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Théorie des systèmes de van der Waals

3.1 Interaction de van der Waals

Une liaison de van der Waals est une interaction électrique de faible intensité entre atomes, molécules, ou entre une molécule et un cristal. Elle a été décrite pour la première fois par Johannes Diderik van der Waals (1837 - 1923), prix Nobel de physique 1910, qui détermina leur effet en modifiant l’équation d’état des gaz parfaits. C’est la physique quantique qui, des années plus tard, a permis de mieux comprendre les actions qu’elle recouvre.

Forces de van der Waals Les systèmes à couche fermée manifestent toujours une énergie d’interaction due aux forces de van der Waals qui peuvent être décomposées en quatre termes principaux [28, 29] :

– le terme électrostatique résulte de l’interaction entre moments électriques permanents : charge, dipôle, quadrupôle etc. Ce terme peut être attractif ou répulsif selon l’orientation relative des molécules qui interagissent ;

– le terme d’induction résulte de l’interaction entre des moments permanents d’une molécule avec les moments induits par polarisation dans l’autre molécule. Ces interactions découlent du fait qu’une molécule est toujours polarisable si elle se retrouve dans un champ électrique. Ce terme est attractif dans le cas de molécules dans leur état électronique fondamental ;

– le terme de dispersion résulte de la polarisabilité électronique mutuelle des partenaires d’interaction. Ce terme est attractif et il a une origine purement quantique ;

– le terme d’échange se manifeste à courte distance intermoléculaire et croît rapidement lorsque celle-ci décroît. Ce terme a aussi une origine quantique.

Développement multipolaire de la perturbation. La prise en compte du potentiel d’interaction des deux sous-systèmes peut se faire dans le cadre de la théorie de perturbation. L’énergie d’interaction limitée au deuxième ordre de perturbation peut être décomposée en trois termes. Le terme du premier ordre est une énergie électrostatique :

Ue= hΨA0ΨB0| ˆHA0ΨB0i (3.1)

où ΨA

0, ΨB0 sont les fonctions d’ondes des molécules A,B dans leur état de plus basse énergie et ˆH représente le potentiel d’interaction des deux molécules. Le potentiel d’interaction entre les moments

des nuages électroniques de chaque molécule est négligable. En unité électrostatique (e.s.u.), le potentiel correspondant s’écrit dans sa forme générale comme :

Vmult= (4π)3/2

l1, m1, m 1, l2, m2, m2 (−1)l1  (2l1+ 2l2)! (2l1+ 1)!(2l2+ 1)! 1/2 ×  l1 l2 l1+ l2 m1 m2 −m1− m2  Y(l1+l2) m1+m2( ˆR) 1 Rl1+l2+1× D(lm1) 1m1(Ω1)1Q(l1) m′ 1 2Q(l2) m′ 2 D(l2) m′ 2m2(Ω2), (3.2) où :

- on trouve ici un symbole 3J ;

- ˆRreprésente l’orientation du vecteur joignant les centres des masses des deux molécules par rapport à un repère fixe ;

- D(li) m′

imi(Ωi)(i = 1, 2) est un élément de matrice de rotation faisant passer du repère dont le centre est au centre de masse de la molécule i et dont les axes coïncident avec ceux du repère fixe à un repère lié à la molécule i ;

-iQ(li) m′

i (i = 1,2) est une composante sphérique du moment multipolaire d’ordre li. Les noms et des symboles des premiers opérateurs multipolaires sont suivants :

q : Charge l = 0

µ: Dipôle l = 1

Θ : Quadrupôle l = 2

Ω : Octupôle l = 3

Φ : Hexadépôle l = 4

L’énergie électrostatique se décompose en :

– un terme charge-charge qui varie avec la distance R entre les deux systèmes comme R−1; – un terme charge-dipôle qui varie comme R−2;

– un terme dipôle-dipôle et charge-quadrupôle qui varie comme R−3;

– un terme quadrupôle- quadrupôle, dipôle-octupôle et charge-hexadécapôle qui varie comme R−5; – etc. . .

L’effet d’induction. Les interactions d’induction constituent une partie des termes d’ordre deux de la théorie des perturbations sur les états électroniques des molécules.

