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I. 3.5.2.2. Spermatogenèse

I.4. Modifications de la différenciation sexuelle

I.4.2. Influence des hormones stéroïdes sexuelles

Les effets des hormones stéroïdes sexuelles sur la différenciation des gonades ont été

largement relatés. Ces hormones peuvent influencer la différenciation sexuelle et altérer la

sex-ratio. Elles peuvent aussi provoquer des anomalies gonadiques ou même de l’inversion

partielle ou complète du sexe. Le rôle des stéroïdes sexuels a été d’abord examiné chez Rana

esculenta. Chez plusieurs amphibiens, le sexe a été inversé lorsque les stéroïdes ont été

ajoutés dans l’eau d’élevage ou injectés directement aux larves. En effet, le traitement avec

des œstrogènes pendant la vie larvaire conduit à une inversion des mâles en femelles chez

l’anoure Xenopus laevis et chez les urodèles Ambystoma punctatum, Hynobius retardatus et

Triturus helveticus (Hayes, 1998).

De nombreux stéroïdes comme les progestatifs, les corticoïdes et les androgènes, ont des

effets similaires sur l’inversion sexuelle. Tous ces stéroïdes sont capables d’induire le

développement testiculaire en produisant une descendance unisexuée mâle. L’effet d’une

hormone sexuelle peut varier selon les espèces (œstrogènes produisent que des femelles ou

que des mâles), ou selon les doses utilisées chez la même espèce (des doses faibles d’E

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induisent 100% des femelles, alors que les fortes doses donnent 100% de mâles), ou bien

selon les stades du développement auxquels les hormones ont été administrées (application

d’E

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au début de la différenciation testiculaire conduit à une différenciation ovarienne,

cependant le traitement fait plus tard au cours de la différenciation du testicule n’a aucun effet

ni sur la différenciation gonadique ni sur la sex-ratio).

Chez les vertébrés, le rôle des stéroïdes sexuels dans la détermination et la différenciation

sexuelle a été largement étudié (Nakamura et al., 1998; Baroiller et al., 1999; Guiguen et al.,

1999, 2010; Devlin & Nagahama, 2002; Strüssmann & Nakamura, 2002; Nakamura, 2010).

Chez les vertébrés non mammaliens, les traitements avec des œstrogènes ou des androgènes

modifient ou inversent la différenciation gonadique, alors que chez les mammifères la

différenciation des gonades a lieu indépendamment de ces hormones.

Les hormones stéroïdes sont synthétisées à partir du cholestérol à l’issue de plusieurs

réactions enzymatiques. L’étape clé et limitante de la biosynthèse des stéroïdes sexuels est la

coupure de la chaîne latérale du cholestérol, par le cytochrome P450scc (side chain clivage), qui

conduit à la formation de la prégnénolone. Les androgènes et les œstrogènes sont les derniers

éléments de la synthèse stéroïdienne et la balance entre eux est régulée par différentes enzymes.

La testostérone peut être convertie soit en œstradiol par l’aromatase soit en DHT non

aromatisable par la 5α-réductase (Miller, 1988). Les œstrogènes sont produits dans les cellules

des follicules ovariens, tandis que les androgènes sont synthétisés dans les cellules de Leydig.

I.4.2.1. Stéroïdes et différenciation sexuelle

Pour illustrer le rôle des hormones stéroïdes dans la différenciation des gonades, il faut

analyser leur production avant, pendant et après la différenciation du sexe. De cette façon,

nous saurons si la différenciation gonadique est régulée par les stéroïdes sexuels, ou l’inverse,

la production de ces derniers est le résultat de la différenciation sexuelle des gonades. Chez

