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Tableau 28 Corrélations simples (coefficient de Pearson) entre les paramètres physiologiques, la composition chimique des moûts, l’analyse sensorielle et le profil aromatique, des baies de Seyval (2012) et de Vandal-Cliche (2012 et 2013).

5.1 Impact de la charge fruitière sur la vigne et la qualité des baies

Au cours de cette étude, les résultats obtenus pour chaque cépage et années d’expérimentation ont montré un nombre de grappes par plant significativement différent d’un traitement de charge (40%, 70% et 100%) à l’autre, ce qui démontre que les traitements de charge par l’égrappage ont été efficaces. Cependant, l’efficacité a été différente chez les deux cépages à l’étude puisque le traitement d’égrappage maximal (40% des grappes laissées sur le plant) a permis de réduire le rendement de 23% seulement chez le Seyval blanc, alors que chez le Vandal-Cliche, des diminutions de rendement de 10% et 36,4% ont été obtenues en 2012, et de 15 et 41% en 2013, ont été obtenues pour les traitements à 70 et à 40% de charge, respectivement.

Le faible impact du traitement chez Seyval blanc est principalement dû au fait que ce cépage a compensé la faible charge fruitière en produisant des grappes de poids beaucoup plus élevé. En effet, chez les deux cépages, le nombre de grappes à la récolte est demeuré similaire au nombre de grappes laissé à la floraison. La réponse observée chez le Seyval blanc est bien documentée chez les cépages hybrides (Reynolds et Vanden Heuvel, 2009) dont le Seyval blanc (Berkey et coll., 2011 ; Edson et coll., 1995) et a aussi été observée chez le cépage V. vinifera Carignane (Bravdo et coll., 1984) ; la compensation aurait probablement été moins marquée si l’égrappage avait été effectué sur des grappes déjà formées (vendange en vert). Par contre, une telle compensation du poids des grappes n’a pas été observée chez le Vandal-Cliche (2012 et 2013) puisque le poids moyen des grappes est demeuré similaire entre les traitements. Ces résultats sont contraires aux données rapportées par Bravdo et coll. (1984) pour le cépage Carignan puisqu’ils ont observé une augmentation du nombre de baies et du poids des baies par grappe.

Le ratio de la surface foliaire par unité de fruit a montré des différences significatives pour chacun des cépages et des années d’expérimentation (Vandal-Cliche 2012, p≤0,001 ; Seyval 2012 et Vandal-Cliche 2013, seuil p≤0,05), ce qui est en accord avec les résultats obtenus par Edson et coll. (1995), Edson et coll. (1993), et Bravdo et coll. (1984), où une relation inverse a été observée entre une charge fruitière élevée et le ratio de la surface foliaire par unité de fruit lors d’un traitement d’égrappage.

Le traitement d’égrappage a eu peu d’impact sur le poids moyen des baies, qui n’a pas été affecté (p>0,05) par la réduction de la charge fruitière chez les deux cépages étudiés. Toutefois, la teneur en eau des baies de

dessèchement des baies peut survenir lorsque la maturité est atteinte, ce qui concorde avec la teneur en solides solubles totaux plus élevée dans les moûts extraits de ces baies, comparativement à ceux des autres traitements. Néanmoins, cet effet est possiblement minime, car aucune interaction n’a été trouvée entre le traitement de charge et la date de récolte pour la teneur en eau des baies, ce qui signifie qu’on ne peut affirmer que le traitement d’égrappage a avancé la maturité des baies en se basant sur la teneur en eau des baies.

Contrairement à plusieurs études (Ford, 2007 ; Gu et Wample, 2006 ; Guidoni et coll., 2002 ; Reynolds et coll., 1994 ; Bravdo et coll., 1985 ; Ough et Nagaoka, 1984), l’impact de l’ajustement de la charge n’a eu qu’un faible impact sur les paramètres technologiques des moûts de Seyval blanc et le Vandal-Cliche et ce, pour les deux saisons d’expérimentation. En effet, chez le Seyval blanc la réduction de la charge fruitière a causé une faible augmentation de la teneur en solides solubles totaux (7,8%) ce qui est en accord avec les observations de nombreux auteurs (Kliewer et Dokoozlian, 2005 ; Jackson et Lombard, 1993 ; Reynolds, 1989b ; Bravdo et

coll., 1985 ; Bravdo et coll., 1984 ; Kliewer et Ough, 1970 ; Winkler, 1954). Par contre, cet effet n’a pas été

observé chez le Vandal-Cliche, où seule une augmentation du pH a été constatée, pour l’année 2013 seulement, l’acidité titrable étant demeurée similaire entre les traitements. Ces résultats concordent en partie avec les résultats rapportés pour le cépage hybride Chambourcin, où une réduction de la charge fruitière par égrappage (8, 16, et 24 grappes/m par rang) n’a affecté ni le pH, ni l’acidité titrable des vins faits à partir du cépage hybride Chambourcin (Prajitna, et coll., 2007).