Ui= −

i6=0 |hΨAiΨB0| ˆHA0ΨB0i|2 EA i − E0A

j6=0 |hΨA0ΨBj| ˆHA0ΨB0i|2 EB j − E0B (3.3) La première contribution UA

i est une variation d’énergie du système par suite de la polarisation de la molécule A sous l’influence de la molécule B non perturbée, la seconde contribution UB

i représente l’équivalent relatif à la molécule B. Il est possible d’évaluer ces deux contributions individuellement grâce à relation (3.1). On obtient l’expression en terme d’élements de tenseurs qui représentent les grandeurs appelées polarisabilités dipolaires αB

αβ, mixte dipôle-quadrupôle AB

αβγ et quadrupôle CB αβγδ respectivement [1]. Ces polarisabilités caractérisent l’aparition de moments induits correspondants dans la molécule sous l’influence d’un champ électrique externe. L’expression du potentiel U comporte des termes qui varient comme R−6, R−8, R−10, etc. Le terme d’induction est toujours négatif.

Ud= −

i6=0

j6=0 |hΨAiΨBj| ˆHA0ΨB0i|2 EA− E0A+ EBj − E0B (3.4) On trouve dans l’interaction de dispersion isotrope des termes :

- en −C6/R6, traduisant une interaction de type dipôle–dipôle ; - en −C8/R8, traduisant une interaction de type dipôle–quadrupôle ; - en −C10/R10, traduisant une interaction de type quadrupôle–quadrupôle,

où les multipôles sont les moments instantanés (ou dynamiques) des molécules. Dans le cas de certaines molécules (toupies sphériques, par exemple [30]), ces interactions ont aussi une partie anisotrope dépendant des hyperpolarisabilités de chaque molécule.

Forces de répulsion. Aux forces d’attraction, il convient d’ajouter des forces de répulsion qui prédominent à très courte distance, dès que les orbitales moléculaires tendent à s’interpénétrer. Ces forces correspondent à l’anisotropie des nuages électroniques des molécules, mais aussi à leur recouvrement et aux effets d’échanges électroniques entre les molécules. En combinant la contribution répulsive avec les termes d’attraction, le potentiel d’énergie résultant possède un minimum. Une des représentations très connue de ce potentiel est le potentiel de Lennard-Jones :

V = 4ε  σ R 12σR6  (3.5) où 4εσ6 correspond au coefficient C6 déjà mentionné, et où le terme répulsif est en R−12. L’énergie de répulsion peut être également exprimée sous une forme expontielle, de type Be−bR.

Interactions de transfert de charge. Une molécule possédant un faible potentiel d’ionisation peut former avec une autre molécule de grande affinité électronique, un complexe donneur-accepteur. La formation d’un tel complexe se manifeste par une bande de transfert de charge dans le spectre d’absorption électronique.

Liaison hydrogène. La liaison hydrogène résulte d’une interaction locale où prédomine le terme électrostatique, et, dans une moindre mesure, le transfert de charge. Comme le proton de l’atome d’hydrogène est partagé entre les molécules liées, cette liaison est partiellement covalente. La liaison par pont hydrogène (ou liaison hydrogène (H)) est un cas particulier des liaisons intermoléculaires de Van der Waals, qui contribue à la cohésion des liquides ou des gaz. Les liaisons H sont très importantes pour les assemblages macromoléculaires (repliement des polypeptides, structure quaternaire, association des 2 brins du DNA). Une autre illustration est celle de l’eau solide (glace).

L’origine de la liaison hydrogène est essentiellement électrostatique et de type dipôle–dipôle induit. Un hydrogène attaché à un atome fortement électronégatif va porter une fraction de charge positive qui polarisera fortement une autre molécule possédant un doublet non liant. L’interaction forte entre dipôle et dipôle induit entraînera leur alignement et une grande proximité des atomes considérés par rapport aux interactions typiques de van der Waals. La liaison hydrogène est donc dirigée et de force supérieure aux liaisons de van der Waals. Pour que cette liaison s’établisse, il faut être en présence d’un donneur de liaison hydrogène et d’un accepteur :

- le donneur est formé d’un composé à pH acide, c’est-à-dire un hétéroatome (azote, oxygène, fluor) porteur d’un atome hydrogène (comme dans les amines, alcools, thiols) ;

