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Importance de la triadine dans le remodelage cardiaque

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Le niveau d’expression de CT1 dans l’IC est controversé. En effet, il peut diminuer (Gergs et al. (2007) ; Valle et al. (2014) ; Jones et al. (1998)) comme augmenter (Fan et al. (2004) ; Kirchhefer et al. (2004)), voire être stable (Sato et al. (1998)).

Les résultats obtenus au cours de ma thèse montrent que chez l’Homme comme la souris le niveau d’expression de CT1 (ARNm et protéine) diminue dans l’HVG et l’IC. Ainsi nous retrouvons dans nos résultats le même changement d’expression-une diminution- de l’expression d’une protéine du RS, comme pour la CSQ2 et SERCA2a (Zarain-Herzberg, Estrada-Aviles, and Fragoso-Medina (2012)). La diminution du niveau d’expression de CT1

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peut être la conséquence d’une augmentation de sa dégradation par l’activation du protéasome (Roux-Buisson et al. (2012)) ou par un défaut de glycosylation (Milstein et al. (2008)). Ce mécanisme peut être envisagé comme une réponse adaptative du cœur face à un stress et la triadine pourrait devenir une cible potentielle pour prévenir le syndrome de l’IC (Scimia, Gumpert, and Koch (2014). Ce point sera discuté plus tard dans la discussion.

Chez l’Homme, deux mutations sur le gène TRDN affectent la stabilité de la protéine, faisant de ces personnes des cas naturels de KO. Ces patients souffrent d’arythmies cardiaques responsables de morts subites, les TVPC (Roux-Buisson et al. (2012)).

Il était donc indispensable de disposer d’un modèle murin KO pour étudier les conséquences de ces mutations dans le cœur et savoir s’il présentait le phénotype TVPC. Pour notre étude, le modèle KO Trd, donné par Dr. Isabelle Marty est utilisé entre 2 à 4 mois. Les souris KO Trd de Pérez utilisées dans l’étude de Chopra sont âgées de 4 à 7 mois et présentent le phénotype CPVT contrairement aux nôtres (Chopra et al. (2009)). Ainsi, peut- être que le phénotype de cet autre modèle KO Trd est apparu au cours du vieillissement et que de notre côté nous n’avons pas attendu assez longtemps pour qu’il se manifeste. Nous avons pu étudier 3 souris KO âgées de 8 mois. Nous n’avons pas pu observer le phénotype CPVT. Mais nous n’avons pas utilisé le même protocole pour observer la survenue d’arythmies sous l’effet des catécholamines (isoprotérénol). Il serait donc intéressant de pouvoir vérifier si le modèle KO du Dr. Isabelle Marty présente les mêmes caractéristiques que dans l’article de Chopra en utilisant des souris plus âgées et également en utilisant l’exercice, une des conditions associées aux morts subites chez les patients souffrants de CPVT, avec l’élévation des catécholamines circulantes.

L’adaptation fonctionnelle du cœur face à une surcharge de travail repose sur l’augmentation de sa masse, l’hypertrophie. La surcharge de pression (TAC) comme l’infusion de catécholamines par MP sont des modèles capables d’entraîner cette adaptation. Les protéines du RS sont impliquées à la fois dans l’homéostasie calcique comme dans le développement de l’hypertrophie avec les deux modèles pathologiques que nous avons utilisés (Zou et al. (2011) ; Jaehnig et al. (2006) ; Mitsuyama et al (2013)).

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Grâce aux données anatomiques, échographiques et cellulaires, nous avons confirmé pour la première fois dans la littérature qu’in vivo la délétion de la CT1 a des effets trophiques dans le cœur et dans deux modèles d’HVG différents.

