de données de protéines s’élève déjà à 39,45°C et la température de résistance thermique moyenne du groupe (2) 5

1

BD

G est de 51,8°C. Nous ne pouvons donc déterminer et identifier que les interactions qui ont une contribution relative plus stabilisante dans cette gamme de températures. Il est donc possible que la résistance aux faibles températures que présentent les protéines psychrostables soit assurée par des mécanismes différents.

Nos résultats montrent que les paires de résidus dont la contribution relative à la stabilité des protéines est plus favorable à basse température font pour la plupart intervenir des acides aminés polaires non-chargés (tableaux 4.14 - 4.19). Ces paires d’acides aminés apparaissent comme significativement plus stabilisantes au sein d’un environnement protéique de faible résistance thermique par rapport aux autres interactions. Les détails concernant toutes les interactions mésostabilisantes identifiées sont fournis en annexe (tableau A.6, fig. A.56-A.88).

4.2.2.1 Les interactions entre résidus polaires non-chargés

Les contributions énergétiques des interactions formées entre paires de résidus polaires non-chargés présentent une dépendance thermique significative. Relativement aux autres interactions entre paires de résidus, elles contribuent en moyenne plus favorablement à la stabilité au sein de protéines mésostables (fig. 4.26).

Figure 4.26 – Potentiel de distance

m T d

W

de la paire de regroupements [NQST-NQST] et

représentation schématique d’un pont H s’établissant entre [N-T]. Légende cf. figure

4.21.

En particulier lorsque l’on considère les contributions effectives dérivées pour les regroupements de résidus polaires non-chargés [NQST-NQST], le grand écart entre celles dérivées des deux groupes de protéines de résistance thermique moyenne distincte ( (2) 5

1 BD G et 5 ) 2 ( 2 BD

G ) n’est atteint que dans une seule des mille séries aléatoires. De plus, en examinant les contributions énergétiques des paires de résidus et paires de regroupements similaires qui font intervenir ces quatre résidus, nous constatons que plusieurs ont la même dépendance thermique significative quelle que soit la représentation simplifiée utilisée (Cµ ou Cν).

Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν NQST - NQST 0,1 0,1 0,1 (1) 0,1 (1) N - NQST <0,1 0,8 <0,1 (2) <0,1 (3) Q - NQST <0,1 <0,1 <0,1 (2) <0,1 (3) S - NQST 4,8 1,2 2,7 (1) 0,6 (1) T - NQST 6,3 / 0,9 (1) / S - N / 5,9 / 2,6 (2)

Tableau 4.14 – Interactions mésostabilisantes : entre résidus polaires non-chargés. Légende cf. tableau 4.7.

L’allure des profils énergétiques présente un minimum lorsque la paire d’acides aminés considérée est séparée d’environ 3-4 Å. Après avoir examiné les géométries d’interaction de ces différentes paires de résidus polaires non-chargés à cet intervalle de distances, les conformations adoptées forment en général des ponts H. Ceux-ci s’établissent entre les groupements amides de l’asparagine et la glutamine et les groupements alcools de la sérine et la thréonine. Les atomes impliqués dans la formation de ces ponts H sont respectivement pour ces quatre résidus les atomes Oδ1 et Nδ2 ; Oε1 et Nε2 ; Oγ et Oγ1. Ce résultat suggère que les contributions des ponts H formés entre résidus polaires non-chargés sont plus favorables à basse température relativement aux autres interactions.

La dépendance thermique globale observée pour ce type d’interactions est en accord avec la composition en acides aminés des deux groupes (2) 5

1 BD G et (2) 5 2 BD G (tableau 3.12). En effet, le nombre de résidus polaires non-chargés est légèrement plus faible au sein du groupe

5 ) 2 ( 2 BD

G ayant la résistance thermique moyenne la plus élevée qu’au sein du groupe (2) 5 1

BD

G de

plus faible Tm. Cette légère dissemblance pourrait être liée à l’adaptation des protéines aux températures extrêmes. En effet, la déamidation des résidus N et Q est plus aisée à haute température et les résidus S et T peuvent faciliter cette réaction [44,80].

4.2.2.2 Les interactions entre paires de résidus polaires non-chargés et chargés

négativement

Parmi les paires de résidus en contact présentant une contribution à la stabilité des protéines plus favorables à basse température figurent celles entre les acides amines D ou E et N, Q, S ou T (tableau 4.15, fig. 4.27). Les profils énergétiques de ces paires de résidus et paires de regroupements de résidus similaires présentent un profond minimum énergétique aux alentours de 3 à 4 Å. A cet intervalle de distance séparant la paire considérée (tant en utilisant les distances entre centres géométriques Cµ que fonctionnels Cν) l’écart entre les contributions dérivées des deux groupes de protéines de résistance thermique moyenne distincte est significatif.