- l’accepteur est composé d’un hétéroatome (uniquement azote, oxygène ou fluor) porteur de doublets libres. Lorsqu’une liaison hydrogène s’établit, les deux hétéroatomes se trouvent à une distance d’environ

non-rigides. Un complexe moléculaire faiblement lié en phase gazeuse (ou dans un jet moléculaire) se forme entre deux (ou plusieurs) monomères neutres, atomiques ou moléculaires. Ces complexes ne peuvent pas être caractérisés par une seule structure d’équilibre autour de laquelle les atomes effectuent des mouvements de faible amplitude. La spécificité de ces complexes tient dans le fait qu’ils ont plusieurs minima d’énergie avec des structures d’équilibre équivalentes. Ces structures sont reliés entre elles par les mouvements de grande amplitude de chaque monomère, ce qui rend la structure des spectres de ces monomères plus complexe. La complexité du spectre est due également à des mouvements de grande amplitude des protons identiques réalisés par effet tunnel pour les molécules possédant certaines symétries (NH3 par exemple), Il devient difficile dans ce cas d’effectuer l’attribution du spectre. Le groupe Complet de Permutation-Inversion Nucleaire (CNPI) s’applique pour résoudre ce problème [31, 32]. Longuet-Higgins ont montré [32] que pour un grand nombre de noyaux identiques, on ne conserve pas toutes les opérations de permutation : le sous-groupe correspondant est le groupe de symétrie moléculaire. Des études théoriques sur les processus de réarrangements moléculaires par effet tunnel sont nécessaires pour la détermination du groupe de symétrie moléculaire, ainsi que des calculs ab initio [31]. On peut noter les travaux consacrés aux calculs des états de vibration-rotation-tunnel (VRT) de complexes de van der Waals [33, 34, 35]. Dans les complexes de van der Waals, il existe une hiérarchie dans le domaine des mouvements du noyau. Dans les molécules chimiquement stables qui constituent le complexe, les atomes vibrent rapidement. Les mouvements des molécules dans le complexe sont gouvernés par les forces de van der Waals, qui sont faibles, ou par la liaison hydrogène, qui n’est que légèrement plus forte. Ils sont donc plus lents ; les basses fréquences qui n’ont pas été observées pour les monomères vont apparaître dans ce cas. Cette situation permet d’appliquer une approche de type Born-Oppenheimer, dans laquelle on sépare les vibrations intramoléculaires et les vibrations intermoléculaires. Ces dernières ont généralement de grandes amplitudes et, comme il y a souvent plusieurs minima dans la surface équipotentielle avec des barrières basses, les vibrations intermoléculaires ressemblent plus à des rotations entravées ou des mouvements de tunnel. Dans pratiquement tous les cas, il existe un couplage fort entre les différents degrés de liberté intermoléculaires.

Il faut noter cependant que, parfois, les molécules stables qui constituent le complexe sont flexibles. Dans ce cas, certains des modes intramoléculaires présentent eux-mêmes des fréquences basses et de grandes amplitudes, et ces modes de vibration sont fortement couplés avec les modes intermoléculaires ou modes de van der Waals. En conséquence, les méthodes reposant sur les modèles de l’oscillateur harmonique et le rotateur rigide avec corrections de perturbations, qui sont utilisés pour étudier les spectres des molécules presque rigides, ne sont pas vraiment adaptées pour les modes intermoléculaires des complexes de van der Waals. Pour la description des mouvement intermoléculaires, on utilise souvent les coordonnées curvilignes, tandis que pour les mouvements intramoléculaires il est de coutume d’utiliser les coordonnées normales (harmoniques). Un choix naturel des coordonnées de van der Waals dans un dimère est donné par la distance R entre les centres de masse des monomères et les angles d’Euler qui définissent l’orientation des trièdres d’Eckart sur les monomères. Ces angles d’Euler peuvent être définis par rapport à un trièdre de laboratoire (trièdre fixe) ou par rapport à un trièdre qui est installé dans le dimère (trièdre mobile). Ce dernier présente des avantages si on essaie de séparer les vibrations intermoléculaires du dimère de toutes les rotations. Mais, bien évidemment, il est possible de faire un autre choix de coordonnées en fonction du problème que l’on veut résoudre. La nature des complexes de van der Waals étant gouvernée par une surface potentielle difficile à caractériser, leur étude au moyen des méthodes ab initio nécessite l’utilisation de théories de haut niveau.

Il est intéressant de noter que les dimères de van der Waals sont souvent quasiment des toupies symétriques allongées («prolate» en anglais, Ix= Iy> Iz) en raison de la grande distance R de la liaison de van der Waals.

on traite les modes intramoléculaires.

