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Initialement, lorsque les chercheurs ont étudié la flaveur du lait, ce fût pour identifier les composés chimiques responsables de flaveurs indésirables (‘oxydés’ ou ‘rances’) pouvant parfois être présentes (Marsili, 2003). La provenance de plusieurs composés volatils responsables de flaveurs indésirables a d’ailleurs été élucidée. Des défauts de qualité peuvent se former suite à l’exposition du lait à de la lumière provenant des fluorescents dans les supermarchés, et ce, même s’il se trouve à l’intérieur de bouteilles de polyéthylène de densité élevée (Marsili, 2003). Le lait est alors plus vulnérable à la formation de flaveurs indésirables que l’on dit ‘induites par la lumière’ (Marsili, 2003). Ce processus serait divisé en deux étapes. En premier lieu, la dégradation d’acides aminés soufrés provenant des protéines du lactosérum donnerait un goût de brûlé au lait dans les premiers jours (Marsili, 2003). Après deux jours passés sur les tablettes, un goût de métal ou de carton se développerait et resterait dans le lait (Marsili, 2003). Ce goût serait associé à la formation d’aldéhydes (surtout le pentanal et l’hexanal), d’alcools, d’hydrocarbures et de cétones (1-hexen-3- one et 1-nonen-3-one) lors de réactions d’oxydation des lipides (Marsili, 2003). Le matériel d’emballage peut aussi être directement responsable de la formation de flaveurs indésirables dans le lait. Par ailleurs, comme le lait est un excellent milieu de croissance pour les microorganismes, certaines flaveurs indésirables peuvent aussi apparaître suite à une contamination post- pasteurisation par des bactéries psychotropes (Marsili, 2003).

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La flaveur du lait peut donc être influencée par l’alimentation ou le métabolisme de la vache, ainsi que par des microorganismes et leurs enzymes durant l’entreposage. Or, la flaveur du lait peut également être modifiée lors des traitements thermiques (Calvo et de la Hoz, 1992). L’intensité de la flaveur ainsi produite dépend de l’intensité du traitement appliqué, incluant la température atteinte, la durée du traitement et la méthode de chauffage.

Une étude récente indique que la pasteurisation peut modifier la flaveur du lait en lui donnant un goût de ‘cuit’ ou de ‘chauffé’, surtout lorsque le produit vient tout juste de subir le traitement (Alvarez, 2009). L’intensité de cette flaveur indésirable diminuerait durant l’entreposage (Alvarez, 2009).

L’étude de Bendall (2001), dans laquelle on a identifié une soixantaine de composés volatils, a été réalisée sur du lait ayant été préalablement pasteurisé. Au contraire, Hettinga et al. (2007) ont analysé du lait n’ayant subi aucun traitement. Des laits crus de vaches ayant reçu différentes rations à base d’ensilage (55 %) et de concentrés (45 %) et sans défaut de qualité ont été analysés et on a retrouvé systématiquement sept composés volatils (Hettinga et al., 2007).

Les composés aromatiques formés lors de traitements thermiques peuvent provenir des protéines du lait (Calvo et de la Hoz, 1992). Dans l’étude de Calvo et de la Hoz (1992), les auteurs expliquent que les composés aromatiques peuvent être formés à partir du relâchement de composés sulfhydriles durant la dénaturation des protéines du lactosérum ou des protéines contenues dans la membrane des globules de gras. C’est ce qui permettrait de former différents composés soufrés. Toutefois, les auteurs mentionnent que la concentration en certains composés soufrés se verrait diminuer lorsque l’intensité des traitements thermiques appliqués serait trop grande. Le lactose, le glucose et le galactose peuvent aussi être précurseurs de composés aromatiques durant les traitements thermiques, entre autres par le biais d’interactions avec des acides aminés et autres composés azotés lors de la réaction de Maillard. L’application de traitements thermiques peut également conduire à la formation de composés à partir des lipides. Par exemple, dans les laits chauffés, des

méthyl-cétones, des lactones et des aldéhydes sont formés à partir du gras du lait (Calvo et de la Hoz, 1992).

Outre le procédé utilisé, la température à laquelle est réalisé le traitement peut aussi avoir un impact. Gandy et al. (2008) ont réalisé une étude dans le but de cibler les effets de différentes températures de pasteurisation sur les caractéristiques sensorielles, les composés volatils et la durée de vie du lait. Ils ont utilisé du lait standardisé à 2 % et pasteurisé à 77, 79, 82 et 85 ºC. Une analyse en composante principale a permis d’établir des liens entre la présence de certains composés volatils et la température de chauffage (figure 1). On a aussi analysé l’effet des jours passés après la pasteurisation sur les composés volatils présents dans le lait.

Les résultats indiquent que 37,5 % de la variation est expliquée par la composante 1 (horizontale) alors que 18,2 % de la variation est expliquée par la composante 2 (verticale). Le jour de la pasteurisation, soit le jour 0 (d0 dans la figure), le traitement à 77°C (77d0) était hautement corrélé avec la présence d’hydroxylamine, de phénol et d’acide butanoïque dans le lait alors que sept jours après le traitement, il était davantage relié à celle du limonène, de l’heptanol et du nonane (Gandy et al., 2008). D’autres molécules étaient associées aux autres traitements, mais l’élément principal qui ressort de cette analyse est que les échantillons de lait peuvent être facilement différenciés, à partir de leurs composés volatils, surtout aux jours 0 et 7 (Gandy et al., 2008). Beaucoup moins de composés volatils étaient présents dans le lait 10 et 13 jours après la pasteurisation. Cela implique que les composés volatils qui se développent après les traitements de pasteurisation se dégradent par la suite.

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Figure 2.1. Analyse en composantes principales des composés volatils retrouvés dans du lait pasteurisé à différentes températures (77, 79, 82 et 85°C) et analysés aux jours 0, 7, 10 et 13 après la pasteurisation (Source : Gandy et al., 2008).

Dans des laits ayant subi un traitement thermique, les composés soufrés tels que le sulfure d’hydrogène, le méthanethiol, le disulfure de carbone, le sulfure de diméthyle, le disulfure de diméthyle et le trisulfure de diméthyle seraient libérés des groupes sulfhydriles des protéines du lactosérum, principalement de la β-lactoglobuline, et seraient responsables de la flaveur ‘cuite’ (Simon et Hansen, 2001). Pourtant, dans l’étude de Pereda (2007) où on a analysé des laits ayant subi une homogénéisation à ultra-haute pression ou une pasteurisation à haute température, on a seulement identifié le sulfure de diméthyle. Cela pourrait être dû à la méthode d’extraction utilisée, la micro-extraction en phase solide (SPME), qui ne serait pas assez sensible pour permettre l’identification de composés soufrés à de très faibles concentrations (Pereda, 2007). De récents travaux, réalisés par Havemose et al. (2007), ont montré que la SPME serait une méthode appropriée pour étudier les modifications d’oxydation dans lait, mais qu’elle ne serait pas assez sensible pour détecter des composés présents à faible concentration tels que les composés soufrés. Nous y reviendrons dans la section sur les techniques d’analyse.

Il est également possible que d’autres procédés de transformation aient un impact sur le profil des composés volatils du lait. En effet, après une homogénéisation sans pasteurisation, les lipases naturelles du lait causent une lipolyse dans le lait cru et libèrent ainsi des acides gras libres (Hettinga et al., 2007). Ces derniers vont ensuite former des aldéhydes et des cétones (Hettinga et al., 2007).

2.5. Impact des méthodes d’analyses sur les composés volatils retrouvés dans le