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Dans le cas de l’impact sur une surface froide, nous avons vu qu’il se développe une couche limite visqueuse à l’interface liquide-solide. Cette couche limite a une épaisseur de l’ordre de

νt qui correspond à la zone dans laquelle le liquide est stagnant. En

dehors de la couche limite, on retrouve un écoulement inertiel car l’influence de la paroi solide n’a pas eu le temps de se propager jusque là.

Eggers et al. (Eggers et al. [2010]) ont adapté leur modélisation du bourrelet dy-namique pour prendre en compte les effets de friction visqueuse. La différence entre le cas visqueux et le cas purement inertiel (se rapprochant de la situation de caléfaction) est incorporée dans la force de poussée. La différence est que l’écoulement inertiel n’est plus convecté sur toute l’épaisseur du film h(rm, t) mais uniquement sur la partie en

dehors de la couche limite M ax(0, h(rm, t)− aνt), où a est un scalaire ajustable.

Cependant, la figure 3.3 page 70 qui montre des différences surprenantes à temps courts entre la caléfaction et le cas froid suggère que la description est plus complexe, ne serait-ce qu’avec un changement de conditions initiales, mais aussi par la prise en compte d’efforts de friction entre le bourrelet et le substrat solide ainsi que la dissipation au niveau de la ligne triple mobile.

Nous avons donc choisi de ne pas modéliser le bourrelet dynamique comme nous avons pu le faire dans le cas des impacts en caléfaction. Nous nous sommes cependant intéressés aux conséquences qu’impliquent les mesures locales d’épaisseur et de vitesse que nous avons effectuées auparavant.

3.3.1 Temps caractéristiques

Au chapitre 2, nous avons vu que les mesures locales d’épaisseur faisaient apparaître un terme inertiel hinertiel= (t+1)3.192 déjà appréhendé lors des mesures locales en caléfac-tion, et un terme additionnel s’exprimant sous forme adimensionné hadd = δ

t∗+1

Re . Cette forme d’épaisseur permet de prévoir que les effets visqueux deviendront prépon-dérants dès lors que hinertiel hadd.

Cette considération nous a permis de construire un temps caractéristique visco-inertiel tel que t + ατ ∼ τRe15.

Nous avons vu au chapitre précédent qu’il était difficile de mesurer précisément le scalaire α. Afin de s’affranchir de cette valeur, nous avons défini le temps caractéristique visqueux, noté tv, comme le temps nécessaire à la goutte pour qu’elle passe de 75% à 90% de son étalement maximal. La différence entre ces deux instants étant attendue

10

2

10

3

10

4

10

0.1

10

0.2

10

0.3

R

e

t

* v

Figure 3.9 – Temps visqueux caractéristique, adimensionné par τ , en fonction du nombre de Reynolds. La courbe en rouge satisfait l’équation tv = 0.495Re15.

comme proportionnelle à τ Re15. Le seuil particulier de 75% a été choisi du fait que la prise de vu par le dessus empêche de mesurer correctement des extensions radiales de goutte plus petites que leur rayon R.

Ce temps, adimensionné par le temps caractéristique τ , est représenté figure 3.9 en fonction du nombre de Reynolds. On constate un bon accord entre les prévisions provenant des mesures locales et le temps visqueux mesuré, ce qui a également été reporté par Lagubeau et al. (Lagubeau et al. [2012]).

3.3.2 Épaisseur limite

Comme déjà évoqué dans le chapitre 2, nous avons vu que l’épaisseur finale atteinte par le film liquide était de l’ordre de hf ∼ Re 25. Cette prédiction est en bon accord avec nos résultats expérimentaux (cf. figure 2.23), ainsi que ceux de Lagubeau et al. (Lagubeau et al. [2012]).

3.3.3 Étalement maximal

A partir des données concernant l’épaisseur maximale, si on considère la conser-vation du volume de la goutte, ce qui revient à négliger le volume du bourrelet, on s’attend à avoir :

10

1

10

2

10

3

10

4

10

0.1

10

0.4

10

0.7

R

e

R

max *

Figure 3.10 – Extension maximale adimensionnée Rmax, en fonction du nombre de Reynolds pour des impacts froids. La courbe en rouge satisfait l’équation Rmax = 0.87Re15. Les impacts ont été réalisés avec différents liquides : : éthanol,  : isopropa-nol,  : mélange isopropanol-glycérol à 15%, : mélange isopropanol-glycérol à 30%,

+ : mélange isopropanol-glycérol à 45%. avec hf ∼ RR25

e . D’où :

Rmax ∼ RRe15. (3.15) Cette prédiction est en bon accord avec les données expérimentales pour des nombres de Reynolds compris entre 102 et 104 comme le montre la figure 3.10. Toutefois, à plus bas nombres de Reynold, le régime asymptotique Rmax∼ RRe15, n’est pas atteint. Les plus bas nombre de Reynolds atteints, de l’ordre de 35, ont un temps visqueux adimensionné de l’ordre de 3515 = 2.0 (voire plus court si l’on considère le pré-facteur numérique). Ce temps est donc du même ordre de grandeur que le temps d’aplatissement, égal à 2τ . On comprend donc qu’une description de l’impact par une phase aplatissement suivie par une phase d’étalement est chronologiquement impossible, puisque que la phase d’étalement se termine avant la phase d’aplatissement.

Cette considération permet donc de créer un critère séparant deux comportements, dans le cas d’impacts froids. Un premier comportement dans lequel l’aplatissement ayant une durée de l’ordre 2τ est suivi d’un étalement freiné par viscosité durant une durée de l’ordre de τ Re15. Le deuxième comportement se retrouve quant à lui à bas nombre de Reynolds, où la dissipation visqueuse est suffisamment forte pour que toute la dissipation ait lieu durant la phase d’aplatissement.

La frontière entre ces deux domaines est donnée par un nombre de Reynolds cri-tique tel que Re,c15 ∼ 2, soit Re,c ∼ 32. Pour des nombres de Reynolds plus petits que Re,c, on est quasiment dans une dynamique de goutte posée, pour laquelle une fois l’aplatissement terminé, toute l’énergie cinétique de la goutte est dissipée, et la goutte s’étale de façon lente sous l’effet des contraintes capillaires dues à sa courbure (Tanner [1979]), ou des effets gravitaires (Huppert [1982]).

3.3.4 Conclusion

Même si nous n’avons pas poussé la description dynamique du bourrelet comme dans le cas Leidenfrost, les éléments locaux permettent de retrouver des éléments glo-baux tels que l’étalement maximal ou le temps visqueux d’étalement, aux travers de comportements d’échelle, en cohérence avec des études récentes.

Ces éléments nous ont également permis de donner un critère entre un comporte-ment d’étalecomporte-ment de la goutte, et un comportecomporte-ment de dynamique "lente" pour lequel toute la dissipation a lieu durant la phase d’aplatissement. Ce dernier comportement a lieu en dessous d’un nombre de Reynolds critique de l’ordre de Re,c = 32