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Impacts systématiques de la mutation ptpn6 Ala457Thr

Chapitre 4 : Discussion

4.3 Impacts systématiques de la mutation ptpn6 Ala457Thr

SHP-1 influence la différenciation des macrophages à partir de progéniteurs de la moelle osseuse

Les impacts potentiels sur les progéniteurs des macrophages ont été investigués chez les souris mutées étant donné que SHP-1 est impliquée dans la régulation de la différenciation et la prolifération de plusieurs lignées cellulaires. Une étude a montré l’importance de SHP-1 au niveau du développement de plusieurs lignées hématopoïétiques. En exprimant une forme inactive de SHP-1 dans des cellules embryonnaires à différents temps, ils ont montré une augmentation des progéniteurs des macrophages (Paling & Welham, 2005). L’hypothèse que la mutation ptpn6Ala457Thr affecte les progéniteurs des macrophages a donc été

explorée. Des macrophages ont été dérivés à partir des cellules de la moelle osseuse et ont été stimulés avec divers agonistes des TLR.

Les résultats démontrent que, même en l’absence de stimulation, les macrophages dérivés de la moelle osseuse des souris ptpn6Ala457Thr libèrent plus de

médiateurs inflammatoires, ce qui témoigne de l’importance de SHP-1 dans la différenciation de ce type cellulaire. En effet, il est bien documenté que les macrophages des souris « motheaten » sont hyperréactifs (Abram & Lowell, 2017). De plus, SHP-1 est important dans la régulation de la réponse des macrophages dérivés de la moelle osseuse à des agonistes des TLR. Les macrophages dérivés

de la moelle osseuse de souris ptpn6Ala457Thr sécrètent plus de TNF-a et d’IL-6 en

réponse à divers agonistes. Plusieurs études ont montré des résultats similaires dans d’autres modèles murins de mutation de SHP-1. Rego et ses collaborateurs ont utilisé un modèle de différenciation des macrophages avec du M-CSF chez des souris « motheaten ». Ils ont montré une augmentation des niveaux de TNF-a, mais une diminution des niveaux d’IL-6 suite à une stimulation au LPS (Rego et al., 2011; Zhou et al., 2010). Les résultats obtenus suite à cette étude divergent de ceux montrés dans le modèle de mutation ptpn6Ala457Thr notamment ceux en lien avec les

niveaux d’IL-6. Zhou et ses collaborateurs ont plutôt étudié les macrophages dérivés avec du M-CSF de la moelle osseuse de souris « motheaten viable » (Zhou et al., 2010). Ils n’ont à l’inverse observé aucune différence des niveaux du TNF-a, mais une augmentation des niveaux d’IL-12 suite à une stimulation au LPS. Ces différences peuvent être expliquées par la méthode de différenciation des macrophages. Le modèle de différenciation utilisée dans ce travail diffère de ceux retrouvés dans la littérature, notamment par la présence du GM-CSF, de la rosiglitazone et du surfactant pulmonaire en plus du M-CSF. La différence dans les types de modèles murins de mutation de SHP-1 influence également les résultats. Finalement, le dosage d’autres médiateurs inflammatoires comme l’IL-12 et de médiateurs anti-inflammatoires comme l’IL-10 permettrait de mieux caractériser les effets de la mutation ptpn6Ala457Thr sur les progéniteurs des macrophages.

Chez les souris « motheaten » et ptpn6spin, les phénotypes inflammatoires

incluant l’inflammation des pattes et l’infiltration de neutrophiles au poumon sont conférés par les progéniteurs de la moelle (Croker et al., 2008; Koo, Rosen, Sirotina, Ma, & Shultz, 1993). Ainsi, des expériences de transfert de moelle osseuse permettraient de déterminer le rôle des progéniteurs hématopoïétiques dans ce nouveau modèle de mutation de SHP-1. En somme, la mutation ptpn6Ala457Thr cause

une exacerbation de la réponse des macrophages dérivés de la moelle osseuse à divers stimulus. Ces résultats indiquent une altération possible des progéniteurs de

La mutation ptpn6Ala457Thr affecte l’immunité adaptative

Suite à l’observation d’amas cellulaires dans les poumons de souris mutées qui ressemblent à des TLT, l’hypothèse selon laquelle la mutation ptpn6Ala457Thr

pourrait affecter les fonctions et le développement des lymphocytes a été posée. Ainsi, l’immunisation des souris ptpn6Ala457Thr a été réalisée afin d’étudier davantage

les effets de SHP-1 sur les fonctions des lymphocytes B.

