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Historique du projet de ligne à grande vitesse entre Bordeaux et Toulouse : de

PARTIE 1 – LA PARTICIPATION DU PUBLIC DANS LES POLITIQUES

I. Historique du projet de ligne à grande vitesse entre Bordeaux et Toulouse : de

tracé

La LGV Bordeaux-Toulouse est l’un des tronçons appartenant à un projet plus général connu sous l’appellation LGV Sud-Europe-Atlantique (LGV SEA). L’enjeu de la LGV SEA est de desservir l’Ouest de la France en TGV141

.

Pour cela, un premier tronçon a été construit entre Paris et Saint-Pierre- des-Corps (banlieue de Tours) et mis en service en septembre 1990. Ce tronçon central permet, tel qu’il a été conçu, d’une part d’étendre le réseau ferroviaire à grande vitesse vers

Rennes, puis Brest et

Nantes (respectivement connu sous les appellations LGV Bretagne et LGV Atlantique), et d’autre part de descendre vers le Sud-ouest en desservant plusieurs métropoles ou agglomérations.

Le projet du Sud-Ouest se compose d’un tronçon central, restant encore à construire, de Tours à Bordeaux, suivi de trois branches : l’une reliant Bordeaux à Toulouse, l’autre descendant de Bordeaux vers l’Espagne en passant par Dax et Hendaye et la dernière connectant Poitiers à Limoges.

Carte 1 : le projet global de la LGV SEA Source : www.lgv-sea-tours-bordeaux.fr

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Par ailleurs, l’enjeu consiste également à achever le maillage ferroviaire en permettant une liaison Sud-Sud reliant Bordeaux, Toulouse, Narbonne, Montpellier et Marseille. Cette liaison nouvelle viendrait raccorder le réseau à grande vitesse en service depuis décembre 2013 entre Toulouse et Barcelone via Perpignan. En effet, une liaison grande vitesse entre Paris et Barcelone a d’ores et déjà été mise en place en utilisant la ligne Sud-Est : Paris, Valence, Nîmes, Perpignan, Barcelone. Il est important de souligner que sur cet axe, à ce jour, les TGV empruntent toujours une voie ferrée classique entre Nîmes et Perpignan. En outre, bien que les lobbies pro-LGV fassent pression sur le gouvernement pour que ce tronçon soit inscrit dans les travaux prioritaires à réaliser avant 2030, aucune date précise n’a été fixée à ce jour. D’autant que la création d’une ligne grande vitesse est actuellement en cours de construction entre Nîmes et Montpellier pour une mise en service prévue en 2017.

Dans cette partie, il va s’agir d’examiner plus en détail comment le schéma national des infrastructures ferroviaires s’est mis en œuvre pour le Sud-Ouest de la France. Tout d’abord, à l’origine, ce schéma ne constitue qu’une intention étatique. Puis, il a fait l’objet d’une appropriation par les collectivités territoriales, et notamment par les conseils régionaux contribuant peu à peu à ancrer cette intention dans leur territoire. Le projet de LGV entre Bordeaux et Toulouse a été ainsi progressivement « récupéré » afin d’apparaître dans les documents d’urbanisme des collectivités locales concernées. En particulier dans l’Agenais, secteur géographique qui nous intéresse dans le cadre de cette étude, l’inscription d’un tracé dans le POS142 s’est matérialisée très tôt, dès 1998. Aussi, il s’avère que, bien avant la mise en débat public du projet (2005), le tracé de la LGV s’est déjà trouvé confronté à de nombreux échanges institutionnels. Ces derniers constituent autant d’épreuves successives ayant contribué à le façonner de manière significative.

