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Chapitre III : Le Lez, un système karstique complexe

2. Contexte géologique et hydrogéologique

2.2. Hydrogéologie et karstification

2.2.2. Hydrogéologie

Limites du bassin et zones de recharge

Les limites de la zone d’alimentation de la source ne sont pas connues précisément, principalement par manque de connaissance des circulations souterraines, compte tenu de la complexité du bassin. Il est de plus admis que ces limites varient en fonction du niveau de remplissage dans le karst comme le propose Y. Karam (1989). Les études antérieures, comprenant notamment des essais de traçage, permettent néanmoins de connaître les limites approximatives de ce bassin hydrogéologique. Elles ont notamment été compilées par Y. Conroux (2007) pour proposer un contour du bassin du Lez à la station de jaugeage de Lavalette, prenant en compte le bassin d’alimentation de la source du Lez. Ce bassin aurait une extension de 400 km² et est représenté sur la Figure 27. P. Fleury et al. (2008) ne conservent de ce bassin que les zones d’affleurement de l’aquifère principal et les pertes (qui permettent une infiltration rapide) pour donner une estimation de la zone de recharge de l’aquifère, c'est-à-dire le bassin d’alimentation de la source du Lez, qui aurait une superficie de l’ordre de 130 km².

Les parties libres de l’aquifère, qui constituent les zones de recharge directe, sont situées essentiellement { l’Ouest, au niveau du causse de Viol-le-Fort et au Nord (partie Sud du massif du Coutach). L’aquifère affleure en quelques endroits { l’Est et au centre du bassin. Le reste de l’aquifère est captif, sous une couverture de marnes et calcaires marneux du Crétacé inférieur, et au niveau des bassins de Tréviers, de Prades-le-Lez et d’Assas, sous une couverture de marnes et de brèches oligocènes (Figure 27). A ces zones d’affleurement, il faut ajouter les infiltrations localisées au niveau des pertes, présentes notamment le long des failles. Ceci laisse donc l’opportunité que des ruissellements se produisent sur les parties imperméables puis s’infiltrent {

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la faveur de pertes. C’est ce qui est notamment observé au niveau de la combe de Mortiès (Figure 27). Lors de pluies, un fort ruissellement peut être observé, et cette zone est drainée par le ruisseau du Yorgues qui vient ensuite se perdre au voisinage de la faille de Corconne. De la même façon, le Causse de l’Hortus, en partie drainé par des sources temporaires sur sa bordure Est, peut indirectement contribuer { la recharge de l’aquifère principal. Les sources drainant la partie Est du Causse donnent naissance à des ruisseaux (Brestalou de Lauret et de Claret notamment) qui se perdent { l’approche de la faille de Corconne. Des traçages au niveau de ces pertes démontrent leur relation avec la source du Lez (G. Marjolet & J. Salado, 1976 ; Y. Karam, 1989). A titre d’exemple, un traçage effectué au mois d’avril 1976 par G. Marjolet a consisté en l’injection d’un colorant dans la perte du Brestalou de Claret sur la faille de Corconne. Le colorant est ressorti 12 jours plus tard à la source du Lez. La vitesse apparente de propagation (vitesse considérée pour un trajet en ligne droite) pour ce traçage est de 57 m/h ce qui est assez rapide.

Circulation supposée des eaux souterraines

Les failles et la présence de formations imperméables font de l’aquifère du Lez un karst de type karst barré, et permettent l’apparition des sources du Lez et du Lirou (Figure 28 et Figure 30).

Figure 28 : Source du Lirou à sec en Juin 2010.

