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Chapitre 3. Incorporation de l’iode dans les verres nucléaires sous haute pression

3.1 Homogénéité des verres dopés en iode et saturation de l’iode

L’inspection des échantillons par microscopie optique, ou en imagerie en électrons rétrodiffusés, permet de vérifier si des bulles sont présentes dans les échantillons synthétisés à haute pression, ou si une séparation de phase a eu lieu. Néanmoins, ces techniques sont insuffisantes pour qualifier l’homogénéité des teneurs en iode dans un échantillon. De même, ces techniques sont limitées pour mettre en évidence des phases cristallines dans un échantillon qui en apparence est totalement vitreux. Cette courte partie présente une expérience menée pour contrôler l’homogénéité de l’iode, ainsi que deux analyses DRX réalisées pour contrôler la présence de phases cristallines, dans des verres synthétisés à haute pression.

3.1.1 Homogénéité des teneurs en iode dans la capsule

L’échantillon C20N15-2’ (1.5 GPa, 1400°C, 4h, tableau 3.1) a été utilisé pour contrôler l’homogénéité de la teneur en iode dans le verre à l’échelle de la capsule (figure 3.1). L’échantillon C20N15-2’ est une réplique de l’échantillon C20N15-2, dans lequel des teneurs en iodes élevées ont été mesurées (4.7 ± 0.3 mol %, tableau 3.1). Les teneurs en iode élevées dans cet échantillon mettent plus facilement en évidence des disparités dans les teneurs en iode au sein de l’échantillon. La capsule a été montée dans un plot en résine, puis coupée en deux, afin d’obtenir une tranche proche de l’axe de l’échantillon (la géométrie de l’échantillon est cylindrique).

La géométrie de la surface exposée de l’échantillon est une tranche rectangulaire. L’une des surfaces ainsi exposées a été polie selon le même procédé que les autres échantillons avant les campagnes d’analyse au SEM-EDS. Trois profils de dix points ont été acquis sur l’axe longitudinal de la capsule, près des bords et au centre de la capsule, pour un total de 30 points. On voit sur la figure 3.1 que la concentration en iode n’est pas totalement homogène dans l’échantillon, malgré 4h d’expérience. Les teneurs en iode mesurées s’étalent de 4.1 à 5.1 mol % (figure 3.1). La teneur la plus élevée est atteinte au bas de la capsule, là où se situe la charge initiale. Cette valeur est un cas particulier qui n’est pas représentatif de la teneur en iode dans le reste de la capsule. Avec les 29 points restants, la teneur moyenne en iode est de 4.4 mol %, pour un écart type de 0.2 mol.%. Cette erreur est considérée comme représentative de l’erreur sur la teneur en iode pour tous les échantillons, dans la mesure où : 1) les morceaux de verres sélectionnés sont ceux se situant vers le centre de l’échantillon synthétisé, 2) plusieurs morceaux sont sélectionnés pour l’analyse SEM-EDS, à défaut d’avoir un morceau large ou une section de l’échantillon provenant de la zone centrale de la capsule.

Figure 3.1 : Cartographie de la teneur en iode dans un échantillon haute pression par SEM-EDS. La capsule récupérée après expérience a été résinée, puis coupée en deux et polie. 30 scans ont été réalisés selon un quadrillage régulier. Le bas de la capsule est particulièrement concentré en iode (c’est là que se trouve la charge initiale). La résolution est de 10 par 3 valeurs, les isoteneurs sont calculées par extrapolation linéaire.

3.1.2 Apparition de phases cristallisées

À cause du faible volume de synthèses en piston cylindre, les analyses par diffraction des rayons X (DRX) ont été limitées par la faible masse disponible des échantillons synthétisés (< 300 mg par expérience). Pour cette raison, seuls quelques diffractogrammes ont été acquis, à l’aide d’un diffractomètre INEL, équipé d’un tube à rayons X à anode Cu, et un monochromateur en quartz. Le détecteur est un multicanal courbe INEL CPS 120° fixe, d’une résolution de 0.03°. Les échantillons sont placés dans des tubes capillaires en verre. Seuls deux diffractogrammes de deux échantillons différents ont été acquis (figure 3.2).