Les deux modèles pathologiques que nous avons utilisés activent des voies pathologiques hypertrophiques principalement Ca2+-dépendantes, CaN/NFAT et CaMKII (Zarain-Herzberg, Fragoso-Medina, and Estrada-Aviles (2011)). Si les protéines du RS et leur implication dans le développement d’une hypertrophie sont très documentées, les voies hypertrophiques activées qu’elles activent sont peu étudiées et diverses. En effet, si RyR2 active les voies CaN/NFAT et ERK1/2 (Zou et al (2010)), de son côté HRC active les voies MAPK avec la voie de la CaMKII (Park et al. (2013)) tandis que le PLB activerait uniquement la voie CaN (Louch et al. (2012)). On peut voir que les voies hypertrophiques activées par les protéines du RS sont variées et pas uniquement Ca2+-dépendantes comme nous pouvions le supposer au départ. Pour stopper l’hypertrophie développée par les altérations de l’expression de ces protéines du RS, il serait peut-être plus efficace et simple de les cibler plutôt que d’inhiber les voies qu’elles activent. Notre étude n’a pas permis d’identifier les voies hypertrophiques activées par la délétion de la triadine. En effet, les résultats sur les voies hypertrophiques activées par la délétion de la triadine ne sont pas concluants et sont incomplets (GSK-3β, CaN). L’expression de la CaN est la même entre les WT+TAC et KO+TAC. Mais l’expression de la CaN ne reflète pas son activité, responsable de l’hypertrophie (Molkentin et al. (1998)) tout comme l’expression de ses protéines régulatrices comme MCIP-1 (Aramburu et al. (2004) ; Roehrl et al. (2004)). Les effecteurs de la CaN, comme NFATc, sont également impliqués dans son action (Wilkins et al. (2002)). Ce facteur a la particularité d’être régulé avec la CSQ2 par un même facteur de transcription, Egr-1 (Kasneci et al. (2009)). Egr-1 est activé durant l’IC (Saadane et al. (1993)) et provoque l’inhibition du promoteur de la CSQ2 tout en activant NFAT (Kasneci et al. (2009)). La diminution de l’expression de la CSQ2 comme le développement de l’hypertrophie dans notre modèle KO- TAC pourrait être liés à deux facteurs de transcription Egr-1 et NFAT.

Le rapport de Gsk-3β phosphorylée sur Gsk-3β non phosphorylée est le meilleur indicateur pour déterminer l’activité inhibitrice d’hypertrophie de Gsk-3β, il nous reste donc à déterminer ce rapport pour voir si elle se trouve diminuée chez les KO-TAC. Nous n’avons pas non plus regardé toutes les autres voies hypertrophiques que peuvent activer les protéines du RS : ERK1/2 (Zou et al (2010)), CaMKII (Park et al (2012)). Les voies

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hypertrophiques activées dans notre modèle de mini-pompe restent à étudier et aucune voie n’est à privilégier. En effet, aucun projet avec un modèle d’hypertrophie développée par une mini-pompe d’isoprotérénol (Jaehning et al. (2006)) n’a identifié la voie hypertrophique activée par les protéines du RS.

Un autre modèle d’HVG pourrait être envisagé : l’entraînement physique. Avec notre étude nous avons montré que la présence de la triadine prévient l’hypertrophie déclenchée par les catécholamines. Dans ce contexte, la délétion de la triadine pourrait avoir un rôle dans la transition de l’hypertrophie physiologique, provoquée par l’exercice à l’hypertrophie pathologique.

Si nous avons démontré les effets trophiques de la triadine in vivo, il reste à identifier ses effets in vitro. En effet, si nous observons de base et en réponse aux stimuli hypertrophiques une hypertrophie des cardiomyocytes chez les KO, il ne faut pas oublier que ce ne sont pas les seules cellules du cœur et que des signaux paracrines des autres cellules du cœur peuvent influer sur cette hypertrophie (Barth et al. (2000) ; Sadoshima and Izumo (1993)). Pour s’affranchir de ces signaux et identifier que la triadine a bien un rôle dans l’hypertrophie des cardiomyocytes, nous pourrions utiliser des cardiomyocytes de rats nouveau-nés infectés par un adénovirus Trd ou un adénovirus anti-sens Trd en réponse à la PE. L’utilisation de la lignée H9c2 sera plus relevante car elle présente un phénotype adulte tout en étant capable d’être transfectée.

