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LES INSTRUMENTS DE MESURE

Ce n’est que vers la fin des années ’70, début ’80 que des équipes ont commencé à développer des instruments de mesure permettant de transporter des conceptualisations fascinantes, telles que la différenciation de soi ou les manifestations adultes des acquisitions issues du processus de séparation-individuation, sur le terrain de l’empirisme. Leurs travaux n’ont pas été publiés avant le milieu des années ’80 (Bray et al., 1984b; Levine, Green, & Millon, 1986) et divers instruments ne sont apparus dans la littérature scientifique que tout récemment (Haber, 1993; Skorown & Friedlander, 1998).

La thèse actuelle s’insère dans un effort d’utilisation des opérationnalisations auto- administrées de la notion de la différenciation de soi dans l’étude de la satisfaction conjugale afin d’en jauger la valeur empirique et ainsi stimuler la réflexion théorique au sujet de cette notion si prisée des cliniciens.

Dans la description des instruments recensés, le nom anglais de chacun des tests est presque toujours conservé. En fait, presque aucun de ceux-ci n’a été traduit et il sera donc plus facile pour le lecteur de les retrouver dans la littérature sous leur nom anglais. Ils sont

regroupés en fonction des deux cadres théoriques sous-tendant ces notions: une approche psychodynamique (Mahler et al., 1975) versus une approche systémique/familiale principalement représentée par les travaux de Bowen (1978) et Williamson (1981, 1982a, 1982b). Le lecteur retrouvera plus loin un tableau comparatif (voir tableau 1) des propriétés psychométriques de chacun des instruments.

Le but de cette revue est de sélectionner les meilleurs tests, issus de chacun des grands courants de pensée théoriques et cliniques ci-dessus recensés (psychodynamique versus systémique) et de les utiliser par la suite dans l'étude de la satisfaction/détresse conjugale afin d'en comparer les valeurs respectives dans l'amélioration de la compréhension du phénomène à l'étude.

Les instruments s’inspirant plutôt des théories des relations d’objet

Quelques auteurs se référant à des théories d’orientation psychodynamique (Bios, 1975; Erikson, 1980; Mahler et al., 1975) se sont attaqués à la tâche d’opérationnalisation de la notion de différenciation de soi (Olver, Aries, & Batgos, 1990) ou de séparation- individuation (Levine et al., 1986) auprès d’adolescents, de jeunes adultes ou de personnes présentant un diagnostic de trouble de la personnalité limite (Christenson & Wilson, 1985).

Separation-Individuation Inventory (SIL)

Le “Separation-Individuation Inventory” ou !’Inventaire de Séparation- Individuation (Christenson & Wilson, 1985) vise à évaluer les manifestations, chez l’adulte présentant un trouble de la personnalité limite, des anomalies développementales survenues durant son enfance, lors de la phase de séparation-individuation. L’inventaire vise à évaluer le clivage, la différenciation et divers aspects relationnels. L’instrument auto-administré contient 39 items cotés sur une échelle de type Likert en 10 points. Un score plus élevé indique un manque de différenciation de soi. Un score dépassant la cote de 190 est proposé par les auteurs comme indication de pathologie dans le processus de

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séparation-individuation tel que manifesté chez l’adulte. Des analyses factorielles révèlent la présence d’un seul facteur expliquant 49% de la variance commune (Christenson & Wilson, 1985) (alpha de Cronbach = .92). Le score à l’inventaire permet de discriminer un groupe d’individus présentant un trouble de la personnalité limite d’un groupe contrôle de personnes non en traitement. Une forte corrélation (r = .78) a été observée entre l’inventaire et un questionnaire évaluant la présence d’un trouble de la personnalité limite, questionnant ainsi la spécificité de l’inventaire de séparation-individuation (Dolan, Evans, & Kingsley, 1992). En fait, le questionnaire est-il un inventaire évaluant la présence du trouble de la personnalité limite ou mesure-t-il les manifestations à l’âge adulte des aléas développementaux de la séparation-individuation? Rien n’est clair à ce sujet.

