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Chapitre 2. Méthodologie expérimentale et instrumentation

2.4 Analyses SEM/EDS

La microscopie électronique à balayage couplée à la spectrométrie d'émission X dispersive en énergie (SEM/EDS en anglais) est une technique d’analyse chimique largement utilisée dans la recherche scientifique et le développement technologique (Goldstein et al. 2003). Les pics de rayon X induits par excitation électronique permettent d’identifier et de quantifier pratiquement tous les éléments du tableau périodique (excepté les plus légers : H, He, Li). Le seuil de détection et de quantification dépend de l’élément considéré, du matériau dans lequel il se trouve, ainsi que des conditions d’analyse.

La technique SEM/EDS permet, avec un protocole rigoureux, de quantifier la plupart des éléments avec une bonne précision (de l’ordre de 0.1 at.%, Ritchie 2011, Ritchie et al. 2012). Simple à employer, elle a été largement utilisée dans le cadre de cette thèse, pour quantifier les halogènes dans les verres synthétisés, mais aussi pour vérifier une bonne homogénéité des verres produits, et l’absence de séparation de phases (figure 2.5). Le cas échéant, les échantillons concernés sont écartés de l’étude.

Les campagnes d’analyses ont été menées avec un JEOL JSM 5800LV SEM, équipé d’un spectromètre à dispersion d’énergie SDD SAMx. La tension était de 15kV, et le courant de 0.5nA, pour toutes les campagnes d’analyses. Le courant du faisceau d’électrons est contrôlé régulièrement lors de chaque campagne d’analyse.

Les échantillons sont résinés en plots, puis polis. L’aspect de surface est un paramètre important dans les analyses par SEM/EDS, le polissage doit être rigoureux pour garantir une mise au point régulière sur toute la surface analysée par le faisceau. Les plots sont polis avec du papier abrasif au carbure de silicium, de 400/P800 à 1200/P4000 pour une rugosité de surface de l’ordre de 20µm. Sur chaque plot se trouve un morceau de verre ISG, qui sert de référence pour chaque campagne d’analyse.

L’assignation des éléments sur le logiciel de pilotage du spectromètre est manuelle. Le temps d’acquisition est de 60s par scan, afin de réduire la concentration minimale d’identification (critère de seuil de pics, voir Newbury & Ritchie 2013). Le logiciel prend en compte les pics mineurs pour chaque élément analysé, afin de réduire le risque de mauvaise interprétation sur des pics de faible intensité.

La quantification des éléments est réalisée avec des standards internes : LaB6 pour B2O3, de l’alumine pour Al2O3, de la wollastonite pour le SiO2 et le CaO, du NaCl pour Na2O et le chlore, et du RbI pour l’iode. Les dérives éventuelles sont corrigées à partir du verre standard ISG, considéré, généralement de l’ordre de 0.2 mol. %. La quantification de certains éléments est problématique, notamment le bore. Cette limitation n’est pas un obstacle dans cette étude, car la composition en majeur varie assez peu (le verre de départ étant toujours le même).

La justesse de la quantification d’un élément donné dépend de plusieurs paramètres, comme la capacité du détecteur à mesurer l’énergie des photons X que l’élément émet (voir Lyman et al. 1990), le rendement des éléments (dépendant du numéro atomique), ou encore de paramètres

Figure 2.5 : Exemple d’mage en électrons rétrodiffusés d'un échantillon. L’échantillon présenté ici a été supprimé du jeu de donné de cette étude car il est fortement hétérogène, contient des bulles, mais aussi des phases non vitreuses. En cela il représente tout ce que l’on cherche à éviter pour une matrice de conditionnement vitreuse. La quantité d’électrons rétrodiffusés est proportionnelle au numéro atomique. Les zones claires sont donc enrichies en éléments lourds, tandis que les zones sombres contiennent plutôt des éléments légers. Le point 1 est une phase saline NaI. Cette phase apparait en clair, car l’iode est un élément lourd. Les points 2 et 3 sont situés sur deux phases vitreuses de composition légèrement différente (visible par le contraste). L’échantillon contient également une grande quantité de bulles, formant des cavités sphériques après le polissage. Les zones homogènes en termes de couleur, à gauche et à droite, sont la résine supportant l’échantillon. Un verre homogène serait une surface d’une couleur unique et sans contrastes, comme ici la résine forme une surface homogène, car elle est homogène chimiquement.

Le protocole établi dans le cadre de cette étude est empirique. La méthode utilisée vise à s’affranchir de la complexité physique derrière ces analyses. En contrepartie cette méthode impose l’utilisation d’un échantillon de référence lors de chaque campagne d’analyse. Un morceau de verre ISG est analysé en début et fin de chaque campagne d’analyse. Le tableau 2.3 montre les résultats obtenus et corrigés des analyses chimiques par SEM-EDS des verres synthétisés à pression atmosphérique.

Tableau 2.3 : Résultats des analyses SEM-EDS (Annexe 4, Jolivet et al. 2019). Les majeurs sont corrigés à partir des valeurs obtenues pour ISG dans chaque campagne de mesures, le protocole de correction est donné dans le texte. Le protocole comprend une normalisation, ce qui fait que la somme des majeurs est de 100 mol.%.