L’expression des gènes fœtaux et marqueurs d’hypertrophie augmente avec le temps et avec la transition vers l’IC (X. M. Li et al. (2009)) tout comme l’accumulation de collagène, de fibrose interstitielle (Sabbah, Sharov, Lesch, and Goldstein (1995)). La souris KO Trd en réponse à la TAC exprime 4 fois plus d’ANF et 2 fois de β-MHC que le modèle WT sous TAC . Son VG est également composé de plus de fibrose interstitielle avec TAC ou MP Iso. Ainsi avec notre étude, nous montrons que la triadine comme d’autres protéines du RS, SERCA2a et la CSQ2 participe à la transition vers l’IC par une augmentation de l’expression des marqueurs d’hypertrophie et la présence d’une fibrose interstitielle plus importante (Takahashi, Allen, and Izumo (1992) ; Linck et al. (2000)). L’animal KO possède de base une raréfaction capillaire qui n’impacte pas sur sa fonction cardiaque. Il y aurait donc des mécanismes de compensation de base mais qui ne seraient plus suffisants sous l’effet de nos

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modèles pathologiques. A ce jour, aucune étude n’avait montré un lien entre une protéine du RS et une raréfaction capillaire. Il conviendrait d’identifier la cause de ce défaut en nombre de capillaires. Une altération de la voie pro-angiogénique du VEGF en est souvent à l’origine (pour revue : T. Oka, Akazawa, Naito, and Komuro (2014)). De plus, il existe une corrélation entre la diminution de l’expression de SERCA2a et du PLB et l’altération de la voie angiogénique VEGF (Huang et al. (2004) ; H. He et al. (2008)). Ainsi, si le lien entre les protéines du RS, le Ca2+ et l’angiogenèse n’est pas évident, le modèle KO Trd pourrait aider à établir ce mécanisme.

Dans notre étude, sous l’effet d’une surcharge de pression (TAC), le cœur de la souris KO Trd va s’hypertrophier pour s’adapter à ses nouvelles contraintes de charge d’après la loi de Laplace. Selon cette loi, la charge en tout point du cœur se rapporte à la valeur suivante : (pression x rayon) (2 x épaisseur de la paroi). Or la dilatation du VG développée par les souris KO en addition de l’hypertrophie ne permet pas de normaliser les contraintes, comme nous l’indiquent les données échocardiographiques et celles obtenues à l’aide des expériences de cathétérisme intraventriculaire gauche. Ainsi la délétion de la triadine conduit à un remodelage cardiaque ne permettant pas le maintien de la fonction cardiaque. Ce remodelage conduit à une dysfonction cardiaque aussi bien en diastole qu’en systole. En comparaison, les souris WT développent une hypertrophie concentrique du VG capable de maintenir leur fonction cardiaque.

La diminution de l’expression de la CSQ2, constatée dans notre étude, peut être un élément délétère dans l’adaptation de le modèle KO Trd du Dr. Isabelle Marty en réponse à la TAC. En effet, par son rôle de sensibilisateur au Ca2+ pour RyR2, son absence pourrait entraîner un défaut du CEC par l’altération des propriétés intrinsèques de RyR2 et impacter sur la fonction cardiaque. Par ailleurs, la triadine et la calséquestrine sont importantes dans l’établissement de l’ultrastructure du RS. Leur absence ou la diminution de leur expression peuvent entraîner une détérioration de l’ultrastructure participant également à la dysfonction cardiaque (Chopra et al. (2009) ; Knollmann et al. (2006)).

Notre étude est incomplète et nécessite d’étudier par exemple d’autres facteurs pouvant participer au défaut d’adaptation du modèle KO Trd du Dr. Isabelle Marty à la pathologie qu’on lui a imposée comme les phosphorylations de RyR2 (Reiken et al. (2003)) et la liaison de RyR2 à FKBP12.6. Cette liaison est absente dans le KO de la triadine au niveau du muscle squelettique (Eltit et al. (2010)).