Separation-Individuation Test for Adolescence fSITAj

Le “Separation-Individuation Test for Adolescence” ou le Test de Séparation- Individuation pour l'Adolescence (Levine et al., 1986) vise à mesurer la résolution des phases de séparation-individuation telles que conceptualisées par Mahler et ses collègues (Mahler, 1968; Mahler et al., 1975) mais dans leurs manifestations lors d’une période développementale ultérieure s’échelonnant de l’adolescence à la vie de jeune adulte, i.e. de 12 à 22 ans (Bios, 1967; Bios, 1975; Bios, 1980). Ces manifestations sont opérationnalisées par le biais des neuf concepts suivants: 1) l’anxiété de séparation (les personnes significatives sont perçues comme enclines à l’abandon), 2) l’anxiété d’envahissement (l’intimité est perçue comme trop enveloppante), 3) la recherche de la dépendance (très fort attachement à la figure parentale), 4) la symbiose avec les pairs (recherche d’intimité intense avec les pairs), 5) la symbiose avec le professeur (recherche d’attachement intense au professeur), 6) l’essai du narcissisme (“practicing miroring” ou une tendance à la survalorisation de soi), 7) le déni de la dépendance (les besoins d’attachement sont niés), 8) l’attente de rejet (les personnes significatives sont perçues comme dures et hostiles) et 9) la capacité de séparation saine (mouvement flexible entre les besoins de dépendance et d’indépendance) (Levine & Saintonge, 1993).

Le questionnaire auto-administré comporte 86 questions, cotées sur une échelle de type Likert en cinq points oscillant entre “fortement d’accord ou toujours vrai pour moi” à “fortement en désaccord ou jamais vrai pour moi”. La cohérence interne (alpha de Cronbach) des échelles est très variable selon les études: entre .64 et .88 (Levine & Saintonge, 1993), .19 à .87 (Kroger & Green, 1994). La fidélité test-retest à deux ans d’intervalle (n = 79 participants) varie entre .33 et .71, la moyenne se situant à .60 (Kroger & Green, 1994).

Lors de la vérification de la validité du nombre de composantes postulées, on observe différents résultats. Certaines études favorisent une solution factorielle optimale à huit facteurs (Levine et al., 1986) alors que d’autres privilégient une solution à sept facteurs (Kroger & Green, 1994; Levine & Saintonge, 1993). Une version française de l’instrument présente neuf facteurs (Saintonge & Lachance, 1995). Il faut toutefois mentionner que l’outil a subi une révision importante (Levine & Saintonge, 1993) et que toutes les études de validation n’utilisent pas la même version.

Les scores de certaines échelles du Test de Séparation-Individuation pour l'Adolescence permettent de discriminer les sujets en fonction de leur type de personnalité tel qu’évalué à l’aide de l’Inventaire de Personnalité pour Adolescents de Millon (McClanahan & Holmbeck, 1992). Le questionnaire a été relié à l’ajustement collégial (Rice, Cole, & Lapsley, 1990), à l’état de l’identité du moi (Kroger, 1995; Papini, Micka, & Bamett, 1989), à la capacité du sujet de parler de sa vie sexuelle (Papini, Farmer, Clark, & Snell, 1988), aux problèmes d’alimentation (Rhodes & Kroger, 1992) et au degré de dépression (Quintana & Kerr, 1993).

Compte-tenu de sa facture s’adressant à une population adolescente, le questionnaire n’a jamais été utilisé dans l’étude de la satisfaction conjugale. Il mériterait toutefois d’être modifié afin de l’adapter à une population adulte et ainsi évaluer la pertinence de ces concepts auprès de l’adulte.

