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Chapitre 3 : Mise en place d’un modèle comportemental de préférence olfactive

3- Implication et rôle du CI dans l’AOC et la POC

Bien que des afférences olfactives aient été mises en évidence dans le CI, les

études lésionnelles n’ont jamais souligné un rôle du CI dans l’AOC (Kiefer et al.,

1982, 1984 ; Roman et al., 2006). Cependant les lésions permanentes peuvent

entraîner une réorganisation du réseau des structures intervenant dans l’AOC qui

pourrait pallier l’absence du CI. L’approche pharmacologique s’imposait donc pour

caractériser cette implication éventuelle du CI dans les différentes étapes de l’AOC.

Nos résultats ne montrent aucun effet des différents traitements pharmacologiques

destinés à bloquer le CI avant l’acquisition, la consolidation, le rappel récent ou le

rappel ancien de l’AOC. Cela suggère que le CI n’est en aucune manière

indispensable à l’apprentissage de l’AOC. Parallèlement, des études récentes

montrent que la lésion du CI n’a pas d’effet sur la POC (Sakai et Yamamoto, 2001 ;

Touzani et Sclafani, 2007). Grâce à la technique du catFISH, nous révélons au

niveau cellulaire dans le CI, contrairement au NBL, une absence d’augmentation de

convergence SC-SI suite à l’apprentissage de la POC (ces résultats sont toutefois à

confirmer sur un plus grand nombre d’animaux). L’ensemble de ces données indique

donc que le CI n’est pas une structure critique pour les aversions et préférences

olfactives conditionnées.

Les résultats de cette approche interventionnelle contrastent avec une partie de

la littérature basée sur une approche corrélationnelle. Des travaux récents

d’électrophysiologie indiquent ainsi que le CI est activé lors du rappel de l’AOC

(Chapuis et al., soumis). De même, la présentation de l’odeur suite à l’apprentissage

de l’AOPG engendre une augmentation de l’expression des protéines Fos et Egr1 au

sein du CI (Dardou et al., 2006 ; 2007). D’autres structures comme le NBL, les corti

piriforme, frontal médian et orbitofrontal sont également activées lors de la

présentation de l’odeur aversive. En mettant en relation tous ces résultats nos

constatons que le CI est activé par l’odeur suite à un apprentissage olfactif, bien que

cela ne signifie pas qu’il soit impliqué.

Alors que l’inactivation du CI n’a pas d’effet sur l’AOC, elle perturbe un autre

apprentissage olfactif, la TSPA (Fortis-Santiago et al., 2008). Cependant, la TSPA

est basée sur des odeurs orthonasales alors que l’AOC repose également sur des

odeurs rétronasales. Ces apprentissages impliquent des mécanismes différents

(association odeur-odeur pour la TSPA et odeur-malaise pour l’AOC) et comprennent

une dimension sociale déterminante pour la TSPA (Galef et Wigmore, 1983). Ces

différences expliqueraient que ces tâches ne reposent pas sur le même réseau de

structures, impliquant différentiellement le CI (pour revue : Petrulis & Eichenbaum,

2003).

Concernant la POC, des animaux peuvent développer une préférence pour une

flaveur associée à la stimulation électrique du CI (Cubero et Puerto, 2000). Les

auteurs suggèrent que cette stimulation servirait de SI en mimant les effets positifs

d’un nutriment. Néanmoins, cela ne signifie pas que l’intégrité du CI soit nécessaire à

la POC en condition normale (non-stimulée). La stimulation électrique du CI pourrait

activer d’autres structures normalement impliquées dans le traitement du SI comme

le NBL et le NPB (voir Touzani et Sclafani, 2007).

Enfin, en réalisant des expériences sur les effets de l’interaction entre AGC et

AOC, nous avons obtenu des données préliminaires qui indiquent que l’inactivation

du CI perturbe l’AOC lorsque les animaux ont préalablement appris une AGC. Cet

effet est spécifique de l’association goût-malaise puisqu’il ne se vérifie pas si l’AOC

succède à une première AOC ou si les animaux ont expérimenté un goût seul (non

associé au malaise). Ceci suggère que l’association goût-malaise engendre une

plasticité particulière au sein du CI qui intégrerait cette structure au sein du réseau

Même si le CI est une structure recevant des informations olfactives, gustatives et

viscérales, les différentes approches utilisées ici chez des animaux naïfs n’ont pas

permis de révéler la nécessité du CI dans les apprentissages olfactifs alimentaires. Il

reste à chercher si cette plasticité du CI est spécifiquement induite par l’AGC ou

d’autres apprentissages, et si elle ne concerne que l’AOC ou les apprentissages

olfactifs en général.

