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Idempotent associ´e ` a un tableau d’Young

CHAPITRE 4 : REPR´ ESENTATIONS DU GROUPE SYM ´ ETRIQUE

1. Tableaux d’Young. Alg`ebre du groupe et idempotents

1.3. Idempotent associ´e ` a un tableau d’Young

Les consid´erations de l’alin´ea pr´ec´edent ´etaient tout `a fait g´en´erales. Revenons au cas du groupe Sn et montrons qu’on peut associer un idempotent minimal `a chaque tableau d’Young. Si on sait montrer que les repr´esentations correspondantes sont in´equivalentes et puisqu’on sait qu’elles sont en nombre ad´equat, on aura bien construit toutes les repr´esentations cherch´ees.

Dans l’alg`ebre du groupe Sn, on consid`ere d’abord les deux combinaisons lin´eaires, appel´ees respectivement sym´etriseur et antisym´etriseur

s =X σ σ (1.10a) a =X σ σσ (1.10b)

On v´erifie ais´ement que pour tout τ ∈ Sn, s.τ = τ.s = s et a.τ = τ.a = τa. Par cons´equent s.s = n! s, a.a = n! a, et s.τ.s = n! s, a.τ.a = τn! a, s.τ.a = 0. D’apr`es la proposition de l’alin´ea pr´ec´edent, les idempotents s/n! et a/n! engendrent des repr´esentations irr´eductibles in´equivalentes : ce sont bien sˆur les deux repr´esentations unidimensionnelles que nous avions d´ej`a identifi´ees.

Consid´erons maintenant un tableau d’Young Y de lignes de longueur f1, f2,· · · , fr, et disposons dans les lignes successives les nombres 1,· · · , f1, puis f1+ 1,· · · , f1+ f2, etc... (tableau dit “normal”)

1 2 ... f1 f1+1 ... f1+f2 .. . ... n (1.11) Nous consid´erons alors le sous-groupe H de Sn des permutations qui m´elangent entre eux les chiffres de la premi`ere ligne, entre eux ceux de la deuxi`eme ligne, etc; de mˆeme V d´esigne le sous-groupe des transformations qui m´elangent les chiffres `a l’int´erieur des colonnes. D´efinissons alors le sym´etriseur et l’antisym´etriseur attach´es au tableau d’Young Y par sY = X h∈H h aY = X v∈V vv . (1.12)

Ces ´el´ements de ˜G sont des idempotents, `a une normalisation pr`es, comme on le v´erifie: sY.sY =NYsY, aY.aY = ˜NYaY, o`uNY = f1!f2!· · · (que vaut ˜NY?). Ce ne sont cependant en g´en´eral pas des idempotents minimaux. En revanche on va montrer que le produit

jY = aY.sY = X

h∈H v∈V

vv.h (1.13)

est un idempotent minimal (`a une normalisation pr`es). Avant de donner la preuve g´en´erale, illustrons la propri´et´e sur un cas explicite.

Exemple

Consid´erons le groupe n = 3 et le tableau

Y = . (1.14)

Les groupes H et V qu’on vient de d´efinir se composent respectivement de {e = (123), (213)} et de {e, (321)}. On a donc sY = e + (213) et aY = e − (321), jY =

e + (213)− (321) − (312) et on calcule e.jY = (213).jY = jY ,

(132).jY = (312).jY = (132) + (312)− (231) − (213) ≡ g ,

(321).jY = (231).jY =−(123) − (132) + (231) + (321) = −jY − g . (1.15) On en d´eduit que jY.jY = 3jY. Au facteur 3 pr`es, jY est idempotent et l’id´eal est engendr´e par jY et g : c’est bien la repr´esentation de dimension 2 attendue. On construit facilement les matrices de la repr´esentation dans la base jY, g (qui n’est pas unitaire!) : voir exercice 1.

Cette repr´esentation agit sur des fonctions de trois variables f (x1, x2, x3) `a la mani`ere de la repr´esentation r´eguli`ere

(σf ) (x1, x2, x3) = f xσ−1(1), xσ−1(2), xσ−1(3)



Donc

(jYf ) (x1, x2, x3) = f (x1, x2, x3) + f (x2, x1, x3) − f(x3, x2, x1) − f(x2, x3, x1) (gf ) (x1, x2, x3) = f (x1, x3, x2) + f (x2, x3, x1) − f(x3, x1, x2) − f(x1, x2, x3) forment deux combinaisons lin´eaires m´elang´ees par les op´erations de S3 selon (1.15).

