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I. Première partie : dépistages des cancers gynécologiques et inégalités sociales de santé

3. Les inégalités sociales de santé

Depuis 2008 et la publication des travaux de la Commission sur les déterminants sociaux de la santé (CSDH selon son acronyme anglais) de l’OMS, la nécessité de réduire les inégalités sociales de santé sont devenues des priorités de santé publique dans de nombreux pays. Le constat d’écarts sociaux manifestes d’espérance de vie à la naissance et de morbi-mortalité sont largement décrits dans les pays développés et également dans les pays en développement (8). Les disparités criantes de l’état de santé en fonction de la position de l’individu sur l’échelle sociale au sein d’un même pays persistent - voire s’aggravent - au cours des récentes décennies ; y compris dans des pays, comme ceux de l’Union européenne, qui ont atteints des niveaux de santé élevés. De manière générale, on utilise comme variables sociales individuelles, le niveau de revenu, le niveau d’éducation et/ou la situation ou la catégorie professionnelle pour mettre en évidence, suivre et comparer les disparités de santé inhérentes à la position de l’individu sur l’échelle sociale. Le constat général est une augmentation du niveau de santé et de recours aux soins à mesure que le statut socioéconomique augmente. C’est ce phénomène que l’on qualifie de gradient social de santé. Ce gradient social a largement été décrit pour la mortalité, l’incidence de diverses pathologies, le handicap, la prévalence de certains facteurs de risque, le recours et l’accès aux soins et en particulier le recours aux soins de prévention. La qualification de ces écarts sociaux mesurés en terme « d’inégalités sociales de santé » correspond finalement à l’application d’un jugement moral et éthique : ces écarts sont jugés injustes, contradictoires aux principes de justice sociale qui devrait prévaloir en matière de santé (9).

Plusieurs théories, probablement complémentaires, tentent aujourd’hui d’expliquer les mécanismes causaux susceptibles d’expliquer de tels gradients sociaux de santé. Une de ces

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théories évoque les variations de conditions matérielles dans lesquelles vivent les individus comme agent causal des inégalités sociales de santé. Ainsi, la qualité du logement, l’accès aux biens matériels (nourriture, logement), à un large choix de commerces et de services, à des infrastructures permettant l’activité physique ou de loisirs, ou encore aux moyens d’information pourraient être des facteurs expliquant pour partie le gradient social de santé. Plusieurs études ont apporté un support à cette théorie puisque, par exemple, on sait qu’il existe une forte association entre l’incapacité à partir de l’âge de 50 ans et le niveau d’accès à certaines infrastructures de base (eau chaude, toilette dans le logement, réfrigérateur etc…) au cours de la vie (10).

De manière apparemment assez contrastée, la théorie psychosociale attribue, elle, l’existence d’inégalités sociales de santé à des effets directs ou indirects du stress induit par la position sociale des individus. Ainsi, être socialement bas situé dans la hiérarchie ou socialement vulnérable induirait un effet de stress direct, physiologique, sur l’organisme. Des études empiriques dans ce domaine sont étayées par les données de neurobiologie (11,12). L’adaptation au stress met en œuvre des mécanismes endocriniens et neurobiologiques largement décrits aujourd’hui (11,12). L’accumulation, la durée d’exposition au stress pourraient dérégler ces réponses adaptatives et induire un certain « degré d’usure physiologique » responsable d’une dégradation de l’état de santé. Les stresseurs sociaux liés à la position sociale peuvent être « objectifs » (exposition aux nuisances environnementales, conditions de travail, expositions aux incivilités, etc.) ou subjectifs : il s’agit de l’impact de la position sociale de l’individu relativement aux autres individus de la société. De nombreuses études ont ainsi montré d’importantes associations entre statut social subjectif et santé (13) ; de ce fait les sociétés les plus inégalitaires et/ou celles reposant sur des normes culturelles d’équité ou d’égalité seraient aussi celles au sein desquelles les plus défavorisés sont les plus affectés par leur position sociale.

Par ailleurs, des effets indirects liés à ce stress conduiraient à la mise en place de comportements à risque d’un point de vue sanitaire (consommation de toxiques par exemple mais aussi moindre souci porté à sa santé ou aux soins de soi).