4- Interactions entre NBL et CI dans les apprentissages olfacto-gustatifs

alimentaires

Nos travaux soulignent que les apprentissages olfactifs et gustatifs alimentaires

impliqueraient différemment le NBL et le CI. Nous montrons au cours de cette thèse

que les apprentissages olfactifs, AOC et POC, sollicitent le NBL mais pas le CI. Ces

résultats corroborent les données lésionnelles obtenus sur l’AOC (Bermudez et al.,

1983 ; 1986 ; Kiefer et al., 1982, 1984 ; Roman et al., 2006) et la POC (Gilbert et al.,

2003 ; Sakai et Yamamoto, 2001 ; Touzani et Sclafani, 2005, 2007). Ils sont

également à rapprocher des données obtenues sur l’AOPG où l’aversion olfactive est

fortement altérée par la lésion ou l’inactivation du NBL mais peu par celle du CI

(Bermudez et al., 1983, 1986 ; Fernandez-Ruiz et al., 1993 ; Ferry et al., 1995 ; Ferry

et Di Scala, 2000 ; Hatfield et al., 1992 ; Hatfield et Gallagher, 1995 ; Inui et al.,

2006 ; Kiefer et al., 1982, 1984 ; Lasiter et al., 1985).

Contrairement à l’AOC et la POC, l’importance relative du NBL et du CI semble

inversée dans les apprentissages gustatifs. Comme nous l’avons vu dans la

première partie de la thèse le CI est indispensable aux différentes étapes de

formation et de rappel de l’AGC. Si l’implication du NBL dans l’AGC reste

controversé (cf. Introduction Tableau 3 ; pour revues : Lamprecht et Dudai, 2000 ;

Reilly et Bornovalova, 2005), elle semble en tout cas moins importante pour l’AGC

que l’AOC. Le blocage du système noradrénergique n’affecte pas l’acquisition de

l’AGC (Miranda et al., 2008) alors qu’il perturbe l’acquisition de l’AOC (Miranda et al.,

2007). De même, l’inhibition de la synthèse protéique au sein du NBL n’a aucun effet

sur l’AGC (Bahar et al., 2003) alors que nous avons mis en évidence qu’elle perturbe

la consolidation de l’AOC. L’implication différentielle du CI et du NBL dans l’AGC est

également supportée par les données concernant l’AOPG. Celles-ci montrent que la

lésion du CI mais pas du NBL perturbe de façon importante l’aversion au goût

(Bermudez et al., 1983, 1986 ; Fernandez-Ruiz et al., 1993 ; Ferry et al., 1995 ; Ferry

et Di Scala, 2000 ; Hatfield et al., 1992 ; Hatfield et Gallagher, 1995 ; Inui et al.,

2006 ; Kiefer et al., 1982, 1984 ; Lasiter et al., 1985). Enfin, des lésions de

l’amygdale, englobant NBL et NC, ne perturbent pas les préférences gustatives

conditionnées (alors qu’elle affecte largement la POC ; Touzani et Sclafani, 2005).

L’ensemble de ces résultats suggèrent une double dissociation : (1) un rôle

essentiel du NBL mais pas du CI dans les apprentissages olfactifs alimentaires et (2)

un rôle prépondérant du CI par rapport au NBL dans les apprentissages gustatifs.

Néanmoins le NBL et le CI sont liés par d’importantes connexions anatomiques

(Krettek et Price, 1977 ; Saper, 1982 ; Dunn et Everitt, 1988 ; Shi et Cassell, 1998) et

fonctionnelles (Escobar et al., 1998, 2002 ; Ferreira et al., 2005 ; Jones et al., 1999 ;

Kodama et al., 2001 ; Miranda et McGaugh, 2004 ; Yamamoto et al., 1984). Dans les

conditions naturelles l’aliment est caractérisé par l’ensemble de ses composantes

chimiosensorielles, olfactive et gustative. Si le NBL et le CI traitent préférentiellement

l’une ou l’autre de ces composantes, les interactions NBL-CI pourraient permettre

leur intégration et leur mémorisation sous la forme d’une flaveur.

5- Importance d’autres structures dans les apprentissages olfactifs