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Lors de leur exposition en extérieur, les lentilles primaires des modules testés ont été soumises à différentes conditions ambiantes. Ainsi, leur température de fonctionnement n’est pas constante. Cette variabilité va impacter les propriétés optiques du concentrateur dans une certaine mesure. Tout d’abord, nous allons présenter le modèle utilisé pour déterminer la température de lentille. Ensuite, nous verrons comment le comportement électrique évolue en fonction de ce paramètre.

2.6.1 Détermination de la température de lentille

La température de lentille est un paramètre a priori accessible par la mesure. Cependant, il n’est pas souhaitable de placer une sonde de température sur l’optique: celle-ci serait située sur le chemin optique des rayons lumineux et impliquerait une diminution de l’irradiance sur une des cellules du module. Pour quantifier ce paramètre, nous avons développé un modèle simple [82] qui permet d’estimer la température de lentille à partir de la température Tmodulemesurée en face arrière, de la température ambiante Tamb et des caractéristiques du module mesuré. Le modèle thermique consiste à reproduire un schéma électrique équivalent du module CPV (fig 2.29), qui s’appuie sur le principe suivant: 1) La lumière concentrée par l’optique provoque l’échauffement de la cellule; 2) La chaleur se dissipe via le substrat et la plaque arrière du module; 3) Cette plaque arrière évacue la chaleur par convection à l’intérieur et à l’extérieur du module; 4) Le volume intérieur chauffée par la convection transfère une partie de cette chaleur à la lentille; 5) La lentille conduit cette chaleur vers l’extérieur.

Où Rconvection équivaut à la résistance thermique de convection, Rconduction,lentille, la résistance de conduction de la lentille et Q la puissance dissipée en face avant du module.

En s’appuyant sur ce modèle, on peut alors calculer la puissance Q par l’équation 2.6:

Q= Tmodule− Tamb

2Rconvection,interne+ Rconduction,lentille+ Rconvection,avant

Figure 2.29: Schéma électrique équivalent du modèle thermique utilisé pour déterminer la température de lentille Tlentille [83].

La résistance thermique de conduction Rconduction,lentille a été estimée à partir de la conductivité thermique des matériaux et de l’épaisseur de la lentille. Ne disposant pas des chiffres exacts pour chaque technologie, nous fixons cette valeur à 0, 095/Amodule, avec Amodulecorrespondant à l’aire du module (face avant).

La température de lentille Tlentille,externes’exprime alors (Eq. 2.7):

Tlentille,externe= Tamb+ Q.Rconvection,avant (2.7)

On remplace dans les équations précédentes les résistances de convection par (Eq. 2.8): Rconvection= 1

Amodule.h (2.8)

Où h est le coefficient de convection du milieu considéré. Dans le cas du volume interne, il sera fixé à la valeur hinterne= 5W.m−2.K−1 (correspondant à une absence de vent). Pour l’extérieur, il dépendra de la vitesse du vent selon la formule 2.9, utilisée fréquemment dans la littérature relative aux échanges thermiques [84]:

L’étude décrite dans [82] a permis de tester le modèle sur trois différentes technologies (dont les technologies A et B présentés dans cette thèse. Les modules ont été équipés de capteurs de température sur la lentille en face avant pendant une période de plusieurs dizaines de jours, et les mesures ont alors été comparées aux résultats de modélisation. Une erreur quadratique (RMSE) de 2,9°C a été trouvée pour une période de mesures de 90 jours sur le module A pour des mesures s’étalant sur une plage de 44°C. Les résultats sont jugés satisfaisants et nous appliquons le modèle aux modules testés.

2.6.2 Impact de la température de lentille

L’impact de la température de lentille va principalement s’effectuer sur le rendement optique. Nous nous intéressons logiquement à la variation de l’indicateur Isc/DNI avec la température. Ce paramètre est représenté pour le module C en fonction de Tlentille sur la figure 2.30. L’échelle colorimétrique SMRtopmid permet d’ajouter une dimension spectrale au graphique. Tout d’abord, la gamme de température estimée s’étend sur une plage de 15°C à 46°C. Sur cette plage, nous observons bien une dépendance du rendement optique à spectre constant: pour chaque couleur, une tendance positive à Tlentille se dessine. La quantification de cette tendance nécessite un filtrage serré autour du critère de spectre.