Figure 4.27 – Potentiel de distance

m T d

W

de la paire de regroupements [DE-NQST] et

représentation schématique d’un pont H s’établissant entre [D-S]. Légende cf. tableau

Par ailleurs, en examinant les structures des protéines présentant ces paires d’acides aminés séparés par cet intervalle de distance, leur géométrie d’interaction révèle la formation de ponts H entre eux. Les groupements amides (de N et Q) et les groupements alcools (de S et T) des acides aminés polaires non-chargés établissent des ponts H avec les groupements carboxyliques des acides aminés chargés négativement (D et E). Les atomes de l’acide aspartique (glutamique) impliqués dans la formation des ponts H sont Oδ1 et Oδ2 (Oε1 et Oε2).

Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν DE - NQST 4,5 / 0,9 (1) / D - NQST 0,2 0,2 0,4 (3) 2,6 (3) DE - T 1,0 3,2 0,5 (3) 4,1 (3)

Tableau 4.15 – Interactions mésostabilisantes : entre paires de résidus polaires

non-chargés et chargés négativement. Légende cf. tableau 4.7.

4.2.2.3 Les interactions entre résidus chargés négativement et la phénylalanine

Une des interactions répertoriée parmi celles thermostabilisantes est l’interaction entre acides aminés aromatiques et chargés négativement (section 4.2.1.4). Cependant, lorsque le résidu aromatique considéré est la phénylalanine, l’interaction formée avec les deux acides aminés chargés négativement D et E est plus favorable à basse température (tableau 4.16). Ce renversement de situation peut être lié à l’absence d’atomes électronégatifs forts le long de la chaîne latérale de la phénylalanine. Dès lors, la formation d’un pont H entre la phénylalanine et un résidu chargé négativement est impossible ce qui n’est pas le cas des autres résidus aromatiques. La seule possibilité pour que la mise en contact de F avec D ou E soit énergétiquement favorable (ou le moins défavorable possible) est que la charge négative se retrouve dans le plan du cycle aromatique de la phénylalanine (fig. 3.7). Cependant, bien que cette interaction soit significativement plus favorable à basse température, elle ne contribue que très faiblement à la stabilité des protéines (~ -0,1 kcal/mole).

Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν DE – F 9,3 / 1,5 (1) / E – F / 9,2 / 6,5 (1)

Tableau 4.16 – Interactions mésostabilisantes : entre résidus chargés négativement et la

phénylalanine. Légende cf. tableau 4.7.

4.2.2.4 Les interactions entre paires de résidus polaires non-chargés et résidus de

petite taille ou aliphatiques

La présence d’un acide aminé polaire non-chargé proche d’un résidu de petite taille ou aliphatique confère une stabilité plus importante au repliement des protéines à basse température (tableau 4.17, fig. 4.28). Les profils énergétiques dérivés pour ces interactions montrent qu’elles ne sont que faiblement stabilisantes (-0,2 à -0,4 kcal/mole). D’autre part ces profils présentent deux minima à des intervalles de distance proches de 4 et 7 Å séparant la paire de résidus, que les résidus soient décrits par leurs centres géométriques Cµ ou fonctionnels Cν.

Figure 4.28 – Potentiel de distance

m T d

W

de la paire de regroupements [AILV-NQST] et

[AG-NQST]. Ces fonctions d’énergie sont dérivées en fonction de la distance inter-résidus d entre centres géométriques (Cµ-Cµ). Les couleurs des trois fonctions d’énergie dérivées à partir des trois groupes de protéines de la série (2)BD5

G correspondent à celles définies au tableau 3.11 (à savoir : classés en fonctions de leur résistance thermique moyenne croissante). Figure réalisée avec le logiciel XMgrace [290].

Les géométries d’interaction de ces paires de résidus ne montrent aucune tendance particulière et n’adoptent pas de conformation spécifique. En outre, les résidus polaires impliqués dans ces interactions sont souvent à la surface des protéines en contact avec le solvant ou établissent des ponts H avec d’autres résidus dans leur voisinage.

Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν AILV - NQST 1,0 <0,1 0,5 (2) 0,2 (2) AG - NQST 0,3 0,2 0,1 (2) 0,5 (2) A - NQST 1,6 1,7 1,4 (3) 0,8 (4) G - NQST 0,8 1,3 0,1(2) 0,5(1) L - NQST 0,3 1,2 0,4 (4) 0,5 (3) AILV - N 3,2 5,9 2,7 (1) 4,6 (2) AILV - Q 7,8 5,1 8,5 (2) 1,9 (2) AG - S 4,8 5,8 4,0 (3) 1,9 (1) AILV - T 3,5 7,5 3,3 (2) 5,6 (2) AG - T 0,1 0,4 0,9 (3) <0,1 (3) A - T 1,5 1,2 0,5 (3) 0,3 (4) G - S 2,6 / 1,4 (3) / G - T 5,4 9,4 <0,1 (1) <0,1 (2)

Tableau 4.17 – Interactions mésostabilisantes : entre paires de résidus polaires

non-chargés et résidus de petite taille ou aliphatiques. Légende cf. tableau 4.7.

4.2.2.5 Les interactions entre paires de résidus de petite taille

La contribution de ces interactions entre résidus de petite taille est significativement plus favorable à basse température relativement aux autres interactions (tableau 4.18, fig. 4.29). Plus précisément, leurs profils énergétiques d’interactions montrent que deux résidus de petite taille distants d’environ 5 Å ont une contribution moins défavorable au sein de protéines

mésostables. Par ailleurs il est difficile de dire si dans cet intervalle de distances présentant un minimum énergétique ces acides aminés sont en contact ou établissent une interaction quelconque. La dépendance thermique de la contribution de ces interactions n’est pas évidente à expliquer. Il s’agit peut-être d’un mélange de divers effets indirects tels que : l’incapacité de ces résidus à former des interactions spécifiques, leur degré de flexibilité élevé autour de la chaîne principale ou encore la faible perte entropique qu’ils imposent lors du repliement protéique.

Figure 4.29 – Potentiel de distance

m T d

W

de la paire de résidu/regroupement [G-AG].

Légende cf. tableau 4.22. Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν G - AG 2,1 2,3 1,6 (1) 1,6 (1) A - G 5,1 4,5 1,4 (1) 1,1 (2)

Tableau 4.18 – Interactions mésostabilisantes : entre paires de résidus de petite taille. Légende cf. tableau 4.7.

4.2.2.6 Les interactions entre la leucine et d’autres résidus

A l’inverse des interactions entre l’isoleucine et d’autres résidus (section 4.2.1.6), celles établies par la leucine sont plus favorables à basse température (tableau 4.19). Cette particularité semble être liée à la différence de composition de nos deux groupes de protéines

5 ) 2 ( 1 BD G et (2) 5 2 BD

G : l’isoleucine est plus fréquente dans les protéines thermostables au contraire de la leucine qui est plus abondante dans les protéines de plus faible résistance thermique. Ainsi que nous l’avons détaillé à la section 4.2.1.6, cette dépendance en la température pourrait être liée à la plus faible hydrophobicité de la leucine par rapport à I et V.

Interactiona Ptotal (%) b Cµ-Cµ Ptotal (%) b Cν-Cν Pmin (%) c Cµ-Cµ Pmin (%) c Cν-Cν L - FWY / 4,5 / 3,7 (1) L - F 5,9 / 8,1 (2) / L - D 8,6 / 6,3 (2) / L – G 1,9 1,9 1,9 (3) 1,8 (3)

Tableau 4.19 – Interactions mésostabilisantes : entre paires de résidus de petite taille. Légende cf. tableau 4.7.

4.3 Conclusions

Notre analyse préliminaire sur la dépendance en la température de quatre types d’interactions protéiques révèle pour deux d’entre elles des variations particulières (section 4.1). En effet, cette analyse préliminaire a clairement mis en évidence que lorsque la température augmente, la contribution stabilisante d’une interaction effective entre deux résidus hydrophobes reste en général inchangée relativement aux autres interactions, alors que celles des ponts salins formés avec l’arginine deviennent relativement plus favorables. Ce résultat peut être considéré comme statistiquement significatif puisque la probabilité d’observer cette influence de la température aléatoirement n’est que d’une chance sur mille. L’influence de la température sur les interactions aromatiques et cation-π reste cependant qualitative et informative.

