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[461] On peut dater l'existence des premiers centres de santé à l'instauration des consultations charitables pour « pauvres malades » au XVIIème siècle76. Théophraste Renaudot, médecin ordinaire du roi et commissaire aux pauvres du Royaume, fut le premier à créer un dispensaire payant pour les plus aisés et gratuit pour les plus pauvres.

[462] Mais le véritable mouvement de création de centres de santé, sous la forme de dispensaires, démarre à la fin du XIXème siècle et s'accélère au cours du siècle dernier. Il convient à cet égard d'opérer un découpage historique entre la période précédant la seconde guerre mondiale et celle qui lui succède jusqu'à aujourd'hui.

[463] Entre 1880 et 1945, des dispensaires sont créés sous l'impulsion du courant hygiéniste et du socialisme municipal. Les premières lois sociales de la fin du XIXème et du début XXème ont en effet autorisé les communes à créer des dispensaires sous forme de services municipaux. La création de bureaux d'hygiène devient même obligatoire pour les communes de plus de 20 000 habitants (loi du 15 février 1902), tout comme la création de dispensaires publics d'hygiène sociale et de prévention antituberculeuse dans les villes où la maladie est particulièrement présente (loi du 15 avril 1916)77. La création des centres municipaux d'Aubervilliers (1920), de Gennevilliers (1936) et de Pantin s'inscrit dans ce contexte.

[464] Au cours de la même période, Robert-Henri Hazemann, médecin à Vitry-sur-Seine, procède au rapprochement des services d'hygiène, de prophylaxie et du service social de la ville préfigurant le modèle des centres de santé. A cette époque, il appelait à « prévoir l'existence de « centres » qui constituent des sortes de citadelles abritant le personnel et l'armement destinés à lutter contre la misère physique, intellectuelle et morale (...) ».

[465] La circulaire du 26 août 1936 définit les centres de santé comme « l'ensemble des différents organismes d'hygiène et d'aide sociale d'un secteur donné ».

[466] A côté des dispensaires municipaux, la première moitié du XXème voit la création de dispensaires gérés par des associations caritatives ou des congrégations religieuses. L'Institut Alfred Fournier, créé en 1923 par Jean-Alfred Fournier sous la forme d'un Institut de prophylaxie sanitaire, s'inscrit dans ce modèle des dispensaires associatifs.

[467] Depuis 1945, de nombreux dispensaires ont été créés pour répondre aux besoins d'après-guerre. Cela traduit également un véritable choix politique de la part des maires de la « banlieue rouge ». Le dispensaire associatif du COSEM voit le jour en 1945 et le dispensaire municipal de Nanterre en 1947. C'est également à cette époque que ces établissements commencent à se structurer à travers la création du Syndicat national des médecins de dispensaires (1946). Peu après, un comité de liaison des dispensaires et centres de santé est créé (1952), puis la revue Le Centre de santé (1954) et enfin le congrès national des médecins de dispensaires et centres de santé est institué (1961). Au cours des années 1950, le terme « centre de santé » commence à se substituer à celui de dispensaire bien que cette appellation perdure jusqu'à aujourd'hui dans l'imaginaire collectif.

76Les centres de santé : une histoire, un avenir, D. Acker et M. P. Colin (revue Santé publique, 2009)

77Les centres de santé en mouvement, Michel Limousin et al (Le temps des cerises, 2012)

effet, on reconnaît que leur développement ne doit pas s'effectuer uniquement au gré des initiatives locales sans planification préalable. Dans le même temps, le ministre de la santé publique indique en 1956 qu' « on ne saurait favoriser le développement normal de ces dispensaires alors qu'ils ne devraient pas exister ou qu'ils devraient disparaître dans un délai raisonnable, lorsque l'initiative privée, après un temps de carence, devient à même de fournir les services demandés ». Ce propos illustre l'existence d'une opposition entre le modèle d'exercice libéral de la médecine et le modèle salarié, opposition longtemps source de concurrence et de tension entre ces deux mondes.

[469] Au milieu des années 1950, l'administration a néanmoins soumis les centres de santé municipaux aux normes techniques et sanitaires exigées des dispensaires privés. La création ou l'extension de ces structures était soumise à l'approbation du préfet (décret n°56-284 du 9 mars 1956). Une commission médicale consultative ainsi qu'une commission de surveillance durent par ailleurs être créées au sein de chaque établissement.