Les failles séparent l’aquifère du Lez en plusieurs compartiments. Les échanges d’un compartiment { l’autre sont mal connus et de nombreux essais de traçage ont été effectués afin de connaître au mieux les relations des différents compartiments entre eux, ainsi qu’avec la source du Lez. Une synthèse des travaux réalisés pour déterminer les connexions des différents compartiments de l’aquifère entre eux et avec la source du Lez a été proposée par P. Bérard (1983). Elle est ici présentée sous forme de carte en Figure 29. Sur cette carte sont également positionnés les exutoires secondaires de l’aquifère du Lez, ainsi que des aquifères perchés, qui se situent dans le bassin d’alimentation de la source du Lez ou autour de celui-ci. Seules les circulations principales sont représentées.

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Figure 29 : Fonctionnement hydrodynamique supposé, d’après P. Bérard (1983).

Les étoiles correspondent aux principales sources ou pertes et les flèches aux directions supposées de circulation souterraine.

P. Bérard (1983) distingue trois compartiments pour le système du Lez, qui sont ici présentés du Nord au Sud et de l’Ouest vers l’Est.

 Le premier compartiment consiste en la partie Nord-Ouest du bassin où l’aquifère du Lez est essentiellement sous couverture. Il faut noter à cet endroit la présence du Causse de l’Hortus qui, comme nous l’avons indiqué précédemment, permet l’infiltration des eaux de pluie de manière indirecte dans l’aquifère du Lez. Le Causse de l’Hortus peut être partagé, en ce qui concerne les écoulements souterrains, en deux zones : la partie Ouest alimentant le bassin de l’Hérault par des sources telles que la source de Lamalou, la partie Est alimentant l’aquifère du Lez (Foux de Lauret et de Pompignan). La limite du bassin d’alimentation de la source du Lez n’est donc pas connue précisément pour ce compartiment ; elle est de plus susceptible de varier en fonction du niveau piézométrique. Dans ce premier compartiment, la seule partie où l’aquifère du Lez est libre se trouve au niveau du massif du Coutach, situé tout { fait au Nord du bassin d’alimentation de la source du Lez. Le massif du Coutach est un massif calcaire, dont les eaux sont partagées entre la source du Lez et les sources de Sauve qui donnent naissance au Vidourle. Il n’apparaît donc pas entièrement sur la carte présentée en Figure 27 qui se focalise sur la partie Sud, probablement drainée par la source du Lez. De la même façon que pour le Causse de l’Hortus, la limite entre le bassin d’alimentation des sources de Sauve et celui de la source du Lez est mal connue et évolue en fonction du niveau piézométrique (P. Bérard, 1983 ; Y. Karam, 1989).

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Concernant les circulations souterraines de ce compartiment Nord-Ouest, la relation de ce secteur avec la source du Lez a été démontrée par des traçages réalisés au niveau des pertes présentes dans la partie Nord de la faille de Corconne qui forme la bordure Est du compartiment. Ces traçages, déjà évoqués au paragraphe précédent démontrent le rôle de drain joué par la faille qui conduit les écoulements à la source du Lez (la vitesse de transfert de l’ordre de 50 m/h).

Enfin la présence du Pic-Saint-Loup immédiatement au Sud-Ouest de ce compartiment empêche la communication avec le compartiment du Causse de Viol-le-Fort, situé au Sud- Ouest du bassin d’alimentation de la source du Lez.

Figure 30 : Coupe hydrogéologique simplifiée de l'aquifère du Lez d’après P. Fleury et al. (2008).

 Le deuxième compartiment est le plus grand, il est composé de toute la partie Est du bassin d’alimentation de la source du Lez, comprenant la source elle-même et séparée de la partie Ouest par la faille de Corconne. Le compartiment comprend les bassins d’effondrement de Tréviers, Prades-le-Lez et Assas (voir Figure 29) au niveau desquels le karst est totalement sous couverture, et une zone où le karst affleure par endroits, correspondant { la partie Est du bassin d’alimentation de la source du Lez.

Ce compartiment comprend la source du Lez, il reçoit donc de l’eau provenant des deux autres compartiments et en particulier du Causse de Viol-le-Fort.

