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4. Matériels et méthodes

4.1 Isolement et identification de souches réduisant le cholestérol en coprostanol

4.1.3 Identification des souches bactériennes produisant du coprostanol

L’extraction des stérols est un processus qui suit plusieurs étapes résumées dans le tableau 5. La première est l’extraction des lipides totaux de l’échantillon, la seconde est une étape de saponification pour casser les liaisons esters et libérer les stérols qui sont extraits dans une troisième étape. La méthode utilisée ici est une technique adaptée de Bligh et Dyer (Bligh, E.G. and Dyer 1959). Les échantillons subissent un dernier traitement pour faciliter leur passage en chromatographie en phase gazeuse (GC) couplée au spectromètre de masse (MS) : une dérivatisation par sylilation, permettant une meilleure volatilité des composés.

Tableau 6 : Extraction des stérols

Etapes de l’extraction Méthodes/Principes/Eléments de protocole

1. Solubilisation et extraction

Méthode : Extraction liquide/liquide

Principe : L’extraction liquide/liquide est la mise en contact d’un mélange binaire avec un troisième liquide non miscible (solvant) et retenu pour extraire préférentiellement un composé du mélange. Après décantation, deux phases sont observées : l’extrait enrichi en soluté et le raffinat appauvri en soluté.

Protocole : Le mélange binaire est représenté par 500 µL de culture en milieux LYHBHI, L-DON et M17 glucose (tableau 5) +CH/PC additionnés de 10 µL de 5α-cholestane à 100 µg/mL (standard interne). Un blanc est effectué avec 500 µL d’eau stérile. Le solvant est le réactif de Folch composé de méthanol-chloroforme (1:2). Après un mélange par vortex, la décantation est réalisée par une centrifugation. La phase organique située en position inférieure du mélange représente l’extrait enrichi en lipides et en stérols. Il est ensuite séché aux vapeurs d’azote.

2. Saponification

Méthodes : Saponification continue à chaud

Principe : La saponification est une hydrolyse en milieu basique formant un ion carboxylate et un alcool à partir d’un ester.

Protocole : La réaction se fait à 60 °C pendant 1 h en présence d’une base forte, le KOH dissout dans du méthanol. Celui-ci sert en fait de tensioactif pour favoriser la rencontre du KOH (hydrophile) avec les stérols estérifiés (plutôt hydrophobes). L’ajout d’EDTA (acide éthylène diamine tétra-acétique) va favoriser la réaction en chélatant les ions divalents présents dans le mélange. Le BHT (hydroxy-toluène butylé), un puissant antioxydant est ajouté à la réaction pour éviter l’oxydation des lipides sous l’effet de la chaleur.

3. Extraction

Méthode : Extraction liquide/liquide Principe : cf 1ère étape de ce tableau

Protocole : Le mélange binaire est représenté par le mélange utilisé pour la saponification additionné d’eau stérile. Le solvant utilisé pour l’extraction est l’hexane di-éthyléther (1:1). Comme dans la première étape, un mélange par vortex est suivi d’une centrifugation pour l’étape de décantation. La phase récupérée et séchée à la vapeur d’azote est la phase organique (en partie supérieure du mélange cette fois) enrichie en stérols.

4. Dérivatisation

Méthode : Silylation

Principe : La silylation consiste à remplacer un hydrogène acide sur le composé initial par un groupe silyle et ici un groupe triméthylsilyle (-Si(CH3)3). Le composé à modifier est tout d’abord déprotoné avec une base forte. Il va ensuite réagir avec un chlorure de silyle permettant le changement de groupe chimique.

Protocole : Les échantillons sont tout d’abord dissous dans du cyclohexane. La réaction utilise ensuite deux réactifs de

silylation particulièrement adaptés pour réagir sur les stéroïdes : le BSTFA (N, O-

bis(triméthylsilyl)trifluoroacétamide) et le TSMC (chlorure de triméthylsilyle). Le premier, très réactif va agir rapidement sur les composés, le second joue un rôle du catalyseur du premier. Les échantillons sont ensuite séchés à l’azote, repris dans du cyclohexane et conservés à -80 °C avant analyses en GC/MS.

Avantages : Les dérivés ainsi formés sont en général moins polaires, plus volatiles et plus stables thermiquement. De plus, en spectrométrie de masse, la silylation permet de produire de meilleurs schémas de fragmentation des ions aidant l’identification de composés retrouvés en traces dans les échantillons

4.1.3.2 Dosage des stérols par chromatographie en phase gazeuse couplée au spectromètre de masse (GC/MS)

Historiquement, les études identifiant les souches productrices de coprostanol utilisaient la chromatographie sur couche mince (TLC) (Freier et al. 1994; Eyssen et al. 1973) puis les études plus récentes sont passées à la GC (Gérard et al. 2007).