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Initialement ces deux théories étaient mises en opposition, mais il est largement admis aujourd’hui qu’elles sont probablement vraies toutes les deux et certainement pas exclusives. Le cadre conceptuel proposé par la CDSH met d’ailleurs en exergue le fait que ces deux mécanismes puissent agir de façon conjointe. Ce cadre élargit même le concept, en tenant compte de l’impact du contexte socioéconomique et politique sur la distribution de la santé et de l’état de bien être dans la société, permettant ainsi d’envisager des moyens de réduire ces écarts de santé.

Figure 5. Cadre conceptuel des déterminants sociaux de santé (source : Solar and

Irwin).

Sous une autre perspective, et de manière complémentaire aux théories psychosociale et matérielle, l’approche biographique propose des pistes de compréhension et d’intervention vis-à-vis des inégalités sociales de santé (14,15). Elle postule que ces écarts sont modulés tout au cours de la vie (dès la vie in utero) par les circonstances et les évènements auxquels vont être exposés les individus. Ainsi trois types d’effets sont décrits aujourd’hui dans cette approche : les effets latents décrits comme les effets de l’environnement précoce des individus (indépendamment du parcours de vie ensuite) sur leur état de santé à l’âge adulte ; les effets de trajectoires inhérents au parcours de vie des individus et les effets cumulatifs, pour lesquels l’intensité et la durée d’exposition à un environnement défavorable affectent de manière dose-réponse la santé des individus (12). Cette approche permet aussi

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d’identifier les périodes critiques de la vie au cours desquelles se déterminent l’expérience future de santé.

b) Les déterminants sociaux, environnementaux et psychosociaux

En élargissant ces concepts, on imagine assez facilement que les inégalités sociales de santé puissent finalement résulter de l’effet cumulatif et/ou interactif de facteurs individuels, collectifs, de contexte et d’environnement social.

Le développement des approches multi niveaux a permis, de manière robuste, de mettre en évidence de nombreux déterminants sociaux contextuels (territoriaux) classiquement décrits aujourd’hui dans l’ensemble de la littérature (16). Ainsi les effets de quartier et de l’environnement social, physique et de services sont des variables contextuelles largement et classiquement utilisées dans l’analyse des inégalités sociales de santé, qui renvoient elles-mêmes à des mécanismes matériels (accès aux soins et aux services, environnement construit), physiques (exposition au bruit, polluants, etc.), psychosociaux –stress induit par le sentiment d’insécurité ou la promiscuité par exemple) ou sociaux (influence des co-résidents sur les normes et comportements de santé) (17).

Le caractère multi factoriel de ces inégalités est aujourd’hui largement admis et la mise en évidence de caractéristiques modifiables est finalement le point le plus largement abordé. Cependant, même si les leviers d’action semblent moins évidents sur les variables dites non modifiables (telles que le genre ou l’ethnie), la mise en évidence de disparités les concernant est un préalable indispensable à l’adaptation des politiques de santé publique et la mise en œuvre d’actions spécifiques, préférentielles ou renforcées, à la hauteur des besoins dans des stratégies qualifiées d’universalistes renforcées (18).

Origine ethnique et origine migratoire

En France, la question des statistiques ethniques suscite le débat dans un contexte marqué par les valeurs universalistes des Lumières, un attachement à la citoyenneté hérité de la Révolution Française, une histoire marquée par la colonisation, l’immigration massive de mains d’œuvre au décours des deux guerres mondiales, la période de l’Occupation puis la décolonisation (19). A l’institutionnalisation du regroupement familial (en 1976) - au même

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moment où la croissance des Trente glorieuses arrive à son terme – succède l’émergence (ou la réémergence), au début des années 1980, d’un discours raciste et anti-immigrés qui va s’installer et diffuser durablement dans le débat politique et l’espace public. Aujourd’hui, pour reprendre les termes de D. Fassin, « en se niant comme pays d’immigration », la France (et ses chercheurs) reste embarrassée par cette question (20) : même si de telles statistiques - ou plus largement, des études sur les conditions de vie et en ce qui nous concerne, en épidémiologie sociale, des conditions de santé des immigrés et de leur familles - s’avèrent de plus en plus nécessaires pour la connaissance et l’action publique, leurs conditions de mise en œuvre et leur utilisation restent problématiques (ou jugées comme telles), entre méconnaissance et risque de « racialisation ».

