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Indicateurs issus de l’analyse topologique de réseau

Plusieurs applications sont possibles, en manipulant par exemple des matrices de risques, d’acteurs, de tâches ou de projets. Pour des raisons de volume et de redondance, seule l’application aux risques est présentée ici.

Nous introduisons 4 indicateurs pour montrer l’éventail des possibilités d’analyses, et la difficulté éventuelle pour récolter, calculer ou exploiter les données. Le premier indicateur est le plus simple et le plus local, le degré actif ou passif (exemple ci-dessous) de chaque risque (nœud du graphe), c’est-à-dire le nombre de liens en entrée et en sortie. P i ij j G

Deg RSM

=

À partir de la RSM, il est possible d’obtenir une seconde matrice, appelée RRM (Risk Reachability Matrix) dans laquelle RRMij = 1 si et seulement s’il existe au moins un chemin de Rj vers Ri. On peut ainsi calculer de façon plus globale, car tenant compte des liens indirects, le nombre de chemins allant d’un risque à un autre, ou le nombre de chemins menant à un risque, ou le nombre de risques pouvant engendrer un risque, ou la longeur moyenne (ou maximale) des chemins menant à un risque.

S

i ij

j G

N RRM

=

représente le nombre de risques pouvant être impactés par le risque Ri (les sorties S de Ri) La Figure 40 ci-dessous illustre sur le cas Tramway le nombre de risques potentiellement causes ou conséquences de chaque risque, avec des zones très différenciées. Les risques R2, R55 et R43 qui sont des accumulations de beaucoup de causes. Les risques R6, R49, R27 et autres sont des sources, causes potentielles de nombreux autres risques dans le réseau. Enfin, les risques avec beaucoup de causes et d’effets simultanément sont des transitions, avec plus de causes que d’effets pour R12 et R52 et l’opposé pour R10, R13, R39.

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Nous avons développé des indicateurs relatifs aux interfaces hétérogènes, c’est-à-dire entre natures différentes de risques ou entre propriétaires différents (Figure 41).

Figure 41 : Nombre d’interfaces entre domaines différents (similaire pour interfaces entre responsables différents) Par exemple, l’indicateur ci-dessous calcule le nombre d’interfaces directes et indirectes (globales, d’où le G en exposant) entre deux domaines de risques Du et Dv (risques contractuels et risques technologiques par exemple).

, uv i u j v G D ij R D R D

I RRM

=

Pour finir, un dernier type d’indicateurs nous a paru intéressant, qui mesure la centralité ou le degré d’entourage d’un nœud ou d’un arc (betweenness en anglais, d’où le B), à savoir par exemple le nombre de chemins passant par un nœud (ou un arc) donné. L’équation ci-dessous donne l’exemple du nombre de chemins passant par l’arc reliant les risques Rp et Rq:

, ,

AND

p q pi jq i j G i j p q

B

RRM RRM

≠ ≠ ≠

=

La Figure 42 ci-dessous illustre une mise en relief de certains risques, que ce soit par un code couleur (nœud gris, arc en gras) ou une forme particulière (triangle pointe en bas pour les risques sources, pointe en haut pour les risques d’accumulation, trapèzes pour les risques de transition). L’intérêt de toutes ces mesures est de détecter des problèmes potentiels avec des risques qui au départ n’avaient pas été individuellement jugés critiques.

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4.2.4. L’évolution : des indicateurs encore plus adaptés à la disponibilité des

données et au besoin de l’utilisateur

Les indicateurs de mesure de complexité, relative ou absolue, ont montré leur intérêt dans l’aide à l’identification d’ECP et l’aide à la priorisation de certains évènements lorsqu’on tient compte de leur positionnement dans le réseau complexe auquel ils appartiennent. Des suites sont en cours ou envisagées.

Travaux en cours

Un stage Master Recherche est en cours avec Sergio Alonso. Il porte sur l’élaboration d’indicateurs relatifs de complexité des processus d’une entreprise, en focalisant sur ses processus de transformation (les projets de transformation interne) appliquée à un type particulier de processus non encore défini. La particularité de ce stage est donc de mixer l’analyse des processus du projet et du système résultant. Jusque-là, nous avons toujours étudié l’impact du système résultant sur le système projet. C’est la première fois que nous étudions également la complexité du système résultant.

Travaux futurs

En plus du travail sur les processus de transformation, qui débouchera fin 2011 sur le lancement d’une thèse avec le CEISAR et au moins un des partenaires du CEISAR, à savoir Axa, Air France et Total, cela permet d’ouvrir de nombreuses perspectives en fonction du système résultant étudié. Historiquement, nous avons toujours travaillé dans les grands produits complexes (automobile, ferroviaire, aéronautique). Un autre exemple d’extension du domaine d’application est une possibilité de travailler sur des projets de construction ou de rénovation de réseaux énergétiques. Cela est favorisé par l’arrivée récente d’Enrico Zio et de la chaire « Science des systèmes et défis énergétiques » de l’entreprise EDF. Le chapitre 6 reviendra plus longuement sur ce dernier point.

