• Aucun résultat trouvé

Groupe de Veech des surfaces affines

On décrit dans cette section les résultats obtenus dans [DFG], en collaboration

avec Eduard Duryev et Charles Fougeron. Notre théorème principal est un résultat

de structure des groupes de Veech des surfaces de dilatations. On prouve que le

groupe de Veech d’une telle surface est discret à moins qu’elle appartienne à une

classe que nous avons nommé les surfaces de Hopf.

3.2.1 Groupe de Veech.

On considère une surface dilatation Σ. On dit que g ∈ Diff

+

(Σ) est un

automorphisme affine de Σ si en coordonnées g s’écrit comme un élément de

GL

+

(2,R)n R

2

, pour l’identification standard de Cavec R

2

. On note Affine(Σ)

le sous-groupe de Diff

+

(Σ) des automorphismes affines et Mod(Σ) le groupe

mo-dulaire de Σ. La partie linéaire en coordonnées de Affine(Σ) est bien définie à

la multiplication par des constantes λR

+

près. On a donc un morphisme de

groupe bien défini

ρ: Affine(Σ)−→SL(2,R)

qui associe à tout automorphisme sa partie linéaire normalisée. On appelle ρ la

représentation fuchsienne de Σ. Son image ρ(Affine(Σ)) est appelé le groupe de

Veech de Σ et on le noteV(Σ).

Dans cette section, Σ est toujours une surface de dilatation fermée. Notre but

est ici de clarifier la relation entre la matrice de SL(2,R) associée à un élément du

groupe de Veech et le difféomorphisme qui la réalise. Il y a deux manière formelle

(et je qui je pense traduisent dans leur essence deux points de vue différents)

de définir le groupe de Veech : soit on dit qu’il s’agit du groupe des dérivées de

difféomorphismes affines de Σ ou soit on le définit comme étant le stabilisateur de

Σ par l’action deSL(2,R) sur l’espace de module des structures affines.

Afin de comprendre les difficultés/subtilités liées à la confusion entre ces points

de vue, nous allons formaliser au maximum la discussion. Nous introduisons les

définitions suivantes :

1. Affine(Σ) est le sous-groupe de Diff

+

(Σ) qui est affine en coordonnées (i.e.

s’écrit comme un élément de GL(2,R)n R

2

) ;

2. ρ : Affine(Σ) −→ SL est la projection naturelle obtenue de la manière

sui-vante :f ∈Affine(Σ) s’écrit en coordonnées comme un élément de GL

+

(2,R)n

R

2

. Sa partie linéaire dans GL

+

(2,R) ne change, pour un choix différent de

coordonnées, que par l’action par multiplication d’un certain réel λR

+

.

Par conséquent sa classe dans GL

+

(2,R)/R

+

= SL(2,R) est bien définie et

est par définitionρ(f). On appelle ρla représentation Fuchsienne.

3. τ : Affine(Σ) −→ Mod(Σ) est la projection naturelle sur le groupe

modu-laire.

Remarque 11. Il est important de remarquer que le fait que l’image de ρ soit

dans SL(2,R) est d’une certaine manière artificiel et que l’ensemble dans lequel

elle vit naturellement est GL

+

(2,R)/R

+

. En particulier, un élément du groupe

de Veech regardé en coordonnées n’a aucune raison d’avoir déterminant, aussi

naturelles soit les coordonnées choisies.

Remarquons tout d’abord que le noyau de ρ n’est pas nécessairement trivial.

Prenons par exempleΣ un revêtement ramifié d’une surface de dilatation Σ munib

de la structure de dilatation tirée en arrière. Les automorphismes de ce

revête-ment sont des automorphismes affines qui sont dans le noyau de la représentation

fuchsienne associée àΣ. Réciproquement, le quotient d’une surface de dilatationb

par le noyau de sa représentation Fuchsienne est toujours une surface de

dilata-tion, dont la représentation fuchsienne est fidèle. Le groupe de Veech V(Σ) de Σ

est par définitionρ(Affine(Σ))⊂SL(2,R).

