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Chapitre II : Une industrialisation complexe – Premiers doutes identitaires du dessin

1. La greffe du dessin de presse dans le domaine du cinéma

méthodologiques.

Tout comme pour la plupart des formes médiatiques, il est très difficile de définir ou de cerner conceptuellement un objet tel que le dessin animé, et ce, pour plusieurs raisons. La première raison, que nous avons déjà évoquée, est d’ordre linguistique : comment établir des analogies entre plusieurs terminologies propres à des pays singuliers, et donc à des structures culturelles, industrielles ou sociales différentes ? Si le terme “dessin animé” renvoie, en France, tout aussi bien aux films de Disney qu’aux mangas animés ainsi qu’aux expériences d’Émile Cohl ou de Marius O’Galop, ces films ne s’inscrivent pourtant pas dans le même contexte de production ou de réception, ni ne partagent les mêmes origines ou racines

historiques. Affirmer que le terme générique “dessin animé”, en France, est une forme de traduction littérale de l’expression américaine “animated cartoon”, sous-entend déjà une prise de position de notre part, consistant à penser l’institutionnalisation du dessin animé sous l’angle de l’hégémonie industrielle et économique de son principal pays producteur.

Le fait qu’Émile Cohl ne définisse pleinement son propre médium d’expression qu’à la fin des années 1910, c’est-à-dire à son retour des États-Unis, nous paraît à ce titre symptomatique. Le terme de dessin animé ne paraît pouvoir se concevoir pour Cohl qu’à partir de sa confrontation au système de production industriel de l’animation de dessins aux États-Unis. L’appellation “dessin animé” ne fait d’ailleurs, rappelons-le, sa première apparition d’ordre “générique” qu’à la sortie du Little Nemo de Winsor McCay en France, c’est-à-dire à la première occurrence de dessin animé tiré d’un comic strip américain. Il est intéressant de remarquer, de ce point de vue, la distinction terminologique qu’opère Michael Barrier dans son ouvrage Hollywood Cartoons, entre “animated cartoonsˮ et “animated drawingsˮ. L’auteur explique en effet que « la première tentative de création d’une série [de courts dessins animés (animated cartoons)] fut, comme pour le dessin animé [cartoon] Little Nemo de McCay, basée sur un comic strip. Le dessinateur français Émile Cohl, qui avait, durant les quatre années précédentes, réalisé des douzaines de courts métrages – quelques-uns contenant des dessins animés [animated drawings)] – pour Gaumont et Pathé, vint aux studios Éclair à Fort Lee, dans le New Jersey, à l’automne 1912, pour faire une série basée sur le comic strip de George McManus, “Les Newlyweds”191 ». En marquant une différence entre deux expressions pouvant êtres traduites par le même syntagme en français, Michael Barrier sépare bien ce qui n’est encore que de l’ordre de la technique – des dessins dotés de mouvement, impliquant le terme “drawings” – de ce qui correspondrait selon lui à une catégorie précise – le dessin animé, ou cartoon, à partir du moment où il puise son inspiration dans les comic strips de l’époque, et qu’il se compose dès lors de cartoons de presse mis en mouvement. Pour être plus précis, peut-être faut-il déjà affirmer ici que selon nous, la structuration du “dessin animé” en tant que genre à part entière ne se cristallise sans doute pas avant la fin des années 1920, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, mais elle ne peut se comprendre ou s’expliquer qu’à la lumière d’un contexte d’industrialisation beaucoup

191

Michael Barrier, Hollywood Cartoons – American Animation in its Golden Age, New-York, Oxford University Press, 1999, p. 11 (traduction personnelle de l’anglais ; texte original : « The first attempt at such a series was, like McCay’s Little Nemo cartoon, based on a comic strip. The French cartoonist Emile Cohl, who in the preceding four years had made dozens of short films – some containing animated drawings – for Gaumont, and Pathée, came to Eclair studios in Fort Lee, New Jersey, in the fall of 1912 to make a series based on George McManus’s comic strip “The Newlywedsˮ »).

plus poussé outre-Atlantique que dans les autres pays du monde au début du XXème siècle, et ce, dans les domaines du cinéma et de la presse.