De plus, nous avons mis en évidence deux géométries d’interactions distinctes des ponts salins formés avec l’arginine : la géométrie fork-stick, dans laquelle l’atome Nε de l’arginine fait partie de l’interaction, et la géométrie fork-fork où les chaînes latérales des deux résidus formant le pont salin se font face. Ces deux géométries ont des contributions favorables au repliement des protéines. Plus précisément, elles sont plus favorables au sein de protéines thermostables que mésostables et dans des proportions légèrement différentes. En effet, de manière générale les différentes géométries ainsi que les ponts salins formés avec l’arginine et la lysine n’ont pas le même poids vis-à-vis de la thermostabilité des protéines. Il est important dès lors de les distinguer afin de mieux analyser et prédire la résistance thermique des protéines. L’importance de dissocier les rôles de l’arginine et de la lysine dans un pont salin s’explique par le fait que la charge positive de la lysine est localisée alors que celle de l’arginine est délocalisée sur son groupement guanidinium. Cette dissemblance implique des contributions énergétiques différentes qui peuvent avoir une dépendance en la température distincte (à savoir : l’empilement π−π et les forces électrostatiques). Leurs partenaires de pont salin chargés négativement (D et E), peuvent être considérés comme étant fort similaires. En effet, bien que l’acide glutamique ait une entropie conformationnelle légèrement supérieure (liée à sa plus longue chaîne latérale), la distribution de la charge négative est identique au sein des acides aspartiques et glutamiques.

Par ailleurs, les minima des profils énergétiques décrivant les ponts salins formés avec l’arginine sont déplacés vers de plus petites distances d’interaction au sein des protéines thermostables. Cette tendance est plus fortement marquée en ce qui concerne la géométrie d’interaction fork-fork. De tels déplacements ne sont pas observés pour les interactions entre résidus hydrophobes suggérant la présence de ponts salins plus compacts et le maintien d’un empilement hydrophobe similaire au sein de protéines thermostables.

De manière générale, nos résultats sont en accord et complémentaires aux analyses statistiques menées sur la thermostabilité au sein de familles de protéines homologues. En effet, ils sont en accord avec leurs résultats puisque deux des facteurs conférant une thermostabilité accrue souvent mis en avant sont : un plus grand nombre de ponts salins et une structure plus compacte [10,44,84,87,88,91,94-96,99,100,102,103,122,111-130,131,133-135]. Par ailleurs, l’approche par mécanique statistique des potentiels de force moyenne apporte un nouveau point de vue qui nous permet de fournir de nouvelles caractéristiques plus spécifiques. A savoir, le fait que les différents ponts salins ainsi que la compacité des diverses interactions protéiques sont affectés de manière distincte par la température [249-251].

Afin d’étudier la dépendance en la température des contributions de toutes les paires d’acides aminés au repliement des protéines, nous avons mené une analyse automatique et systématique à partir d’un échantillon de données plus grand (section 4.2). Bien que nous soyons entretemps parvenus à augmenter la taille de notre échantillon de protéines, la teneur en protéines issues d’archaea hyperthermophiles reste très faible. L’adaptation thermique de ces protéines semble être différente leur conférant une plus grande compacité et une taille plus petite [189]. Compte tenu de leur faible nombre dans notre base de données, nous avons adapté nos potentiels de force moyenne en les normalisant par rapport à la taille des protéines.

Pour mener à bien cette analyse automatique et systématique de grande envergure, nous avons défini deux plus grands groupes de protéines de structure connue et de thermostabilité distincte, un potentiel de distance statistique spécialement conçu pour contrôler la dépendance en la température ainsi qu’une méthode automatique permettant d’analyser la significativité statistique des dépendances observées. Nous avons également introduit un nouveau potentiel où les distances inter-résidus sont calculées entre les atomes virtuels Cν, représentant plus précisément la localisation des groupements fonctionnels des chaînes latérales de certains résidus (e.g. cycles aromatiques, groupements carboxyliques, alcools et amines). Ce potentiel donne des informations complémentaires à celles fournies par le potentiel utilisant l’atome virtuel Cµ, défini comme étant le centre géométrique de la chaîne latérale. La représentation utilisant les Cν apparaît légèrement supérieure dans la description des profils énergétiques des ponts salins (fig. 4.22). Les conclusions qui découlent de cette vaste analyse systématique peuvent être résumées comme suit :

a. Les ponts salins, les interactions cation-π et les ponts H entre un résidu aromatique et un résidu négativement chargé, sont plus stabilisants aux températures élevées relativement aux autres interactions. Un des points communs entre ces différentes interactions est qu’elles ont toutes une composante électrostatique. De manière similaire, les interactions répulsives entre résidus chargés positivement semblent être relativement plus favorables (moins défavorables) à haute température.

