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Depuis les premières études de conditionnements alimentaires, l’AOC est

longtemps apparue difficile à mettre en place contrairement à l’AGC (Figure 4). Dans

la grande majorité de ces études, l’AOC reposait sur l’association d’une odeur

présentée autour de la solution à boire (eau sans goût) et d’un malaise gastrique

(Palmerino et al., 1980 ; Rusiniak et al., 1979). Dans ces conditions il était possible

d’induire une aversion pour l’odeur seulement si l’IIS se trouvait suffisamment court

(inférieur à quelques minutes). Pour ces raisons ce modèle a été moins étudié, ou

jugé moins pertinent que l’AGC pour investiguer les bases comportementales et

neurobiologiques de la mémoire.

Ces idées survécurent jusqu’au milieu des années 90 lorsque Slotnick et

collaborateurs développèrent une AOC en tout point comparable à une AGC (Figure

5). Avec une seule association entre odeur et malaise gastrique et un IIS dépassant

largement l’échelle de la minute, il réussit à provoquer une AOC puissante et durable

chez des rats (Slotnick et al., 1997). La différence majeure entre son paradigme

expérimental et les précédents résidait dans le fait qu’il mélangeait l’odeur à l’eau

(0.1% acétate d’isoamyl; odeur de banane) lors de l’acquisition et du rappel du

conditionnement provoquant ainsi une « ingestion » de l’odeur par les animaux.

Utilisant des animaux bulbectomisés (c'est-à-dire sans bulbe olfactif et donc sans

odorat), ils contrôlèrent que la solution était reconnue sur ses propriétés olfactives et

non gustatives.

Si ces travaux indiquaient que l’ingestion de l’odeur était primordiale pour l’AOC,

ils ne démontraient pas clairement le mécanisme et en particulier l’importance des

voies olfactives stimulées. Utilisant un protocole et une cage de conditionnement

différents de ceux utilisés classiquement, de récents travaux ont permis de le faire

(Chapuis et al., 2007). Les animaux sont d’abord habitués à passer le museau dans

un port à odeur (n’émettant aucune odeur) afin d’avoir accès à une pipette d’eau

(Figure 6A). Le jour du conditionnement les rats reçoivent dans le port l’odeur de

banane (odeur distale) et dans la pipette soit de l’eau normale soit de l’eau odorisée

à la banane (0.01% acétate d’isoamyl; odeur proximale). Certains animaux sont

donc conditionnés avec l’odeur distale seulement, d’autres avec l’odeur en distale et

proximale. Alors que les animaux conditionnés avec l’odeur distale développe une

AOC seulement si le LiCl est injecté dans les 5 minutes qui suivent la session (et pas

une heure plus tard), ceux conditionnés avec l’odeur distale et proximale supporte un

IIS pouvant aller jusqu’à deux heures (Figure 6B). Il est intéressant de noter que lors

des tests de rappel, le mode de présentation de l’odeur n’a pas d’importance : les

animaux conditionnés avec une odeur distale/proximale ont tous une AOC

importante qu’ils soient testés de façon distale (seule) ou distale/proximale. L’AOC

reste aussi 50 jours après le conditionnement (Chapuis et al., 2007). Ces résultats

confirment donc que l’ingestion de l’odeur via une solution odorisée est déterminante

pour induire une AOC efficace et durable. Ils suggèrent que l’activation des voies

olfactives orthonasale et rétronasale est nécessaire pour un conditionnement optimal

et que l’activation de la voie orthonasale est suffisante pour le rappel. Ces

conditionnements sont en partie instrumentaux. Il serait donc intéressant d’évaluer si

ces résultats sont généralisables dans des conditions expérimentales plus simples,

c'est-à-dire dans la cage d’élevage et avec un accès facile à la boisson. Cela

permettrait alors de comparer les performances d’animaux en AOC et en AGC et de

cette manière les bases neurobiologiques qui sous-tendent les deux

conditionnements.