La définition même de ce qu’est un « groupe ethnique » pose problème. Selon le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, une ethnie est un groupe humain d’une certaine densité qui n’a pas eu accès au statut d’état mais qui représente néanmoins de longue date plusieurs des caractéristiques suivantes :

 Un territoire (à cheval ou non sur plusieurs états)  Une langue propre

 Un nom collectif  Une histoire singulière  Des traits culturels originaux

 Une identité revendiquée et plus ou moins assumée

On imagine largement, dès lors, que la reconnaissance et le dénombrement des groupes ethniques est complexe à mener puisqu’il tient compte de données objectives et subjectives et laisse place à l’évaluation des groupes concernés (et, en leur sein, des personnes concernées, ou non).

Le Royaume uni et les Pays-Bas font partie des premiers pays à avoir introduit dans leurs données de recensement des questions relatives à « l’origine ethnique ». Il s’agit plus en réalité de recenser l’origine nationale de leurs habitants, y compris celle des ressortissants d’origine étrangère. La plupart des nouveaux pays membres de l’UE ont par ailleurs

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poursuivi leur collecte de données ethnonationales et/ou linguistiques après leur adhésion à l’UE.

Le tableau 1 ci-dessous précise les données recueillies par les différents pays de l’Union Européenne.

Pays Pays de naissance Nationalité Ethnicité Religion Langue Pays de naissance des parents

Albanie * Arménie * * * * Autriche * * * * Azerbaijan * * * * Belgique * * Bulgarie * * * * * Croatie * * * * * Chypre * * * * * * République Tcheque * * * * * * Danemark * * * Estonie * * * * * * Finlande * * * * France * * Géorgie * * * * * Allemagne * * * Grèce * * Hongrie * * * * * Islande * * * Irelande * * * * * Italie * * Lettonie * * Liechtenstein * * * Lituanie * * * * * Luxembourg * * Malte * * * Moldavie * * * * Pays Bas * * * Norvège * * * Pologne * * * * Portugal * * * Roumanie * * * * * Fédération de Russie * * * * * Serbie et Montenegro * * * * Slovaquie * * * * * Slovénie * * * * Espagne * * Suède * * Suisse * * * *

Ancienne république Yougoslave de Macédoine * * * * *

Turquie * *

Ukraine * * * *

Royaume Uni * * *

Total (sur 42 pays) 39 37 22 24 26 6

Tableau 1 : informations sur le recueil de nationalité, religions, langue et ethnicité des pays

européens pour leurs statistiques ethniques.

En France, depuis la Révolution et tout au long de la construction de notre Etat-Nation, la population est partagée en deux catégories, que ce soit dans notre droit ou dans les catégories d’appréhension du corps social : les citoyens (tous les Français sans distinction d’origine ou de race) et les autres (les étrangers, non dotés de la nationalité française). Certains tableaux de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE)

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distinguent entre les Français de naissance et les Français par acquisition, c’est-à-dire par naturalisation, mariage, déclaration ou à leur majorité.

En France, est immigrée toute personne née étrangère dans un pays étranger et résidant en France3. Un immigré peut donc être (resté) étranger ou avoir acquis la nationalité française. Au 1er janvier 2014, la France compte 65,8 millions d’habitants (hors Mayotte) : 11,6 % d’entre eux sont nés à l’étranger, 8,9 % sont immigrés et 6,4 % sont de nationalité étrangère. Au cours des années 2006 à 2013, l’ensemble de la population résidant en France a augmenté de 2,6 millions de personnes, celle de nationalité française de 2,1 millions, celle des immigrés de 700 000 personnes. La part des immigrés dans la population s’est accrue de 0,8 point entre 2006 et 2014. En Ile-de-France, on compte 18,2% d’immigrés et 12,9% d’étrangers.