Nous allons voir comment les éléments de contexte inhérents à la fois au projet de LGV

entre Bordeaux et Toulouse tel qu’envisagé par l’Etat et aux spécificités du territoire dans lequel l’aménagement s’inscrit permettent de saisir l’évolution du projet avant même que celui-ci ne soit confronté à l’épreuve du débat public. Effectivement, la

manière dont le projet s’est progressivement mis en place au niveau de l’Etat avant de venir frapper à la porte de l’Aquitaine va impacter la dynamique civique au moment du débat public. Inscrire la dynamique d’élaboration du projet dans son contexte et sa temporalité permet d’appréhender les différentes épreuves qui ont façonné corrélativement le projet LGV et les formes de participation citoyenne. De l’échelon national, matérialisé par le SNIT, à

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l’échelle intercommunale, consacrée par le SDRA (document d’urbanisme agenais), en passant par le contrat de plan Etat-région, le projet de ligne à grande vitesse entre

Bordeaux et Toulouse a fait l’objet de choix politiques, préalables à la mise en discussion publique, qu’il est nécessaire d’éclairer pour comprendre précisément ce qui s’est joué au moment des débats CNDP. C’est donc dans ce contexte particulier que les citoyens

seront appelés à donner un avis et à se prononcer sur l’opportunité du projet en 2005 comme nous le verrons dans le chapitre suivant.

I.1. La conception du projet LGV : d’une intention étatique à son interprétation par le maître d’ouvrage

I.1.a. Adoption et mise en œuvre du schéma national des infrastructures ferroviaires (SNIT)

Le succès des lignes nouvelles à grande vitesse mises en service entre Paris et Lyon en 1981 et 1983 nourrit les ambitions du gouvernement Mitterrand récemment élu, en termes de progrès et d’infrastructures. Lors du conseil des ministres du 31 janvier 1989, le gouvernement décide d’élaborer un schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse. Cette élaboration, engagée par arrêté ministériel du 29 décembre 1989, s’inscrit dans le cadre des dispositions de la loi d’orientation des transports intérieurs (LOTI) du 30 décembre 1982. Le gouvernement entend impulser sur le territoire un aménagement cohérent et innovant en termes d’infrastructures ferroviaires capable de concurrencer l’avion et la voiture. L’Etat fixe les grandes orientations en concertation avec les différentes régions mais n’est pas évoquée, à l’époque, la réalisation effective des différents éléments composant le schéma directeur. En ce sens, dans le rapport de présentation du SNIT tel que proposé par le ministère de l’équipement, du logement et des transports, il est précisé que ce « schéma directeur n’est pas un document de programmation »143. Comme le souligne le rapport : « un

tel schéma directeur a pour vocation d’évaluer les besoins avec suffisamment d’anticipation, compte tenu de l’importance des délais de réalisation des lignes ». Autrement dit, le SNIT ne précise ni les échéances de réalisation ni l’ordre des priorités entre les lignes, ni même leur financement. Il s’agit simplement de matérialiser une intention étatique visant un aménagement d’ensemble du territoire français. Dans le même sens, une précision est

143 Rapport de présentation du Schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse - mai 1991.

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apportée quant à la « dimension européenne »144 de certains axes. Quelques tronçons sont également inscrits dans le schéma directeur du réseau européen de trains à grande vitesse. Ce schéma, sous l’impulsion de la France, a été présenté au Conseil de la Communauté Economique Européenne (CEE) en décembre 1990. Dans ce cadre-là, les axes prioritaires soulevés par l’Europe concernant le Sud-Ouest sont les liaisons Paris-Bordeaux-Irun et Paris- Montpellier-Barcelone, autrement dit un axe atlantique et un axe méditerranéen. Concrètement, les objectifs de ce schéma directeur sont, à termes, d’améliorer les temps de parcours entre Paris et les grandes agglomérations françaises mais également de contribuer au rapprochement de celles-ci avec les métropoles européennes.

Ainsi, afin de réaliser ce schéma, le rapport indique que l’ensemble des décideurs : conseils régionaux, comités régionaux des transports et conseil national des transports ont été consultés pour exprimer leur avis. Cette consultation ne concerne donc pas la société civile, mais uniquement la sphère du pouvoir :

« Au terme de cette consultation, le schéma directeur a été adopté par le Comité interministériel d’aménagement du territoire (CIADT) du 14 mai 1991»145.