Si on distribue de fa¸con arbitraire les nombres 1,· · · , n dans les boˆıtes d’un tableau, il est clair que l’action des groupes H puis V permet toujours de se ramener `a la situation dite “standard” o`u les nombres sont croissants dans chaque ligne de gauche `a droite et dans chaque colonne de haut en bas. Voici par exemple une configuration standard pour le tableau{2, 1}

Y0 = 1 32 . (1.16)

On peut `a nouveau d´efinir les groupes H et V pour un tel tableau Y0, les idempotents s, a et jY0. On v´erifie dans l’exemple pr´ec´edent que la repr´esentation irr´eductible associ´ee `

a jY0 est ´equivalente `a celle attach´ee au tableau “normal”. Dans le mˆeme ordre d’id´ees, si on avait d´efini ˜jY = sY.aY, on aurait construit une repr´esentation ´equivalente `a celle bas´ee sur jY. Il n’y a donc rien de canonique `a sym´etriser d’abord, puis `a antisym´etriser.

Venons-en `a la d´emonstration de la proposition pr´ec´edente. Elle se fait en plusieurs ´etapes.

(i) On va utiliser la propri´et´e suivante : si une permutation r de Sn n’est pas de la forme v.h, v ∈ V , h ∈ H, deux chiffres i et j d’une mˆeme ligne de Y se retrouvent apr`es action de r dans la mˆeme colonne, aux positions k et l.

i j k

l −→

i

(voir exercice 2). On a donc σkl.r.σij = r o`u σij et σkl sont les transpositions des chiffres indiqu´es en indices, ou encore

r = v.r.h , h∈ H , v ∈ V , v =−1 . (1.17) (ii) Si un ´el´ement y de l’alg`ebre est tel que pour tout h∈ H et pour tout v ∈ V on a

y.h = y

v.y = vy (1.18)

alors y est un multiple de j : y = µj.

Preuve : Tout ´el´ement y de l’alg`ebre se d´ecompose sur la base des ´el´ements r de Sn :

y = X

r∈Sn

yrr , yr C (1.19)

et (1.18) implique que pour tout h ∈ H, tout v ∈ V , et tout r ∈ Sn

yrh = yr , yvr = vyr (1.20)

et donc

yh= ye , yv = yvh= vye . (1.21)

Ceci d´etermine yr pour tout r de la forme v.h. Pour les autres, on utilise la propri´et´e ´enonc´ee en (1.17)

yr = vyr = −yr= 0 . (1.22)

Le lemme est donc ´etabli avec µ = ye.

(iii) Il est ais´e de voir que quel que soit x, y = j.x.j satisfait (1.18). On a donc j.x.j = µxj, et en particulier

j2 = µej (1.23)

En outre on peut montrer et nous admettrons que µe 6= 0, j/µe est donc idempotent, et minimal par le lemme de la section 1.2.

(iv) Si Y et Y0 sont deux tableaux standards correspondant au mˆeme tableau normal, il leur correspond deux repr´esentations ´equivalentes.

Preuve: On consid`ere deux tableaux obtenus l’un `a partir de l’autre par une permutation p. On a donc j0 = p.j.p−1 donc j0.p.j = p.j.p−1.p.j = p.j2 = µp.j 6= 0. Par le point (ii) du lemme de la section 1.2, on en conclut que les deux repr´esentations sont ´equivalentes.

(v) A deux tableaux (normaux) diff´erents correspondent deux repr´esentations irr´eductibles in´equivalentes.

Preuve : soient deux tableaux diff´erents Y et Y0, j et j0 leurs idempotents respectifs. Pour tout

x ∈ G, on note Y0(x) le transform´e du tableau Y0 par l’action de x; on a alors

Comme au point (i), on montre qu’il existe au moins une paire de chiffres i, j qui se trouvent dans une mˆeme ligne de Y et une mˆeme colonne de Y0(x). Si σij est la transposition de i et j, sY.σij = sY et σij.aY0(x) = −aY0(x) donc

sY.aY0(x)= sY.σij.σij.aY0(x)= −sY.aY0(x) = 0 . Par le lemme de la section 1.2, les deux repr´esentations sont in´equivalentes.

Comme on l’a not´e plus haut, le d´ecompte des tableaux d’Young suffit alors `a ´etablir qu’on a le nombre voulu de repr´esentations de Sn et donc le Th´eor`eme ´enonc´e au d´ebut de cette section.

On montre aussi, et nous admettrons, que la d´ecomposition de la repr´esentation r´eguli`ere en repr´esentations irr´eductibles s’effectue `a l’aide des tableaux standards : ra-men´ee `a des repr´esentations irr´eductibles in´equivalentes, elle fait apparaˆıtre des multipli-cit´es, ´egales (cf. chap. 2, sect. 4) `a la dimension de la repr´esentation consid´er´ee. Dans notre exemple de n = 3

D(reg) = D ⊕ D ⊕ D1 2

3 ⊕ D1 3

2 . (1.25)