Il y a en fait plusieurs phases dans l’institutionnalisation du dessin animé, la première étant sans doute la plus compliquée à analyser, en raison du flou institutionnel certain entourant l’objet. C’est en l’occurrence la seconde raison pour laquelle le dessin animé, en tant que forme médiatique, nous paraît difficile à appréhender dans les années 1910 : l’autonomisation de l’animation de dessins – l’émergence de l’animated cartoon, donc – repose bien sur une autre forme médiatique, le comic strip, c’est-à-dire sur une pratique graphique singulière qui sera, dans le courant du XXème siècle en France, rattachée à la notion, beaucoup plus large, de bande dessinée. C’est sans doute ce qui amène Claude Moliterni et Philippe Mellot à affirmer dans leur ouvrage Chronologie de la bande dessinée que « depuis le début du siècle, les rapports entre la bande dessinée et le dessin animé restent étroits192 ». C’est sans doute également ce qui amène Olivier Cotte à faire le constat suivant : « le découpage [des dessins animés des années 1910-1920] est organisé sur une base de plans larges et moyens très inspirés de la bande dessinée du début du siècle et de la caricature. L’animation se révèle pour ce qu’elle est à cette époque : une mise en mouvement des bandes dessinées à succès193 » Pourtant, tout comme l’expression “dessin animé”, l’expression “bande dessinée” est loin d’être univoque, ce qui rend de tels énoncés extrêmement imprécis. Comme l’explique Éric Maigret dans son récent ouvrage collectif La Bande dessinée : une médiaculture :

« La “bande dessinée” n’est pas un invariant historique, elle n’apparaît qu’à partir du moment où elle est définie progressivement comme telle, c’est-à-dire nommée, d’abord en termes épars puis sous ce vocable : “histoires en estampes” bien sûr (et d’autres formules contemporaines), “strip cartoon”, “funnies”, “comic strip”, “comic”, “comic book” aux États-Unis, “fumetti” en Italie, “illustrés” puis “bandes dessinées” en France, “mangas” au Japon (pour ne rappeler que quelques expressions)… […] Ce n’est pas avant le XVIIIème siècle, voire la fin du XIXème siècle, qu’une véritable autonomie esthétique, économique et sociale du “récit en images” est conquise. Il faut pour cela que des auteurs dégagent une sphère propre d’exercice artistique, que des éditeurs mettent en place de nouveaux systèmes de diffusion de l’opinion et de la culture pour un public fraîchement constitué194

».

192 Philippe Mellot et Claude Moliterni, Chronologie de la bande-dessinée, Paris, Flammarion, 1996, p. 55. 193 Olivier Cotte, Il était une fois le dessin animé… et le cinéma d’animation, Paris, Dreamland Editeur, 2001,

p. 48.

194

Éric Maigret, « Théorie des bandes débordées », in Éric Maigret et Matteo Stefanelli (dir.), La Bande

Autrement dit, il faut que la pratique du récit en images s’institutionnalise, c’est-à-dire conquière, pour reprendre les termes d’André Gaudreault, stabilité, spécificité et légitimité. Philippe Marion le met d’ailleurs clairement en évidence dans le même ouvrage : « définir un média comme la BD, c’est donc arrêter un certain nombre de composantes constitutives telles qu’elles sont déterminées par une instance d’institutionnalisation qui s’est construite autour de ce média. Cette définition s’inscrit dans un contexte, une époque, une socio-culture, une histoire195 ». Il va sans dire que suivant cette logique, le comic strip doit être pris en compte comme une pratique tout à fait singulière historiquement, loin de pouvoir être génériquement assimilée ou amalgamée, sans précautions, à ce que l’on appelle dorénavant la bande dessinée. Ce sont justement les conditions d’émergence économiques, industrielles et sociales propres au comic strip qui permettent de le rattacher à une institution à part entière qu’est la presse – et pas seulement à une forme d’expression artistique particulière que la locution “bande dessinée”, seule, risquerait de donner à entendre.