Figure 2.30: Relation entre la grandeur Isc/DNI normalisée par l’aire de lentille et la température Tlentille pour le module C, pour différentes compositions spectrales (échelle colorimétrique).

Compte-tenu des observations précédentes, nous autorisons des variations de spectre de l’ordre de ±1% autour d’une valeur de SMRtopmid optimisée pour maximiser la gamme de valeurs Tlentille. Pour le cas du module C présenté précédemment, nous choisirons ainsi une valeur SMRtopmid égale à 0,95. Nous appliquons également un second critère DNI/GNI =

0, 87 ± 0.2, afin de limiter la dispersion des valeurs. La valeur Isc/DNI normalisée par l’aire de lentille, afin d’apparaitre sur le même graphique, a été tracée en fonction de la température Tlentillesur la figure 2.31. Les régressions linéaires ont également été ajoutées, avec leurs coefficients associés pour toutes les technologies , ainsi qu’une régression de type exponentiel qui épouse mieux les points pour le cas du module B.

Figure 2.31: Variation de l’indicateur d’efficacité optique Isc/DNI normalisé par l’aire de lentille en fonction de la température Tlentillepour chaque technologie.

Tout d’abord, nous remarquons que l’ensemble des modules présente une efficacité optique qui varie positivement avec la température de lentille. Cette dépendance est plus ou moins marquée selon les technologies: alors que pour le module A, elle est de 0,013 mA/cm².°C soit moins de 0,1% de la valeur d’Isc/DNI, elle atteint plus de 0,051 mA/cm².°C pour le module B (tendance linéaire), soit environ 0,4% de l’Isc/DNI. Si pour ce même module, on considère les points où la température Tlentilleest inférieure à 30°C , la dépendance est encore plus forte. Ce chiffre est à comparer au coefficient thermique en courant de la cellule qui est de l’ordre 0,05-0,07%/°C pour les cellules triple-jonction, soit jusqu’à huit fois inférieur au coefficient de dépendance à la température de lentille.

Ce graphe montre également que les modules sont plus ou moins tolérants à la variation de température de lentille en terme de photogénération: l’ajout d’une optique secondaire SOE tend à diminuer cette tendance, confirmant les résultats menés en intérieur dans [62]. En revanche, contrairement aux attentes et aux études menées sur les lentilles PMMA [42], le module D ne montre pas moins de dépendance que les autres technologies. Ce résultat diffère des observations effectuées dans [59], où un module de même technologie avait montré une sensibilité à la température de lentille moins importante que les technologies SoG. Il est difficile de connaitre avec certitude la cause de cette différence de comportement. Un élément

de réponse peut être apporté: le module testé dans ce travail de thèse est constitué d’un seul couple lentille-cellule. L’étude [59] traitait d’un module plus grand, avec 25 éléments lentille-cellule. Ainsi le comportement mécanique du module en fonction de la température peut être différent. Ce comportement implique un changement de la distance lentille-cellule, modifiant la distribution d’irradiance et en conséquence le comportement électrique. Cette hypothèse n’a pas pu être vérifiée expérimentalement.

La température de lentille impacte également la forme de la courbe IV comme l’a montré l’étude [53] où différents profils ont été testés. Nous nous sommes intéressés à étudier ce phénomène à partir des mesures extérieures. Les résultats attestent de l’existence d’une certaine variation, mais dans une mesure bien moindre: 1% à 4% de variation du facteur FF pour une différence de température Tlentille de plus de 20°C. Cependant, nous n’avons pu dressé de tendances claires. De plus, compte-tenu de la faiblesse des variations observées, il n’est pas toujours possible de trouver un compromis de filtrage donnant un jeu de données suffisant tout en s’affranchissant suffisamment de la variabilité des performances due à d’autres phénomènes. Nous préférons alors ne pas tirer de conclusions hâtives quant aux observations effectuées et des expériences supplémentaires sont nécessaires pour attester de l’impact de la température de lentille sur la variation du facteur de forme pour les modules testés.