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2. Inégalités socioéconomiques

2.1 Inégalités sociales, inégalités scolaires?

2.1.3 Institution scolaire et Autochtones canadiens

L’éducation des Autochtones canadiens est gérée par de nombreuses instances - ententes tripartites dans quelques provinces canadiennes - et se fait différemment selon les divers groupes autochtones (Dupuis, 1991). Les membres des Premières Nations, soit les Indiens inscrits, sont régis en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867 et de la Loi sur les Indiens

de 198514 (Ministère de l'éducation, 2009). Dans le cas des Métis et des Inuit, le droit à l’éducation et ses règles sous-jacentes ont été établis dans la Loi Constitutionnelle de 1982 (CMEC, 2009).

Le capital culturel des familles amérindiennes a grandement été affecté par les écoles fédérales communément appelées, les pensionnats indiens. Ces établissements - présents entre 1874 et 1996- étaient financés par le Gouvernement fédéral et dirigés par l’Église catholique (Ottawa, 2010). Ces écoles avaient pour but premier d’assimiler les enfants des membres des Premières Nations canadiennes à un système économique et culturel de type européen (Schissel et Wotherspoon, 2005). Isoler les jeunes de leurs familles devait permettre de les intégrer graduellement à la société, puisqu’on forçait les enfants à se soumettre à des manières d’agir et de penser ainsi que des rites et coutumes dites «blanches» (Schissel et Wotherspoon, 2005)15. On leur enseignait l’histoire et la culture des «Blancs» dix mois par année. Les enfants autochtones ne pouvaient parler leur langue, sinon ils étaient réprimés. Dans ces pensionnats, les enfants des Premières Nations ont été acculturés et ils ont également été victimes d’abus et de violence physique, psychologique et sexuelle par les membres de l’Église catholique (Dupuis, 1991, Ottawa, 2010). Schissel et Wotherspoon, (2005), affirment même que cette politique est vue comme le génocide

canadien. Cette situation a eu des répercussions sur le capital culturel des Autochtones : la

culture dominante s’est imposée et les dominés ont dû s’adapter et perdre en grande partie de leur identité d’origine.

Au sein même du système scolaire actuel, des inégalités persistent. Tout d’abord, la Loi sur

les Indiens de 1985 couvre seulement les élèves autochtones du primaire et du secondaire

résidant dans une communauté des Premières Nations (CMEC, 2009). Par conséquent,

14 La Loi sur les Indiens a été créée en 1876. Celle encore active aujourd’hui date de 1985. Des explications

plus détaillées seront fournies dans une section ultérieure.

15 Ces écoles étaient généralement à plusieurs heures d’autobus, de train et de bateau de leur résidence

selon l’interprétation faite de la Loi par le Gouvernement fédéral, les Indiens inscrits résidant à l’extérieur des communautés des Premières Nations ou les Indiens non-inscrits se voient exclus de cette loi. De plus, le Gouvernement fédéral finance de manière inégalitaire les écoles autochtones. En effet, l’Assemblée des Premières Nations affirme que cette institution gouvernementale fournit trois mille dollars de moins pour un étudiant autochtone allant dans une école primaire ou secondaire que ce que reçoit un étudiant non autochtone du même niveau scolaire (CMEC, 2009). De plus, le financement attribué aux membres des Premières Nations est plafonné depuis 1996. Ceci a pour conséquence d’empêcher des milliers d’étudiants autochtones d’avoir accès à une aide financière pour la poursuite de leurs études (ACCC, 2011). Un rapport de recherche de la firme Environics, basé sur des entrevues réalisées auprès de 2614 membres des Premières Nations (inscrits et non- inscrits), des Métis et des Inuit vivant en milieu urbain, soutient que le manque de financement des Autochtones résidant à l’extérieur des communautés des Premières Nations canadiennes est la source première du non-accès aux études postsecondaires (Environics, 2010). De plus, l’état physique des écoles autochtones laisse à désirer : le manque d’investissement pourrait expliquer cette situation. Encore une fois, le CMEC (2009) souhaite que le Gouvernement fédéral, responsable de ces écoles, pallie à ce déficit majeur.

De nombreux chercheurs (Gerber, 1990; Dupuis, 1991; Cooke et coll., 2004; White et Maxim, 2007; Hohban, 2009; Wilkes, 2011;) soulignent la différence de scolarisation entre les peuples autochtones et non autochtones canadiens. Toutes les enquêtes des dernières décennies montrent que les Autochtones ont un taux de scolarisation moindre que les non- Autochtones. En général, les Autochtones ont le plus haut taux de non-diplomation. Utilisant le recensement de 2006, Hohban (2009) note que, chez les individus d’identité autochtone âgés entre vingt-cinq ans et soixante-quatre ans, 25 % des hommes et 20 % des femmes n’ont pas de diplôme d’études secondaires, comparativement à 15 % et 14 % chez les non-Autochtones. Le Ministère de l'éducation (2009) présente des données sur la

scolarisation des Québécois selon l’origine en 2001. Les Inuit (68 %) ont plus de chances de ne pas avoir de diplôme d’études secondaires, suivis des membres des Premières Nations résidant à l’intérieur des communautés (63 %), des membres des Premières Nations résidant à l’extérieur des communautés (40 %) et finalement, des non-Autochtones (32 %).

L’obtention d’un diplôme d’études postsecondaires est également plus élevée chez les non- Autochtones. Wilkes (2011) affirme que dans le recensement de 2001, il y a des écarts plus importants dans le bas et le haut de la distribution. Au Canada, on retrouve 48,03 % des individus d’identité autochtone qui n’ont pas de diplôme du secondaire, tandis que 30,81 % ne l’ont pas chez les non-Autochtones. Chez les individus d’identité autochtone 4,42 % ont un diplôme universitaire comparativement à 15,74 % chez les non-Autochtones. Plus précisément, au Québec, 51,57 % des individus d’identité autochtone n’ont pas de secondaire, tandis que 31,51 % ne l’ont pas chez les non-Autochtones. Chez les individus d’identité autochtone québécois, 4,72 % ont un diplôme universitaire comparativement à 14,05 % chez les non-Autochtones québécois. Deslauriers et coll. (2011) soulignent qu’en 2001, les Québécois d’identité autochtone, âgés entre 20 et 59 ans, ayant fréquenté des institutions postsecondaires avaient plus de chances d’obtenir un revenu plus élevé que les Autochtones n’ayant pas une alphabétisation fonctionnelle - soit neuf années d’études.