De fait, si le dessin animé paraît prioritairement s’institutionnaliser aux États-Unis, c’est sans doute parce que la bande dessinée paraît, elle-même, y puiser les bases de son institutionnalisation future. Plusieurs ouvrages d’histoire de la bande dessinée font en effet débuter leur approche chronologique outre-Atlantique, avec la forme des comic strips, liée pour la première fois à une industrie, à savoir celle de la presse : c’est le cas de la chronologie de Moliterni et Mellot, débutant en 1896 avec une présentation des séries de Richard Felton Outcault ou de Rudolph Dirks ; c’est également le cas d’un ouvrage signé Annie Baron- Carvais, dans lequel l’auteure affirme, dès sa troisième page, que « la bande dessinée a pris son essor, à l’orée du XXème

siècle, aux États-Unis, en même temps que la presse populaire196 » ; citons enfin également l’ouvrage de Pierre Fresnault-Deruelle, entamant son parcours chronologique avec « La bande dessinée aux USA197 », témoin encore une fois de la prééminence du pays dans le cadre de l’histoire de la bande dessinée pensée comme une forme institutionnalisée. Or, puisque le dessin animé des années 1910 puise sa source au sein de ces premières “bandes dessinées”, lui-même semble en conséquence trouver quelques-unes de ses bases institutionnelles par l’intermédiaire de la presse. Que ce soit la bande dessinée ou le dessin animé, ces deux “formes médiatiques”, à l’appellation française de type généralisant, trouvent ainsi leurs bases institutionnelles – et définitionnelles – au sein d’un contexte

195 Philippe Marion, « Emprise graphique et jeu de l’oie – fragments d’une poétique de la bande dessinée », in

Éric Maigret et Matteo Stefanelli (dir.), op. cit., p. 183.

196

Annie Baron-Carvais, La Bande dessinée, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1985, p. 5.

singulier dans lequel ils ne sont encore respectivement appelés que comic strips (héritiers de l’illustration et du cartoon européens) et animated cartoons.

Ce contexte est important à rappeler dans la mesure où, à cette époque, la presse est une institution largement mieux et plus anciennement installée que le cinéma, lequel commence tout juste à adopter ses structures économiques, sociales et culturelles. La seule ville de New-York compte en effet, en 1910, 2430 quotidiens dont le tirage total dépasse les 24 millions d’exemplaires, les premières chaînes de journaux sont constituées (13 en 1910, groupant au total 63 quotidiens) et les premières agences de presse se constituent (l’Associated Press en 1846, la United Press en 1883 ou encore l’International News Service fondé par William Randolph Hearst en 1909)198. De fait, il est intéressant de rappeler ici l’intérêt grandissant de la presse pour le cinéma à partir de la fin des années 1900. Non seulement peut-on observer un phénomène d’intégration des vues animées au sein d’une presse corporatiste spécialisée – André Gaudreault rappelle par exemple la création du Moving Picture World aux États-Unis ou du Bioscope en Angleterre en 1907, puis de Ciné- Journal en France en 1908199 – mais également un processus inverse d’intégration de la presse au sein même des productions cinématographiques. Au début des années 1910, en effet, plusieurs hommes de presse prennent conscience de ce que le cinéma peut apporter à leur industrie en termes de distribution de masse ou de circulation de l’information. C’est par exemple le cas de William Randolph Hearst, fondateur du New York Journal en 1895. Cet homme d’affaires étend ainsi en 1914 son agence International News Service en créant l’International Picture Service, dédié à la création de newsreels, c’est-à-dire de films d’actualité. Ces liens de plus en plus forts entre presse et cinéma – sans doute en partie pour quelque chose dans le processus d’institutionnalisation du cinéma décrit par Gaudreault – s’illustrent en l’occurrence parfaitement selon nous à travers le cas des animated cartoons. Issus de l’univers du dessin de presse, ces objets se structurent à partir d’une instance institutionnelle déjà largement industrialisée, identitairement pérenne et stabilisée, ce qui expliquerait, nous allons le voir, leur inscription assez ambiguë dans l’industrie du cinéma.