La chromatographie est une technique de séparation des composés d’un mélange complexe reposant sur les différences d’affinités de ces composés avec deux phases non miscibles : une phase stationnaire (couche de silice pour la TLC et une colonne capillaire pour la GC) et une phase mobile (solvants pour la TLC et gaz pour la GC) (Ambrose & Ambrose 1961).

En GC/MS, le mélange est vaporisé en entrée de la colonne capillaire contenant la phase stationnaire et est transporté par la phase mobile (le gaz). Les différents composés vont se séparer et sortir de la colonne successivement à des temps différents appelés temps de rétention. Un composé avec peu d’affinité pour la colonne sortira avant un composé avec une forte affinité. En sortie, les composés ainsi séparés vont être détectés par un spectromètre de masse. Ils vont être ionisés par le passage au travers d’un champ électronique généré entre une cathode (filament chaud) et une anode. Cette technique s’appelle l’ionisation électronique ou EI. L’interaction entre les composés et les électrons libres ainsi créés conduit à la formation d’ions. Ceux-ci sont ensuite séparés sous l’effet d’un champ magnétique généré par un quadripôle. Cette étape constitue en fait une filtration des ions en fonction de leur rapport masse sur charge (m/z). Les ions sélectionnés atteignent le détecteur qui va d’abord convertir les ions en un signal électrique puis amplifier le signal obtenu pour le traitement informatique et la formation de spectres (Silverstein et al. 2005) (figure 18).

Figure 18 : Représentation schématique de la chromatographie en phase gazeuse couplée au spectromètre de masse

Les analyses de GC/MS sont réalisées sur la plateforme lipidomique de l’Institut de Cardiométabolisme et Nutrition (ICAN), Paris, 13ème arrondissement avec un appareil Thermo Fischer Scientific (TRACE 1310-ISG LT). Un volume de 0,3 µL d’échantillon est injecté avec un gradient de température de 250°C à 300°C. Le gaz vecteur est l’hélium et son débit dans la colonne est fixé à 1,2 mL/min. Le spectre de masse est fait à partir de 2 ions spécifiques de chaque composé : le premier est quantitatif (le plus sensible), le second est qualitatif. Le ratio de ces deux ions doit toujours être le même (écart de 20 % maximum) afin d’obtenir toujours la même molécule. L’acquisition des données est réalisée grâce au logiciel XcaliburTM (Thermo Fischer Scientific). Une méthode prédéterminée par la plateforme analyse directement l'aire sous la courbe des pics bien formés sur les composés abondants mais pour les plus petits (comme le coprostanol), il faut le faire manuellement. D’après la plateforme, le seuil de détection du coprostanol est de 5 pg/µL. Ces analyses sont effectuées par Marie Lhomme, ingénieure Recherche & Développement à ICAN.

4.1.3.3 Analyses des données de GC/MS

Dans un premier temps les analyses sont directement menées par la plateforme ICAN qui compare les aires des pics de cholestérol et de coprostanol à celle du standard interne. Ensuite les échantillons sont comparés entre eux pour la production de coprostanol. Dans un second temps, nous analysons les données au sein de l’équipe Ife à l’aide de Microsoft® Office Excel 2007 et du logiciel gratuit RStudio version 3.3.1 pour les statistiques. Les tests statistiques effectués sont des ANOVA suivies quand il y a lieu d’un test de Tukey.

4.1.4 Identification taxonomique des souches commensales nouvellement isolées

4.1.4.1 Extraction d’ADN génomique

Le contenu cellulaire et l’ADN génomique des bactéries coprostanoligènes ou non, nouvellement isolées, a été obtenu selon une méthode de lyse cellulaire mécanique (Cell-D, Constant Systems Ltd.) puis d’une extraction de l’ADN au phénol/chloroforme avant une précipitation à l’éthanol.

Le principe du Cell-D (Constant Systems Ltd.) repose sur l’utilisation de la pression hydraulique pour casser les échantillons biologiques. L’échantillon est placé dans une chambre de cassage, une pression (dont l’intensité est contrôlable) va venir s’exercer sur cette chambre et pousser l’échantillon dans un tube. L’échantillon ainsi broyé va remonter dans une chambre de récupération située au-dessus de la chambre de cassage (figure 19).

Figure 19 : Représentation du Cell-D et des détails du mécanisme de cassage.

D’après le site http://www.constantsystems.com/products/oneshot.php. Le connecteur permet le déclenchement de la montée en pression du piston et la coiffe, qui doit être maintenue par l’expérimentateur est une protection de l’appareil et des utilisateurs compte tenu de la pression exercée.

