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CAS DE LA PLATE-FORME DE LLUCMAJOR (MAJORQUE,

2.2 Présentation du site d’étude

2.2.2 Ile de Majorque

L‟intérêt de cette étude s‟est porté sur l‟île de Majorque en vue des nombreuses études antérieures et un nombre conséquent de puits d‟observation disponibles grâce au Gouvernement des Baléares, localisé à Palma de Majorque, capitale des Baléares.

2.2.2.1 Morphologie structurale actuelle de l’île Majorque

Majorque est la plus grande île de l'archipel des Baléares, de forme trapézoïdale (70 km d‟Ouest en Est et 50 km du Nord au Sud). Les structures élevées de l'île (Sierres de Tramuntana, Randa et et Levant) correspondent aux horsts avec une orientation NE-SO (Gelabert, 1998) qui sont le résultat de la phase tectonique produite au cours du Miocène moyen. Ces trois chaînes de montagnes sont séparées par deux dépressions majeures (Gelabert, 1998). La configuration actuelle de l‟île a été conditionnée par la phase extensive (distension) du Néogène, qui a formé de petits bassins (Figure 2-25). Trois d'entre eux (Palma, Inca et de Sa Pobla) sont alignés dans la zone ouest, limités par des failles NE-SO et séparés les uns des autres par des structures NO-SE. Le quatrième

(Llucmajor-70

Campos), dans la partie sud-orientale, montre la même tectonique. Ces unités dérivent de l'action de failles normales listriques d‟orientation NE-SO qui délimitent les bassins.

Figure 2-25 : Relief et principales formations de l’ile de Majorque (Arango et al., 2009 modifiée d’après Gelabert, 1998). Les flèches larges indiquent les directions d’extension et les flèches fines, les directions de

compression.

La plate-forme Llucmajor est l'une de ces dépressions. Elle est composée en surface de sédiments datant du Quaternaire (limons rouges, conglomérats et eolianites) et de sédiments du Miocène (calcaires) en profondeur. Des calcarénites récifales et des silts discontinus du Quaternaire affleurent dans la zone Nord (Pomar, 1991). Plusieurs relevés géophysiques régionaux ont été menés à Majorque en utilisant les méthodes gravimétrique, magnétique, sismique et magneto-tellurique (Benedicto et al., 1993; Pous et al., 1995). Ces relevés confirment la continuité en profondeur des principales structures régionales observées en surface.

2.2.2.2 Description géologique de l’île Chronologie des principaux évènements

Dans le contexte de Majorque, les événements compressifs majeurs ont eu lieu au Miocène moyen, en même temps que la formation de la Cordillère Bétique (Pomar et al., 1996) et des chaînes maghrébines. Le Bassin de Campos a subsidé seulement au début du Pléistocène (Jenkyns et al., 1973). A la fin du Tortonien et au début du Messinien, la plate-forme Llucmajor a progradé sur un profil de dépôt légèrement pentu, à environ 20 km vers le sud et le sud-ouest (Figure 2-25). La plate-forme présente une architecture très complexe, conduite par des changements eustatiques du niveau de la mer.

71 Description des lithologies et structures

Lithostratigraphiquement, les unités lithologiques de l'île sont composées de roches d‟âge paléozoïque à quaternaire, formant des séries superposées en écailles (résultat de la phase compressive).

Figure 2-26: Carte géologique de Majorque (Robledo, 2001).

Les séquences stratigraphiques qui composent les hauts reliefs comprennent les sédiments du Paléozoïque, Trias, mésozoïque et tertiaire (Figure 2-26). Seuls quelques affleurements marquent la période Carbonifère (-359 à -299 Ma). Les séquences mésozoïques commencent avec un faciès Triasique (-251 à -200 Ma) de type allemand (faciès Buntsandstein, Muschelkalk et Keuper) et une épaisse couche de calcaires jurassiques (-200 à -145,5 Ma) le succède. Elles recouvrent la plupart des sommets de montagne et falaises. Le socle Mésozoïque, sur lequel s‟est développée la plate-forme Llucmajor, affleure au nord de la Sierra de Levant. Des dépôts pélagiques constituent le reste de la séquence mésozoïque, mis principalement en place dans les zones basses. Le premier dépôt datant du Cénozoïque appartient à l‟Eocène moyen, et il contient des calcaires et quelques veines de charbon. Les dépôts de l‟Oligocène contiennent des séquences de conglomératiques alluviaux en éventails venant du Nord-Ouest, et des sédiments côtiers. Les roches du Miocène inférieur, du Pliocène et du Pléistocène sont déposées dans des bassins plus ou moins restreints, post- orogéniques, et correspondants à des environnements côtiers (calcaires marins). Des sites de formations analogues (développées lors de la même période ou dans des environnements similaires) ont été étudiés spécifiquement dans le sud de l‟Espagne tel que le bassin Sorbas et le bassin Vera (Andalousie) (Bourillot et al., 2010 ; Ott d‟Estevou et Montenat, 1990 ; Martın and Braga, 1994; Rouchy and Caruso, 2006).