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Structural Analysis of Social Behavior, Intrex Questionnaires (SASB/Intrex)

Le “Structural Analysis of Social Behavior” ou l’Analyse Structurale des Comportements Sociaux, sous sa forme de questionnaire auto-administré (Intrex), permet d’évaluer toute relation interpersonnelle à partir de trois aspects i.e. le focus (le comportement d’autrui, la réaction de soi à autrui et l’intr'ojection du comportement d’autrui), le degré d’affiliation (haine - amour) et le degré d’interdépendance (contrôle - différenciation de soi) (Benjamin, 1974; Benjamin, 1979; Benjamin, 1988; Benjamin, 1996). Une dyade spécifique est toujours ciblée. Ainsi, si la relation passée à la mère est évaluée, l’individu répondra quatre fois à une même série de questions en évaluant respectivement 1) les comportements typiques de sa mère envers lui, 2) ses réactions typiques aux comportements de sa mère, 3) ses comportements typiques envers sa mère, 4) les réactions typiques de la mère aux comportements de son enfant. De plus, s’ajoute une série de questions évaluant le concept de soi.

Cet instrument complexe se présente en deux versions, soit longue (180 items) ou brève (60 items). Toutefois, la longueur du questionnaire est variable selon !’utilisation qu’en font les équipes de recherche. La même série d’items (e.g., 36 items pour la version longue) peut être réutilisée à l’infini: pour coter la perception par exemple que l'homme a de sa femme, la réaction de l'homme envers sa femme, le comportement de l'homme envers sa femme, les réactions de la femme envers son conjoint, la perception que l'homme a de lui-même à son meilleur et à son pire. Le nombre d’items du questionnaire est donc variable d’une étude à l’autre. Chaque item est coté sur une échelle graduée allant de 0 (ne ressemble pas du tout à la relation) à 100 (ressemble parfaitement à la relation), l’échelle étant graduée par intervalles de 10 points. La codification des réponses aux questionnaires fournit un score en fonction de deux axes (amour-haine versus différenciation de soi - soumission) à l’intérieur d’un modèle circomplexe à 36 sous-positions, et ce, pour chacun des focus. Ces 36 positions se regroupent sous huit facettes contenant chacune quatre ou cinq positions (et donc quatre ou cinq items).

Des résultats d’analyses factorielles en composantes principales obtenus auprès de participants universitaires à l’aide de la version longue appuient la présence de quatre

positions représentant les quatre pôles des deux axes et de deux supra-facteurs représentant les deux axes (Lorr & Strack, 1999). Les huit facettes se distribuent dans l’ordre prévu autour des deux axes mais leur distribution est quelque peu aplatie i.e. se rapprochant de l’axe horizontal indiquant que les deux axes diagonaux sont moins bien définis. Les coefficients de cohérence interne obtenus auprès de ce même échantillon oscillent entre .50 et .92 (Lorr & Strack, 1999).

Lorsque les mêmes analyses sont reprises (toujours avec la version longue) auprès d’un groupe de 182 patients en psychiatrie, on obtient également 4 composantes représentant les extrémités des deux axes et deux supra-composantes identifiées aux deux axes. Toutefois, la circomplexité du modèle n’est pas du tout présente. L’axe d’affiliation (amour-haine) est bien représenté mais les composantes de Taxe d’interdépendance (différenciation - soumission) se regroupent toutes de façon non circulaire (Lorr & Strack, 1999), et ce, dans les trois focus (soi, autrui, introjection). Il semble donc que Taxe de différenciation soit moins discriminant pour les personnes consultant dans un département de psychiatrie, leur attention étant plus attirée par Taxe amour/haine.

Des analyses factorielles confirmatoires adaptées pour évaluer la présence de huit facteurs organisés de façon circomplexe et équidistants l'un de l'autre ont été menées à l’aide de la version brève de l’Intrex auprès de 376 étudiants universitaires et à l’aide de la version longue auprès de 187 patients psychiatrisés (Pincus, Gurtman, & Ruiz, 1998). Dans les deux situations, la structure équidistante n’est pas confirmée. Toutefois, si la distance entre les composantes peut varier, le modèle circomplexe est valable. Afin de vérifier quel modèle représente le mieux les données, des analyses de positionnement spatial ont été menées et révèlent une forme ellipsoïde, aplatie dans le sens de Taxe vertical, soit celui évaluant différenciation-autonomie / contrôle-soumission (Pincus et al., 1998). Le long de cet ellipse, les huit dimensions (tant pour la version longue que brève de !’instrument) s’associent en trois groupes: les dimensions associées à un attachement positif, celles liées à un attachement carencé et un troisième regroupement lié à Taxe autonomie-émancipation / contrôle-soumission.