Rana rugosa, les gènes de la stéroïdogenèse semblent être exprimés dans les gonades

indifférenciées des deux sexes dès les stades qui précèdent la différenciation du sexe (Maruo

et al., 2008). Par exemple, des enzymes importantes de la chaîne de biosynthèse des

hormones stéroïdes, telles que 3 et 17β-hydroxystéroïde déshydrogénase (3βHSD et

17βHSD), sont présentes et actives dans les gonades indifférenciées. Par ailleurs, les gonades

indifférenciées des femelles peuvent convertir la progestérone en androstènedione (précurseur

des androgènes) plus efficacement que des larves mâles (Sakurai et al., 2008). De plus,

l’expression de cyp19 (gène de l’aromatase) est significativement plus élevée dans la gonade

indifférenciée des femelles (Maruo et al., 2008), alors que cyp17, une autre enzyme

importante dans la stéroïdogenèse, est exprimée fortement dans les gonades indifférenciées

des mâles. Son expression devient beaucoup plus forte dans les ovaires de R. rugosa, après

une inversion sexuelle effectuée par une injection de testostérone chez des larves femelles

(Iwade et al., 2008). Ceci suggère que cyp19 (Cytochrome P450 19) joue un rôle important dans

la différenciation femelle, alors que cyp17 est nécessaire pour la différenciation mâle. Les

stéroïdes pourraient donc être le facteur clé pour la différenciation sexuelle chez l’amphibien

R. rugosa (Nakamura, 2009, 2013).

Chez le pleurodèle, l’effet des hormones stéroïdes a été bien étudié. Elles ont une action

plus tardive par rapport à la température: la période hormonosensible s’étend du stade 52 au

stade 56 (Figure 14A). L’utilisation de stéroïdes chez le pleurodèle a montré que la production

d’E

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est importante pour la différenciation femelle. En effet, le traitement des larves à l’E

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(100µg/L) conduit à une différenciation des individus génétiquement mâles (ZZ) en

néo-femelles fertiles (ZZ

E2

) (Gallien, 1951; Chardard et al., 2003; Kuntz et al., 2003a).

Le traitement par la testostérone a été aussi étudié chez le pleurodèle. La testostérone a un

effet paradoxal car elle n’affecte pas les larves femelles mais elle provoque l’inversion

sexuelle des mâles en femelles (Gallien, 1962). Cet effet paradoxal est expliqué par

l’aromatisation de la testostérone en œstradiol. Cette hypothèse a été confirmée par

l’utilisation d’androgènes non aromatisables Par exemple, lorsqu’il est appliqué à 500 µg/l sur

des larves ZZ pendant la période thermosensible, la DHT, un androgène qui provient de la

conversion de la testostérone par la 5α-réductase, n’inverse pas les mâles ZZ alors qu’elle

induit la masculinisation des larves génétiquement femelles ZW (Chardard et al., 2003). De

plus, l’exposition de larves ZW à 400 µg/L de 11β hydroxyandrostendione (11β-OHA)

conduit à un effet masculinisant plus important que la DHT.

Chez le pleurodèle, la 3βHSD a été étudiée. L’analyse histochimique a révélé la présence

de la 3βHSD dans les gonades indifférenciées des deux sexes dès le stade 44 (Collenot &

Collenot, 1977). Cette enzyme est active dans les gonades de larves ZZ et ZW avant le début

de la différenciation sexuelle, ce qui suggère que la synthèse d’hormones stéroïdes a déjà

commencé dans la gonade histologiquement indifférenciée. CYP19 a aussi été bien étudié

chez le pleurodèle (voir partie aromatase). Les effets de tous les traitements effectués visant à

inverser le sexe des larves de pleurodèle sont résumés dans la figure 14B.

I.4.2.2. Aromatase et différenciation sexuelle

L’aromatase est un complexe enzymatique appartenant à la superfamille des cytochromes

P450, qui est localisé au niveau de la membrane du réticulum endoplasmique. Cette enzyme

est codée par un gène unique (CYP19) capable de convertir les androgènes en œstrogènes et

impliqué également dans la différenciation ovarienne chez le pleurodèle. Les principales

étapes de la stéroïdogenèse chez les vertébrés sont présentées dans la Figure 15.

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