Ce comité interministériel s’est réuni sous l’égide du Premier ministre, Michel Rocard, et rassemble l’ensemble des ministères concernés par l’aménagement du territoire. Le décret d’application est publié le 1er

avril 1992 et fait de ce projet d’aménagement du territoire un projet « d’intérêt général » au sens des articles L.121-12 et R.121-13 du Code l’urbanisme. Ce programme, comme le montre bien la carte ci-après, est ambitieux. Il vise à construire un maillage cohérent du territoire en termes de LGV. Cependant, n’apparaissent ni les infrastructures existantes, ni les infrastructures en projet qu’elles soient ferroviaires, routières ou autoroutières. En ce sens, la réalité du maillage territoriale n’est pas explicite. Dans ce contexte, l’absence de précision sur les projets d’aménagement du territoire, en dehors des projets LGV, va être « l’occasion d’une véritable surenchère des responsables politiques locaux, chacun cherchant à amener le TGV sur son territoire et poussant pour que son projet soit réalisé au plus tôt »146. Ainsi, le SNIT, reprenant l’ensemble des démarches locales, inscrira seize lignes à construire d’ici une trentaine d’années. Autrement dit, ce schéma national prévoit la construction de 4700 kilomètres de ligne. Il est intéressant de souligner qu’en 1992, trois projets de création de lignes nouvelles viennent d’être déclarés d’utilité

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Rapport de présentation du Schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse - mai 1991. Ministère de l’équipement, du logement et des transports.

145 Idem

146 Zembri P., « Les fondements de la remise en cause du Schéma Directeur des liaisons ferroviaires à grande

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publique et sont donc en cours de financement : la LGV Nord, la LGV Rhône-Alpes et la LGV Interconnexion Est. Il reste donc 3442 kilomètres de lignes nouvelles à réaliser et à financer.

Carte 2 : Schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse adopté en 1992. Evolution des temps de parcours au départ de Paris.

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Ainsi, « la perspective d’effets bénéfiques sur le développement local pousse l’ensemble des régions à demander leur ligne ».147 Rapidement, elles vont solliciter la SNCF et l’Etat pour poursuivre les études techniques et économiques pour chaque projet de ligne. Face aux sollicitations des collectivités territoriales, la SNCF met en place plusieurs « Missions TGV »148 sur le territoire. Un premier malentendu apparaît alors. La concurrence accrue entre les collectivités territoriales, qui doivent « se placer » 149 pour obtenir leur équipement, élude complètement la question du financement. Comme le souligne P. Essig150, les collectivités comptaient de manière implicite sur les financements traditionnels : une contribution de la SNCF, complétée par des contributions de l’Etat et des collectivités territoriales. Ainsi, lorsque l’entreprise répond à la commande des collectivités et « conduit avec célérité les études préliminaires »151, les modalités de financement des projets ne sont jamais abordées, ni même la question de sa participation financière. A ce sujet, l’Etat ne lève jamais cette ambigüité. Il accompagne les démarches en région, comme nous allons l’aborder plus en détail par la suite, en encourageant la signature des contrats de plan Etat-région. Il mobilise les administrations compétentes, laissant planer la possibilité que tous ces projets, en cours de réflexion, puissent être financés. Les études se poursuivent, la SNCF développe « les analyses économiques et financières nécessaires » 152 aux procédures de débats publics en proposant

une estimation chiffrée du coût total de l’infrastructure sans expliquer précisément selon quelle répartition financière le projet sera réalisé.

I.1.b. une importante réforme ferroviaire : la création de Réseau Ferré de France (RFF)

En 1991, lorsque le SNIT est adopté, la SNCF finance le lancement de trois lignes nouvelles153. A cela s’ajoute les investissements nécessaires liés à la maintenance du réseau existant et au développement des transports interrégionaux. La SNCF est confrontée à des dépenses conséquentes alors que sa capacité d’autofinancement est faible. Comme l’analyse P. Zembri, le déficit de la SNCF ne fait que s’accentuer : sa dette154 « devient alors une

147 Zembri P., « Les fondements de la remise en cause du Schéma Directeur des liaisons ferroviaires à grande

vitesse : des faiblesses avant tout structurelles », In les Annales de Géographie, 1997, p.183.

148

Les « Missions TGV » sont le nom donné par la SNCF aux équipes chargées de réaliser les études pour chaque projet de ligne.