72 2.2.2.3 Description des réservoirs aquifères

L„île Majorque se caractérise par un système aquifère développé et hétérogène. Les principaux aquifères sont dans les secteurs d'Andratx, Calvià, Palma et les marinas de la côte orientale. La plupart des cours d'eau est à sec la plus grande partie de l'année. Les ressources en eau proviennent selon les secteurs, soient:

- des aquifères libres dans des calcaires du Miocène. Les nappes superficielles sont généralement déjà supplantées par des forages ;

- des aquifères captifs tels que celui de Llucmajor datant de l‟Oligo-Miocène, marqué par un faciès marno-calcaire qui vient s'intercaler entre les aquifères libres et le substratum ;

- des captages des eaux superficielles tels que deux retenues d'eau collinaires (Cùber et Gor-Blau), dans la partie occidentale de la Sierra de Tramuntana.

Les substratums de l'aquifère sont orientés selon la pente du socle orogénique imperméable. Au sud-est de l‟île, cette pente est dirigée vers la mer de 1 à 3% (Figure 2-27). Aucun cours d'eau permanent n‟existe. Des écoulements éphémères apparaissent seulement après des orages. Une grande partie de la recharge des eaux souterraines a lieu le long des trois chaines de montagne. Dans les zones basses, une partie des pluies est recueillie par certaines formations très transmissives ou par percolation du sol.

Figure 2-27: Carte des pendages et directions des couches géologiques du Sud de l’île (source : IGN Mallorca)

Problèmes d’intrusion saline

L‟île de Majorque subit depuis toujours le phénomène d‟intrusion saline des aquifères côtiers mais ce dernier est accentué depuis plusieurs décennies pour des raisons touristiques et agricoles. Il est très important près de Palma, la capitale locale. En effet, les récits historiques racontent que les Romains avaient déjà remarqué la présence d'une source salée dans une rivière située au nord de l'île près de la ville de Pollença. Ce site est localisé à plusieurs kilomètres à l‟intérieur des terres et à 10 m d‟altitude.

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Les ressources en eau sont principalement souterraines (75%). Un des principaux champs de pompage (Llubí) se situe dans la région Sa Pobla-Inca pour approvisionner la capitale, Palma de Majorque, ainsi que les villes locales. La qualité des eaux locales s‟amenuise, surtout lors d‟année sèche. Certains forages de cet aquifère captif montrent des flux ascendants d‟eaux souterraines salines profondes (Manzano et al., 2002).

Une étude du gouvernement des Baléares a permis de cartographier l‟ampleur des intrusions salines sur l‟ensemble de l‟île à l‟aide de mesures de conductivités en puits. La carte résultante (Figure 2-28) illustre la conductivité mesurée à 60 m de profondeur. Elle montre que près des deux tiers des côtes sont envahis par les eaux salées. Les zones épargnées sont celles des hauts reliefs (les Sierras) ; à noter que la Sierra la plus importante (Tramuntana au NO) n‟a pu être investiguée en raison de ses fortes altitudes. L‟intrusion salée se propage jusqu‟à 20 km à l‟intérieur des terres, ce qui peut être plus important en profondeur en vue de la forme du biseau. La pénétration la plus importante apparaît dans le bassin de Llucmajor (sud de l‟île), jusqu‟à la ville de Campos.

Figure 2-28 : Carte des isochlorures, au toit de la nappe ; valeurs bleues de 0 à 500 mg/l et rouges de 500 à 6000 mg/l, (modifiée d’après carte du Gouvernement des Iles Baléares), le rectangle noir indique la partie

Sud de l’île la plus affectée par l’intrusion saline.

Un tiers de l'eau est consommée par la population: celle de Palma consomme plus de 50% des eaux de Majorque, soit 40 hm3/an, dont 80% de bonne qualité. Les besoins industriels sont très faibles, caractéristiques de régions qui vivent principalement du tourisme, mais pourraient augmenter avec le développement de hautes technologies. Les besoins en eau des terrains de golf ne cessent d‟augmenter.

En conséquence, l‟île a recours à des mesures particulières pour satisfaire la demande en eau par la réutilisation des eaux traitées dans certaines régions agricoles, le dessalement de l'eau souterraine saumâtre et de l'eau de mer, et même de recourir à la transmission occasionnelle d‟eau de la rivière Ebre (Tarragone, péninsule ibérique) par navire.

0 6000 mg/L

20 km

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L‟EMAYA gère actuellement 2 usines de dessalement traitant 35000 m3

/jour d'eau saumâtre et 40000 m3/jour d'eau de mer pour un coût d'exploitation de 0,60 euro par m3, prix peu élevé pour la population locale car la totalité de l'investissement a été pris en charge par la Communauté européenne et l'État espagnol. Mais ces usines sont fortes consommatrices d'électricité. Des moyens de prévention seraient donc à mettre en œuvre afin de pallier aux accroissements de salinisation des aquifères.