• Aucun résultat trouvé

Materiel et méthode

B. Antibiothérapie: Résistances, Consommations et Politiques de bon usage

1- Résistances bactériennes

1.3 Prévention et maîtrise des épidémies à BMR

1.3.1. Identification des patients porteurs et/ou infectés [55] :

L’identification d’un patient susceptible d’héberger une bactérie multirésistante est plus complexe. Dans une situation de prévalence élevée, l’idéal pour la prévention de la dissémination des BMR est le dépistage de chaque entrant et son isolement en attendant les résultats.

Les contraintes de l’architecture hospitalière (absence ou nombre insuffisant de chambres seules) et les contraintes économiques imposent de cibler les patients.

Si on se réfère aux données de la littérature, on peut proposer un dépistage systématique à l’entrée pour certains patients, tandis que le dépistage se fera au cours du séjour pour les autres selon les risques individuel ou collectif (Tableau

3). Le rythme de la réalisation des prélèvements bactériologiques est très

discuté. Le portage d’une BMR peut être très long (plusieurs mois) ou intermittent. On peut proposer l’attitude suivante :

 Pour un patient porteur d’une BMR, il est impératif d’avoir deux prélèvements négatifs à 72heures d’intervalle avant de lever l’isolement.

 En cas de persistance d’une situation endémique dans un service, un dépistage systématique plus fréquent de tous les patients peut être justifié.

Le dépistage des patients infectés, colonisés ou porteurs se fait par des prélèvements bactériologiques ciblés. Dans un souci de cohérence, d’économie et d’efficacité, il est indispensable de connaître les réservoirs naturels humains des BMR (Tableau 4) et d’organiser ce dépistage en collaboration avec le bactériologiste afin de cibler les recherches et d’adapter les milieux de culture utilisés au laboratoire. Dans tous les cas, il faut chercher le portage au niveau du réservoir principal, rechercher des colonisations asymptomatiques au niveau de réservoirs secondaires (urines, plaies) et éventuellement rechercher des infections en fonction des signes cliniques.

Tableau 3 : Propositions de dépistage des patients susceptibles d’être infectés, colonisés ou porteurs de BMR.

Dépistage dès l’entrée Dépistage durant le séjour

-Patient venant d’un service à risque, d’un service endémique.

-Patient antérieurement porteur, colonisé ou infecté par une BMR.

-Patient présentant un risque élevé : présence de plaie, escarre, sonde urinaire,

trachéotomie, multiples antibiothérapies antérieures.

-Politique du service : dans le cas d’épidémie ou de forte endémie.

-Signes cliniques ou paracliniques d’infection.

-Voisin de chambre d’un sujet infecté, colonisé ou porteur.

-Sujets de chambres adjacentes si deux cas sont reconnus chez les patients proches sur le plan géographique

-Ensemble de patients présents dans l’unité si plus de deux cas sont identifiés ou si deux cas surviennent chez les patients hospitalisés dans des chambres éloignées.

-Patient ayant des antécédents de colonisation ou portage de BMR.

Tableau 4 : SARM et Entérobactéries sécrétrices de BLSE.

SARM Entérobactéries sécrétrices de BLSE

-Muqueuses : Nez, Périnée++ -Peau : Aisselles++ -Plaies, Escarres ++ - Urines -Tube digestif++ -Urines++ -Périnée++ -Escarres, plaie

1.3.2. Hygiène des mains et mesures d’isolement de contact a). Hygiène des mains :

L'hygiène des mains pourrait sauver huit millions de vies par an, et cela dans les hôpitaux uniquement. Par ailleurs, l'action menée en faveur de l'hygiène des mains permet de garantir la sécurité des soins de santé fournis dans l'ensemble du système de santé. [56]

En 2005, l'OMS a lancé le Premier Défi mondial pour la sécurité des patients, à savoir la campagne mondiale annuelle sur le thème : « POUR SAUVER DES VIES : l'hygiène des mains » qui a lancé la Journée mondiale de l'hygiène des mains. Cette journée, observée chaque année le 5 mai, souligne l'importance d'une meilleure hygiène des mains et met en évidence les progrès réalisés dans les établissements de soins de santé du monde entier. [56]

a-a). Observance du lavage des mains conventionnel

Depuis une vingtaine d’années, la plupart des études d’observation mettent en évidence une mauvaise observance du lavage des mains dans tous les secteurs de soins [57–61]. Globalement, l’observance calculée dans ces travaux varie entre 20 et 50 %. En termes pratiques, cela veut dire que, dans le meilleur des cas, quand il est indiqué, un lavage des mains n’est effectivement réalisé qu’une fois sur deux. Si on ajoute que, sur les 50 % des lavages réalisés, la moitié peut être considérée comme inefficace en référence aux techniques en vigueur, il reste 25 % de lavages effectués et efficaces pour éviter la transmission manuportée des germes dans les hôpitaux [62].