149 Essig P., « Le concept TGV, des origines au TGV pendulaire », 1997, p.38. 150

Philippe Essig a occupé le poste de président de la SNCF de 1985 à 1988 avant de devenir secrétaire d’Etat au logement dans le gouvernement Mitterrand.

151 Essig P., « Le concept TGV, des origines au TGV pendulaire », 1997, p.38. 152 Idem

153 La LGV Nord, la LGV Rhône-Alpes et la LGV Interconnexion Est. 154

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bombe à retardement qui menace l’existence même du réseau ferré »155

. Concrètement, le gouvernement français se voit dans l’obligation de réformer la SNCF pour éviter la faillite de tout le système ferroviaire français. Aussi, en 1997, l’entreprise Réseau Ferré de France (RFF) voit le jour. L’Etat crée un établissement public à caractère industriel et commercial (dit EPIC). Comme pour la SNCF, l’Etat est le seul actionnaire de RFF. Dès lors, la SNCF se voit attribuer la gestion du trafic et des circulations sur le réseau ferré. De surcroît, la SNCF assure, pour le compte de RFF, le fonctionnement et l’entretien des installations techniques et de sécurité. Quant à RFF, l’entreprise se charge de l’aménagement et du développement des infrastructures ferroviaires dont les caractéristiques principales restent fixées par l’Etat. Ainsi, au regard de ses attributions, dès 1997, RFF prend la main sur tous les dossiers liées au SNIT tel que voté en 1991.

Cette réforme de l’institution ferroviaire mérite d’être soulignée car elle est lourde de conséquences sur la poursuite des études concernant les lignes à grandes vitesse. En effet, pour synthétiser, d’un côté la SNCF est chargée de l’entretien du réseau et de l’autre, RFF a pour mission son développement. Cette évolution structurelle du point de vue de la gestion du chemin de fer en France va nettement renforcer une lecture du SNIT en termes d’investissement. Autrement dit, l’orientation des projets du SNIT va davantage être axée vers une construction de voies nouvelles, l’investissement relevant de la responsabilité de RFF, plutôt que vers la modernisation des voies existantes, relevant des missions de la SNCF. La réforme de 1997 va alors favoriser l’émergence d’une tension nouvelle entre la maintenance du réseau qui rentre en concurrence avec la création de lignes nouvelles. Par là-même, ce sont deux conceptions du service public ferroviaire en France qui entrent en tension : l’une défendant l’accessibilité du réseau et sa proximité via l’entretien de l’existant et la seconde défendant un développement à l’échelle nationale et européenne par la création de dessertes à grande vitesse. Dans le principe, ces deux conceptions ne s’opposent pas. Toutefois, elles rentrent en tension en raison de la capacité financière limitée de l’actionnaire principal de ces deux EPIC, c’est-à-dire l’Etat, qui ne peut pas assurer le coût à la fois de l’entretien et de la construction.

Concrètement, RFF poursuit les études lancées par la SNCF dans le cadre des « Missions TGV » et spécifie les besoins du territoire dans la perspective d’étendre le réseau ferroviaire. Ainsi, avant même le lancement des études dans le cadre des contrats de plan Etat-région (2000-2006), avant même le débat public CNDP (2005), des tensions fortes apparaissent lors

155 Zembri P., « Les fondements de la remise en cause du Schéma Directeur des liaisons ferroviaires à grande

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de la phase de conception du projet de LGV Bordeaux-Toulouse. A ce stade, trois types de

tensions structurent le processus. La première de ces tensions est liée aux effets

d’opportunités que représente l’adoption du SNIT : le renforcement de la concurrence entre

les régions incite l’ensemble des élus locaux à réclamer leur ligne. Deuxièmement, des

tensions apparaissent en raison de la conjoncture économique : la SNCF s’endette de manière conséquente et les capacités de financement de l’Etat diminuent alors même que les études

relatives à la création de LGV sont lancées dans toutes les régions sans que la question du financement soit soulevée. Comme nous le verrons, cet aspect ne fera que s’amplifier

sous l’effet de la crise que va traverser la France dans les années suivantes. Enfin, des

tensions structurelles relatives à la séparation entre le développement du réseau porté par

RFF et la maintenance, mission de la SNCF émergent. Dans ce contexte, RFF doit se démarquer vis-à-vis de la SNCF, voire prouver son utilité, et justifier ainsi l’opportunité de créer des voies nouvelles.