b. Les ponts H entre acides aminés polaires non-chargés uniquement ou entre résidus polaires non-chargés et résidus chargés négativement sont relativement moins stabilisants à haute température. Cette propriété peut être liée à l’absence de caractère électrostatique qui les définit et indirectement liée à la plus forte tendance de déamidation des résidus N et Q à haute température facilitée par les résidus S et T. c. Les interactions entre acides aminés aromatiques faisant intervenir différents types de

contributions en fonction de leur géométrie d’interaction (empilement π−π, empilement hydrophobe) sont relativement plus stabilisantes à haute température. De même, les cation-π formés avec l’arginine sont relativement plus stabilisants à haute température que ceux formés avec la lysine. La première interaction a une composante électrostatique et également une composante liée à la délocalisation électronique du groupement guanidinium de l’arginine alors que la deuxième interaction est essentiellement de nature électrostatique.

d. Les empilements de résidus hydrophobes et aliphatiques semblent ne pas dépendre de la température si la valine est incluse, semblent être thermostabilisants avec l’isoleucine et mésostabilisants avec la leucine. Il semblerait que la résistance aux températures élevées soit favorisée par les résidus fortement hydrophobes (comme l’isoleucine) pour lesquels la solvatation dans l’état déplié est très défavorable.

e. Bien que la faible teneur en cystéine ne permette pas de tirer de conclusions définitives, les ponts disulfures semblent être thermiquement stabilisants.

f. Les empilements de résidus hydrophobes et aliphatiques semblent ne pas dépendre de la température si la valine est incluse, semblent être thermostabilisants avec l’isoleucine et mésostabilisants avec la leucine. Il semblerait que la résistance aux températures élevées soit favorisée par les résidus fortement hydrophobes (comme l’isoleucine) pour lesquels la solvatation dans l’état déplié est très défavorable.

g. Certaines interactions entre paires de résidus semblent être non stabilisantes (ou très peu), mais moins néfastes à la stabilité des protéines thermostables qu’à celle des protéines mésostables (ou inversément). Dans certains cas, cet effet semble être lié aux propriétés d’un seul des partenaires interagissant. Plus précisément, l’effet thermostabilisant des interactions entre résidus chargés et résidus de petite taille peut probablement être lié à la plus grande occurrence de résidus chargés au sein de protéines thermostables. A l’inverse, l’effet mésostabilisant des interactions entre résidus aliphatiques ou petits et résidus polaires non-chargés peut probablement être lié à la plus grande occurrence de résidus polaires non-chargés au sein de protéines mésostables. Par ailleurs, le fait que les interactions entre petits résidus apparaissent comme étant mésostabilisantes est probablement lié à leur taille et à l’incapacité de former des interactions spécifiques à cause de leurs petites chaînes latérales.

Certaines de ces conclusions sont à considérer comme provisoires et nécessitent d’être confirmées lorsqu’un échantillon de données plus grand sera disponible. Par ailleurs, notre base de données ne comportant que trop peu de protéines issues d’archaea nos résultats ne peuvent ni confirmer ni infirmer l’hypothèse selon laquelle différents groupes d’organismes utilisent différentes stratégies d’adaptation thermique [189].

Nous aimerions mettre l’accent sur le fait qu’il y a plusieurs stratégies permettant d’augmenter la résistance thermique des protéines (fig. 1.11). Celles-ci peuvent se résumer en deux combinaisons : en stabilisant la structure thermodynamiquement et thermiquement de manière simultanée ou en la stabilisant thermiquement tout en conservant une stabilité thermodynamique similaire. L’augmentation du nombre d’interactions stabilisantes améliore les deux types de stabilité alors que le remplacement de certaines interactions par d’autres permet de moduler plus spécifiquement la stabilité thermique. Notre approche a pour objectif d’identifier les facteurs dont l’effet est le plus spécifiquement lié à la stabilité thermique. En effet, nous ne nous contentons pas d’analyser le moyen d’atteindre une stabilité thermodynamique plus grande, nous cherchons à décrypter ceux procurant une plus grande stabilité thermique. Cependant, de par la nature même de notre approche il nous est impossible de distinguer parfaitement ces deux stratégies menant à une thermostabilité plus élevée. En effet, les potentiels de force moyenne que nous utilisons mélangent clairement ces deux stabilités qui sont par ailleurs fortement liées. Pour s’en rapprocher le plus possible, de grands groupes de protéines de stabilité thermodynamique équivalente mais de différente stabilité thermique seraient nécessaires.

Une autre observation intéressante qui découle de cette vaste analyse systématique est qu’au lieu de se focaliser uniquement sur les interactions stabilisantes, il est nécessaire de prendre en compte les interactions répulsives. En effet, celles-ci peuvent être plus ou moins répulsives en fonction de la température et contribuer ainsi à la stabilité thermique globale des

protéines. Ceci est particulièrement vrai étant donné que nos potentiels sont des potentiels de

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