[470] Le développement des centres de santé se poursuit sous l'impulsion de la circulaire du 24 août 1961 qui vise à planifier le développement des structures sanitaires et sociales dont les centres de santé, qui peuvent être gérés par des hôpitaux, des municipalités, des caisses de sécurité sociale, des associations ou encore des sociétés mutualistes.

[471] Les centres de santé de l'association AGECSA à Grenoble sont peu à peu créés à partir de 1973, tout comme le centre Olympiades de la Croix-Rouge (1974), le centre de santé d'Houdan (dispensaire communal adossé à l'hôpital) et le centre associatif de Belfort (1981).

[472] Au cours des années 1970 et 1980, un modèle théorique de « centre de santé intégré » est défini en France et en Belgique dans une perspective de revalorisation de la médecine générale.

L'objectif du centre de santé intégré est de « dispenser des soins de base globaux, continus et intégrés et de faire participer la population ». Ils reposent sur une « équipe pluri professionnelle de petite taille, non-hiérarchisée qui assure une permanence, une polyvalence et une décentralisation des soins »78.

[473] Au même moment, les centres de santé municipaux étendent leurs activités en accueillant dans leurs locaux des services de PMI et des programmes spécifiquement dédiés à la prise en charge des addictologies mais aussi des personnes atteintes de MST. En 1986, la loi oblige les centres de santé à obtenir un agrément devant la commission régionale.

[474] En 1990, un premier rapport de l'IGAS dénombre 2 224 centres de santé dont 256 gérés par des municipalités. Il souligne l'existence de difficultés financières en raison de fortes charges de personnel, d'investissements matériels et d'actions de prévention non rémunérées.

[475] A la suite de ce rapport, la loi du 8 janvier 1991 et les décrets du 15 juillet 1991 consacrent le terme « centre de santé » et redéfinissent les conditions d'agrément des centres de santé qui relevaient jusque là du décret de 1956 précité.

[476] La loi crée par ailleurs une subvention versée aux centres de santé en atténuation d'un certain pourcentage des charges sociales dues pour leurs professionnels de santé (subvention dite

« Teulade »).

[477] Le principe du conventionnement des gestionnaires de centres de santé avec les caisses d'Assurance maladie est posé par la LFSS pour 200079. Cette même loi définit les centres de santé dans le Code de la santé publique, indiquant qu'il s'agit de structures gérées exclusivement par des organismes à but non lucratif ou par des collectivités publiques (L.6323-1).

78Le centre de santé intégré et les maisons médicales, (Monique Van Dormael, 1981)

79Article L.162-32-1 du Code de la sécurité sociale

l'Assurance maladie et les organisations représentatives des centres de santé qui forment le RNOGCS80. Cet accord, signé le 18 avril 2003 pour une durée de cinq ans, créé les options conventionnelles relatives à la coordination des soins ainsi que les commissions paritaires nationales (CPN) et régionales (CPR) qui ont pour mission de faciliter l'application de la convention par une concertation permanente entre la CNAM et les organisations signataires de l'accord.

[479] Arrivé à échéance en avril 2008, l'Accord national a été reconduit en l'état pour cinq nouvelles années en raison de l'échec des négociations. Il a toutefois fait l'objet de modifications à la faveur de quatre avenants (deux en 2004 puis un en 2007 et en 2009).

[480] Enfin, la loi HPST du 21 juillet 2009 procède à une complète rénovation du cadre juridique applicable aux centres de santé (abrogation des textes antérieurs). L'agrément est supprimé et remplacé par une vérification des conditions techniques de fonctionnement. La réception du projet de santé du centre par l’ARS déclenche l’enregistrement de la structure dans la base FINESS et le financement par l’assurance maladie. La possibilité pour les centres de santé de participer à des missions de service public et d'établir de nouvelles coopérations (dans le cadre des groupements de coopération sanitaire et de moyens ou de pôles de santé) est également reconnue par la loi. Elle permet aux établissements de santé de créer ou gérer directement des centres de santé ce qui était exclu auparavant.

80Regroupement national des organisations gestionnaires de centres de santé

A NNEXE 3 : R ECENSEMENT DES PROJETS DE