La santé des personnes immigrées représente un enjeu de santé publique en Europe et en France. Repris par le Haut conseil à l’intégration (21), l’usage d’une catégorie « immigrée » proposée par Michèle Tribalat, combinant le lieu de naissance et la nationalité de naissance avait pour but de résoudre les lacunes et biais d’analyses liées au concept d’étranger. C’est ce parti pris qui a finalement été adopté par l’INSEE, même si cette catégorie répond de manière imparfaite aux besoins et aux craintes suscités par les développements d’une « ethnicisation » des rapports sociaux et des observations qui en découleront.

Les pays anglo-saxons ont eu plutôt tendance à utiliser « l’auto-évaluation » des personnes interrogées concernant leur classement dans une rubrique ethnique ou raciale. Cette façon de catégoriser l’origine ethnique permet de réduire l’éventuel biais de classement observé en France (ce dernier ne prenant pas en compte l’aspect subjectif de l’origine ethnique). Elle n’est pas pour autant sans défaut. Elle peut être entachée de biais de réponse ; elle ne permet que de recueillir le point de vue de l’individu (et pas celui des autres porté sur lui) ;

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En revanche, selon la définition des Nations unies, est immigrée toute « personne née dans un autre pays que celui où elle réside » (donc, y compris, les nationaux).

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elle peut être trop grossière dans son recueil4 ou dans son analyse pour étudier finement les disparités (et leurs mécanismes) ; elle est difficilement comparable d’un pays à l’autre (mais son absence en France rend également, par définition, toute comparaison internationale impossible, aussi frustre soit-elle).

Quand elles sont disponibles, les statistiques françaises actuelles renseignent le plus souvent (au mieux) la nationalité des individus au jour de l’enquête. Cette caractéristique est souvent insuffisante car elle ne permet pas de connaître l’origine des Français par acquisition, ni l’origine familiale (éventuellement diverse) des individus, y compris des Français de naissance (et notamment des Français issus de l’immigration).

Une autre caractéristique est parfois étudiée dans certaines enquêtes : le statut migratoire des individus, par le recueil (au moins) de leur lieu de naissance et (au mieux), de l’ensemble de leur trajectoire migratoire. Ces deux indicateurs ne peuvent donner qu’une vue partielle de l’origine des individus et ces deux caractéristiques ont finalement peu de chance d’identifier avec précisions les origines – migratoires, culturelles ou géographiques – familiales des individus dans notre pays où près d’un quart de la population a une ascendance (parents ou grands-parents) immigrée (22).

Quelques grandes enquêtes françaises (l’enquête Histoire de vie familiale de 1999, les enquêtes Formation et qualification professionnelle de 1993 et 2003, l’enquête Emploi depuis 2005, l’enquête Logement de l’INSEE en 2006, ou encore l’enquête Trajectoires et Origines de l’Ined) ont renseigné la nationalité des parents des individus interrogés (ainsi que leur lieu de naissance), ce qui permet de distinguer ceux qui sont communément nommés « les Français issus de l’immigration ou descendants d’immigrés» - c’est-à-dire les enfants français nés d’au moins un parent étranger. Le recueil de toutes ces données permet, au mieux, de caractériser et de regrouper de façon plus détaillée la population enquêtée (voir figure 6).

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Mais certains pays, comme les USA, ont récemment multiplié les catégories raciales pour tenter de correspondre plus finement aux multiples minorités, vagues migratoires et métissages des origines.

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Figure 6: Schéma représentant la classification des habitants de la France métropolitaine en

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Dans ce contexte, peu d’études abordent en France l’impact des origines sur la santé. Quelques études ont exploré les associations entre santé et profil migratoire (23–27) mais peu se sont intéressées aux problématiques de prévention. Même si une revue de la littérature en France (28) montre des résultats contradictoires, il semble qu’assez récemment plusieurs auteurs se sont intéressés à différentes facettes de l’état de santé et du recours aux soins en regard de l’origine migratoire, et ont mis en avant quelques constats marquants : un moins bon état de santé de la population migrante par rapport à la population majoritaire qui ne s’explique que partiellement par des facteurs psychosociaux et sociaux (29), une situation particulièrement exposée des femmes migrantes avec des risques périnataux plus importants (notamment pour les femmes originaires d’Afrique subsaharienne, (30)), également constatée pour l’accès au dépistage des cancers.