Zamboni et coll. (1996) mentionne que l’accumulation de sucre, l’augmentation du pH et la diminution de l’acidité titrable peuvent être peu affectées par la charge fruitière lorsque les plants de vigne possèdent le même ratio de surface foliaire par unité de fruit. Or, dans le cadre de cette étude, le traitement d’égrappage a permis de modifier significativement ce ratio chez les deux cépages étudiés. Les impacts sur les paramètres technologiques sont néanmoins demeurés modestes, bien qu’une corrélation significative ait été trouvée entre le ratio de la surface foliaire par unité de fruit et la teneur en solides solubles totaux chez le Seyval blanc (r2=0,50, p≤0,01 ; Tableau 28). Ces résultats s’expliquent possiblement par le fait que les charges obtenues

sur les vignes témoins étaient déjà relativement réduites suite à différents évènements, tels que certains épisodes de gel (hivernaux et printanier), et/ou la coulure observée chez Vandal-Cliche pendant les deux années d’expérimentation. En effet, certaines études conduites sur des cépages hybrides comme le Maréchal Foch rapportent des rendements témoins de plus de 14 kg par plant (Sun et coll., 2011a), ce qui est bien au- dessus des rendements témoins (100% charge) obtenus au cours de notre étude, sur Seyval blanc et Vandal-

Le contrôle de la charge fruitière par égrappage a affecté significativement la teneur en azote assimilable des moûts de Seyval blanc (p≤0,0083), alors que chez Vandal-Cliche, aucun impact n’a été noté sur les deux saisons d’étude. Au contraire, une diminution de la charge fruitière par égrappage a permis d’augmenter la teneur en azote assimilable chez le cépage Thompson Seedless (V. vinifera) (Kliewer et Ough, 1970).

Enfin, le traitement d’égrappage n’a pas affecté la teneur en esters hydroxycinnamiques et en flavonoïdes des moûts de Seyval blanc et de Vandal-Cliche. Dans les vins rouges issus du cépage Chambourcin, une augmentation linéaire de la teneur en composés phénoliques de 986 à 1462 mg/L a été observée lorsque la charge a été réduite de 24 à 8 grappes/m de rang (Prajitna et coll., 2007).

Selon nos résultats, la réduction de la charge fruitière a eu un impact mineur sur le profil aromatique des moûts de Seyval blanc puisque seuls trois composés volatils sur les 25 molécules analysées ont montré des différences significatives entre les traitements : dans les moûts issus des charges réduites, le 1-octen-3-ol et le linalool ont augmenté (p≤0,0280 et p≤0,0041, respectivement), tandis que l’hexanal a diminué (p≤0,0308). Le linalool est un composé considéré comme étant positif dans les vins (Salinas et coll., 2004). Par contre, le 1- octen-3-ol est un composé à l’arôme de terreux (champignon), dont la présence peut être liée à la présence de pathogènes fongiques tel que Botrytis cinerea (Morales-Valle et coll., 2011; Lafond et coll., 2010 ; La Guerche et coll., 2006). En effet, la réduction de la charge fruitière a causé une augmentation importante du poids des grappes chez le Seyval, ce qui pourrait avoir contribué à des conditions propices au développement de ce champignon, auquel le Seyval blanc est sensible (Vail et Marois, 1991 ; Reynolds et coll., 1986).

Chez le Vandal-Cliche, la somme des composés herbacés a augmenté significativement avec la réduction de la charge en 2012 (p≤0,0380) et en 2013 (p≤0,0056), alors qu’une augmentation significative a été notée pour plusieurs composés issus de la dégradation des acides gras, dont le trans-2-hexenol (p≤0,0300) et le décanal (p≤0,0069). En général, les composés herbacés traversent aisément la fermentation (Kotseridis et coll., 2000) et sont souvent considérés comme indésirables dans les vins (Chapman et coll., 2004), d’où l’importance de les réduire à la source. Les études mettant en relation la charge fruitière et le profil aromatique des baies ou des vins montrent généralement que l’ajustement de la charge fruitière par ébourgeonnage et/ou par égrappage à la véraison affecte les composés herbacés (C6). Selon Sun et coll. (2011a), le traitement de

charge fruitière par ébourgeonnage (15 bourgeons/plant) chez le Maréchal Foch réduit les composés herbacés et a peu d’impact sur les autres composés analysés (esters, acides gras, terpènes). Au contraire, une diminution de la charge fruitière par ébourgeonnage (12, 18, 24, 30, 36, et 48 bourgeons/plant) a causé

la charge fruitière (ébourgeonnage et égrappage) peut grandement affecter les résultats obtenus sur le profil aromatique et sensoriel des vins.

L’analyse sensorielle des baies a présenté des différences significatives entre les traitements de charge fruitière chez le Seyval blanc pour la résistance de la pellicule (p≤0,0436) et de l’astringence de la pellicule chez le Vandal-Cliche (p≤0,0167, saison 2012), qui ont diminué en fonction du niveau de charge. Chez le Seyval blanc, la résistance de la pellicule a progressé de façon similaire dans le traitement de maturité, ce qui suggère que les baies issues des vignes fortement égrappées pourraient avoir atteint une plus grande maturité de la pellicule (donc, une pellicule plus molle). Cette observation pourrait appuyer l’hypothèse d’une plus grande incidence de pathogène fongique comme cause de l’augmentation du 1-octen-3-ol trouvé dans le profil aromatique des moûts de ces baies. Bien que l’impact de la charge fruitière sur l’analyse sensorielle des vins soit bien documenté dans la littérature (Kliewer et Dokoozlian, 2005 ; Bravdo et coll., 1985 ; Bravdo et

coll., 1984 ; Ough et Nagaoka, 1984), peu d’études ont porté sur l’impact de la charge fruitière sur le profil

sensoriel des baies, à l’exception de l’étude de Lohitnavy et coll. (2010) où, au contraire de notre étude, aucune différence significative n’a été trouvée entre les profils sensoriels des baies issues du contrôle, comparativement aux baies issues d’un traitement d’égrappage à la floraison, sur le cépage Sémillon (V.

vinifera).

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