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2) Types de sondes :

7.2 Méthodologie

7.4.3 Impact conjoint de la charge et de la fatigue mentales

Contrairement au travail de Haga et collaborateurs [244], nous avons bien trouvé une modu-

lation due à l'eet conjoint de la charge et du temps passé sur la tâche au niveau électrophysiolo- gique, et ce, pour deux composantes : la N2c et la P3a. L'amplitude de la composante P3a était en eet réduite lorsque le TPT augmentait dans la condition de charge faible, quel que soit le type d'item. Cette diminution d'une composante P300 avec le TPT est un résultat classique de

la littérature [256,257,258,103]. Toutefois, le fait que cette réduction n'apparaisse que dans la

condition de charge faible suggère que, pour cette composante, une charge élevée ait pu être as- sez stimulante pour empêcher l'impact négatif du TPT d'apparaître pendant les essais diciles.

Ceci contredit le travail d'Helton et Russell [243] qui rapportent qu'une condition de charge en

mémoire élevée accentue l'eet du TPT. En revanche, nos résultats vont dans le sens du travail

de Musgrove et Hollands [242] qui rapportent qu'une charge élevée limite l'eet du TPT. En

conséquence, il semble que la charge mentale ait un eet permissif ou suppresseur de l'impact du temps passé sur la tâche pour certaines étapes du traitement des items au niveau électrophysiologique.

En ce qui concerne l'eet conjoint de la charge et du TPT sur le traitement sélectif des items, des résultats ont été obtenus au niveau de la composante N2c, mais diéraient toutefois de ceux attendus. En eet, pour cette composante, l'eet d'item est apparu avec l'augmentation conjointe de la charge et du TPT. Cette composante reète, d'une part, le degré d'attention visuelle néces- saire pour traiter le contexte et les caractéristiques des stimuli dans le cortex visuel, et d'autre

part, les processus de catégorisation [283, 28] (pour une revue voir [232]). En conséquence, sa

modulation cumulée par la charge et le TPT pourrait suggérer un épuisement des ressources attentionnelles et une capacité diminuée à discriminer les items. Donc, il semble que cette composante N2c reète, au moins en partie, l'eort imposé par le TPT et la charge sur le processus d'allocation des ressources.

Notre paradigme nous a permis de moduler à la fois la charge mentale et le TPT. Néanmoins, leurs eets dans notre étude restent faibles comparés à ceux attendus d'après la littérature. Ceci est peut-être dû au fait que notre tâche de détection était très simple et impliquait un niveau

très bas de traitement des items. Ainsi, an de poursuivre l'évaluation de l'impact conjoint de la charge et du TPT sur le traitement des stimuli et l'attention sélective, des paradigmes impliquant un plus grand nombre de niveaux de charge et une durée de session expérimentale supérieure à une demi journée devraient être envisagés. Enn, une évaluation de la motivation des participants devrait être ajoutée aux futurs protocoles dans le but de déterminer son eet sur les performances et les potentiels évoqués et ainsi de mieux séparer son eet de celui du TPT.

7.5 Conclusion

En conclusion, comme attendu, le temps passé sur la tâche et la charge mentale ont tous deux eu un eet négatif sur les performances comportementales et ont bien modulé les marqueurs élec- trophysiologiques du traitement des stimuli. Les deux résultats principaux de cette étude, repris

dans la gure 7.7, sont les suivants :

1) An de réussir la tâche, les participants engageraient plus de ressources dans les condi- tions diciles (TPT long et charge élevée), ce qui se traduirait par une augmentation de l'amplitude de la composante P3a. En revanche, des situations peu stimulantes car trop simples semblent plus prônes à provoquer un eet du temps passé sur la tâche, ce qui se traduirait par un désengagement des ressources allouées à la tâche de manière générale et une diminution de l'amplitude de la P3a.

2) Les participants engageraient un processus d'allocation de ressources diérentiel qui allouerait plus de ressources au traitement des cibles et inhiberait le traitement des distracteurs, et ce, an de consommer le moins de ressources possibles dans des conditions prônes à l'épuise- ment des ressources. Ceci est suggéré par une augmentation de la diérence d'amplitude de la composante N2c entre les types d'items lorsque les conditions deviennent plus diciles.

En conclusion, l'amplitude des composantes ERPs pourrait donc reéter à la fois l'engagement des ressources et l'engagement du processus d'allocation sélectif de ces ressources. Ceci est primordial pour les applications en neuroergonomie car cela montre que l'on peut utiliser les potentiels évoqués pour mesurer l'engagement des ressources des participants. Néanmoins, ces marqueurs doivent être manipulés avec précaution pour eectuer l'estimation de niveaux de charge ou de fatigue mentales, puisque des situations aussi bien trop faciles que di- ciles peuvent toutes deux provoquer un désengagement des ressources et du processus diérentiel d'allocation des ressources attentionnelles, et peuvent ainsi conduire à des variations de patterns de potentiels évoqués analogues. Ces travaux font l'objet d'un article en cours de rédaction (voir

Figure 7.7  Récapitulatif des résultats principaux de cette étude concernant l'évaluation de l'impact conjoint de la fatigue et la charge mentales sur les potentiels évoqués du traitement sélectif des stimuli.

