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CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE

3.1 PHASE 1 : LES PRATIQUES DÉCLARÉES DES ENSEIGNANTS

3.1.3 Instrument de collecte de données

L’auto-administration d’un questionnaire électronique nous apparaît être un choix raisonnable puisqu’il s’agit d’une façon rapide et peu coûteuse de recueillir des données d’un grand échantillon réparti sur un vaste territoire (Fortin et al., 2006). L’utilisation de questionnaires afin d’obtenir des données au sujet de ce que les enseignants font dans leur classe est une pratique méthodologique grandement répandue parmi les études quantitatives recensées (Desimone, Smith and Frisvold, 2010; Fagnant et Burton, 2009; Lubienski, 2006). Il faut cependant être conscient que certaines limites peuvent être associées à l’utilisation de cet instrument de mesure dans ce domaine d’étude en particulier (Ball et Rowan, 2004; Hiebert et Grouws, 2007; Mayer, 1999). Par exemple, une limite importante soulevée est celle de la compréhension et de l’interprétation des questions administrées (Stigler, Gonzales, Kawanaka, Knoll et Serrano, 1999). À ce propos, Ball et Rowan (2004) expliquent que les connaissances des répondants sont souvent à l’origine des différents sens attribués aux énoncés du questionnaire, et ce, particulièrement dans le domaine des mathématiques. Par ailleurs, Mayer (1999) mentionne que lorsque les enseignants complètent des questionnaires en lien avec leur pratique, ils peuvent, sans en être conscients, fournir des réponses trompeuses. À titre d’exemple, Mayer (1999) présente les résultats d’une étude menée par Cohen (1990) qui a permis de montrer que certains enseignants étaient convaincus que leur pratique enseignante s’inscrivait dans la réforme pédagogique en place, alors qu’en réalité, leur enseignement était très éloigné de la vision de ladite réforme. Une deuxième limite à mentionner est celle de la désirabilité sociale, qui consiste à répondre aux questions d’une manière qui soit acceptable ou socialement désirable. Dans le cas d’un questionnaire portant sur leurs propres pratiques, les enseignants peuvent répondre aux questions non pas en rapportant ce qu’ils font réellement dans leur classe, mais plutôt en rapportant ce qu’ils croient être acceptable de faire dans leur classe (Hiebert et Grouws, 2007; Mayer, 1999), ce qui peut rendre la validité de l’instrument questionnable. Toutefois, Desimone et al. (2010) soutiennent que le biais associé à la

désirabilité sociale n’est pas exclusif aux questionnaires, et qu’en fait, son caractère confidentiel et anonyme peut aider à réduire l’effet de ce biais.

Conscients de ces limites, différents choix ont été faits pour assurer la validité de notre questionnaire. D’abord, pour chacune des sections du questionnaire, nous avons inclus les définitions vulgarisées des concepts qui y sont traités. Selon nous, cette première stratégie contribue à une représentation plus claire (et commune) de chaque concept abordé dans le questionnaire. Par ailleurs, toujours pour surmonter la limite liée à l’interprétation et à la compréhension des questions, nous avons utilisé majoritairement des questions fermées ou semi-structurées, c’est-à-dire des questions pour lesquelles des choix de réponses sont fournies (questions fermées), ou pour lesquelles des choix sont présentés, mais laissant toujours la liberté au répondant d’inscrire sa réponse personnelle dans la section « autre » (questions semi-structurées) (Fortin et al., 2006). Il s’agit donc principalement de questions présentées sous la forme de choix multiples ou d’échelles exprimant un rang. Le fait d’avoir davantage de questions fermées et semi-structurées, comparativement à des questions ouvertes, peut aider le répondant à mieux saisir le sens de la question de par les choix offerts. Les choix de réponse guident en quelque sorte le répondant, l’orientent vers une certaine catégorie de réponses, réduisant ainsi les possibilités d’interprétations erronées. Par le fait même, ce type de question assure une plus grande validité des données. Le questionnaire compte uniquement quatre questions ouvertes, pour lesquelles il était inapproprié de formuler des questions de type fermé ou semi-structuré. De plus, pour réduire le biais associé à la désirabilité sociale, les questionnaires sont entièrement anonymes. Aucune question ne permet d’identifier le nom de l’enseignant ni même l’école dans laquelle il travaille. Finalement, rappelons que nous avons analysé les données issues des entrevues menées lors de la phase exploratoire avant de débuter la construction de notre questionnaire. Concernant plus précisément le contenu de ce questionnaire, l’ensemble des questions a été structuré en trois sections :

