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PARTIE PRATIQUE NOTRE ETUDE

3.2 Les Glottiscopes : a) Définition :

Les glottiscopes sont des dispositifs innovants remplaçant la laryngoscopie directe conventionnelle par une vision indirecte de l’orifice glottique dans un oculaire ou sur un écran [11]. Les glottiscopes disponibles actuellement ne sont pas équivalents, et présentent des caractéristiques différentes dans leur conception et dans leur maniement. Le point commun entre ces différents dispositifs est que contrairement à la laryngoscopie conventionnelle, l’alignement des axes oraux, pharyngés et laryngés n’est plus nécessaire pour visualiser l’orifice glottique [11].

b) Airtraq® (Fig. 20) :

b.1 Définition :

L’Airtraq (ATL) est un dispositif à usage unique qui a été récemment développé. Il s’agit d’un laryngoscope avec une courbure de lame exagérée à

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deux chenaux, l'un ouvert à droite permettant de guider la sonde préalablement lubrifiée et l'autre contenant un système de lentilles optiques pour la visualisation glottique. Après mise en marche, il est recommandè d’attendre environ 30 secondes avant de l’utiliser pour permettre à la lampe de chauffer la lentille distale et éviter la création de buée.

La lame est introduite en position médiane dans la cavité buccale, sans essayer de charger la langue. Pour exposer la glotte, l’extrémité de la lame est positionnée dans la vallécule, ou au-dessus de l’épiglotte. L’orifice glottique doit être au centre de l’écran avant d’avancer la sonde d’intubation. Une légère traction de l’Airtraq vers le haut ou, en l’absence de visualisation des structures, un mouvement vers l’arrière est parfois nécessaire.

b.2 Intérêt :

Par rapport à la laryngoscopie standard (LS), l'ATL offre plusieurs avantages. Une meilleure vision glottique sans nécessité d'aligner les trois axes (pharyngé, du laryngé et oral), moins de force sur la langue et la mandibule, moins de traumatisme, avec moins de variations hémodynamiques par rapport à une laryngoscopie [38] avec une réduction de la durée de l'intubation [8,9].

Il a également été utilisé chez des patients avec une immobilisation du rachis cervical ou chez des patients après échec de l’intubation ou ayant des critères prédictifs d’une ID [38]. Le taux de succès varie de 95 % à 100 %. Il ne permet pas l’oxygénation. Ces caractéristiques lui ont permis une plus grande efficacité par rapport à la LS et d’être validé pour l'intubation trachéale difficile [10].

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Figure 20 : Airtraq.

c) Le GlideScope® (Vidéolaryngoscope) (Fig. 21) :

c.1 Définition :

Le Vidéolaryngoscope (VL) est un nouveau dispositif muni d’une micro caméra magnétique à haute résolution intégrée à une lame semblable à celle d’un laryngoscope standard. La lame fait un angle de 60° à sa partie médiane. L’image est transmise sur un écran à cristaux liquides [39].

c.2 Intérêt :

Il permet une meilleure vision glottique par rapport à la LS [39]. Une étude multicentrique réalisée chez 728 patients a montré que l’exposition glottique était meilleure avec le GlideScope® comparé au laryngoscope de Macintosh et que le taux de succès de l’intubation était supérieur à 96 % [39].

Il permet une intubation sans mobilisation importante du rachis cervical. Chez les patients atteints d’une spondylarthrite ankylosante, le GlideScope® procure de meilleures conditions d’intubation même chez les patients ayant un score de Cormack et Lehane supérieur à II [40]. Le GlideScope® est une bonne alternative à l’intubation fibroscopique vigile avec un meilleur confort [39].

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Figure 21 : Le GlideScope® (Vidéolaryngoscope)

d) Algorithmes de prise en charge de l’ID et glottiscopes (VL et ATL) :

L intérêt des glottiscopes pour la prise en charge de l’ID est discuté dans des récentes études randomisées.

Amathiew et all [10] ont évalué un algorithme de prise en charge de l’ID incluant l’ATL. Dans cette étude prospective, monocentrique de grande envergure, les auteurs ont mis au point un algorithme de prise en charge de l’ID incluant ces étapes successives : une laryngoscopie standard, puis associée à un mandrin d’Eshmann, puis si échec tentative avec un glottiscope : ATL et en cas d’échec persistant, tentative avec un C-Trach™.

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En cas de ventilation au masque inefficace, le C-Trach™ était utilisé en première intention. En ultime recours, en cas d’échec d’oxygénation, l’algorithme prévoyait une cricothyroidotomie avec jet ventilation. Il s’agit de la première étude qui évalue un algorithme d’ ID qui prend en compte les nouveaux matériels que sont les glottiscopes et les masques laryngés video-assistés pour l’ ID.

Figure 26 : Algorithme d’ ID issu de l’ étude d’ Amathiew et all.

Un mandrin s’est avéré nécessaire chez 1.9% des patients et parmi ceux-ci l’échec a été constaté chez 29 patients soit 0.02%. Au sein de ce sous groupe, une intubation par ATL a été réussie chez 27 d’ entre eux mais a nécessité le guidage de la sonde d’intubation par un mandrin dans 3 cas. Pour les deux

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patients restants, l’intubation par le masque laryngé C-Trach™ a été possible. Le recours à cricothyroidotomie n’a jamais été nécessaire.

Aussi Caldiroli et all [41] ont évalué un algorithme à partir du score de Ganzouri. En cas de score inferieur à 7, le VL était utilisé. Pour un score supérieur ou égal à 7, une technique vigile par fibroscopie était utilisée. Sur une cohorte de 6276 patients, 6 ont été sélectionné pour une intubation vigile par fibroscopie avec succès et la VL était jugée difficile dans seulement 0.14% des cas.