D’un point de vue plus technique et court-terme, la première amélioration envisagée serait d’introduire des nombres flous permettant de tenir compte de l’incertitude sur certaines des évaluations fournies en entrée. De plus, la méthode AHP présente certaines faiblesses, comme par exemple la sensibilité à l’ajout ou au retrait d’une alternative dans le classement final (Holder 1990). Il faudrait donc que la liste soit sûre avant de démarrer l’analyse, le problème étant que les idées de nouveaux projets peuvent apparaître au fil de l’eau. Enfin, il sera étudié la possibilité d’intégrer les interactions et corrélations entre les différents facteurs (comme suggéré par le coefficient de corrélation de Spearman que nous avons calculé), par exemple en utilisant une méthode de type ANP (Analytic Network Process). Une autre possibilité sera de se situer par rapport à des exemples de référence, ce qui est un des principes de base de la méthode Electre TRI, que nous comptons utiliser prochainement. Les premières conclusions de ce travail préliminaire montrent que certaines métriques ne sont pas adaptées à ce contexte. Pour savoir si elles le seraient dans d’autres contextes (matrices de risques, matrices de tâches ou de projets par exemple), des études complémentaires sont à mener. Nous n’avons pas encore fini de creuser l’étude des domaines de validité de tel ou tel indicateur (ou de telle ou telle méthode) en fonction de la structure de la matrice, de sa taille, de sa densité, de sa répartition de remplissage, de son caractère plus ou moins bouclé, etc…

Anticiper les évolutions possibles du système projet afin notamment de détecter les ECP Page 86

4.3. ANTICIPER LES EVOLUTIONS POSSIBLES DU SYSTEME PROJET AFIN

NOTAMMENT DE DETECTER LES ECP

Cette section présente deux manières d’anticiper directement les évolutions possibles d’un système complexe à partir de l’étude en dynamique de son comportement, notamment des phénomènes de propagation. Nous présentons d’abord une identification d’ECP à partir de l’identification d’interactions qui peuvent propager des phénomènes « origine » en réactions plus ou moins surprenantes et désagréables (cascades, domino, papillon, boucle). Ensuite, l’utilisation de la quantification de ces interactions permet dans certains cas d’aller jusqu’à l’analyse qualitative de ces ECP.

Le premier type d’analyse se sert donc de données binaires (identification d’interactions) pour détecter des phénomènes complexes potentiels sans chercher à faire d’estimation. Cela permet de détecter de nouveaux phénomènes, non identifiés par les méthodes classiques d’identification des risques. L’exemple présenté utilise des matrices décrivant des interactions entre objets (acteurs, tâches et projets). Ce travail a été mené dans le cadre d’un projet collaboratif avec Julie Le Cardinal, avec une application PSA Peugeot-Citroën. Il a fait l’objet d’une publication dans International Journal of Product Development (section 9.6, page 150).

Le second type d’analyse porte ensuite sur l’anticipation des comportements potentiels du projet à partir de données numériques, et quelles différences sont constatées par rapport aux analyses classiques de risques. Cela repose sur deux approches complémentaires, qui sont la simulation à évènements discrets et la modélisation mathématique matricielle directe. Ce travail a été mené dans le cadre de la thèse de Chao Fang. Il a fait l’objet de plusieurs communications en conférences et d’une publication chez Decision Support Systems (section 9.7, page 151). Il a été appliqué chez JLSA Prod’ et Alstom Transport.

4.3.1. Le problème : les anticipations de propagation se font actuellement plutôt

sur des paramètres simples (coût-délai) ou globaux (objectifs du projet)

Les outils actuels de gestion de projet qui proposent des formalisations d’interactions restent simples, mono ou bi-interactions et focalisés sur des paramètres facilement mesurables, comme le coût et le temps. Aucun outil n’a été développé spécifiquement pour étudier des propagations, même s’ils permettent de le faire. Ainsi, on peut étudier l’impact d’un retard sur le reste du projet via l’analyse des marges et des tâches critiques. On peut aussi étudier les variations individuelles de durée ou de coût sur les valeurs agrégées au niveau du projet. Cela reste insuffisant et nécessite des outils plus précis, développées dans le but d’étudier ces propagations potentielles.

4.3.2. Première proposition : l’identification d’Evènements Complexes Potentiels

à l’aide de données binaires

Ce paragraphe introduit en quoi la manipulation de DSM et de DMM binaires permet d’obtenir des informations précieuses sur des Evènements Complexes Potentiels qui auraient pu échapper à l’analyse classique de risques. Il est rappelé qu’une DSM est une matrice carrée reliant les mêmes objets en ligne et en colonne, alors qu’une DMM (Domain Mapping Matrix) relie des objets différents et est donc souvent rectangulaire.