Les résultats obtenus témoignent d’une altération de la réponse immune à un antigène, principalement dans la production d’IgG1. Ces données montrent que la réponse immune nécessitant seulement les lymphocytes B est altérée, ce qui pourrait indiquer une implication de SHP-1 au niveau des lymphocytes B. D’ailleurs, SHP-1 est important dans le développement des populations de lymphocytes B et dans leur fonction de produire des anticorps en réponse à un antigène (Pao et al., 2007). Le même modèle d’immunisation au NP-Ficoll a été utilisé par cette étude. Pao et ses collaborateurs ont utilisé un modèle de délétion spécifique de SHP-1 dans les lymphocytes B (ptpn6f/f ; CD19-cre), ce qui diffère du modèle ptpn6Ala457Thr.

Le modèle murin de mutation ptpn6Ala457Thr est ubiquitaire et ne cause pas une

délétion totale de SHP-1, mais une diminution partielle de l’activité de la phosphatase chez l’humain (Bosse et al., 2019). Toutefois, la diminution de l’activité de SHP-1 dans le modèle murin demeure à valider. Cette différence pourrait expliquer que le phénotype observé chez les ptpn6f/f ; CD19-cre soit plus sévère que

celui observé chez les souris ptpn6Ala457Thr. En effet, chez les souris ptpn6f/f ; CD19-

cre, une absence de production d’IgG1 et d’IgG3 est observée en plus d’une diminution des IgM suite à l’administration du NP-Ficoll. Par ailleurs, dans un modèle murin de délétion spécifique de SHP-1 dans les lymphocytes B activés (ptpn6f/f AicdaCre/+), la réponse mémoire à une immunisation T dépendante avec l’antigène

NP-CGG est altérée. Les souris ptpn6f/f AicdaCre/+ ont une diminution de la

production d’IgG1 comparativement aux souris sauvages suite à l’immunisation. SHP-1 semble donc être impliqué dans la régulation de la réponse mémoire à un antigène (Y. F. Li et al., 2014). Il serait donc pertinent d’également étudier la réponse

immune à un antigène T dépendant afin de documenter si ce phénotype de déficit en production d’anticorps est seulement observé en contexte d’immunisation T indépendante.

Cette preuve de concept ouvre la porte à l’étude plus approfondie des impacts de la mutation ptpn6Ala457Thr sur les lymphocytes B et les maladies qui leur sont

associées. D’ailleurs, des phénotypes d’immunodéficience et d’auto-immunité ont déjà été documentés chez les souris « motheaten », notamment par une diminution du nombre de progéniteurs de lymphocytes B dans la moelle osseuse et par l’altération de l’organisation des tissus lymphoïdes (Shultz & Green, 1976; Shultz, Rajan, & Greiner, 1997). Un lien possible entre la présence d’immunodéficience et cette mutation est donc envisageable. L’immunodéficience commune variable est d’ailleurs une maladie caractérisée par un déficit en production d’anticorps malgré la présence normale des lymphocytes B (Park & Levinson, 2010). Cette maladie peut être causée par une altération de la différenciation des lymphocytes B. Une caractéristique de cette maladie est la présence de lésions granulomateuses lymphocytaires (GLILD) dans 10 à 20 % des patients atteints de cette maladie hétérogène (Salzer, Warnatz, & Peter, 2012). Ces lésions ont des phénotypes similaires à ce que nous avons observé dans les poumons des souris âgés de 9 mois. Ces hypothèses demeurent toutefois à valider.

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