teforme EEG du CHU Grenoble) a été réalisée pour collecter les données comportementales et électrophysiologiques de participants réalisant une tâche de mémoire pendant 1h30. À partir de ces données, l'analyse de marqueurs électrophysiologiques et la mise en place de chaînes de traitement ont permis une estimation de la fatigue et de la charge mentale comme détaillé dans les parties suivantes. De plus, l'impact de ces deux facteurs sur l'attention sélective temporelle a aussi été évalué à l'aide d'une tache de détection insérée dans la tâche de mémoire. En eet, ces facteurs étant présents dans toutes les situations de la vie réelle, nous avons souhaité déterminer dans quelle mesure leur action conjointe pouvait perturber le traitement cérébral d'une tâche de détection étalée dans le temps, et donc proche de celle réalisée par des opérateurs de surveillance.

8.1 Estimation de la fatigue mentale

Nous nous sommes centrés sur une fatigue mentale liée à un temps important passé sur une même tâche, sans aller jusqu'à basculer dans un état de somnolence. An d'améliorer les systèmes existants, il nous a paru important d'étudier deux aspects :

1) La possibilité d'extraire des marqueurs oculaires dérivés du signal EEG an de caractéri- ser les clignements oculaires et d'eectuer un suivi de la fatigue par leur biais sans avoir à placer de capteurs sur le visage des sujets.

Pour répondre à cette question, une méthode de détection et de caractérisation des cligne- ments oculaires enregistrés au niveau du scalp par des électrodes EEG a été développée et validée. Le but principal de cette méthode était de permettre un suivi de la fatigue des sujets sans avoir à placer d'électrodes sur le visage des sujets grâce à l'utilisation d'une information qui est ha- bituellement supprimée des données EEG, l'activité oculaire. Notre méthode innovante nous a permis d'obtenir de très bonnes performances lors de la validation sur plusieurs sujets sans avoir aucun calibrage à eectuer. Un index de fatigue mentale a aussi été proposé an d'eectuer un suivi à partir des caractéristiques des clignements oculaires reconstruits à partir de l'EEG. Cette méthode pourrait donc être utilisée pour détecter et suivre l'activité oculaire à partir du signal EEG, mais pourrait aussi être couplée avec une analyse du signal EEG débruité par ses soins. Ceci rendrait ainsi le système de suivi complètement indépendant de toute mesure EOG et donc plus agréable à porter.

2) La pertinence de l'utilisation du signal EEG spontané et du signal ECG pour eectuer une estimation de la fatigue mentale.

Nous avons évalué la pertinence du signal EEG spontané et du signal ECG pour l'estimation de la fatigue mentale lorsque la fenêtre d'analyse est particulièrement courte (i.e. respectivement 800 ms et 5 s), notamment dans l'optique d'implémenter des systèmes de suivi très réactifs. L'étude des marqueurs EEG spontanés fréquentiels a été très concluante. En eet, des per- formances d'estimation optimales en termes de justesse de classication et supérieures à celles rapportées par la littérature ont été atteintes grâce à une chaîne de traitement alliant sélection d'électrodes et surtout ltrage spatial par CSP. Nos résultats montrent que la fatigue mentale reste dicile à estimer sur des fenêtres courtes d'analyse lorsque des chaînes de traitement et des caractéristiques traditionnelles sont utilisées, même en sujet-dépendant. En revanche, nous avons montré que l'emploi du ltrage spatial par CSP permet d'augmenter signicativement les performances et d'atteindre un taux de détection optimal grâce aux bandes de fréquence alpha, et surtout bêta. Ensuite, nous avons montré que l'estimation de la fatigue mentale à l'aide de caractéristiques classiques extraites de l'ECG sur des fenêtres d'analyse très courtes était réali- sable, ce qui n'avait pas encore été démontré, bien que peu ecace.

Ainsi, il est eectivement possible d'extraire des marqueurs oculaires dérivés du signal EEG permettant une caractérisation des clignements oculaires et un suivi de la fatigue mentale. De plus, le signal EEG est particulièrement pertinent pour estimer la fatigue mentale lorsque celui-ci est analysé grâce à une chaîne incluant un ltrage spatial de type CSP. Enn, l'activité cardiaque est, en revanche, peu pertinente lorsque celle-ci est extraite de fenêtres courtes. À notre sens, il reste peu d'améliorations à apporter à l'estimation de la fatigue mentale en ce qui concerne les marqueurs électrophysiologiques. En revanche, en ce qui concerne la chaîne de traitement, il reste encore à déterminer s'il est possible de trouver une chaîne permettant une estimation de la fatigue basée sur les marqueurs d'EEG spontané qui soit indépendante du sujet. De plus, bien que des performances optimales aient été atteintes grâce à l'utilisation de l'EEG spontané et d'une chaîne incluant un ltrage par CSP, ce type d'estimation par classication nécessite une base d'apprentissage contenant des essais de chaque niveau de fatigue. Ceci semble peu pratique à réaliser pour une implémentation vie réelle. Un suivi d'analyse de tendance comme pour les marqueurs oculaires serait donc peut-être plus approprié.