Aucune phase cristalline n’a pu être clairement mise en évidence par les analyses DRX (figure 3.2), si ce n’est un peu de cristobalite dans le cas des échantillons TY, comme souligné de manière bien plus intense par les analyses Raman et RMN (Annexes 1 et 2). La présence de cette phase n’est pas surprenante vu la teneur en silicium de ce verre (tableau 3.1). Cet échantillon ne montre pas de pics caractéristiques d’une phase cristalline (figure 3.2). Du NaI cristallin a été détecté par RMN du 23Na dans l’échantillon C0N35-1 (Annexe 1).

mol.% I

Figure 3.2 : Diffractogrammes de deux échantillons dopés en iode, suspectés de contenir des phases cristallines à cause de leur coloration. Le pic à droite du diffractogramme de l’échantillon ISG 23 est un artéfact de mesure. La forme de diffractogrammes présentés est typique de ce qu’on pourrait attendre d’un verre, toutefois deux pics fins apparaissent vers 25°, et peuvent potentiellement signer la présence de microcristaux dans ces échantillons. Le pic du diffractogramme de TY33 pourrait correspondre à de la cristobalite, qui est également présente sur certains spectres Raman et RMN (Annexes 1 et 2), et qui est susceptible d’apparaitre dans cette composition particulièrement riche en silicium (tableau 3.1). Aucun diffractogramme de semble correspondre au motif du NaI, mais il est possible qu’il existe des cristaux submicrométriques de NaI (<50 nm, le seuil de détection de l’appareil) en infimes quantités, qui ne peuvent être détectés.

3.1.3 Immiscibilité de l’iode et formation d’inclusions d’I2

Des inclusions ont été observées dans toutes les synthèses TY, mais aussi de manière moins marquée dans quelques échantillons ISG, comme ISG 31, 32-2, 33-1 et 2 (figure 3.3). Ces inclusions sphériques, opaques, et noires (figure 3.3) colorent l’éthanol lorsqu’on broie ces échantillons, et s’évaporent à la chaleur en produisant une fumée violette. Ces observations sont caractéristiques de l’iode sous sa forme I2. La présence d’inclusions solides de I2 montre que les synthèses se déroulent dans des conditions qui amènent la phase liquide à se saturer en iode. Les teneurs en iode mesurées par SEM-EDS sont donc représentatives de la solubilité de l’iode pour ces compositions.

Figure 3.3 : Microphotographie d’un morceau de l’échantillon TY 31. Les échantillons TY contiennent une grande

quantité d’inclusions de I2. Les verres borosilicatés ne contiennent que très rarement de telles inclusions. Des

inclusions de I2 sont présentes dans l’échantillon ISG 32-2, mais de manière bien plus sporadique que dans les

échantillons TY. TY 31 1500°C 0.5 GPa 1 mm I2 inclusions 0.5 mm ISG 32-2 1500°C 1.0 GPa

L’expérience C20N15-2’ montre que les teneurs en iode ne sont pas parfaitement homogènes dans les échantillons synthétisés à haute pression. Néanmoins, les écarts entre les teneurs sont relativement faibles dans la majorité de la capsule, conduisant à un écart type de 0.2 mol.% sur les teneurs de l’ensemble de la capsule. Des analyses sur plusieurs morceaux provenant du centre de la capsule seront représentatives de l’échantillon.

L'analyse DRX ne montre pas de phases cristallines dans l’échantillon ISG 23-1, alors que des phases cristallines étaient fortement suspectées à cause de sa coloration marquée. Par conséquent, les échantillons borosilicatés sont considérés comme totalement vitreux dans le reste de cette étude, sauf exception. Les échantillons TY contiennent de faibles quantités de cristobalite.

Des inclusions de I2 sont présentes dans certains échantillons, particulièrement dans les échantillons de la série TY : ces inclusions attestent que le verre est saturé en iode, et que les teneurs en iode mesurées dans le verre sont représentatives de la solubilité de l’iode dans la phase vitreuse.