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En ce qui concerne donc la structure de l’Intrex dans ses deux versions, un modèle à deux dimensions (affiliation et autonomie) sur chacune des surfaces (focus sur soi, autrui et introjection) est préférable à un modèle circomplexe (Pincus et al., 1998). Ces données n'invalident pas le modèle théorique sous-jacent. Lorsque des juges naïfs tentent d’identifier les dimensions sous-jacentes aux items de l’Intrex, on obtient une représentation circomplexe plus près du modèle postulé (Benjamin, 1988). Toutefois, il semble nécessaire de procéder à un effort important de raffinement des items de l’Intrex.

Afin d’évaluer la validité convergente de T outil, Pincus, Gurtman et Ruiz (1998) ont vérifié les associations entre Tlntrex dans sa version brève, deux mesures de modèles circomplexes similaires au SASB soit le “Interpersonal Adjective Scales” (Wiggins, Trapneil, & Phillips, 1988) et le “Inventory of Interpersonal Problems Circumplex Scales” (Alden, Wiggins, & Pincus, 1990) et un inventaire de personnalité très connu, soit le “NEO Five Factor Inventory” (Costa & McCrae, 1992). Les divers résultats révèlent à la fois une convergence intéressante avec des composantes similaires issues des autres instruments et des particularités propres à l’hitrex, confirmant ainsi sa valeur unique (Pincus, Newes, Dickinson, & Ruiz, 1998).

Pour la version brève, les coefficients test-retest sont en moyenne de .87 à quatre semaines d’intervalle, oscillant entre .66 (introjection de soi au pire) à .92 (relation au père) (Benjamin, 1988). Aucune donnée n’est fournie à ce sujet pour la version longue.

L’Intrex a été peu utilisé pour mieux comprendre divers aspects de la vie conjugale mais les données obtenues sont intéressantes. On note entre autres que les hommes issus de couples dont l’un des conjoints est qualifié d’alcoolique ont une perception d’eux comme étant non différenciés (soumis) contrairement à leur conjointe qui les perçoit comme différenciés (autonomes) (Chiles, Stauss, & Benjamin, 1980). On observe, dans une étude d’interactions dyadiques auprès de seize couples dont un des partenaires a été hospitalisé pour risque ou tentative suicidaire, une relation significative entre une amélioration de la différenciation de soi et une définition de soi meilleure (Blake, Humphrey, & Feldman, 1994).

L’Intrex long permet de différencier les hommes alcooliques antisociaux d’hommes alcooliques non antisociaux et d’hommes faisant partie d’un groupe contrôle (Ichiyama, Zucker, & Fitzgerald, 1994). Parmi les différences observées, on note chez les deux types d’alcooliques une plus grande variation du concept de soi en fonction de la relation conjugale qu’auprès des hommes du groupe contrôle, i.e. un moins bon degré de différenciation de soi chez les alcooliques (Ichiyama et al., 1994; Ichiyama, Zucker, Fitzgerald, & Bingham, 1996). De plus, les conjoints alcooliques et antisociaux sont plus contrôlants envers leur conjointe, tout en s’autorisant plus de séparation que les hommes alcooliques et non antisociaux et que les hommes du groupe contrôle (Ichiyama, Zucker, & Fitzgerald, 1994; Ichiyama, Zucker, Fitzgerald, & Reflor, 1996).