3.2.1 Généralités sur la détermination de potentiels ab initio

L’utilisation dans les calculs de méthodes prenant en compte la corrélation électronique avec de grandes bases de fonctions bien équilibrées peut fournir des calculs de potentiels très précis pour les dimères. Ces calculs se divisent en deux types : les calculs basés sur l’approche «supermolécule» et les calculs basés sur l’approche de «Symmetry Adapted Perturbation Theory» (SAPT) [36, 37, 38, 39]. Pour les grands complexes, les calculs ab initio de haut niveau ne sont généralement pas pratiqués.

Approche «supermolécule». Le moyen le plus simple pour déterminer l’énergie d’interaction – moyen que j’utilise dans mes calculs – est fourni par l’approche de type «supermolécule». Pour deux sous-systèmes en interaction A et B, l’énergie d’interaction non corrigée EABdu complexe est une différence : ∆E(R) = EAB(AB, R) − EAB(AB, ∞) = EAB(AB, R) − EA(A) − EB(B) (3.6) Dans cette équation, R est une distance de séparation AB, les lettres en parenthèses sont liées à la base finie dans les calculs, et le système pour lequel l’énergie est calculée est donné en exposant. Cependant, cette méthode présente certains désavantages. On effectue en effet une différence entre deux grands nombres, et le résultat cherché est plus faible de 4 ou 5 ordres de grandeur que les valeurs des nombres à soustraire. La description précise de la surface d’énergie potentielle nécessite donc l’utilisation d’une théorie de haut niveau, et un nombre de points à calculer assez élevé. Les calculs sont alors assez coûteux, ce qui exige de faire un certain compromis entre le niveau de calculs et le nombre de points. Les calculs d’énergies d’interaction sont susceptibles de produire des erreurs de superposition de base s’ils sont effectués à partir de bases finies. Lors du calcul de l’énergie du complexe, on utilise une base plus étendue que lors du calcul de l’énergie des monomères A et B, ce qui se répercute sur l’énergie.

Erreur de superposition de base (Basis Set Superposition Error, BSSE). Une méthode de correction connue est l’approche par rééquilibrage : la méthode de correction dite du contrepoids, (CP -Counterpoise), proposée initialement par Boys et Bernardi [40], consiste à calculer la BSSE en ré-effectuant tous les calculs en utilisant les bases mélangées. L’énergie d’interaction s’écrit :

∆EBSSE(R) = EAB(AB, R) − (EAB(A, R) + EAB(B, R)) (3.7)

où EAB(A, R) et EAB(B, R) sont les énergies des molécules A et B calculées avec la base utilisée pour le calcul du complexe AB. En effet, le calcul pour l’énergie de la molécule A est fait en présence des fonctions de base de la molécule B pour la même géométrie que dans le dimère AB (les noyaux de B ne sont pas présents dans le calcul). De cette façon, la base pour la molécule A est étendue par les fonctions de base de l’autre monomère. Cette méthode donne une bonne estimation de l’énergie d’interaction. Approche «SAPT». L’énergie d’interaction peut être obtenue également à partir de la théorie perturbative. Dans cette approche, on obtient séparément les différentes contributions à l’énergie totale d’interaction, ce qui constitue son principal avantage [41] :

Eint= Epol1 + Eech1 + E2pol+ Eech2 + . . . (3.8) où E1

pol est l’énergie électrostatique classique calculée prenant en compte l’effet de pénétration (chevauchement de charge), E2

pol est la somme de l’énergie d’induction et de dispersion. E2

pol+ Eech2 est rigoureusement amorti par les effets de chevauchement de charge, et En

ech, n = 1,2 sont les contributions d’échange, qui peuvent physiquement s’interpréter comme l’effet de résonance du tunnel des électrons entre des systèmes interagissants. Cette méthode perturbative permet d’éviter l’erreur du type BSSE du fait qu’on calcule uniquement les fonctions d’onde des monomères. Mais il faut noter que la convergence

pour les complexes faiblement liés : la méthode variationnelle, la méthode variationnelle discrète (DVM), la méthode de collocation, la méthode de liaison forte, la méthode variationnelle de Monte-Carlo et la méthode de diffusion quantique de Monte-Carlo. On trouve dans la littérature une description de ces méthodes, par exemple dans [42].

Calculs ab initio pour la spectroscopie de