• Aucun résultat trouvé

2) Les outils pour étudier les tsunamis

2.1 Observations historiques

2.1.2 Paléotsunamis – recherche de dépôts

2.1.2.2 Intérêt

et les blocs (boulders) contenus d’après eux, exclusivement dans ces dépôts de Martinhal (sud Portugal) pour le cas particulier du tsunami de Lisbonne de 1755.

Les dépôts de tsunamis permettent tout d’abord de remonter dans le temps encore plus loin que les archives humaines et d’avoir ainsi une vision à plus long terme de ce qui se passe dans une région donnée. Par exemple, Bussert et Aberhan (2004) mettent en évidence en Tanzanie des dépôts qu’ils associent aisément à des dépôts de tempêtes. En revanche, de par ses caractéristiques qui sont explicitées par les auteurs, une des couches de dépôts serait attribuable à un tsunami qu’ils datent au Jurassique supérieur.

Leur étude permet de connaître l’extension ou l’impact direct d’un tsunami (Paris et al., 2007) en tentant de corréler des dépôts de différents sites entre eux. Ils peuvent également être corrélés à des évènements historiques connus comme par exemple la crise Crétacé-Tertiaire avec la chute d’un astéroïde qui aurait généré un tsunami géant dont les dépôts ont été retrouvés un peu partout dans le golfe du Mexique (Tada et al., 2003 ; Goto et al., 2004, 2008), ou a des évènements plus récents de type inondation comme ceux indiqués dans les

17 Débris arrachés à leur environnement de dépôt d’origine puis redéposés dans un environnement de dépôt

travaux de Haslett et Bryant (2007) concernant des dépôts sédimentaires associés à des évènements hautement énergétiques (tempêtes, tsunamis) sur les côtes française et britanniques. Les dépôts de tsunamis sont contenus/conservés dans les archives naturelles de la Terre que sont les roches sédimentaires ou ce qui aspire à le devenir au cours des temps géologiques par recouvrement sédimentaire et compression. Les dépôts de tsunamis sont, pour faire simple, des dépôts marins dans des faciès terrigènes. Parfois difficiles à distinguer des dépôts associés aux tempêtes comme nous l’avons vu précédemment, leur identification autorise une datation de l’évènement qui leur est associé, de par leur position dans les couches géologiques, ou de par la présence d’éléments chimiques et de leurs isotopes (le carbone par

exemple) (Vött et al., 2006 ; Haslett et Bryant, 2007) ou part thermoluminescence,

luminescence stimulée par infrarouge (IRSL) ou encore luminescence stimulée optiquement (OSL18

L’étude des dépôts permet même de reconstruire le processus de run-up via l’utilisation de modèles mathématiques comme l’ont montré Soulsby et al. (2007) pour le tsunami de Grand Banks de 1929 et de Storegga (6000 ans av. J.C.) ou Srisutam et Wagner (2010) pour le tsunami de 2004 en Thaïland (province de Phangnga) : les auteurs utilisent des méthodes d’inversion utilisant les propriétés hydrodynamiques des tsunamis ainsi que les dynamiques de sédimentation et proposent des relations permettant de calculer les hauteurs et distances de run-up en fonction des épaisseurs de dépôt et leur composition sédimentaire (en terme de taille de grains).

) (Bishop et al., 2005 ; Cunha et al., 2010). Si plusieurs niveaux de dépôts sont répertoriés dans un site donné, cela permet de proposer une période de récurrence de tsunami pour la région étudiée. Des études approfondies telles que celles menées par Wassmer et al. (2010) sur l’anisotropie de susceptibilité magnétique (ASM) des grains contenus dans les dépôts permettraient de connaître le nombre de vagues et leurs orientations : en effet, l’ASM permet de caractériser la fabrique des roches et donc aussi l’état de déformation d’un dépôt sédimentaire soumis aux contraintes imposées par les flux (ou courants) associés à un tsunami en fournissant une mesure moyenne de l’orientation préférentielle des grains (parallèle à la direction du flux) et en mettant en évidence des marqueurs de cette déformation quasi invisibles comme une imbrication spéciale des grains de chaque échantillon (pendage à contre-courant).

18 La procédure de datation par luminescence stimulée optiquement est très bien explicitée par Lian et Huntley

Ils ont aussi le potentiel d’enregistrer l’épaisseur de la lame d’eau à terre (ou ‘flow

depth’) et la vitesse d’écoulement ou ‘flow speed’ (Jaffe et Gelfenbaum, 2007 ; Smith et al., 2007), qui sont des paramètres d’importance pour les ingénieurs côtiers.