I.2. Le projet LGV à l’échelle régionale : du SNIT à la signature du contrat de plan Etat-Région

Avant les premières lois de décentralisation (1982), la vision de l’aménagement du territoire français était exclusivement centralisée. Comme on peut d’ailleurs le constater sur toutes les cartes d’infrastructures, notamment celle représentant le SNIT156, l’ensemble des liaisons ferroviaires part de la capitale et forme une « étoile »157 dont le centre est Paris. Cette vision persistante va marquer le lancement de l’ensemble des projets de LGV en France. Tous les projets de LGV sont impulsés par le gouvernement centralisé et les travaux partent de la capitale pour irriguer progressivement la province.

« Tout se joue à Paris. Avant même que le schéma directeur ne soit voté, le sénateur [X]est venu me trouver, j’étais conseiller général à l’époque, et il m’a demandé mon avis sur le projet. Il voulait savoir si je le soutiendrais. Avec tout le respect que j’avais pour lui, je lui ai répondu en rigolant, ce projet-là, c’est un projet de technocrates parisiens, on n’a pas besoin de ça dans notre département, ça n’apporte rien à l’économie. Ce sont encore de bonnes terres agricoles qui vont disparaître pour du béton ! Ça n’a pas empêché le gouvernement de voter pour le schéma ferroviaire de 92 »158

156 Voir la carte 2 p.66.

157 Extrait de l’entretien avec un élu local (code enquêté : EE5) 158

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I.2.a. La construction du tronçon de Paris à Tours

Selon les archives consultées, ce sont les ingénieurs du département planification de la SNCF à Paris qui, dès les années 1975, émettent l’idée de construire le TGV-Atlantique. L’enjeu est alors de relier, au plus vite, Paris avec les grandes agglomérations du grand ouest français. Ces ingénieurs ont donc formellement pour mission de réfléchir à un « schéma à l’horizon 2000 »159

. Dans leur article sur les origines du TGV, J.F. Picard et A. Beltran ont pu interroger l’un des instigateurs de ce projet, Gérard Mathieu :

« Il s’agissait de fusionner les flux des axes Paris-Bordeaux, Toulouse et l’Espagne d’une part, Paris vers la Bretagne et les Pays de la Loire de l’autre, à partir d’un tronc commun »160.

Puis l’idée chemine rapidement jusqu’au sommet de l’Etat. Et en septembre 1981, lors de l’inauguration du TGV Sud-Est (la ligne Paris-Lyon), le président François Mitterrand annonce publiquement la volonté du gouvernement de poursuivre cette « marche vers le progrès »161 par le lancement d’une nouvelle infrastructure : le TGV-Atlantique. La première étape du projet concerne donc la création d’une ligne nouvelle vers Nantes et Bordeaux avec un tronçon commun jusqu’à Tours (Saint-Pierre-des-Corps pour être précis). Très vite, le projet se structure et des études sont lancées. A l’époque, l’enjeu pour les promoteurs de cette LGV Paris-Tours consiste à être le plus réactif possible afin que les changements structurels relatifs à la SNCF et les changements conjoncturels relatifs à la réforme de l’enquête d’utilité publique ne viennent impacter le bon déroulement des procédures administratives nécessaires au lancement des travaux.

D’une part, dès janvier 1983, la SNCF se transforme en EPIC. La convention mise en œuvre en 1937 pour 45 ans entre l’Etat et les différentes compagnies ferroviaires privées de l’époque est arrivée à expiration permettant ainsi au gouvernement de récupérer sous son giron la SNCF. Il s’agit, en quelque sorte, d’une nationalisation de l’entreprise. Et d’autre part, l’adoption imminente de la loi Bouchardeau162

, faisant évoluer le dispositif de l’enquête d’utilité publique de la défense du droit des propriétaires lors d’expropriation à une procédure d’information et de recueil des avis de la population, incite les promoteurs du projet à se