La plupart des études ont essayé de préciser les facteurs associés à la non-observance du lavage des mains. Le manque d’équipement constitue évidemment la première limite de cette technique [63].

Une mauvaise perception du risque de transmission des micro-organismes au cours des soins semble également participer à la mauvaise observance [64-65].

Par ailleurs, le lavage des mains est souvent associé à une mauvaise tolérance cutanée qui correspond la plupart du temps à un non-respect de la technique, ce qui en limite d’autant l’utilisation [62].

a-b).Place de la friction hydroalcoolique

L’observance médiocre des personnels médicaux et non médicaux au lavage traditionnel des mains, constamment rapportée dans les études depuis 20 ans, a conduit à réexaminer les techniques proposées ainsi que leur faisabilité dans le contexte réel des activités de soins. Il a alors été montré que compte tenu de la charge en soins des personnels, une amélioration de l’observance ne pourrait être obtenue qu’en proposant une technique d’hygiène des mains plus simple, plus rapide et plus accessible au lit du malade : la friction hydroalcoolique [66].

L’hygiène des mains par friction avec un produit hydroalcoolique est actuellement recommandée comme méthode de substitution au lavage traditionnel [67,68]. Cette technique, très simple, consiste à appliquer directement sur des mains sèches un produit (solution ou gel) contenant en général principalement de l’alcool (éthanol ou iso-propanol) et un émollient puis à frotter jusqu’à évaporation. Cette technique prend environ 30 secondes [69].

Elle ne nécessite aucun point d’eau et donc peut être facilement réalisée au lit du malade. De nombreuses études documentent l’activité in vitro et au cours de simulations de contamination des mains de ces produits. À chaque fois, la réduction de la contamination des mains obtenue avec la friction hydroalcoolique était significativement supérieure à celle obtenue avec le lavage conventionnel quel que soit le type de savon utilisé [63]. Une technique de friction chirurgicale des mains peut également être utilisée en remplacement du lavage chirurgical traditionnel. Cette technique consiste actuellement à effectuer deux applications larges et successives de solution hydroalcoolique après une étape de lavage au savon doux. Elle présente l’avantage d’une plus grande simplicité que la version traditionnelle [70].

b). Mesures d’isolement de contact :

Le bénéfice des programmes de maîtrise de la diffusion des bactéries multirésistantes « endémiques » à l’hôpital n’est globalement pas très clair, voire nul dans certains pays [71]. Il en va différemment de phénomènes « épidémiques » ponctuels là où la mise en place d’un isolement strict et rigoureux des malades (isolement géographique des malades porteurs et isolement de contact) peut permettre l’arrêt des transmissions croisées. Certaines stratégies d’isolement ont fait la preuve de leur efficacité, celle-ci étant mesurée par un taux de transmission malades isolés vs malades non isolés. Par exemple, l’association de huit mesures (isolement de contact des malades colonisés ou infectés, port de gants, surblouse et masque pour les soins des porteurs, isolement jusqu’à éradication, prélèvement des malades voisins et dépistage hebdomadaire, séances régulières d’information notamment sur le lavage antiseptique des mains, éradication du portage et surveillance, dépistage du

personnel) permettait la diminution de la transmission croisée de staphylocoques dorés résistants à la méthicilline (SARM) dans un service de néonatalogie en proie à une épidémie [72].

Dans les études évaluant l’intérêt des mesures d’isolement, souvent l’observance de l’hygiène des mains n’est pas mesurée ou, quand elle l’est, elle est régulièrement faible dans les études ne montrant pas d’impact des mesures d’isolement [73,74]. Enfin, placer un malade en isolement de contact semble être associé à la survenue d’effets adverses que ce soit en termes de qualité des soins ou d’effets psychologiques négatifs [75].