D’autre part, l’instrument permet de discriminer divers groupes d’individus en fonction du diagnostic de personnalité état-limite, que ce soit à partir de la version brève (Stem, Herron, Primavera, & Kakuma, 1997) ou longue (Benjamin & Wunderlich, 1994). La version brève permet de différencier des individus boulimiques d’individus normaux (Friedman, Wilfley, Welch, & Kunce, 1997), des femmes avec troubles dissociatifs d’individus d’un groupe contrôle (Alpher, 1996). L’instrument révèle des liens importants entre la qualité de la relation aux parents et le concept de soi chez des personnes boulimiques (Wonderlieh, Klein, & Council, 1996).

Ces quelques résultats indiquent comment le potentiel de cet outil complexe qu’est l’Analyse Structurale des Comportements Sociaux ne semble pas encore avoir été mis suffisamment à profit pour comprendre les liens entre le degré de différenciation des partenaires et la qualité de leur vie à deux.

Self/Other Différentiation Scale (SODS)

Le “Self/Other Différentiation Scale” ou l’Échelle de Différenciation Soi/Autrui (ÉDSA, Olver et al, 1990) est un questionnaire évaluant le degré de différenciation du soi des participants. Il évalue des aspects tels que trop de considération pour les désirs et les souhaits d’autrui, la référence à autrui dans l’évaluation de sa valeur personnelle, le

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manque de jugement indépendant et !’utilisation du dialogue pour connaître ses propres sentiments. Cette échelle à facteur unique comporte 11 items présentés dans le format vrai ou faux. Plus la cote est élevée, plus l’individu se dit différencié, le maximum étant un score de 11. Il a été conçu pour être utilisé auprès de jeunes adultes (17 à 30 ans). La cohérence interne du questionnaire varie entre .72 et .76 (Olver et al., 1990).

L’Échelle de différenciation soi/autrui se distingue d’autres instruments fréquemment cités comme moyens d’évaluation des aspects du soi en tant qu’enchevêtré dans la relation à autrui. Ainsi, on observe des corrélations modérées avec deux échelles du “Personal Research Form” de Jackson (1965 cité dans Olver et al., 1989), soit positivement avec l’échelle d’Autonomie (l’absence de besoins d’encouragement et d’aide d’autrui; r = .45, p < .001) et négativement avec l’échelle de Recherche de Secours (besoin d’assistance et de conseil; r = -.52, p < .001) de même que positivement avec l’échelle de Masculinité du “Personal Attributes Questionnaire” (Spence, Helmreich, & Stapp, 1974, dans Olver et al., 1989; r = .50, p < .001). L’instrument ne présente toutefois aucune corrélation significative à des échelles évaluant la tendance à procurer assistance à autrui (“Nurturance scale” du “Personality Research Form” de Jackson, 1965) ou le style interpersonnel plutôt affiliatlf/émotionnel (échelle de féminité du “Personnal Attributes Questionnaire” de Spence, Helmreich, & Stapp, 1974, dans Olver et al., 1990).

Les corrélations modérées de l’échelle de différenciation de soi avec les autres échelles mentionnées indiquent que tout en visant des concepts similaires, le présent instrument touche des aspects de la différenciation de soi non évalués par les autres mesures tout en évitant d’être une échelle évaluant un style interpersonnel extraverti ou centré sur autrui. En fait, quelqu’un pourrait être extraverti mais être simultanément très différencié. Finalement, on note qu'un meilleur degré de différenciation de soi est associé à de meilleures frontières interpersonnelles dans la relation entre la mère et le jeune adulte (Olver et al., 1990).

Aucune étude ne reprend le questionnaire afin d’évaluer la relation entre ce concept et la satisfaction conjugale.