On dit qu’une surface de dilatation est irréductible si sa représentation

fuch-sienne est fidèle ou de manière équivalente si elle n’est pas le revêtement ramifié

d’une surface plus simple. On fait dans la suite l’hypothèse que les surfaces que

nous considérons sont irréductibles. C’est une hypothèse assez faible car le

re-vêtement ramifié d’une surface affine partage globalement les mêmes propriétés

dynamiques et géométrique que la surface de base.

3.2.2 Les surfaces de Hopf.

On présente dans cette section une construction générale de surfaces dont le

groupe de Veech est conjugué à

λ t

0 λ

1

!

|tRet λR

+

Nous prouverons de surcroit que ce sont les seules surfaces de dilatations avec

les tores affines dont le groupe de Veech n’est pas discret.

Definition 8. Un graphe enrubanné est un graphe fini avec pour chaque sommet

un ordre cyclique sur les semi arêtes qui en sont issus.

On peut penser à un graphe enrubanné comme un graphe tracé sur une surface

orientée : l’ordre cyclique à chaque sommet provient de l’orientation de la surface.

La structure de variété à bord d’un voisinage tubulaire d’un tel plongement

dé-termine complètement la structure de graphe enrubanné.

Étant donné un graphe enrubanné Γ, on fait la construction suivante : on colle

à chaque composante de bord d’un épaississement infinitésimal de Γ un cylindre

affine d’angle un multiple de π de telle sorte d’obtenir une surface compacte.

Attention, n’importe quel recollement ne donne pas une surface de dilatation au

sens où on l’a défini :

— il faut bien choisir les multiplicateurs des cylindres pour que les points

sin-guliers crées par le recollement, aux sommets de Γ soient euclidiens ;

— il faut aussi choisir les angles des cylindres intelligemment, autrement la

surface construite ne sera qu’un surface de demi-dilatation.

On donne un exemple ci-dessous qui illustre cette construction.

Figure 3.2 – Un graphe enrubanné non-connexe à deux sommets.

qu’on transforme en une surface de genre 2 en collant trois cylindres D

i

aux

composantes de bord, chacune joignant C

i

à C

i0

pour i= 1,2,3.

Figure 3.3 – La décomposition en cylindre de notre surface de genre 2.

Soit λi le facteur de dilatation de Di. Pour les points singuliers de Σ soient

euclidien, il faut et suffit que le produit des facteurs des cylindres adjacents à

chaque points soit égal à 1. Dans notre cas, pour le bon choix d’orientation des

cylindres cela donne

λ

1

=λ

2

λ

3

.

Cette contrainte s’étend directement au cas général et est l’unique obstruction

pour que la construction donne une "vraie" surface de dilatation. On appelle une

telle surface de dilatation une surface de Hopf.

3.2.3 Le théorème de structure

On prouve dans cette section un théorème de structure sur le groupe de Veech

des surfaces de dilatation.

Théorème 35 (Duryev-Fougeroc-G.). Soit Σ une surface affine de genre au

moins 2.

— Si Σ est une surface de Hopf alors V(Σ) est conjugué au sous-groupe des

matrices triangulaires supérieures ;

— Si Σ n’est pas une surface de Hopf alorsV(Σ)est discret.

Cette section est dédiée à la preuve du théorème 44. Commentons en

rapi-dement la structure. Le point crucial est qu’on peut distinguer les surfaces de

dilatations selon qu’elles ont des connexions de selle dans au moins deux

direc-tions ou pas. Si tel est le cas, leur groupe de Veech est automatiquement discret,

grâce à un argument directement emprunté au cas des surfaces de translation

(voir section 3.1 de [HS06]). La principale difficulté revient donc à caractériser les

surfaces n’ayant des connexions de selle que dans une unique direction.

Lemme 29. Soit Σ une surface affine ayant deux connexions de selles dans des

directions différentes. Alors V(Σ) est un sous-groupe discret deSl

2

(R).

