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4.2 Impacts sur surfaces texturées périodiques

4.2.5 Coefficients de restitution

Un autre paramètre qui caractérise la morphologie de l’impact sur une surface solide est l’existence ou non de rebond sur cette surface. Nous avons donc cherché à déterminer le coefficient de restitution quand il y a rebond et la vitesse seuil à partir de laquelle il y a rebond.

Puisque l’énergie dissipée par friction visqueuse est très faible pour des impacts en caléfaction ou sur des surfaces super-hydrophobes texturées lors de l’impact, l’énergie cinétique est convertie en énergie de surface, ce qui correspond à l’étalement, suite à quoi la goutte se rétracte jusqu’à rebondir (Richard et Quéré [2000]). Une manière de sonder l’énergie "perdue" par friction visqueuse lors de l’impact serait donc de mesurer l’énergie restituée lors du rebond de la goutte. Cette énergie est repartie suivant les modes vibrationnels de la goutte, et d’autre part en énergie cinétique de translation, qu’il est facile de mesurer par analyse d’images.

Les rebonds d’un objet sur une surface sont en général caractérisés par un coefficient de rebond, noté r, défini comme :

r = Uaprès

U , (4.27)

où Uaprès représente la vitesse de remontée de la goutte juste après son rebond et U la vitesse d’impact. Dans le cas de chute libre (valable pour jusqu’à des hauteurs de l’ordre de 60 cm pour des gouttes de rayons millimétriques d’après la figure 2.2 page 37), ce coefficient de restitution peut aussi être mesuré comme :

r =



Hrebond

H (4.28)

où Hrebond est la hauteur maximale de remontée de la goutte après rebond, et H la hauteur initiale de chute. Nous avons mesuré ces coefficients de restitution pour des impacts sur les différentes surfaces texturées super-hydrophobes, dans le cas où le

re-Figure4.23 – (a) Photographies d’une goutte d’eau de rayon initial R = 1.1 mm et de hauteur de chute H = 1 cm, rebondissant sur une surface texturée super-hydrophobe multi-échelles. (b) Coefficients de restitution en fonction du nombre de Weber. (c) Coefficients de restitution en fonction du nombre de Weber, échelles logarithmiques.

bond est total, c’est-à-dire en l’absence de transition de mouillage (pour des nombres de Weber plus petits que 10).

Les figures 4.23 (b) et (c) montrent que sur les piliers micro-échelles, le coefficient de rebond dépend de la fraction solide φS. Dans le cas de surfaces nano-échelles ou multi-échelles, le coefficient de restitution est toujours supérieur à celui existant dans le cas d’impacts sur surfaces micro-échelles, pour lesquelles le coefficient de restitution décroit avec la fraction solide. Pour les surfaces nano-échelles et multi-échelles, nous n’avons pas observé de différence discernable entre les coefficients de restitution.

Ces observations se comprennent encore une fois en considérant la dissipation vis-queuse, qui augmente quand la friction entre le solide et le liquide augmente, et donc quand la fraction solide augmente. Pour les impacts en caléfaction sur les surfaces micro-échelles, le coefficient de restitution est quasi identique à celui mesuré sur les surfaces nano-échelles et multi-échelles, étant donné que le liquide n’est pas en contact avec le solide.

          

Figure 4.24 – Comportement d’une goutte ( : rebond ou  : adhésion) impactant une surface texturée super-hydrophobe micro-échelle, en fonction du nombre de Weber et de la fraction solide φS. — : 4(cos(θr)− cos(θa))

Pour des nombres de Weber plus petit que environ 1, l’énergie cinétique de la goutte n’est pas suffisante pour contre-balancer l’énergie d’adhésion (Richard et Quéré [2000], Biance et al. [2006], Bartolo et al. [2006], Rioboo et al. [2008]), et aucun rebond n’est alors observé (le coefficient de restitution est alors nul). Cette énergie d’adhésion est due à l’hystérésis de l’angle de contact, et vaut :

Eadhesion = γS(cos(θr)− cos(θa)) (4.29) où S est la surface liquide en contact avec le solide, θa et θr respectivement les angles de contact d’avancée et de reculée. Étant donnés les nombres de Weber très faibles à la transition adhésion/rebond (plus petits que 2), on peut faire l’approximation que S est simplement de l’ordre de R2. On s’attend à ce qu’il y ait rebond à partir du moment où l’énergie cinétique d’impact devient supérieure à l’énergie d’adhésion Eadhesion, ce qui fait apparaître un nombre de Weber critique We,rebond,crit tel que :

We,rebond,crit ∼ (cos(θr)− cos(θa)) (4.30) La figure 4.24 représente le comportement (déposition ou adhésion), dans le cas d’impacts sur surfaces super-hydrophobes micro-texturées. La transition adhésion/rebond semble effectivement suivre la tendance décrite par l’équation 4.30, avec un préfacteur environ égal à 4.

Notons que pour des surfaces nano-échelles et multi-échelles, sur lesquelles l’hysté-résis de l’angle de contact est faible, le rebond est observé de façon systématique étant

donné la très faible valeur de l’hystérésis de l’angle de contact (qui n’a d’ailleurs pas été possible de mesurer pour ces types de surfaces étant donnée sa faible valeur).

4.2.6 Conclusion

Ce chapitre nous a permis de voir deux aspects concernant les impacts sur surfaces rugueuses. D’une part les impacts sur défaut unique en situation de caléfaction et d’autre part les impacts sur surfaces texturées super-hydrophobes.

Après l’étude effectuée sur les impacts en caléfaction, qui correspondent à une situa-tion modèle d’absence de mouillage et de fricsitua-tion visqueuse quasi-nulle, la perturbasitua-tion la plus élémentaire pouvant être rajoutée à cela est celle d’un défaut unique et ponc-tuel. Les effets engendrés par ce défaut sont multiples. Dans certains cas nous avons vu qu’il pouvait être l’activateur de la nucléation d’une zone de démouillage dans le film liquide, dont la dynamique peut être comprise à partir de l’analyse locale décrite au chapitre 2. Le défaut entraîne également une déstabilisation du bourrelet liquide formé à la périphérie de la goutte : le bourrelet semble s’ouvrir sur un secteur angulaire, aux extrémités duquel deux gouttelettes sont éjectées, ce qui ressemble fortement au phéno-mène de splash directionnel observé sur des surfaces super-hydrophobes texturées. Une perspective envisagée est actuellement l’étude d’impacts sur défauts multiples afin de comprendre comment la déstabilisation du bourrelet peut être généralisée à un grand nombre de défauts, dans des situations où l’on observe des impacts cristallographiques. Ces impacts cristallographiques ne sont qu’un aspect de la dynamique très riche des impacts sur surfaces super-hydrophobes texturées. L’aspect frictionnel entre le solide et le liquide a également a été abordé en considérant l’étalement maximal sur ces surfaces, et les coefficients de restitution lors de rebonds de gouttes. Il ressort de ces études une gradation de la friction, au fur et à mesure que la fraction solide de la texture augmente. Mise à part la caléfaction, la friction est ainsi minimale pour des surfaces à texture multi-échelles, pour lesquelles la très faible fraction solide (plus petite que 0.01) permet de limiter au maximum les effets visqueux. Enfin, si ces surfaces permettent de limiter la friction visqueuse grâce à l’existence d’air piégé entre les interstices de la micro-structure, il faut noter qu’au delà d’une vitesse critique, la pression dans la goutte peut devenir suffisante pour vaincre la pression capillaire critique nécessaire à l’imprégnation du liquide dans la texture.

Impacts sur surfaces mobiles

5.1 Position du problème et observations