Réseau et support social

La question de l’isolement social fait partie des questions importantes soulevées par l‘analyse des déterminants psychosociaux de la santé. En effet, de nombreuses études se sont interrogées sur l’impact des relations sociales d’un individu sur sa santé (17,31). Le réseau social peut être défini comme l’ensemble des relations qui entourent un individu et par les caractéristiques de ces liens.

Berckman et Kawachi ont proposé un modèle conceptuel (17) cherchant à expliquer l’impact du réseau social et du support social sur les comportements et sur la santé des individus (figure 7).

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Figure 7:Modèle conceptuel de l’impact du réseau social sur la santé (Source

Berckman&Kawachi).

Le soutien ou support social est l’ensemble des ressources (émotionnelles et matérielles) qu’un individu peut mobiliser ou sur lequel il peut compter. Le support social est divisé en plusieurs sous types, dans la mesure où il diffère en fonction des liens considérés. En effet, certains liens peuvent apporter plusieurs types de support quand d’autres en apporte un seul et unique type. Ainsi, on compte parmi les différents types de support le support matériel, émotionnel, informatif. Ce modèle se veut explicatif des comportements de santé à travers l’interaction de macro déterminants et de micro déterminants. C’est l’importance et la qualité du réseau social des individus qui conditionneraient les qualités et les possibilités de support social des individus (susceptibles d’atténuer les effets de circonstances et de conditions de vie péjoratives pour leur santé), qui détermineraient en partie leur accès aux informations de santé, qui participeraient (plus largement) à la construction de leurs normes de santé et à l’adoption de comportements en lien avec la santé.

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De nombreuses études ont mis en évidence, depuis une vingtaine d’années l’importance du support social ou l’impact de l’isolement social sur la santé (32–35), certaines mettant même en évidence que l’importance du réseau social serait plus associée à la mortalité que l’incidence de certaines pathologies (36), donc finalement plus associé à leur prise en charge qu’à leur prévention primaire. Mais peu d’études se sont intéressées directement à cet impact sur les comportements de prévention, en particulier en France.

c. Les inégalités sociales de santé en France

Comparée aux autres pays, en particulier européens, la prise de conscience française concernant les inégalités sociales de santé a été tardive. En effet, en 2007, Mireille Elbaum écrivait que la France se situait au mieux entre le stade de la prise de conscience et celui de la perception des inégalités sociales en tant qu’enjeu des politiques de santé publique (37). Pourtant les écarts de mortalité précoce et entre cadres et ouvriers ont été mis en évidence il y a de nombreuses années. En effet, en France, les différences sociales de mortalité sont les mieuxconnues et ce, depuis très longtemps, avec notamment les travaux de Villermé sur les causes des différences de mortalitéentre les différents quartiers de Paris en 1828, ou le calcul par l'INSEE des espérances de vie par catégories sociales depuis les années 1970. L'écart d'espérance de vie à 35 ans entre cadre et ouvrier est aujourd'hui de 7 ans chez les hommes et 3 ans chez lesfemmes. Ces inégalités d'espérance de vie se doublent par ailleurs d'inégalités dans le nombre d'années vécues en bonne santé (38). Ces inégalités ont eu tendance à s’accentuer entre les années 1990 et aujourd’hui (39,40) et la France est parmi les pays européens où les écarts sociaux de santé et de recours aux soins sont les plus marqués . Plusieurs publications dont celles du Haut Conseil de Santé Publique, ont permis d’accentuer la prise de conscience et de relever les défis de leur prise en considération par les politiques publiques (41,42). Un premier défi a consisté à lutter contre la perception des inégalités sociales de santé comme concernant uniquement les individus situés au plus bas de l’échelle sociale, ou les plus exclus.

Si la lutte contre les inégalités sociales de santé a été annoncée comme un axe majeur de la loi de santé publique, et apparaît clairement comme objectif des derniers plans cancers, notamment concernant l’accès aux dépistages des cancers, force est de constater dans un

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rapport récent de l’IGAS que ce sujet n’a pas encore fait l’objet d’une réelle stratégie en France(43).

d. Revue de la littérature concernant les inégalités socio-territoriales de

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