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Influence des conditions d’élaboration sur la nanostructure

CHAPITRE 1 Généralités sur les semiconducteurs magnétiques : cas du Ge-Mn

III. Etat de l’art sur les semiconducteurs magnétiques Ge-Mn

III.4. Influence des conditions d’élaboration sur la nanostructure

Les conditions d’élaboration influencent considérablement la structure des couches minces. L’influence de la température d’élaboration et de la concentration en manganèse sur la structure des nanocolonnes sera décrite par la suite. Les différentes nanostructures qui peuvent apparaître dans ce type de système seront également explicitées.

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Evolution structurale des nanocolonnes avec la température de croissance La température est un paramètre libre de l’élaboration et permet de modifier la nanostructure obtenue. Concernant le système Ge-Mn, ce paramètre conduit à des observations différentes :

- Dans des conditions de faible température de croissance (Tg <120°C), une étude structurale en microscopie électronique à transmission révèle la présence de nanocolonnes auto-organisées riches en Mn et orientées dans la direction de croissance. La figure 1.15.a montre la structure cristalline caractéristique de colonnes dont la température d’élaboration est inférieure à 120°C. On peut ainsi mettre en évidence que les nanocolonnes sont cohérentes avec la matrice pour des échantillons élaborés à faible température de croissance, et cela quel que soit la concentration en Mn dans la couche mince.

Figure 1.15 : Image en microscopie électronique en haute résolution en vue plane de différents échantillons élaborés à différentes températures de croissance : (a) à Tg = 100°C, (b) à 130°C, (c) à 150°C et (d) à 170°C [Devillers 2007].

- Dans des conditions de croissance intermédiaire, c'est-à-dire pour 120°C ≤ Tg < 150°C et pour des concentrations en Mn supérieures à 4%, les images en microscopie électronique présentées sur la figure 1.15.b mettent en évidence une légère augmentation du diamètre moyen des nanocolonnes qui s’accompagne d’une diminution de la densité des colonnes quand la température d’élaboration augmente (Tableau 1.2). De plus les nanocolonnes ne sont plus cohérentes avec la matrice, puisque des dislocations d’accommodations sont observées à l’interface entre la colonne et la matrice ce qui traduit une relaxation du paramètre de maille des nanocolonnes. Le paramètre de maille mesuré

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dans la direction relaxée est de l’ordre de 4% plus grand que le paramètre de maille de la matrice de germanium.

- Dans des conditions de température de croissance élevée (150°C ≤ Tg < 170°C), les clichés de microscopie électronique (Figure 1.15.c) mettent en évidence la présence simultanée de nanocolonnes et de précipités sphériques pouvant être identifiés comme la phase Ge3Mn5. On observe une augmentation importante du diamètre des nanocolonnes et une diminution de la densité des colonnes (Tableau 1.2). Cette augmentation du diamètre s’accompagne d’une dégradation de la structure cristalline comme on peut l’observer sur le cliché en microscopie électronique à haute résolution sur la figure 1.15.c. Les nanocolonnes élaborées à haute température sont amorphes.

- Lorsque la température d’élaboration est supérieure ou égale à 170°C, les clichés en microscopie électronique haute résolution sur la figure 1.15.d montrent la présence simultanée de précipités de Ge3Mn5 qui deviennent prépondérants et de fragments de nanocolonnes.

Tableau 1.2 : Evolution du diamètre moyen et de la densité des colonnes en fonction de la température de croissance [Devillers 2008]. Température de croissance (°C) Diamètre moyen des colonnes (nm) Ecart type au diamètre moyen (nm) Densité surfacique des colonnes (μm-2 ) 100 2,70 0,42 32500 130 3,20 0,60 20000 150 6,15 1,33 6600

Evolution structurale des nanocolonnes avec la composition en Mn

Pour étudier l’influence de la concentration en Mn sur les propriétés structurales des couches de Ge-Mn, divers échantillons présentant différentes concentrations ont été élaborés à basse et haute température de croissance (Tg = 100°C et 150°C). Ces échantillons ont ensuite été observés au microscope électronique à transmission en vue plane et sont regroupés sur la figure 1.16. Quelles que soient les conditions d’élaboration, les nanostructures observées ne sont attribuées qu’à la présence de nanocolonnes et non à la présence éventuelle de précipités de Ge3Mn5.