3.3 L’étude :

Cette étude démontre qu’en chirurgie thyroïdienne programmée, l’Airtraq laryngoscope (ATL) et le vidéolaryngoscope (VL) permettent des conditions d’intubation plus optimales par rapport au laryngoscope standard (LS) en termes de durée d’intubation, de nombre de tentatives et de difficultés.

Seul l’ATL permet de réduire le retentissement hémodynamique de l’intubation. Dans les intubations faciles, l’intérêt des laryngoscopes indirects (LI) parait limité par rapport à la laryngoscopie standard (LS) en dehors de leurs performances en matière d’apprentissage et d’enseignement.

Par contre ces derniers ont montré tout leur intérêt dans les intubations difficiles. La chirurgie thyroïdienne, avec ses différents facteurs pourvoyeurs d’intubation difficile, est une situation ou le recours à ces LI parait justifié.

Dans notre centre, nous disposons de deux LI (VL et ATL), ces derniers servent comme des dispositifs de secours dans les intubations difficiles imprévisibles.

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L’intérêt du VL dans la facilité d’intubation par rapport au LS a été déjà démontré [42]. Cette performance est due à la meilleure visualisation glottique offerte par la haute résolution de l’image transmise sur l’écran du VL [39]. Les études faites étaient surtout avec le GlideScope.

La méta analyse faite récemment a montré que ce dernier permet une meilleure vision glottique surtout dans les intubations difficiles, augmente le succès de la première tentative chez les moins expérimentés et réduit le temps d’intubation par les expérimentés [42].

L’ATL est un nouveau dispositif qui offre plusieurs avantages par rapport au LS avec une meilleure visualisation glottique, sans nécessité de l’alignement des axes (oral, pharyngé et laryngé) avec moins de traumatisme et de retentissement hémodynamique. Ces avantages ont permis d’avoir une meilleure performance de l’ATL par rapport au LS dans la facilité d’intubation.

Dans une série prospective de 60 patients , en comparant l’ATL et le LS quand à la facilité d’intubation, les auteurs ont montré que l’ATL a permis seulement de réduire la difficulté d’intubation évaluée par les score IDS et EVA par rapport au LS [8]. Cependant dans cette étude la majorité des patients n’avaient pas des critères prédictifs d’intubation difficile, aucun patient n’était classé C/L IV et un seul patient seulement était classé C/L III dans les deux groupes.

L’intérêt de l’ATL a été démontré surtout pour les patients avec des critères prédictifs d’intubation difficile. En effet, dans une série prospective de 106 patientes obèses, en comparaison avec le LS, l’ATL a permis de réduire le temps d’intubation avec une meilleure préservation de la saturation et des paramètres hémodynamiques ( FC, PAM) par rapport au LS [43]. Dans une

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autre étude incluant des patients avec des critères prédictifs d’intubation difficile, L’ATL a permis de réduire le temps d’intubation, de réduire les manœuvres alternatives pour l’amélioration de la visualisation glottique et de réduire la difficulté d’intubation jugée par le score IDS [44].

Dans cette étude 4 patients étaient intubés avec succès par l’ATL après échec du LS. A travers ces études, il parait que l’intérêt l’ATL est surtout marqué dans les intubations difficiles. En effet différentes séries ont montré l’efficacité de l’ATL en tant que dispositif de secours après échec du LS [38,45].

La dernière méta analyse faite confirme les résultats de ces études en montrant une réduction du temps de l’intubation au profit de l’ATL par rapport au LS avec une réduction de l’incidence du risque de l’intubation œsophagienne [46].

Les autres avantages de l’ATL sont le meilleur apprentissage de l’intubation [47,48], la réduction du mouvement du rachis cervical 54 par rapport au LS et la réduction du risque infectieux [49].

Chez nos patients, nous avons choisi comme critère de jugement principal le temps d’intubation entre les trois groupes. Nous avons utilisé le score IDS, qui est largement utilisé comme critère de jugement secondaire. En effet ce score était validé pour l’évaluation des laryngoscopies directes. Son utilisation pour l’évaluation des laryngoscopes indirects garde encore certaines limites [50], néanmoins une corrélation positive est retrouvée entre le score d’IDS et un score subjectif (EVA) dans la plupart des études [10,50].

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Dans notre étude l’ATL et le VL ont permis de réduire le temps d’intubation par rapport au LS dans la chirurgie thyroidienne. Les deux LI ont permis d’intuber facilement avec des scores IDS et EVA plus faible par rapport au LS, ceci est expliqué par la meilleure vision glottique offerte par ces deux dispositifs.

Néanmoins l’ATL reste plus performant par rapport au VL quand à la facilité d’intubation jugée par l’IDS et l’EVA. Cette facilité d’intubation notée avec l’ATL a été montrée par plusieurs études avec moins de recours aux manœuvres alternatives [8,43,44].

Dans notre série, seul l’ATL a permis une meilleure stabilité hémodynamique (FC, PAM) par rapport au VL et LS.

Les faibles niveaux de pression appliquée sur la langue et la mandibule [51] et surtout l’absence de nécessité d’alignement des trois axes [52] expliquent cette meilleure tolérance hémodynamique de ce dispositif par rapport aux autres (LS et VL). Dans notre étude, l’expérience des opérateurs pourraient expliquer en partie nos résultats, cependant cet effet parait faible du fait de la performance démontrée de ces LI par rapport au LS dans les mains des opérateurs inexpérimentés [53,54].

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