P. Bérard (1983) évoque également une connexion possible avec le Causse de Pompignan situé au Nord-Ouest du bassin d’alimentation de la source du Lez. Les sources temporaires proches de la source du Lez, par exemple Gour Noir et Fleurettes, sont en relation directe avec la source du Lez et constituent donc des exutoires secondaires au système karstique du Lez.

Concernant les écoulements souterrains dans la partie Nord de ce compartiment, les failles de direction Nord-Est Sud-Ouest situées dans cette zone permettent de drainer les écoulements vers la source. En particulier, le site expérimental du Terrieu (Voir carte Figure 27 et photo Figure 31), équipé de plusieurs forages, a permis d’étudier ces écoulements vers la source du Lez soit par des essais de traçages, soit par l’étude des variations piézométriques dans ces forages, en réponse au pompage à la source du Lez. Les différents auteurs ayant travaillé sur ce site (R. Botton, 1984 ; M. Jazayeri Noushabadi, 2009) concluent à une relation très étroite de ce secteur Nord avec la source du Lez. On peut noter que la relation hydraulique de ce compartiment avec la source du Lez, en

99 réponse au pompage de cette source a été démontrée vers le nord jusqu’au niveau du piézomètre de Fontanès (voir carte Figure 32). Ce compartiment comprend donc au moins une partie de la zone d’influence du pompage de la source du Lez.

Figure 31 : Forages sur le site expérimental du Terrieu.

 Le troisième compartiment défini par P. Bérard (1983) correspond au Causse de Viol-le- Fort qui est une importante zone d’affleurement des calcaires constitutifs de l’aquifère principal. Il est limité au Sud par le pli de Montpellier et { l’Est par la faille de Corconne. Le causse se poursuit au-delà de la limite Ouest proposée sur la carte Figure 29, cette limite Ouest est approximative car le causse est drainé, { l’Ouest, par la Mosson.

La faille de Corconne joue un rôle d’écran partiel en bloquant une partie des écoulements du côté Ouest vers le coté Est. Ceci est démontré par le drainage de ce secteur en hautes eaux par la source du Lirou qui doit atteindre un niveau suffisant pour déborder par- dessus les marnes, mises en contact par la faille (coté Est) avec les calcaires (côté Ouest), comme représenté en Figure 30. De plus, l’expérience récente de traçage conduite par V. Léonardi (HydroSciences Montpellier) dans le cadre du Projet Lez Gestion Multi-Usages, effectuée au printemps 2010, a mis en évidence une circulation profonde au travers de la faille, sous les marnes imperméables (en vert sur la Figure 30). Un colorant injecté { l’aven de la Fausse Monnaie (carte Figure 29) est ressorti 25 jours plus tard à la source du Lez, prouvant ainsi la relation entre le Causse de Viol-le-Fort et la source du Lez. Le traceur a également été détecté à la source du Lirou, 19 jours après l’injection. La vitesse apparente (en ligne droite) de transfert est d’environ 10 m/h pour la source du Lez.

Plus récemment, C. Caetano Bicalho (2010) a conduit une étude hydrochimique qui lui a permis de caractériser différents types d’eau arrivant { la source du Lez, notamment lors des crues. Un type d’eau particulier, géochimiquement évolué, a été identifié. Ces eaux correspondent selon l’auteure { des eaux à signature évaporitique. Les évaporites sont présentes dans la couche géologique datant du Trias, situé en-dessous du Jurassique inférieur qui est la dernière couche représentée sur la Figure 19. Ces résultats mis en relation avec des considérations

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hydrogéologiques telles que la présence d’une karstification profonde due { la crise messinienne (voir paragraphe 2.2.1) permettent { l’auteure de proposer la présence d’un compartiment profond de l’aquifère du Lez, sollicité lors des crues de reprise après l’étiage. Les eaux du Lez seraient ainsi un mélange entre les eaux d’infiltration rapide, les eaux de l’aquifère principal et les eaux du compartiment profond.

2.2.3. Instrumentation du bassin et interprétation des séries chronologiques