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En plus de la confirmation ou le manque de résultats probants concernant certains vecteurs que nous soupçonnions, certains cas ne pouvaient pas être expliqués par les vecteurs que nous attendions. D’autres vecteurs ont été mis à jour, et des recherches plus poussées ont été réalisées pour découvrir les mécanismes qui y sont associés :

a) Semences contaminées

Les semences de luzerne sont apparues comme un vecteur probable de dissémination de l’ambroisie sur la zone d’étude. Deux cas pour lesquels nous ne parvenions pas à incriminer les vecteurs « classiques » se sont avérés être probablement contaminés par ce biais.

Les semences certifiées ont été les premières soupçonnées. Même si la probabilité de retrouver des semences d’ambroisie dans les doses de semences de luzerne était à priori faible, il suffit d’un inoculum de quelques semences pour contaminer une parcelle au complet en quelques années. C’est pourquoi nous avons poursuivi nos investigations avec la filière semences de luzerne.

Au premier abord, il semblait que le risque était important. En effet, les principales régions de production (Provence il y a quelques années, et Poitou-Charentes actuellement) sont des régions à fortes infestations par l’ambroisie, et les dates de récolte de la luzerne porte-graine correspondent avec la maturité des semences d’ambroisie (début septembre à mi-octobre). L’ambroisie ne fait pas partie des adventices qui font l’objet de mesures particulières de tri, et la tolérance au niveau des graines d’adventices présentes est large : 1,5% en masse de semences étrangères dont au maximum 1% d’une seule espèce (LUZERNE PORTE- GRAINE : TECHNIQUES CULTURALES, 2000). Avec des poids moyens d’akène de l’ordre de 3mg, cela pourrait représenter 300 semences d’ambroisie par kg…

certifiées soit peu probable. Les semences subissent plusieurs niveaux de contrôles et de tri qui doivent éliminer la plupart des semences exogènes :

-à la parcelle : les luzernières de multiplication font l’objet de protocoles de désherbages particuliers, doublés de contrôles de conformité des parcelles avant récolte par des agents du GNIS.

-après la récolte : même si des semences d’ambroisie parviennent à passer outre les contrôles préalables et peuvent arriver jusqu’au tri (ce qui semble être parfois le cas), elles ne posent aucun problème de tri. D’une part, les semences d’ambroisies ont généralement une taille supérieure aux graines de luzerne, mais elles sont également ornementées, et donc éliminées lors du tri des lots entre des rouleaux de velours (« rice seed »), qui retient les semences rugueuses (MADIOT P, 1997).

Par contre, il semble que des agriculteurs récoltent des semences de luzerne fermières, qui échappent de fait à tout contrôle. Sur cette ancienne région de production de semences de luzerne, les agriculteurs locaux ont le savoir-faire en matière luzerne porte-graine. Par ailleurs, les luzernières sont bien présentes sur le territoire, la plante est bien adaptée aux conditions locales (sols calcaires, faibles besoins en eau) et répond aux besoins locaux des élevages en fourrages (autoconsommation, vente locale ou à quelques dizaines de km).

Certains agriculteurs semblent donc exploiter des luzernières à des fins fourragères pendant les premières années, avant de les laisser grainer pour les récolter lorsqu’elles arrivent en fin de vie. Ces luzernières deviennent alors très favorables à l’ambroisie, car elles sont clairsemées et deviennent moins concurrentielles (Figure N°13).

Figure N°13 : Luzernière agée destinée à la récolte de semences fermières et infestée par les

ambroisies

De telles parcelles ont pu être observées sur le terrain, et leur destination semencière confirmée. Les graines récoltées sont utilisées localement, soit pour réimplanter des luzernières sur l’exploitation, mais font peut-être l’objet d’un marché local d’échange à petite échelle, qui peut contribuer à disséminer des ambroisies sur de nouvelles parcelles ou de nouveaux secteurs.

Même si ce vecteur semble être assez peu répandu sur le secteur, il peut expliquer des infestations sur des zones ou aucun autre vecteur n’était possible. Nous avons pu constater que les semences fermières produites dans les conditions décrites ci-dessus sont des pratiques pour lesquelles aucun chiffre n’est disponible, et dont on ignore l’ampleur.

b) Fourrages contaminés

Les élevages caprins et ovins sont assez présents sur le nord du Gard, ces animaux permettent de valoriser des zones de garrigues ou de parcours au printemps et à l’automne, mais ces milieux ne leur assurent pas une alimentation suffisante tout au long de l’année. De nombreux éleveurs ne parviennent pas ces dernières années en raison d’épisodes de sécheresse récurrents à assurer leur autonomie fourragère et sont contraints d’acheter du fourrage. Certains éleveurs mettent en relation les achats de fourrage avec l’apparition de l’ambroisie sur leur exploitation.

Nous nous sommes donc renseigné sur l’origine des fourrages achetés dans la région : pour des raisons de coûts de transport, les régions du Sud-Est semblent être les fournisseurs privilégiés, en particulier, les régions de la Crau, des Basses Alpes, et de la Drôme. Il s’agit à chaque fois de régions à risque pour l’ambroisie, d’autant plus que les fourrages pour ovins ou caprins sont moins exigeants au niveau de la qualité des fourrages : les regains ou les coupes tardives susceptibles de contenir des ambroisies à maturité semblent bien être importées dans

indemnes d’ambroisies du fait de la concurrence de la culture, nous avons pu relever des prairies très fortement infestées (figure N°14)

Figure N°14 : Prairie temporaire (Ray Grass Anglais) infestée par les ambroisies (dont les graines

risquent de se retrouver dans le fourrage).

c) Fumiers

Le fumier est un vecteur dont l’implication n’a jamais pu être démontrée avec certitude, mais qui fait l’objet de forts soupçons (CHAUVEL, 2004). Il a été montré que les semences d’ambroisie étaient très résistantes et que certaines d’entre elles gardaient leur capacité germinative après le passage dans le tractus digestif bovin (VITALOS et al, 2008). Il est donc possible que des semences viables se retrouvent dans des fumiers issus d’animaux ayant consommé des ambroisies grainées. Par ailleurs, le fumier pourrait également être un vecteur de façon moins directe. Les fumiers sont souvent stockés en bordure de champs ou à la ferme sur des parcelles qui peuvent abriter des ambroisies. Elles peuvent alors se développer et grainer à proximité immédiate des ces tas que les agriculteurs ont tendance à oublier de la mise en tas à l’épandage : le fumier est alors contaminé fortement juste avant son épandage hivernal, les semences sont réparties directement après leur production sur les parcelles (Figure N°15).

Figure N°15 : Tas de fumier en stockage infesté par les ambroisies.

Un cas intéressant de contamination par le fumier a été cité lors d’une enquête. Lors d’une visite à un éleveur, des membres de sa famille ont prélevé du fumier très décomposé et l’ont transporté à plusieurs centaines de kilomètres, dans le but de remplir des jardinières de balcon. L’éleveur a alors pu constater que lesdites jardinières étaient infestées par des ambroisies. Ce cas n’a pas pu être approfondi par manque de temps.

Un échantillon issu d’un tas de fumier contaminé a été prélevé dans un jardin et mis en culture dans les serres du CETIOM à Grignon. Le fumier a été étalé en couche mince de quelques centimètres dans des bacs de culture et placé en conditions favorables (eau, température), mais aucune ambroisie n’a poussé, alors que le tas de fumier d’origine était infesté.

5. Premiers résultats interactions rivières/milieu

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