Figure 6. (A) Schéma présentant le protocole expérimental utilisé par Chapuis et al. pour induire l’AOC suivant le mode de présentation de l’odeur (distal ou distal/proximal). La cage est équipée d’un port olfactif associé à une cellule photovoltaïque et d’un tube mobile délivrant la boisson. (a.) Les rats sont d’abord habitués à fractionner leur consommation d’eau et déclencher l’introduction du tube en introduisant la tête dans le port olfactif ce qui interrompt le faisceau optique. Après 4s, le tube apparaît et se retire au bout de 26s. Le rat doit alors recommencer s’il veut continuer à boire. Une fois la consommation d’eau stabilisée, l’AOC peut être induite. (b.) Durant les sessions avec les stimulations olfactives, l’interruption du faisceau provoque dans le port la libération d’un flux d’air odorisé (acétate d’isoamyl). 4s plus tard, le tube apparaît contenant soit de l’eau (condition distale, D), soit de l’eau odorisée avec l’acétate d’isoamyl (0.01%) (condition distale/proximale, DP). Plusieurs sessions sont réalisées. Dans le coin gauche de la figure sont représentés les différents événements qui se déroulent durant une session.

(B) L’intensité de l’AOC dépend du mode de présentation de l’odeur et du délai inter-stimuli. Consommation moyenne de solution odorisée (condition distale/proximale [DP]) ou d’eau (condition distale [D]) est exprimée en pourcentage de la consommation basale d’eau. Les m êmes conditions ont été utilisées pour les sessions d’acquisition et de rappel de l’AOC. Une astérisque symbolise une différence significative du groupe contrôle (NaCl ; 5min ; p<0.01). Une étoile symbolise une différence significative entre deux groupes ( p<0.01 ; d’après Chapuis et al., 2007).

A.

B.

Figure 6. (A) Schéma présentant le protocole expérimental utilisé par Chapuis et al. pour induire l’AOC suivant le mode de présentation de l’odeur (distal ou distal/proximal). La cage est équipée d’un port olfactif associé à une cellule photovoltaïque et d’un tube mobile délivrant la boisson. (a.) Les rats sont d’abord habitués à fractionner leur consommation d’eau et déclencher l’introduction du tube en introduisant la tête dans le port olfactif ce qui interrompt le faisceau optique. Après 4s, le tube apparaît et se retire au bout de 26s. Le rat doit alors recommencer s’il veut continuer à boire. Une fois la consommation d’eau stabilisée, l’AOC peut être induite. (b.) Durant les sessions avec les stimulations olfactives, l’interruption du faisceau provoque dans le port la libération d’un flux d’air odorisé (acétate d’isoamyl). 4s plus tard, le tube apparaît contenant soit de l’eau (condition distale, D), soit de l’eau odorisée avec l’acétate d’isoamyl (0.01%) (condition distale/proximale, DP). Plusieurs sessions sont réalisées. Dans le coin gauche de la figure sont représentés les différents événements qui se déroulent durant une session.

(B) L’intensité de l’AOC dépend du mode de présentation de l’odeur et du délai inter-stimuli. Consommation moyenne de solution odorisée (condition distale/proximale [DP]) ou d’eau (condition distale [D]) est exprimée en pourcentage de la consommation basale d’eau. Les m êmes conditions ont été utilisées pour les sessions d’acquisition et de rappel de l’AOC. Une astérisque symbolise une différence significative du groupe contrôle (NaCl ; 5min ; p<0.01). Une étoile symbolise une différence significative entre deux groupes ( p<0.01 ; d’après Chapuis et al., 2007).

A.

Pour finir nous pouvons mentionner qu’un autre type d’AOC existe, basée sur

l’association d’une odeur avec un SI oral plutôt que viscéral. Une odeur initialement

neutre, comme la vanille, la banane ou l’amande (mélangée à l’eau de boisson), peut

devenir aversive si elle a été associée plusieurs fois avec le goût amer de la quinine

(Fanselow et Birk, 1982 ; Sakai et Yamamoto, 2001). Il en résulte que les animaux

diminuent leur consommation de la solution odorisée lorsqu’elle leur est présentée

de nouveau sans le goût amer. Néanmoins très peu de travaux se sont intéressés à

ce modèle.