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Chapitre II Le fer : transport et régulation chez les bactéries

II. IlsA, une protéine clé d’un nouvel mécanisme d’acquisition de fer

1 IlsA et acquisition du fer

Suite à une infection par un pathogène, il est communément reconnu que la séquestration du fer par l’hôte est un mécanisme de défense innée, qui lui permet de résister et de lutter contre cette infection. Afin de surmonter cette carence en fer, et de pouvoir se développer chez l’hôte, les bactéries ont développé deux principaux mécanismes qui leur permettent d’acquérir le fer de l’hôte. Le premier, fait intervenir les sidérophores, qui sont des molécules sécrétées, qui entrent en compétition avec les protéines de l’hôte liant le fer ferrique tels que, la transferrine, la lactoferrine et la ferritine. Le deuxième, inclut l’expression des protéines de surface qui permet une interaction directe avec les sources de fer, principalement les hémoprotéines.

Chez B. cereus, il existe très peu d’études concernant l’acquisition de fer à partir des sources présentes chez l’hôte. Cependant, des travaux faites par deux groupes de recherche différents concernant la capacité de B. cereus d’acquérir le fer à partir de la transferrine via les sidérophores ont montré des résultats controverses (Park et al., 2005; Sato et al., 1999a).

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Donc, il n’était toujours pas clair, si B. cereus est capable d’utiliser la transferrine comme source de fer pour sa croissance. Cependant, il n’avait jamais été reporté l’implication des protéines de surface chez B. cereus dans l’acquisition du fer à partir des sources de l’hôte. Au cours de notre étude, nous avons identifié une protéine localisée à la surface de B. cereus qui est essentielle pour l’acquisition du fer de l’hémoglobine, l’hème et la ferritine. Nous avons démontré qu’IlsA est présente au niveau de la surface et exclusivement dans les conditions de carence en fer. D’ailleurs, la présence de la boite fur dans sa région promotrice est en accord avec cette observation. Par comparaison, à la structure des protéines de surface déjà étudiées comme étant des récepteurs aux sources de fer présentes chez l’hôte, IlsA présente une certaine originalité. En plus de son domaine NEAT qui est présent dans la majorité des protéines de surface Isd de S. aureus et de B. anthracis, responsable de l’interaction avec les hémoprotéines, IlsA présente un domaine SLH assurant sa liaison à la surface bactérienne au niveau du peptidoglycane et un domaine LRRs suggérant une interaction protéine-protéine. Ces observations suggèrent qu’IlsA, exprimée dans les conditions de carence en fer (au cours de l’infection) est impliquée dans l’acquisition du fer en interagissant avec les sources de fer présentes chez l’hôte. En effet, nos résultats ont montré que l’absence d’IlsA empêche la croissance de B. cereus in vitro en présence de l’hémoglobine, l’hème et la ferritine comme source unique de fer. Ceci suggérait une interaction directe entre IlsA et ces trois sources de fer. En effet, les tests d’analyses d’affinités (ELISA et Biacore) entre IlsA et l’hémoglobine d’une part, et la ferritine d’autre part, montrent qu’il existe une interaction directe avec ces deux protéines. Toutefois, l’affinité d’IlsA pour l’hémoglobine est plus élevée que son affinité avec la ferritine. De plus, Les résultats avec le test de chémoluminescence et la Biacore montrent une liaison directe d’IlsA à l’hème. Ce résultat est en accord avec l’alignement multiple du domaine NEAT d’IlsA avec ceux des différentes protéines de surface Isd de S. aureus. Cet alignement indique la présence des résidus tyrosines conservés (Tyr166, Tyr170 dans IsdA) essentiel pour la liaison à l’hème (Pilpa et al., 2006). Donc, l’interaction d’IlsA avec l’hémoglobine peut être due à sa liaison avec l’hème par l’intermédiaire du domaine NEAT. Toutefois, des études structurales de IlsA d’une part et des complexes IlsA-hémoglobine, IlsA-hème et IlsA-ferritine d’autres parts, sont nécessaires afin d’élucider, le rôle exacte, du domaine NEAT et du domaine LRR dans ces interactions. Il est très important de noter que nos travaux ont identifié pour la premiere fois une protéine de surface capable d’intéragir avec la ferritine. Ici, nous avons choisi d’étudier l’affinité entre IlsA et l’hémoglobine qui est la source d’hème la plus abondante présente chez

Fur Box

GATAATTATTCTCAATT GATAATGATTTTCATTAT

Bc4542Bc4543 Bc4544 Bc4545 Bc4546 Bc4547 Bc4548 Bc4549

Système ABC transporteur Sortase B Monooxygénase Protéines de surface NPKTG Boîte fur NSKTA Fur Box GATAATTATTCTCAATT GATAATGATTTTCATTAT Bc4542Bc4543 Bc4544 Bc4545 Bc4546 Bc4547 Bc4548 Bc4549

Système ABC transporteur Sortase B Monooxygénase Protéines de surface NPKTG Boîte fur NSKTA

Figure 21 - Représentation schématique du locus isd chez B. cereus

Les flèches indiquent l’orientation et la taille approximative de la phase ouverte de lecture. Les numéros des gènes et les protéines putatives sont indiqués en dessous et en dessus des flèches respectivement. Les motifs NPKTG et NSKTA des protéines codées par Bc4549 et Bc4547 respectivement, sont les substrats de la sortase B putative (Bc4543). Le système ABC transporteur est constitué de la protéine de liaison au ferrichrome (Bc4546), une perméase fhuB (Bc4545) et d’une ATPase fhuC (Bc4544). La séquence nucléotidique conservée de la boîte Fur est également indiquée. Les cylindres jaunes symbolisent les domaines NEAT.

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l’hôte. L’affinité à d’autres sources d’hèmes comme le complexe hémoglobine-haptoglobine ou hémopexine peut être également testée. En outre, nos résultats démontrent, pour la première fois, l’existence d’une protéine qui, en plus de sa structure originale, semble avoir la possibilité de lier des molécules différentes, ayant en commun leur liaison au fer.