Comparaison des qualités psychométriques des instruments d'orientation psychodynamique

Le tableau 1 permet de brosser une vue d'ensemble des qualités psychométriques de chaque instrument recensé. À l'intérieur du courant d'orientation psychodynamique, plusieurs tests sont éliminés dans la sélection actuelle. Le “Separation-Individuation Inventory” (Christenson & Wilson, 1985; Dolan et al., 1992) ne sera pas retenu. En fait, son contenu semble plus porter sur la symptomatologie du trouble de la personnalité limite que sur l'ensemble des manifestations du processus de séparation-individuation à l'âge adulte. Le “Separation-Individuation Test for Adolescence” (Levine et al., 1986) présente deux limites importantes: la population ciblée (les adolescents âgés de 12 à 22 ans) et la formulation des items qui en découle et deuxièmement, la difficulté des auteurs à stabiliser la structure factorielle du questionnaire (la consistance interne des échelles semble d'ailleurs fragile). L'Intrex (Benjamin, 1988) présente plusieurs qualités. Il est appuyé sur un modèle théorique fort complexe, permettant l'évaluation de multiples perspectives et proposant des axes d'intervention. Il permet d'évaluer de façon rétrospective le lien aux parents tout comme les relations actuelles (e.g., conjugales). Outre sa longueur et !'utilisation d'un vocabulaire un peu trop sophistiqué pour des gens moins scolarisés, une limite importante de l'instrument concerne sa validité de construit. En fait, des études très exhaustives (Lorr & Strack, 1999; Pineus et al., 1998) ont illustré que les items de l'Intrex doivent être raffinés puisqu'ils ne permettent pas, dans leur forme actuelle, de reproduire la structure circomplexe postulée par Benjamin (1996). Finalement, le “Self/Other Differentiation Scale” apparaît être, pour le moment, le choix le plus approprié. Quoique très bref, cet instrument largement ancré dans les théories de Mahler (Mahler et al., 1975) et d'Erikson (Erikson, 1980) présente de bonnes propriétés psychométriques. Sa faiblesse est certainement l'absence d'analyses factorielles afin d'en vérifier la validité de construit mais sa grande brièveté permet de croire qu'un seul facteur est présent, tel que postulé par les auteurs (Olver et al., 1990).

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Les instruments de mesure issus des théories des systèmes familiaux

Differentiation of Self Inventory (DSI)

Le “Differentiation of Self Inventory” ou l’Inventaire de Différenciation de Soi (Skorown & Friedlander, 1998) permet d’évaluer le degré de différenciation de soi tel que conceptualisé par Bowen (1978). Il est principalement conçu pour des personnes réellement engagées dans la vie adulte (25 ans et plus). Quatre dimensions du concept sont évaluées: la réactivité émotionnelle, la position “Je”, l’isolement émotionnel (“emotional cutoff’) et la fusion avec autrui. L’échelle de réactivité émotionnelle contient 11 items et reflète le degré avec lequel une personne répond aux stimuli environnementaux avec hypersensibilité ou grande labilité. L’échelle évaluant la position “Je” (11 items) concerne la présence d’un soi clairement défini et la capacité d’adhérer de façon réfléchie à ses propres convictions même lorsqu’il y a pression d’autrui pour agir autrement. L’échelle d’isolement émotionnel (12 items) estime jusqu’à quel point un individu se sent menacé par l’intimité et dans quelle mesure il ressent une vulnérabilité excessive en relation aux autres. Les questions reflètent la peur d’être englouti par autrui et la présence de défenses comportementales telles que le suractivisme, la distanciation. relationnelle et le déni. L’échelle de fusion avec autrui (9 items) se rapporte au surinvestissement dans les relations interpersonnelles dont entre autres les phénomènes de triangulation et de suridentification aux parents.

Le questionnaire auto-administré comporte donc 43 items cotés sur une échelle de type Likert à 5 points. Un score pour chacune des échelles et pour l’inventaire est obtenu en additionnant les items concernés: plus le score est élevé, plus il y a de différenciation (donc moins de réactivité émotionnelle, meilleure position “Je”, moins d’isolement émotionnel et moins de fusion avec autrui). La cohérence interne varie de .74 à .88 (Skorown & Friedlander, 1998). Des analyses factorielles confirmatoires, auprès d’adultes

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