Démonstration. Soit Affine

0

(Σ) le sous-groupe de Affine(Σ) qui fixe l’ensemble

des points singuliers de Σ. Ce l’image de ce sous-groupe par la représentation

fuchsienne V

0

(Σ) est d’indice fini dans V(Σ) et montrer qu’il est discret

im-plique queV(Σ) est discret.

Choisissons un sous-ensemble simplement connexe U ⊂ Σ contenant toutes les

singularités et un développant de la structure affine surU. Grâce à cette dernière,

on peut associer à chaque connexion de selle orientée un vecteur de R

2

.

Remar-quons qu’un élément de V(Σ) appartient au quotient Gl

+2

(R)/R

+

et la matrice

de son action dépend d’une trivialisation à la source et au but. L’ensemble E de

tels vecteurs possède les deux propriétés suivantes :

— il est discret ;

— il est invariant par l’action de la normalisation deV

0

(Σ) à valeurs GL(2,R)

induite par U.

Nous avons fait l’hypothèse qu’un paire (v

1

, v

2

) de ces vecteurs forme une

base de R

2

. Soit(a

n

) est une suite d’éléments deV

0

(Σ) qui tend vers l’identité et

A

n

∈GL(2,R) la normalisation dea

n

induite par U. Il existe une suite λ

n

R

+

telle que que λn·An → Id. Comme An préserve E, nécessairement λn → 1 et

donc A

n

·v

1

v

1

etA

n

·v

2

v

2

. Comme l’ensemble des connexions de selles

est discrets, cela implique que pourn suffisamment grand,A

n

= Id. Ceci prouve

que V(Σ) est discret.

On caractérise maintenant les surfaces n’ayant des connexions de selles que

dans une direction au plus.

Lemme 30. Si toutes les connexions de selles d’une surface de dilatation de genre

g≥2 sont dans la même direction, alors c’est une surface de Hopf.

Démonstration. Comme Σ est de genre au moins 2, Σ a au moins un point

sin-gulier. On va prouver que chaque point singulier a au moins une connexion selle

dans chaque secteur ouvert d’angleπce qui impliquera que toutes les séparatrices

dans une certaine direction sont en fait des connexions de selles. Un telle surface

est par définition une surface de Hopf (cf. section 3.2.2).

On considère la fonction exponentielle à un point p singulier associée à une

normalisation affine locale. Soit r > 0 le plus petit nombre tel que ∆

r

le

demi-disque ouvert, bordé en bas par deux séparatrices horizontale et contenant une

unique séparatrice verticale, s’immerge dans Σ par l’exponentielle. Sir =∞, cela

nous donnerais une immersion affine maximale deH. D’après le lemme 28, l’image

de l’exponentielle est un cylindre affine d’angle π dont le bord est une union de

deux feuilles fermées dans une même direction, contenant tout les deuxp. Il s’agit

donc de deux connexions de selles. On suppose désormais quer <∞. Il y a deux

possibilités dans ce cas de figure :

1. soit l’immersion ∆

r

−→ Σ s’étend continument au bord de ∆

r

auquel

cas l’image de cette extension contient un point singulier. Ce point

sin-gulier est nécessairement dans l’unique direction contenant des connexions

de selles (disons la direction verticale) et la séparatrice verticale est donc

une connexion de selle ;

2. soit ∆

r

−→Σ ne s’étend pas au bord de ∆

r

.

On prouve que cette situation ne peut se produire. Autrement il y aurait une

géodésiqueγ issue depparamétrisée par [0, r[ telle queγ(t) n’a pas de limite dans

Σ quandtr. On confondra γ le sous-ensemble de Σ et sa pré-image dans ∆

r

.

Considérons un disque ouvert dans ∆

r

qui est tangent au bord au point de ∂∆

r

vers lequelγ se dirige et dont le centre appartient àγ. Grâce à l’immersion affine

de ∆

r

dans Σ, on obtient une immersion affine deDsatisfaisant les hypothèses de

la proposition 33. Le cheminγ se projette donc sur une geodésique fermée simple

hyperbolique ce qui contredit le fait queγ est une séparatrice.