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Figure 1.16 : Images en microscopie électronique en vue plane d’échantillons élaborés à différentes concentrations en Mn à basse et haute température de croissance (Tg = 120°C et 150°C), Distribution de diamètres des nanocolonnes pour les différentes conditions d’élaboration d’après [Devillers 2008].

- Pour une croissance à basse température (Tg = 100°C), on observe sur les clichés TEM présenté sur la figure 1.16 que pour de faibles concentrations (<4%), l’augmentation de la concentration provoque une élévation de la densité de nanocolonnes, alors que leurs diamètres restent constants. Pour des fortes concentrations (>4%), la densité des nanocolonnes n’évolue plus mais le diamètre et la distribution en taille des nanocolonnes augmentent avec la concentration en manganèse (Figure 1.17).

- Pour une croissance à haute température (Tg = 150°C), les images en microscopie électronique de la figure 1.16 montrent que les structures colonnaires sont conservées, néanmoins leur morphologie en fonction de la concentration en manganèse évolue. On observe que l’augmentation de la concentration entraine une augmentation du diamètre et de la distribution en taille des nanocolonnes (Figure 1.17), avec parallèlement une diminution de la densité des nanocolonnes.

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Figure 1.17 : Evolution (a) du diamètre moyen et (b) de la densité surfacique de nanocolonnes en fonction de la concentration en Mn d’après Devillers et al. [Devillers 2008].

Pour de fortes concentrations en Mn, l’augmentation de la température de croissance entraine l’apparition de précipités sphériques de Ge3Mn5. Ces observations sont semblables aux conclusions obtenues par Ayoub et al. [Ayoub 2007] par microscopie électronique en transmission.

Auto-organisation verticale de film Ge/Ge-Mn : Formation de super-réseaux L’empilement successif de couches de Ge et Ge-Mn a également été étudié. L’objectif est d’exploiter l’auto-organisation des nanocolonnes pour former des super-réseaux ou des boîtes quantiques directement durant l’élaboration. Ces films pourront être utilisés comme des mémoires magnétiques à haute densité ou des dispositifs pour l'électronique de spin. Suivant l’épaisseur des couches réalisées et les conditions d’élaboration, ces super-réseaux présentent un empilement de couches contenant soit des nanocolonnes riches en Mn (Figure 1.18.a) soit des boîtes quantiques riches en Mn (Figure 1.18.b) (lorsque l’épaisseur des couches est faible), séparées entre elles par des couches de germanium.

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25nm 10nm

(a) (b)

Figure 1.18 : Images en microscopie électronique en vue transverse de super-réseaux (a) de (Ge 5nm/Ge0,92Mn0,06 15nm) élaborés à 100°C et (b) de (Ge 11nm/Ge0,88Mn0,12 3nm) élaborés à 70°C [Yu 2010 - Wang 2011].

L’influence des conditions d’élaboration dans l’auto-organisation des super-réseaux montre un comportement similaire à celui observé dans les films minces présentant des nanocolonnes [Wang 2011(2)].

Stabilité thermique de la nanostructure

Comme nous l’avons mentionné précédemment, la phase colonnaire riche en manganèse ne correspond à aucune phase thermodynamiquement stable du diagramme de phase : il s’agit donc d’une phase métastable. Lorsque de l’énergie est apportée à un système métastable, il va naturellement avoir tendance à évoluer vers un état de plus basse énergie. C’est notamment le cas lors d’un apport d’énergie thermique au système quand il est soumis à un recuit. La figure 1.19 représente des images en microscopie électronique d’une couche de Ge0,90Mn0,10 pendant un recuit in situ. Sur le premier cliché (Figure 1.19.a), l’échantillon présente des nanocolonnes sur l’ensemble de l’épaisseur de la couche à température ambiante. Les deux autres images (Figure 1.19.b et c), présentent l’évolution de la microstructure pendant le recuit réalisé à 250°C et 300°C. Pour des températures de recuit supérieures à 450°C, les structures colonnaires disparaissent progressivement jusqu’à l’apparition de précipités sphériques correspondant à la phase d’équilibre Ge3Mn5 (Figure 1.19.d).

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(a) (b) (c) (d)

Figure 1.19 : Images en microscopie électronique en vue transverse pendant le recuit d’un échantillon de Ge0,9Mn0,1 pour des températures de recuit de 20°C, 250°C, 300°C et 450°C [Devillers 2008].