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Partie 2 : Le bien-être des animaux de cirque

1 Indicateurs de bien-être animal

Le bien-être animal est une notion difficile à évaluer, et pourtant c’est aujourd’hui un des points clés de la captivité des animaux sauvages. Il parait plus aisé de déterminer qu’un niveau de bien-être est insuffisant plutôt que satisfaisant. Afin d’évaluer au mieux la qualité de vie et l’état de bien-être des animaux sauvages de cirque, il convient tout d’abord de savoir comment le « mesurer ». Les nombreuses recherches scientifiques sur le bien-être animal de ces dernières années ont permis de mettre en lumière un éventail de critères qui permettent d’orienter si le bien-être est suffisant ou non.

- Indicateurs comportementaux : Un premier point clé de l’évaluation du bien-être animal passe par l’évaluation du comportement de l’animal en captivité et notamment par la réalisation de comportements anormaux tels que les stéréotypies qui seront détaillées plus loin. Ces comportements sont dits « anormaux » car non présents chez des individus vivant en milieu naturel. Il convient donc de connaitre au mieux le répertoire comportemental des animaux sauvages afin de pouvoir le comparer à celui des animaux en captivité. Cependant,

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ces indicateurs nécessitent quelques précautions. Tout d’abord, les comportements sont très individus-dépendants ou espèces-dépendants : les animaux sauvages et notamment les proies sont des animaux qui cachent très bien les blessures et les souffrances afin de ne pas paraître vulnérables aux yeux des prédateurs. Ensuite, l’absence de comportements anormaux ne garantie en rien que le niveau de bien-être soit correct, cela peut même signifier au contraire un état mental pire pour l’animal. En effet, une indifférence totale d’un animal à ce qui se passe autour de lui peut être équivalente à un état chez l’homme de deuil ou de dépression (Manser, 1992). Même si ce sont principalement les comportements anormaux qui vont être étudiés, certaines études vont s’intéresser également à la réalisation de comportements liés à un état émotionnel positif : les comportements de jeux, de grooming, d’interactions positives avec les autres individus…

- Indicateurs physiologiques : Différents paramètres physiologiques sont utilisés afin d’étudier principalement des états de peur ou de frustration à l’origine d’un stress aigu ou chronique chez l’animal (Fraser, 2009). On va principalement rechercher des modifications de l’axe corticotrope (Veissier et al. 2007) avec des mesures de cortisol fécal, méthode non invasive. Cette mesure présente cependant quelques limites : elle peut en effet être augmentée lors d’autres stimulations qui sont cette fois-ci positives (reproduction, jeux…). D’autres mesures peuvent également être relevées dans le cas d’un stress aigu comme la fréquence cardiaque ou encore la température. La température corporelle des animaux peut être relevée de façon non invasive, grâce à des thermo bouton (enregistreur de température) qui peuvent facilement être donné dans la nourriture des grands animaux (Nevill et al., 2004).

- Indicateurs de la fonction reproductrice : On pourra utiliser différents indicateurs tels que présence ou absence de cycle œstral, succès reproducteur, mortalité infantile, infanticide. Comme tous les autres indicateurs d’évaluation du bien-être animal, celui-ci présente également quelques limites. En effet, certaines espèces se reproduisent très bien en captivité même dans des conditions suboptimales, alors que d’autres au contraire auront beaucoup de mal à se reproduire lorsqu’elles sont en captivité et ce qu’importe les conditions de détention, c’est le cas des éléphants ou des girafes.

- Indicateurs sanitaires : Ils rendent compte de la présence de maladies et/ou de blessures lesquelles peuvent entraîner une gêne ou des douleurs pour l’animal. Un animal qui est plus susceptible de contracter des maladies dû à une diminution de l’efficacité du système

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immunitaire à cause d’un stress chronique par exemple aura un niveau de bien-être insuffisant (Broom, 1991), tout comme un animal malade ou en mauvaise santé. Cependant un animal en bonne santé physique ne garantie pas un niveau de bien-être satisfaisant. Différents paramètres vont être utilisés afin d’étudier la bonne santé des animaux tels que l’absence de maladie, le taux de survie ou encore l’espérance de vie (Fraser, 2009).

- Le « taux de restriction » de l’animal : Kiley-Worthington (1990) développe le concept de « taux de restriction ». Il s’agit d’une évaluation des restrictions physiques, psychologiques et biologiques que l’environnement induit sur l’animal. Par exemple, un animal à l’attache conduit à une forte restriction physique d’une part, mais également psychologique en empêchant des interactions avec d’autres individus. Par conséquent, un animal à l’attache aura un fort taux de restriction et donc un niveau de bien être très insuffisant.

Tous ces critères ne doivent pas être utilisés individuellement, mais ils doivent être pris dans leur globalité. C’est la mise en commun de l’ensemble de ces critères qui permet d’évaluer au mieux le bien-être animal. On peut par exemple utiliser des grilles d’évaluation fournis par l’Anses. Plus un animal présentera d’altérations de ces différents critères, plus on pourra considérer que le bien-être de cet animal est pauvre. Par ailleurs, il faut savoir également nuancer ce qui est observé : un animal qui présente des signes de peur donc un état négatif avec des comportements de fuite ou d’attaque sera-t-il dans un état de bien-être pauvre ? Ressentir de la peur est un sentiment normal, que tout animal expérimente, mais ce sentiment ne doit pas être omniprésent. Ainsi, le bien-être sera faible seulement si cet état persiste. La non-satisfaction d’un besoin entrainera un état de mal-être ou de frustration qui pourra alors se traduire par des troubles physiologiques ou comportementales.