Cela permet aussi de trouver les évènements les plus gros d’une région donnée (Pinegina et Bourgeois, 2001), ce qui sert ensuite essentiellement pour la proposition de scénarios maximisant pour les études de vulnérabilité. Ils représentent finalement des indicateurs paléosismologique pour une région donnée (Luque et al., 2001).

Il est important de noter ici que l’absence de dépôts dans un endroit donné, et plus particulièrement dans un endroit favorable à la conservation de ces dépôts, ne signifie en aucun cas qu’il n’y a pas eu de tsunami en ce lieu : le sol du site considéré peut avoir été remanié ou il se peut qu’il n’y avait rien à déposer aussi.

A noter que parfois, les recherches de paléotsunamis, que ce soit via les investigations dans les archives ou via les recherches in situ, sont initiées grâce aux résultats de modélisation ; en effet, ceux-ci peuvent révéler des régions qui sont particulièrement bien réceptives aux arrivées de ces ondes longues, ce qui pousse alors à mener des recherches approfondies pour valider ces résultats de calcul et les modèles associés. C’est dans cette optique que deux missions d’investigation sur le terrain on été menées dans les îles Baléares en juin 2008 (Majorque) et janvier 2010 (Minorque) : les résultats de modélisation obtenus dans le cadre du projet européen TRANSFER lors des tests de propagation de tsunami effectués pour les îles Baléares avec des sources sismiques tsunamigéniques localisées sur la marge nord africaine ont permis de souligner des zones particulièrement réceptives à l’arrivée d’ondes de tsunami. Une partie des résultats est présentée dans Roger et Hébert (2008). Ces zones côtières sont le plus souvent localisées dans le prolongement de canyons sous-marins comme le canyon de Minorque ou les nombreux canyons présents tout au long du promontoire des Baléares (Acosta et al., 2002), ou correspondent à des zones où peuvent avoir lieu des phénomènes de résonance. Les deux missions, en plus d’avoir pour but de collecter des données sur le tsunami de Zemmouri du 21 mai 2003 (revoir la date), visaient donc aussi des investigations in situ en terme de dépôts de tsunami dans des zones lagunaires (favorables au dépôt des sédiments et à leur conservation) préalablement identifiées grâce aux images satellites et en accord avec les résultats de modélisation (Hmax ou hauteur de vague maximale obtenue en chaque point de la zone considérée) (Paris et al., 2008).

Les études sur les dépôts de tsunamis sont donc très intéressantes et riches en informations. Les dépôts de tsunamis apportent un enregistrement témoin pour de grands

séismes et représentent ainsi des outils paléosismologiques importants (Pinegina et Bourgeois, 2001). Associés aux documents historiques, ils permettent de proposer des périodes de récurrence de tsunami pour une région donnée ainsi que des scénarios plausibles.

Ces études de dépôts s’inscrivent dans une catégorie d’investigation plus vaste à savoir les enquêtes post-évènement ou ‘survey post-event’. Ces missions post-évènement, qui sont de plus en plus fréquentes depuis deux décennies, permettent de collecter une quantité considérable de données concernant le tsunami et les dégâts occasionnés, après le passage des secours et avant la reconstruction (Borrero et al., 2009), comme ce fut le cas lors des récentes campagnes aux Samoa américaines après le tsunami du 29 septembre 2009 (Donahue et al., 2009 ; Jaffe et al., 2010 ; EERI Special Earthquake Report, 2010 ; Okal et al., 2010), en Haïti après celui du 12 janvier 2010 (UNESCO, 2010), et dans le pacifique après le séisme du Chili du 27 février 2010 (Ramirez et al., 2010 ; Lagos et al., 2010). Des protocoles d’intervention ITST (International Post-Tsunami Survey) sur site sont même désormais proposés systématiquement et coordonnés par l’UNESCO depuis le tsunami des Samoa de 2009 et du Chili de 201019, comme celui diffusé récemment par l’ITIC20 pour l’enquête de terrain aux Mentawai (Indonésie), ITSI-Mentawai21

19

après le tsunami du 25 octobre 2010 (UNESCO/IOC, NOAA, ITIC, 2010).

http://193.191.134.38/itic/index.php?option=com_content&view=section&id=6&Itemid=35

20 International Tsunami Information Center

Documents relatifs