1) Informations générales (sexe, nombre d’années d’expérience, niveau scolaire enseigné, commission scolaire actuelle, utilisation (ou non) d’un manuel scolaire pour enseigner les mathématiques, etc.). Cette section compte neuf questions.

2) Opinions par rapport à la résolution de problèmes en contexte scolaire (questions en lien avec les finalités poursuivies). Cette section compte deux questions (ouvertes).

3) Enseignement d’une méthode de résolution de problèmes écrits de

mathématiques (description de la méthode privilégiée en classe, ses avantages et

ses inconvénients, les raisons expliquant le choix de la méthode présentée aux élèves, les exigences relatives à son utilisation par les élèves, etc.). Cette section compte sept questions.

La première section vise uniquement à dresser un portrait général et factuel des répondants. La deuxième section traite de la perspective des enseignants par rapport à l’activité de résolution de problèmes mathématiques en contexte scolaire. Quel est le but de cette activité selon eux? Autrement dit, on cherche à savoir si les enseignants reconnaissent la double finalité de l’activité de résolution de problèmes mathématiques et s’ils la mettent en pratique. Pour ce qui est de la troisième section, elle s’intéresse aux méthodes de résolution de problèmes écrits de mathématiques privilégiées par les enseignants. Par ces questions, nous visons à décrire le quoi (quelle méthode, ses avantages et ses inconvénients), le comment (quelles sont les exigences d’utilisation envers les élèves) et le pourquoi (quelles sont les raisons) de l’utilisation d’une méthode en particulier.

Afin de construire ce questionnaire, nous avons repris la majorité des questions issues du canevas d’entrevue, que nous avons adaptées pour en faire (le plus souvent possible)

des questions semi-structurées ou fermées. Une pré-expérimentation a été réalisée auprès d’enseignants de la population cible. Pour ce faire, le lien électronique menant au questionnaire a été envoyé à trois conseillères pédagogiques de trois commissions scolaires différentes de la région Gaspésie îles-de-la-Madeleine (puisque cette région ne fait pas partie de l’échantillon à l’étude), qui ont elles-mêmes transféré le lien aux enseignants du deuxième et du troisième cycle de leurs écoles. Ces enseignants ont été avisés qu’il s’agissait uniquement d’une pré-expérimentation et donc que leurs réponses ne feraient pas partie de la saisie et de l’analyse de données. Il leur a aussi été spécifié que leur participation était entièrement volontaire. Au total, huit enseignants ont complété le questionnaire. Le logiciel SurveyMonkey nous permet d’avoir accès au temps passé par chaque répondant pour compléter le questionnaire, enregistrant une moyenne de 12 minutes pour ces huit répondants.

Une neuvième enseignante, collègue doctorante dans un domaine autre que la didactique des mathématiques, a ensuite répondu au questionnaire avec une intention d’évaluation plus approfondie. Cette neuvième répondante a pris 58 minutes pour compléter le questionnaire. Son rôle était de noter tout questionnement, problème ou ambigüité rencontrés lors de la passation du questionnaire, pour ensuite discuter de son expérience en partageant ses observations. Ces échanges ont amené différents changements : des questions ont été reformulées et/ou déplacées, alors que des choix de réponse ont été ajoutés, supprimés ou reformulés. La version modifiée du questionnaire a finalement été soumise à deux nouveaux répondants pour une deuxième pré-expérimentation, suite à laquelle un seul changement mineur (l’ajout d’un choix de réponse) a été apporté au questionnaire. La version finale compte un total de 18 questions et le temps de passation est estimé à environ 10-15 minutes. La version finale complète est présentée en annexe 5.