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CHAPITRE I : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

III. 6 Interaction entre composés oxygénés et la surface des catalyseurs

Il est bien connu que les sites actifs en hydrotraitement (pour les catalyseurs à base de sulfures de molybdène) sont des insaturations de coordination du molybdène (CUS), ou des anions sulfures libres, qui sont localisés sur les bords des plans MoS2 supportés sur γ–Al2O3.

L’adsorption des molécules avec une paire d’électrons libres, tels que NO, NH3, pyridine, etc.

(c'est-à-dire présentant un caractère acide de Lewis) aurait alors lieu sur ces sites. Les sites vacants associés au cobalt ou au nickel se révèlent être considérablement plus actifs que ceux associés à MoS2 seul. Par ailleurs, la présence de ces sites semble être fonction du rapport

H2/H2S [2].

La présence d’eau ou de composés oxygénés dans la charge peut changer la structure du catalyseur, tout comme la géométrie des sites vacants dans le cas d’une insuffisance en espèces sulfures dans la charge. Ceci est confirmé par les travaux de Yoshimura et al. [137] sur la désactivation des catalyseurs NiMo/Al2O3 pendant les étapes d’hydrotraitement d’une

charge dérivée du charbon. Cependant, un excès d’H2S peut avoir l’effet inverse sur l’HDO

[138].

Les interactions des cycles furaniques avec la surface du catalyseur sont le plus souvent décrites comme étant similaires aux interactions avec les cycles thiophéniques. De plus, une inhibition mutuelle de l’HDS par les composés oxygénés et de l’HDO par les composés soufrés, observés par Odebunmi et Ollis [139], indique une adsorption compétitive sur les mêmes sites. La géométrie des sites d’HDO et des sites d’HDS semble donc être similaire. Ceci est aussi confirmé par les résultats de Yamamoto et al. [140] qui ont pu observer que la désactivation du catalyseur par formation de coke a le même effet néfaste en HDS qu’en HDO.

IV - HYDRODESOXYGENATION

ET

HYDRODESULFURATION

SIMULTANEES

A l’heure actuelle, très peu de travaux sur le traitement simultané de composés soufrés et oxygénés sont rapportés dans la littérature.

Odebunmi et Ollis [139] ont effectué simultanément l’hydrodésoxygénation du m- crésol et l’hydrodésulfuration du benzothiophène ou du dibenzothiophène (DBT). Ils ont observé que la présence de m-crésol inhibait la désulfuration du benzothiophène. Ils ont également comparé la réactivité des composés soufrés et du crésol en utilisant des mélanges équimolaires de m-crésol et de dibenzothiophène à 400°C sous 6,9 MPa d’hydrogène. Les composés soufrés sont nettement plus réactifs que le crésol utilisé : le dibenzothiophène réagissant 2 à 3 fois plus rapidement que le m-crésol

Lee et Olis [141] ont étudié l’influence du benzofurane sur l’hydrodésulfuration du dibenzothiophène à 325°C sous une pression totale de 1,0 MPa, sur catalyseur CoMo/Al2O3.

Une forte inhibition du benzofurane sur l’hydrodésulfuration du dibenzothiophène a été observée. En effet, la conversion du dibenzothiophène chute de 46% lorsqu’on ajoute 15 % mol de benzofurane dans la charge, cette inhibition ayant été expliquée par une compétition à l’adsorption des deux composés sur les sites actifs du catalyseur.

Nagai et Kabe [142] ont examiné l’influence de trois composés oxygénés (le phénol, le xanthène et le dibenzofurane) sur l’HDS du DBT sur un CoMo/Al2O3 à 300°C sous une

pression totale de 10,0 MPa. Ils ont noté le même effet inhibiteur de ces composés oxygénés à la fois sur la voie HYD et sur la voie DSD du DBT.

Récemment, Gül et al. [143] ont en revanche noté un effet promoteur du phénol sur l’hydrodésulfuration du dibenzothiophène (étude en autoclave sous une pression de 7 MPa et à des températures de 350 et 400 °C avec comme catalyseur du MoS2). Une augmentation de

la conversion du DBT a été notée lors de l’ajout d’un équivalent de phénol (de 15 à 45 % à 350 °C et de 57 à 97 % à 400 °C). Des effets similaires ont été observés avec le 1-naphthol (de 57 à 99 % à 400 °C).

Viljava et Krause [144] ont effectué l’hydrotraitement du para-mercaptophénol en présence de CoMo/Al2O3 dans un autoclave à une pression totale de 7,9 MPa entre 150 et

250°C. Ils ont constaté que l’hydrodésulfuration était beaucoup plus rapide que l’hydrodésoxygénation. En effet, du phénol est présent dans le mélange réactionnel mais il n’y a aucune trace de mercaptobenzène, ce qui prouve que la désulfuration est toujours

antérieure à la désoxygénation. L’hydrodésoxygénation du phénol n’a été observée qu’à partir de 225°C.

