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Chapitre 2 - Du radiotraceur à l'imagerie TEP des plaques amyloïdes

D. L'imagerie clinique

A ce jour, trois radiotraceurs marqués au carbone 11 ([11C]PIB, [11C]SB-13, [11C]BF-227) et deux marqués au fluor 18 ([18F]FDDNP et [18F]BAY94-9172) ont pu poursuivre leur évaluation préliminaire en clinique.

Parmi ceux-ci, le traceur ayant été le plus largement étudié chez l'homme a été certainement le [11C]PIB (Fig. 15). La première étude clinique au [11C]PIB a été réalisée sur 15 patients atteints de la MA et 9 sujets sains (Klunk et al., 2004). Elle a montré une différence significative dans l'accumulation du [11C]PIB au niveau cortical (cortex frontal, pariétal, temporal, occipital) et sous-cortical (striatum) chez des patients atteints de la MA en comparaison des sujets sains (1,5 – 1,9 fois supérieure). Aucune différence n'a été mise en évidence dans les régions du pons et de la substance blanche entre ces deux populations. Cette étude initiale a été suivie et confirmée par d'autres études dans différents centres (Archer et

al., 2006; Edison et al., 2007; Engler et al., 2006; Kemppainen et al., 2006; Lopresti et al., 2005; Mintun et al., 2006; Price et al., 2005; Ziolko et al., 2006). Une de ces études a montré que des patients atteints de la MA avaient un niveau stable de charge amyloïde 2 ans après leur premier examen alors que leur métabolisme cérébral (suivi par [18F]FDG) et leurs performances cognitives se dégradaient (Engler et al., 2006). D'autre part, une étude a montré que des sujets non-déments pouvaient également révéler un marquage important au [11C]PIB (Mintun et al., 2006). Ces études ont démontré que l'accumulation de plaques amyloïdes progresse de manière silencieuse jusqu'à atteindre un plateau. Au-delà de cette charge amyloïde maximale, le cerveau n'est plus capable de compenser les perturbations induites. Son métabolisme et les fonctions cognitives qu'il assure s'en retrouvent dégradés.

[11C]PIB [11C]BF-127 [18F]FDDNP [18F]BAY94-9172 Patients Alzheimer Témoins âgés [11C]PIB [11C]BF-127 [18F]FDDNP [18F]BAY94-9172 Patients Alzheimer Témoins âgés

Figure 15. Exemples d'images obtenues par examen TEP clinique au [11C]PIB (Small et al., 2008), au [11C]BF-127 (Kudo et al., 2007), au [18F]FDDNP (Small et al., 2006) et au [18F]BAY94-9172 (Rowe et al., 2008) montrant l'accumulation de la charge amyloïde chez des patients atteints de la MA (en haut) en comparaison de témoins âgés (en bas). (NB: les images TEP cliniques au [11C]SB-13 ne sont pas accessibles).

Des études se sont ensuite intéressées à des patients atteints de troubles cognitifs légers (ou MCI) qui, comme nous l'avons vu, sont censés représenter le stade prodromique de la MA (Forsberg et al., 2007; Kemppainen et al., 2007; Li et al., 2008). Ces études ont montré qu'en moyenne, l'accumulation de plaques amyloïdes chez une population atteinte de MCI était intermédiaire entre celle de sujets sains et celle de patients atteints de la MA. Les patients MCI ayant progressé vers une MA (constaté de 2 à 16 mois après l'examen au [11C]PIB) présentaient un niveau d'accumulation de peptides Aβ supérieur à ceux n'ayant pas convertis,

et supérieur aux sujets sains. D'autre part, ils étaient tous des MCI de type "amnésique", comme défini précédemment. Ces résultats suggèrent que l'imagerie TEP des plaques amyloïde au [11C]PIB permet de détecter précocement, chez les patients atteints de troubles cognitifs légers de type amnésique, ceux susceptibles de développer une MA. On peut raisonnablement espérer que, lorsque des méta-analyses seront disponibles, elles pourront déterminer si les sujets sains (non-déments, asymptomatiques) présentant un niveau élevé de fixation du [11C]PIB, ont développés par la suite une MA.

Le second traceur carboné ayant fait l'objet d'une évaluation clinique (quoique moins documentée) est le [11C]SB-13. Ses capacités pour détecter l'accumulation de peptides Aβ ont été évaluées et comparées à celles du [11C]PIB (Verhoeff et al., 2004). Les études réalisées chez 5 patients atteints de la MA et 6 sujets sains ont montré que le [11C]SB-13 et le [11C]PIB reflétaient de façon similaire la charge amyloïde dans les régions du cortex frontal et occipital. Plus récemment, le [11C]BF-127 a pu être testé en clinique (Fig. 15) sur des patients atteints de la MA et sur des sujets sains (Kudo et al., 2007). La fixation du traceur chez les patients Alzheimer a été importante au niveau du cortex frontal, temporal et pariétal par rapport aux sujets sains. Ces régions sont connues pour être riches en plaques neuritiques (Arnold et al., 1991). Sa fixation au niveau du cervelet a été comparable dans les deux groupes. L'évaluation du [11C]BF-127 pour détecter la pathologie amyloïde s'est révélée être concluante.

Le [18F]FDDNP a été le premier radiotraceur TEP à montrer in vivo (Fig. 15) la capacité de marquer les deux lésions caractéristiques (SP et DNF) dans le cerveau de patients atteints de la MA (Barrio et al., 2006; Shoghi-Jadid et al., 2002). Il a montré un marquage intense et spécifique au niveau de l'hippocampe, de l'amygdale et du cortex entorhinal de patients atteints de la MA. Les régions marquées in vivo sont celles connues pour être touchées par les 2 lésions caractéristiques. De plus, une étude a montré que le [18F]FDDNP semblait capable de différencier les personnes atteintes de MCI, de celles atteintes d'une MA, et de celles sans troubles cognitifs (Small et al., 2006). Cependant, le signal spécifique obtenu avec le [18F]FDDNP n'a été démontré que 0,3 fois plus important que celui non-spécifique. En comparaison, le [11C]PIB et le [11C]SB-13 permettent d'atteindre des facteurs de l'ordre de 1,5 à 2 (fixation région spécifique / fixation région de référence).

Actuellement, le traceur le plus récent ayant fait l'objet d'études cliniques chez des patients atteints de la MA est le [18F]BAY94-9172 (Rowe et al., 2008) (Fig. 15). Ce traceur fluoré a montré une forte fixation chez des patients Alzheimer au niveau néocortical, notamment dans les régions du cortex cingulaire postérieur et du cortex frontal, en comparaison d'une fixation localisée dans la substance blanche chez les sujets sains et les patients atteints de dégénérescences lobaires fronto-temporales.

Ainsi, l'imagerie TEP des plaques amyloïdes ne permet pas le diagnostic précoce d'une MA. Elle est une aide au diagnostic. Par contre, ce qui est fondamental pour la recherche actuelle, c'est que cette imagerie va être (est déjà) l'outil de choix pour l'évaluation des thérapeutiques visant à réduire la pathologie amyloïde, notamment présente dans la MA.

II. L'automatisation de la radiosynthèse du

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C]PIB