198 Sur cette question, voir Pierre Albert, Histoire de la presse, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1970, pp. 60-

62.

1-b. Circulations et croisements entre cinéma et dessin de presse.

Le fait que les premiers dessins animés à visée commerciale – les animated cartoons des années 1910 – ne soient pas des créations spécifiques au cinéma, mais importées d’une autre industrie, est selon nous révélateur de leur positionnement ambigu. Nous avons déjà remarqué, pour Little Nemo, l’intérêt d’un tel processus de déplacement, assurant le succès du film en vertu de la popularité préexistante du personnage. Ce constat paraît pouvoir être généralisé à partir des premières années de production de dessins animés en série, capitalisant sur le succès de leurs comic strips d’origine.

L’annonce de la sortie du premier épisode des Newlyweds dans le Moving Picture World de février 1913 est, par exemple, tout à fait symptomatique : « Voici venu Éclair avec l’annonce de la célèbre série de cartoons de McManus, “The Newlyweds”200

». L’usage de l’adjectif “célèbre” (famous) est en soi révélateur de la stratégie promotionnelle d’Éclair. Tout en annonçant une nouveauté cinématographique, la société de production insiste bien sur la reconnaissance d’une “marque” préétablie, celle de la série créée par George McManus en 1904 pour le New York World de Hearst. Soulignons d’ailleurs que la première phrase n’annonce nullement une série de “films” (le terme picture n’est pas employé) mais bien une série de cartoons, comme si ceux-ci étaient directement transférés de leurs journaux d’origine à l’écran. C’est bien le sens de la phrase suivante affirmant que « les cartoons sont réellement rendus vivants et mus par le biais de la photographie à truc201 ». Mais le lien au comic strip ne s’arrête pas là, l’encart promotionnel s’achevant sur cette phrase : « Plusieurs épisodes de la série ont été montrés à un certain nombre d’hommes d’affaires et d’hommes de presse réputés, qui ont été réellement enthousiasmés par les films, annonçant qu’ils allaient “faire du bruit”202

». D’aucuns pourraient remarquer, dans cette dernière phrase, l’absence de tout référent “cinématographique”, pouvant s’expliquer pour deux raisons : d’une part, il n’existe peut-être pas encore de pairs du cinéma suffisamment réputés ou connus pour valider ces films singuliers aux yeux du grand public ; et d’autre part, plus vraisemblablement selon nous, le journaliste insiste ainsi sur l’expertise de personnalités liées de près à l’univers des comic strips, à savoir les hommes de presse – présageant de la fidélité de ces adaptations filmiques

200 Anonyme, « “Snookumsˮ brought to life », Moving Picture World, vol. 15, n° 7, 15 février 1913, p. 686

(traduction personnelle de l’anglais, je souligne ; texte original : « And now comes Éclair with the announcement of the famous McManus cartoon series, “The Newlywedsˮ. »).

201 Idem (traduction personnelle de l’anglais ; texte original : « The cartoons are actually brought to life and

made to move by trick photography »).

202 Idem (traduction personnelle de l’anglais ; texte original : « Several of this series have been shown to a

number of prominent exchange and newspaper men who were really enthusiastic about the pictures, pronouncing them a real “screamˮ »).

aux bandes originales – tout en annonçant un futur succès financier par le biais de la figure des hommes d’affaires, flairant la rentabilité potentielle d’une telle entreprise. Il ne s’agit donc peut-être pas tant ici, selon nous, de promouvoir une œuvre “cinématographique”, que de constituer ni plus ni moins qu’un véritable écrin promotionnel pour les comic strips dont ces vues animées sont tirées.