Pelardy et al. [145] ont mesuré l’impact du CO sur des molécules modèles représentatives d’une essence FCC en réacteur à lit fixe et en présence de CoMo/Al2O3 sous

2,0 MPa et 250°C. Le 2-méthylthiophène et le 2,3-diméthylbut-2-ène sont les molécules qui ont été choisies comme représentatives des composés soufrés et des oléfines des essences issues du FCC. Le CO a un impact négatif sur les conversions mesurées aussi bien lorsque le composé était seul que lorsqu’ils étaient en mélange. La sélectivité HYD/HDS, paramètre clef de la désulfuration des essences permettant de chiffrer les effets sur les réactions d’HDS du composé soufré et d’hydrogénation (HYD) de l’oléfine, n’est pas modifiée lors de l’hydrotraitement de la charge modèle en présence de CO. Pour 1,31 kPa de CO introduit, la transformation des deux composés modèles est inhibée de 50 %. L’ensemble de ces effets inhibiteurs est dû à des compétitions à l’adsorption entre le CO et les molécules modèles. De plus, des calculs d’énergie d’adsorption des différents composés par calcul DFT ont mis en évidence que le CO était très fortement adsorbé sur tous les types de bords du catalyseur (-2,05 eV sur le bord métallique et -1,77 eV sur le bord soufre).

Des travaux sur charges réelles ont également été rapportés [146-148]. Par exemple, Bui et al. [146] ont évalué l’effet du guaiacol sur l’hydrodésulfuration d’un SRGO (Straigt-

Run Gas Oil) dans un réacteur à lit bouillonnant entre 280 et 360°C sous 4 MPa en présence

de CoMo/Al2O3. A 360°C, aucun effet du guaiacol (5000 ppm) n’a été observé. En revanche,

lorsque la température baisse, l’inhibition par le guaiacol augmente pour atteindre 80 % à 280°C. Cet effet est expliqué par la présence de phénol, produit intermédiaire de la désoxygénation du guaiacol, à plus faible température qui inhiberait l’HDS du gazole alors qu’à 320°C le guaiacol est totalement désoxygéné.

Enfin, Pinheiro [147,148] a mesuré l’impact de différents composés oxygénés modèles sur l’hydrodésulfuration d’un gazole en unité pilote à 330°C sous 5 MPa en présence d’un catalyseur CoMoP/Al2O3. Dans ces conditions, les molécules modèles oxygénées utilisées

sont totalement converties, et leur effet sur l’HDS du gazole est dû principalement à leurs produits de transformation. Ainsi les molécules, telles que le propanol, le cyclopentanone, l’anisole ou le guaiacol s’hydrodésoxygènent en libérant de l’eau et ont peu d’effet sur l’HDS du gazole. En revanche, les molécules libérant du CO2 ou du CO telles que l’acide

propanoïque ou le décanoate d’éthyle provoquent une inhibition beaucoup plus importante. Il a été mis en évidence que le réel inhibiteur était le CO ou le CO2 libéré lors de la

décomposition de ces molécules modèles et non les composés oxygénés eux-mêmes. Dans ces conditions, le CO et le CO2 sont à l’équilibre de water gas shift.

V - CONCLUSION

Dans cette étude bibliographique, nous avons reporté le type et les caractérisations des catalyseurs utilisés en hydrotraitement afin de mettre en évidence leurs sites actifs. Des avancées importantes ont été obtenues ces dernières années notamment grâce à la caractérisation par microcopie à effet tunnel et aux calculs DFT. Ces techniques ont permis de localiser le nickel et le cobalt sur les feuillets de MoS2 et de proposer les modifications de

structure induites par les conditions de sulfuration.

Expérimentalement, l’utilisation de molécules soufrées telles que le 46DMDBT et le DBT s’avère judicieuse car ce sont de très bons modèles représentatifs des composés soufrés contenus dans les gazoles. En effet, ces molécules sont présentes en majorité dans les gazoles pour des teneurs en soufre inférieures à 250 ppm d’une part et sont parmi les composés soufrés les plus réfractaires d’autre part. Enfin, elles présentent l’avantage de pouvoir caractériser les voies principalement impliquées en HDS, à savoir la voie dite « hydrogénante » (majoritaire pour la transformation du 46DMDBT) et la voie dite de « désulfuration directe » (majoritaire pour la transformation du DBT).

L’hydrodésoxygénation d’huile de pyrolyse issue de biomasse lignocellulosique a été surtout étudiée dans les années 90 à partir de molécules modèles et principalement de composés phénoliques essentiellement sur des catalyseurs sulfures. Il est cependant difficile d’extraire des conclusions très précises aussi bien sur les mécanismes que sur l’impact des produits secondaires tels que l’eau, le CO ou le CO2 ou des conditions opératoires

(température, pression, effet d’H2S). De même, très peu de travaux rapportent des études

précises en co-traitement HDS-HDO. Il semblerait cependant que l’inhibition des molécules oxygénées sur l’HDS des composés soufrés dépende du type de fonction oxygénée. Cet impact négatif serait dû principalement à des effets de compétition à l’adsorption entre les différentes molécules à la surface du catalyseur. En effet, les fonctions ester et acide dont l’HDO conduit à la formation de CO et CO2 présenteraient l’effet le plus important en HDS

des gazoles. Il est par conséquent important de comprendre et de chiffrer les effets à partir de molécules modèles oxygénées sur l’HDS de molécules modèles soufrées (type dibenzothiophènes et alkyldibenzothiophènes) et notamment sur les principales réactions

impliquées, c'est-à-dire la rupture directe de liaisons C-S et l’hydrogénation du noyau aromatique.

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