Échantillon SiO2 Al2O3 B2O3 b CaO Na2O mol.% ISGa 60.2 3.8 16.0 5.7 12.6 ISGV 61.1 (1.3) 3.7 (0.2) 17.9 (0.2) 5.4 (0.6) 11.9 (1.1) BFS 38.3 (0.9) 9.6 (0.3) 17.7 (0.2) 27.5 (0.6) 6.9 (1.2) BFS-Si 44.8 (0.0) 9.2 (0.1) 12.0 (1.0) 26.9 (0.1) 7.0 (1.2) BFS-B1 34.0 (0.3) 8.9 (0.0) 22.9 (0.1) 27.8 (2.9) 6.4 (0.2) BFS-B2 33.2 (0.6) 10.0 (0.6) 22.4 (3.3) 27.7 (0.5) 6.8 (0.6) BASN1 39.6 (0.4) 10.5 (0.3) 29.3 (2.4) 20.6 (0.3) BASN2 34.7 (1.2) 10.6 (0.4) 32.3 (1.7) 22.4 (0.5) BASN3 64.6 (3.6) 11.1 (2.6) 1.4 (0.9) 22.9 (1.0) BASN4 62.8 (1.7) 10.5 (1.1) 5.6 (1.0) 21.1 (0.6) NH 43.0 (0.7) 9.4 (0.4) 16.5 (0.7) 8.1 (0.1) 22.9 (0.5) LJ1 33.2 (0.4) 49.7 (2.0) 17.1 (1.1) LJ2 42.5 (1.2) 41.1 (4.0) 16.4 (3.9) LJ3 49.6 (3.9) 3.1 (0.3) 34.5 (3.9) 12.8 (1.6) LJ4 50.9 (1.8) 3.0 (0.2) 33.7 (1.5) 12.4 (1.1) LJ5 45.4 (1.6) 5.1 (0.2) 30.8 (0.7) 8.0 (0.4) 10.5 (0.5) LJ6 57.1 (1.2) 4.9 (0.3) 20.5 (1.6) 7.5 (0.3) 10.1 (0.3) LJ7 59.2 (1.6) 6.4 (0.2) 13.7 (0.7) 1.1 (3.9) 19.7 (0.2) LJ8 64.6 (1.0) 5.7 (0.5) 8.4 (3.2) 8.1 (0.4) 13.1 (2.4) LJ2b Al 34.2 (0.4) 3.8 (0.1) 39.5 (1.0) 22.5 (1.2) LJ4b Al free 49.0 (0.9) 33.6 (1.1) 17.4 (0.3)

a La composition ISG sert de point de référence sur chaque plot d’échantillons. Elle est analysée plusieurs fois tout au long de la campagne de mesure, et sert à corriger la dérive du spectromètre.

b La teneur en bore est calculée à partir d’un coefficient de correction, obtenu à l’aide de l’échantillon de référence (ISG). L’erreur indiquée ici est l’écart-type sur 10 à 15 mesures avant la correction.

L’analyse du verre ISG lors de chaque campagne d’analyse permet d’établir la dérive entre la teneur théorique et mesurée d’un élément donné. 15 à 20 scans sont effectués pour l’échantillon de référence ISG, et 10 à 15 scans pour les échantillons à analyser. La composition chimique retenue est une moyenne de ces scans (un scan anormal n’est pas pris en compte). Cette dérive est susceptible de varier entre chaque campagne d’analyse, car il est impossible d’avoir des paramètres d’analyse parfaitement identiques entre chaque campagne d’analyse. La dérive est calculée et corrigée indépendamment pour chaque élément. Ici est considéré que la part la plus significative de l’erreur sur la quantification des majeurs est liée à des paramètres d’analyse. Le bore est un cas particulier. La part la plus significative de l’erreur concernant le bore est liée à sa détection.

Le total mesuré des majeurs ne peut pas atteindre 100% à cause du bore. La valeur manquante pour boucler l’analyse à 100% est un indicateur de la quantité de bore non observé. Toutefois cette valeur n’est pas fiable pour le calcul de la teneur en bore, car elle dépend de nombreux paramètres, comme le courant appliqué. La modification du courant va non seulement modifier la valeur du bouclage, mais aussi le rendement d’émissions du bore. La correction de la teneur en bore est appliquée à l’aide d’un coefficient, calculé à partir de l’échantillon de référence (ISG). Après correction des majeurs, bore compris, la composition est normalisée à 100%. La figure 2.6 confronte les résultats SEM-EDS aux résultats ICP-OES (tableaux 2.2 et 2.3, Anexe 4, Jolivet et al. 2019). Seuls les éléments parmi les plus légers y sont présentés (B, Na, Si), car ce sont ceux qui présentent les plus grandes dérives. Il faut noter que le Ca, bien plus gros que le B, Na, ou Si, ne dérive quasiment pas, car il a un très bon rendement. L’Al est également un élément facile à quantifier, dont la dérive est généralement très faible bien qu’il soit plus petit que le Si. Aucune référence n’a été utilisée pour éprouver la quantification de l’iode, car c’est un gros élément dont la quantification est aisée par SEM-EDS. Les erreurs indiquées dans le tableau 2.3 sont des écarts types sur les scans pris en compte dans la composition retenue.

Figure 2.6 : Teneur en B, Na et Si de différents verres non dopés en iode par ICP-OES vs SEM-EDS. Les erreurs par ICP-OES sont plus petites que les figurés. Les teneurs obtenues par SEM-EDS sont assez proches des teneurs obtenues par ICP-OES, considérées comme plus justes.

Ce protocole de correction est difficilement applicable pour des verres dont la composition est trop éloignée du verre de référence. En particulier si la teneur en bore des verres analysés est élevée au regard du verre de référence.

SiO2 B2O3 Na2O

Cette méthode peut être considérée comme appropriée dans le cadre de cette étude sur l’incorporation de l’iode dans les verres, dans la mesure où : 1) la composition de départ (hors teneur en iode) est toujours identique, on travaille toujours avec les mêmes verres, 2) l’échantillon analysé à une composition proche de l’échantillon de référence (au moins sur la teneur en bore), 3) la quantification précise des majeurs n’est pas particulièrement critique, 4) l’iode est facile à quantifier par SEM-EDS.