En fonction de la souche, la mise en culture est faite dans 50 mL de l’un des quatre milieux présentés dans le tableau 5. Après centrifugation, le culot est lavé deux fois avec 2 mL de tampon PBS (NaCl 137 mM, KCl 2,7 mM, Na2HPO4 10 mM et KH2PO4 2 mM; pH 7,4) et ensuite repris dans 2 mL de tampon TE (10 mM Tris et 1 mM EDTA, pH 7,5). Les échantillons sont ensuite passés dans un broyeur cellulaire (Cell-D, Constant Systems Ltd.) avec deux tirs à 2,7 kilobars. Ils subissent ensuite une première phase d’extraction des ADN et ARN au phénol/chloroforme. Puis, un traitement à la RNase A (concentration finale de 200 µg/mL dans les échantillons) pendant 1 h à 37 °C est appliqué avant un second traitement à la protéinase K (concentration finale de 2 mg/mL dans les échantillons) pendant 2 h à 50 °C. Ensuite, une seconde extraction au phénol/chloroforme est appliquée aux échantillons. Enfin, l’ADN est précipité grâce à l’éthanol absolu et au NaCl 0,5 M pendant une nuit à -20 °C. Le culot contenant l’ADN est récupéré après une centrifugation puis repris dans 100 µL d’eau distillée. Les acides nucléiques absorbent à 260 nm alors que les protéines absorbent à 280 nm. Le NanoDrop (ThermoScientific) mesure le ratio de l’absorbance des échantillons à ces longueurs d’ondes dans le but de mesurer la pureté de l’ADN et sa contamination ou non avec des protéines (avec un ratio de ∼ 1,8 l’ADN est considéré comme pur). Il mesure également la contamination par d’autres composés (phénol par exemple, utilisé dans l’extraction d’ADN) en calculant le ratio des absorbances à 260 nm et 230 nm (si celui-ci est aux alentours de 2-2,2, l’échantillon est considéré comme pur). Enfin, le NanoDrop (ThermoScientific) mesure la quantité d’ADN grâce à une version modifiée de la loi de Beer-Lambert en rapportant l’absorbance de l’échantillon à 260

nm à une concentration en ADN. Enfin, une mesure qualitative de la qualité d’ADN des échantillons est réalisée sur gel d’agarose à 0,8 %.

4.1.4.2 Amplification et séquençage de la région V3-V4 du gène de l’ARNr 16S Afin d’identifier l’espèce bactérienne à laquelle appartient l’ADN extrait, nous utilisons le gène codant pour la sous-unité 16S de l’ARN ribosomal (ARNr). Le degré de diversité des séquences de ces gènes est faible entre les micro-organismes d’une même espèce, mais suffisamment élevé entre les micro-organismes d’espèces différentes (Woese 1987). Ce gène est composé de 8 régions très conservées et 9 régions hypervariables, V1-V9 (Baker et al. 2003) permettant de faire la distinction entre les espèces (Van de Peer et al. 1996). Une étude suggère l’utilisation des régions V1-V3 et V1-V4 pour l’identification de bactéries et des régions V1-V3 pour les Archaea (Kim et al. 2011). Les régions V4-V6 semblent elles plus optimales pour la distinction des phyla bactériens (Yang et al. 2016). Pour des raisons de rapidité, nous décidons de séquencer les régions V3-V4 de ce gène pour assigner les bactéries en cours d’étude à des genres voire des espèces.

La réaction d’amplification en chaîne par polymérase (PCR) se fait selon les caractéristiques suivantes : dénaturation à 94 °C pendant 1 min, puis hybridation à 60 °C pendant 1min, amplification à 72 °C pendant 1 min avec un nombre de cycles égal à 30. La séquence des primers utilisés est disponible dans le tableau 7. Il est à noter que des modifications dans ce protocole (notamment température d’hybridation) ont été apportées lorsque cela s’est avéré nécessaire (faible quantité d’ADN, manque de pureté du fragment, etc.). Les molécules d’ADN amplifié ont ensuite été envoyées à la société eurofins Genomics pour le séquençage.

Tableau 7 : Séquences des primers utilisés pour amplifier la région V3-V4 du gène codant pour l’ARNr 16S

Nom du primer Séquence 5’-3’

Forward 5’-CTTTCCCTACACGACGCTCTTCCGATCTACGGRAGGCAGCAG

Reverse 5’-GGAGTTCAGACGTGTGCTCTTCCGATCTTACCAGGGTATCTAATCCT

4.1.4.3 Création de l’arbre phylogénétique

Les séquences sont reçues et analysées pour leur qualité (taille principalement). Ensuite, l’ADN complémentaire est obtenu à partir de la séquence dérivant de la sonde Reverse, puis les deux séquences (celle-ci et celle obtenue à partir de la sonde Froward) sont alignées pour obtenir la séquence entière des régions V3-V4 de l’ARNr 16s. Cette séquence est comparée aux bases de données NCBI (BLASTn). Dans certains cas, l’espèce est identifiée, dans d’autres seulement le genre et parfois, ni l’un ni l’autre n’ont pu être identifiés.

Ensuite, un arbre phylogénétique est créé à l’aide des outils disponibles sur http://www.phylogeny.fr afin de connaitre la distance entre les souches productrices et les souches non productrices de coprostanol.

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