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CHAPITRE 3 Caractérisation structurale et chimique de couches minces Ge-Mn

II. Etude structurale et chimique de nanocolonnes auto-organisées

II.2. Compositions chimiques

Composition chimique de la couche

La composition globale de la couche de Ge-Mn analysée, mesurée sur toute son épaisseur, est de XMn=6,01 ± 0,04 % at., ce qui s’avère être inférieure à la composition nominale attendue de 10% at. en Mn. Des profils de concentration en profondeur montrent que la concentration globale en Mn reste constante sur toute l’épaisseur du film (Figure 2.20 du chapitre2).

Composition de la matrice

Les mesures de compositions chimiques de la matrice montrent que celle-ci ne contient quasiment pas d’atomes de Mn. En effet, la concentration en Mn est inférieure à la limite de détection de la sonde atomique tomographique. Cette observation est en bon accord avec la solubilité quasi-nulle des atomes de Mn dans la structure diamant du Ge à l’équilibre thermodynamique (Figure 1.8 du chapitre1). Les atomes de Mn sont exclusivement contenus dans les nanocolonnes. Cela signifie que durant la croissance et malgré la faible température de croissance, les atomes de Mn diffusent rapidement pour rejoindre et/ou former des germes riches en Mn. De plus, la quantité de Mn introduite est très grande par rapport à la limite de solubilité du Mn dans le Ge. Le système est donc sursaturé et la force motrice de germination

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est très élevée. La matrice se trouve alors rapidement appauvrie des atomes de Mn la composant.

Composition moyenne des nanocolonnes

La composition moyenne de nanocolonnes a été mesurée et corrigée selon le modèle explicité dans le chapitre 2. La figure 3.6 représente la composition en Mn dans les colonnes en fonction de leur rayon. La composition en Mn des nanocolonnes varie entre 25 et 35% avec une composition moyenne de 30% en Mn. L’expérience montre qu’il n’existe pas de corrélation directe entre la composition de Mn et le rayon des nanocolonnes. Cette observation suggère également que les corrections effectuées sont fiables, puisque les effets de grandissement introduisent une dépendance entre le rayon et la composition des précipités. De plus, ces mesures de composition corrigées (~ 30% at. en Mn) sont en bon accord avec des mesures réalisées précédemment par EELS-TEM (30% à 36% at. en Mn) [Jamet 2006 - Devillers 2007 - Prestat 2013].

Figure 3.6 : Concentration en Mn globale et corrigée des nanocolonnes en fonction leur rayon.

Il est important de noter que comme le montre la figure 3.6, les compositions des nanocolonnes sont différentes de celles des phases thermodynamiquement stables (Ge8Mn11 et Ge3Mn5). Il peut s’agir d’une phase métastable. Cela pose le problème des mécanismes de formation de ces nanocolonnes. La formation de nanocolonnes avec une composition en Mn plus faible que celle attendue dans la phase d’équilibre est par ailleurs possible dans le cas de systèmes fortement sursaturés [Schmelzer 2000 - Philippe 2011]. En effet, la théorie de la

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germination non-classique qui est basée sur la minimisation de la barrière de germination (dépendante de la force motrice de germination et des énergies d’interface et élastique) prédit que certains précipités peuvent posséder une composition plus faible que la composition d’équilibre.

A partir de la composition nominale en Mn (C0), de celle de la matrice (Cα) et de la phase riche en Mn (Cβ), la fraction molaire des nanocolonnes fm peut être calculée à partir de la relation de conservation de matière :

(1 f ) C C

f

C0m   m  . (3.1)

Dans notre cas, la matrice est pure en Ge, la composition en Mn dans la matrice (Cα) est nulle, de sorte que : C C f 0 m  . (3.2)

En considérant une composition nominale C0 de 6% at. en Mn et une composition de la phase riche en Mn (Cβ) égale à la composition moyenne mesurée dans les nanocolonnes (~ 30% at.), la fraction molaire est donc d’environ 20%. Il est intéressant de comparer cette valeur avec le calcul de la fraction volumique effectué à partir des caractéristiques de la nanostructure. En effet, la fraction volumique de la phase riche en Mn peut s’écrire comme :

V N

fVV , (3.3)

avec NV et V respectivement la densité et le volume moyen des nanocolonnes. Les nanocolonnes pouvant être assimilée à des cylindres, le volume moyen s’exprime :

H r

V  2  . (3.4)

Comme explicité dans le chapitre précédent, le rayon des nanocolonnes n’étant pas une valeur directement mesurable, l’encadrement de sa valeur permet de calculer un ordre de grandeur pour la fraction volumique. Les résultats de ce calcul sont reportés dans le tableau 3.2. La fraction molaire calculée par l’équation 3.2 est de l’ordre de grandeur des fractions volumiques calculées par l’équation 3.3. Ceci tend à prouver que la correction des compositions des nanocolonnes est correcte et que le volume molaire des nanocolonnes est proche de celui du Ge.

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Tableau 3.2 : Calcul de la fraction volumique des nanocolonnes. Echantillon Hauteur moyenne (nm) Densité (cm-3) Rayon moyen (nm) Rayon² moyen (nm²) fv (%) Ge0.90Mn0.10 53,0 7,75.10+14 Sous-estimé 1,08 1,17 15,1 Sur-estimé 1,40 1,98 25,5

Composition locale des nanocolonnes

Des profils de concentration corrigés ont également été construits pour connaître la concentration en Mn au cœur des nanocolonnes. La figure 3.7 représente deux profils de concentration corrigés réalisés au sein d’une même colonne à différentes hauteurs. La composition en Mn à cœur varie de 50% at. (profil 1) à 35% at. (profil 2). Ces résultats, qui ne sont pas accessibles par des mesures EELS-TEM, montrent que des variations de composition chimique ont lieu le long d’une même colonne.

Figure 3.7 : Profils de concentration réalisés perpendiculairement à la nanocolonne et à différentes hauteurs d’une même nanocolonne.

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Il est intéressant de noter que plus la hauteur des nanocolonnes est élevée, plus il existe des variations importantes de concentration en Mn entre son sommet et sa base. La concentration en Mn mesurée en haut de la nanocolonne est généralement plus élevée (ou égale) à celle mesurée en bas. Cet effet peut être la conséquence de l’effet surfactant du Mn durant la croissance de la couche mince [Zeng 2008]. Ces variations de composition au sein de la nanocolonne peuvent expliquer la distribution de la composition moyenne des nanocolonnes.