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Depuis plusieurs années, l’implication de SERCA2a dans le défaut de recaptage de calcium au niveau du RS est établie dans les modèles d’IC (Arai et al. (1996) ; (Yano et al. (2005)). Le maintien de son activité est indispensable premièrement à la relaxation cardiaque par le recaptage du Ca2+ dans le RS mais également à la contraction cardiaque en permettant le maintien d’une quantité de Ca2+ suffisante dans le RS à cet effet. Une approche thérapeutique a été envisagée pour augmenter son expression et sa fonction pour pallier la perte de contractilité associée à l’IC. Des molécules pharmacologiques ont prouvé leurs effets bénéfiques en augmentant la transcription ou l’expression de SERCA2a (Y. L. Sun, Hu, Wang, Hu, and Zhou (2005) ; Kubo, Margulies, Piacentino, Gaughan, and Houser (2001)). L’utilisation d’une thérapie pharmacologique ayant ses limites (effets pléiotropes), l’option de la thérapie génique s’est peu à peu imposée et a démontré son efficacité sur les performances cardiaques par la mise en place d’un essai clinique chez l’Homme : CUPID trial. Ainsi SERCA2a est maintenant considérée comme une cible essentielle dans le traitement de l’IC (Hajjar et al. (2008) ; Jaski et al. (2009)). Cette année, des résultats montrent que la réexpression de la CSQ2 dans un modèle de CPVT a un effet curatif à long terme sur l’ensemble des dysfonctions présentes dans le modèle CPVT (Denegri et al. (2014). Grâce à nos travaux, nous montrons que la réexpression de la triadine par un AAV9 (don du Dr. Isabelle Marty), peut être envisagée comme une nouvelle cible utilisée en thérapie génique pour prévenir le développement de l’IC. Notre étude montre que sa réexpression a des effets préventifs sur l’IC induite par la TAC. Ainsi par les résultats de notre étude et l’implication de la triadine dans les CPVT (Roux-Buisson et al. (2012)), il pourrait être envisagé également d’utiliser le gène de la triadine en thérapie génique dans le cadre d’un essai clinique pour traiter l’IC par l’IM. Il serait intéressant de savoir si la réexpression de la triadine présente les mêmes effets que celle de la CSQ2 sur un modèle de CPVT dans la prévention de la survenue d’arythmies dans notre modèle d’infarctus du myocarde. En outre, la réexpression de la triadine dans le modèle KO Trd du Dr. Isabelle Marty par l’adénovirus est effectuée avant l’imposition de la pathologie. Il serait pertinent d’effectuer cette thérapie génique après l’instauration de la pathologie cardiaque pour voir si cette réexpression a des effets curatifs, comme dans les cas de la CSQ2 et SERCA2a (Byrne et al. (2008) ; Denegri et al. (2014)).

Notre étude réalisée à l’aide de cet AAV9 reste à compléter afin d’étudier si cette réexpression est capable de ralentir le développement des éléments d’un remodelage

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délétère (marqueurs d’hypertrophie, fibrose, raréfaction capillaire,…) et de maintenir la fonction cardiaque. Nous remarquons dans nos résultats que la réexpression de la triadine est capable de restaurer en partie de l’expression de la CSQ2. Dans le cas de la réexpression de la CSQ2, il y a restauration de l’expression de ces protéines partenaires, la triadine et la JNC, ainsi qu’une normalisation de la structure du RSj (Denegri et al. (2014)).

Ces résultats sont encourageants au vu du faible nombre d’animaux utilisés pour cette étude (n = 6) et l’idée d’une thérapie génique par la triadine pour lutter contre l’IC est très envisageable.

Même si le versant in vitro est absent de notre étude, in vivo la présence de la triadine ralentit le processus hypertrophique en réponse à un stress mécanique ou humoral. Comme d’autres protéines du RS, RyR2, CSQ2 et SERCA2a, elle participe à ces étapes de transition dans l’IC (Zou et al (2010) ; Haghighi et al. (2001) ; Linck et al. (2000)). Nos travaux montrent pour la première fois l’implication de la triadine dans le ralentissement de la transition vers l’IC en agissant à la fois sur le remodelage et la dysfonction cardiaque. Pour compléter notre étude sur l’implication de la triadine dans la transition vers l’IC, il conviendrait d’étudier les conséquences de la triadine sur l’état du métabolisme, de l’apoptose et des voies de survie dans nos différents modèles pathologiques (X. M. Li et al. (2009)).

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