Nous pourrions pourtant être encore plus précis en liant justement cet aspect promotionnel à l’aspect innovant, et donc attractif, de telles productions. Notre hypothèse serait d’affirmer que l’insistance sur la nouveauté de ces animated cartoons est une manière de donner une visibilité nouvelle à ces productions dessinées, et d’accroître leur circulation à l’aide du cinéma. De fait, dans le Moving Picture World du 22 février 1913, un autre encart promotionnel fait son apparition, insistant cette fois-ci beaucoup plus sur l’attractivité et la nouveauté constituées par ces cartoons animés : « “The Newlyweds” sont une série de DESSINS ANIMÉS [animated cartoons] qui provoqueront des éclats de rire même chez les fans de films les plus endurcis du monde. Il ne s’agit pas de personnes réelles déguisées pour imiter les célèbres cartoons de McManus, mais des DESSINS [drawings] QUI BOUGENT ! […] Vous nous avez demandé des nouveautés. Très bien, regardez “The Newlyweds”203

». On le voit, la publicité met ici d’abord l’accent sur la spécificité de ces films, qualifiés d’animated cartoons, en majuscule – insistance sur la nouveauté d’une forme à mi-chemin entre presse et cinéma – puis, dans un second temps, presque incidemment, sur la série de McManus. Si celle-ci apparaît donc presque secondaire, comme si tous les lecteurs la connaissaient, soulignons malgré tout sa présence au sein d’une phrase selon nous importante à relever, opposant les dessins dotés de mouvement à une autre pratique consistant à faire interpréter les personnages de comic strips par des acteurs réels en costumes.

Les premières adaptations de comic strips connues aux États-Unis ne sont, en effet, pas des films animés, mais bel et bien des films en prises de vues réelles, mettant en scène les personnages des cartoons de presse de l’époque. Plusieurs cas ont déjà été relevés par Donald Crafton : des adaptations du Happy Hooligan de Frederick Burr Opper dès 1899 par James Stuart Blackton et Albert E. Smith au Dream of a rarebit fiend de Winsor McCay mis en scène par Edwin S. Porter en 1906, en passant par les Katzenjammer Kids de Rudolph Dirks

203

Anonyme, « The Universal Announces The Greatest Novelty Ever Shown on The Screen », Moving Picture

World, vol. 15, n° 8, 22 février 1913, p. 736 (traduction personnelle de l’anglais ; texte original : « “The

Newlywedsˮ are a series of ANIMATED CARTOONS that will bring screams of laughter from the most callous picture fans in the world. They are not real people dressed up to imitate the famous McManus cartoons, but are DRAWINGS THAT MOVE! […] You’ve been asking us for novelties. Very well, watch for “The Newlywedsˮ! »).

portés à l’écran en 1903204

, les films tirés de comic strips célèbres ont été relativement nombreux avant même l’avènement de l’animation de dessins au cinéma. Selon Crafton, « le fait essentiel à noter est que toutes ces adaptations étaient des films en prises de vues réelles » et que les comic strips ne constituaient simplement qu’« une source narrative importante pour les films des premiers temps en prises de vues réelles205 ». Il est en l’occurrence possible de prouver ce qu’avance Crafton tout en effectuant un pas en avant dans notre réflexion, en constatant qu’avant la sortie du Little Nemo et du Story of a mosquito de McCay206

ou des Newlyweds de McManus réalisés par Émile Cohl, les films adaptés de comic strips étaient présentés comme le reste de la production cinématographique, sans que jamais ne soit mise en avant leur source d’inspiration graphique.

Il suffit, pour s’en assurer, de consulter les journaux d’époque promouvant ces premières adaptations : le New York Clipper de mars 1906 évoque ainsi longuement le Dream of a rarebit fiend de Porter, produit par la Vitagraph, sans faire à aucun moment référence au comic strip l’ayant inspiré, se contentant d’évoquer un film « humoristiquement drôle et mystérieusement mystérieux », comme dans les encarts promotionnels le concernant207. Les premiers Katzenjammer Kids cinématographiques ne sont pour leur part qu’à peine évoqués dans le New York Clipper du 28 mars 1903208, puis dans le numéro du 26 septembre de la même année209, parmi d’autres attractions, sans plus de précisions. Le comic strip de base n’est alors absolument pas promu dans le cadre de ces productions, réalisées le plus souvent