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Une harmonisation des niveaux de gouvernance pour une protection efficace du milieu

Partie 3. Vers un régime légal efficace pour une protection du milieu marin arctique

3.2. De l’importance du droit dur dans l’efficacité des régimes internationau

3.3.4. Une harmonisation des niveaux de gouvernance pour une protection efficace du milieu

L’analyse des approches nationale, internationale et régionale montre que chacun des niveaux de gouvernance en eux-mêmes sont insuffisants afin d’assurer une protection efficace du milieu marin, puisque chacun d’entre eux présente ses propres défis et inconvénients. Par ailleurs, cette étude prouve aussi que chacun de ces niveaux de gouvernance a sa raison d’être. Par exemple, considérant les menaces environnementales transfrontalières (POP, changements

777 Hoel, supra note 749 à la p.449.

778 Roginko et LaMourie, supra note 772 aux p.265 et 266. 779 Agenda 21, supra note 358 aux pp.131-135 et aux pp.147-165. 780 [Traduction libre] Odendahl, supra note 9 aux pp.217-218.

climatiques, pollution, etc.) auxquelles fait face le milieu marin arctique, l’adoption de mesures au niveau global et extra régional est nécessaire781. Du reste, les approches nationale et régionale permettent aux États de résoudre plus rapidement les problèmes qu’une approche globale. Si toutes les approches ont leurs points forts et leurs points faibles et qu’en conséquence, le choix d’un niveau de gouvernance plutôt qu’un autre est compliqué, quelle(s) solution(s) peut-on envisager pour assurer une protection efficace du milieu marin arctique? De manière générale et en ce qui a trait à une vaste majorité de milieux marins, il apparaît qu’une combinaison d’instruments à diverses échelles est préférable à l’utilisation d’instruments à une seule échelle.

Premièrement, les différentes sphères de gouvernance sont nécessairement impliquées dans une protection des milieux marins, puisque suivant la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer, les différentes zones maritimes qui gouvernent les environnements marins mondiaux sont associées à une gouvernance plus ou moins extensive par les États côtiers selon la proximité de leur côte avec la zone concernée782. Une protection segmentaire visant un

niveau de gouvernance particulier n’est donc pas du tout adaptée à la dynamique arctique, dans laquelle les États riverains ont plus ou moins de souveraineté selon la zone maritime concernée. Face à ce zonage maritime, une protection qui combine l’utilisation d’instruments à divers niveaux vient aligner les règles de droit international contenues dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer avec la réalité arctique.

Deuxièmement, l’idée que les niveaux de prise de décision soient indépendants783 et que les décisions soient prises du niveau local vers le niveau international784 peut être remise

781 Vanderzwaag, Huebert et Ferrara, supra note 49 à la p.156.

782 Erika J. Techera, Marine Environmental Governance: From International Law to Local Practice, New York, Routeledge, 2012, aux pp.66-71: Odendahl, supra note 9 aux p.207-209 ; Kachel, supra note 36 aux pp.63-91; Cirilla, supra note 264 aux pp.29-42 ; Palsson, supra note 28 à la p.27-30 ; Stephens, supra note 37 à la p.13 ; Firestone et Jarvis, supra note 187 aux pp.122-129 ; Lalonde, supra note 54 à la p.92 ; Baker, supra note 440 aux pp.48-52 ; Stokke 2013, supra note 85 à la p.300 ; Pietri et al., supra note 44 aux pp.513-514 ; Henriksen, supra note 279 aux pp.11-12.

783 Neil Adger et al., « Governance for sustainability: towards a thick understanding of environmental decision making » (2003) 35 (n°6) Environment and Planning A 1095 à la p.1101; Richard Cowell, « Substitution and scalar politics : negotiating environmental compensation in Cardiff Bay » (2003) 34 (n°3) Geoforum 343; David Gibbs et Andrew Jonas, «

en question. Le processus de mondialisation et l’émergence de problèmes transnationaux comme les changements climatiques changent fondamentalement la nature de la gouvernance, si bien que l’influence du droit national sur le droit international n’est plus unidirectionnelle. On peut désormais parler d’influence mutuelle et réciproque des droits internationaux et nationaux785. C’est donc dans cette perspective de frontières brouillées entre les divers niveaux de gouvernance que la complémentarité des régimes nationaux, régionaux et internationaux devient non pas une option, mais une réalité incontournable afin de créer un cadre légal pour la protection du milieu marin arctique786.

L’objectif final devrait être l’adoption de standards internationaux, même s’ils sont difficiles à atteindre. Dans un premier temps, une combinaison des différents niveaux de gouvernance est toutefois souhaitable afin de protéger efficacement les milieux marins mondiaux, et ce même si cela peut occasionner une redondance des différents systèmes787.

Afin d’éviter de telles répétitions dans le système, des perspectives, des processus et des institutions intégratives peuvent être mis en place788. De même, le réseautage et la

communication dans cette gouvernance à multiples niveaux peuvent permettre d’éliminer ces répétitions. En bref, il est utile de penser la protection du milieu marin arctique en terme de continuum et de complémentarité des différents niveaux de gouvernance. L’idée est de reconnaître les « nouvelles grammaires spatiales […] afin de comprendre l’émergence des

Rescaling and regional governance: the English Regional Development Agencies and the environment » (2001) 19 (n°2), Environment and Planning C: Government and Policy 269.

784 Harriet Bulkeley et Michele M. Betsill, Cities and Climate Change: urban sustainability and global environmental

governance, Londres, Routledge, 2003 ; Susan Owens, « Siting, sustainable development and social priorities» (2004) 7 (n°2) Journal of Risk Research 101.

785 Anne-Marie Slaughter et William Burke-White, « The Future of International Law Is Domestic (or, The European Way of Law) » (2006) 47 (n°2) 327 à la p.328.

786 Erik J. Molenaar, Donald Rothwell et Alex G. Oude Elferink, « Interactions Between Global and Regional Regimes : Trends and Prospects » dans Erik J. Molenaar, Alex G. Oude Elferink et Donald R. Rothwell, eds., The Law of the Sea and the Polar Regions: Interactions between Global and Regional Regimes, Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2013, 389 aux pp.416-417 [Molenaar, Rothwell et Elferink].

787 Boone, supra note 756 à la p.214.

788 Paul Arthur Berkman et Alexander N. Vylegzhanin, « Conclusions: Building Common Interests in the Arctic Ocean » dans dans Paul Arthur Berkman et Alexander N. Vylegzhanin, eds., Environmental Security in the Arctic Ocean, Berlin, Springer, 2013, 371 à la p.395. Dans la perspective d’éviter une telle fragmentation et d’éliminer les répétitions, le Conseil de l’Arctique pourrait jouer un rôle important en tant qu’institution intégrative. Pour plus de détail sur le Conseil de l’Arctique, voir section 3.5.3. de ce mémoire.

formes hybrides de gouvernance environnementale et leurs implications politiques et écologiques »789. La gouvernance environnementale pour la protection des milieux marins ne doit pas se faire en isolant les différents paliers de gouvernance, mais plutôt en utilisant de multiples niveaux sous des formes hybrides qui opèrent de manière réseautique.

3.4. Caractéristiques structurelles pour une protection efficace du