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Nos observations montrent que les anesthésistes doivent faire face à plus de problèmes lors de la surveillance (M=2.36, σ=2.32) et lors de l'induction (M=1.41, σ=1.22) qu'à la fin de l'intervention, l'intervention durant généralement plus longtemps que la phase d'induction et surtout que la phase de réveil. Nous analyserons dans cette partie, le type de problèmes auxquels l'anesthésiste doit faire face ainsi que les actions de gestion de celui-ci (détection et récupération).

3.4.1 Le type de problèmes selon les phases

Nous avons décidé de considérer comme problème soit ce qui était détecté par une alarme nécessitant une recherche d'informations supplémentaires par l'anesthésiste, soit ce que lui-même considérait comme un problème lors de l'auto-confrontation. Au total, 86 problèmes ont été répertoriés (M=3.86, σ=3.41).

Cinq types de problèmes ont été répertoriés avant l'intervention. Il y a tout d'abord les problèmes qui sont liés au matériel (mauvaise vérification, problème d'affichage, etc.) (N=5). On observe également tout ce qui relève d'une mauvaise préparation, une mauvaise organisation comme le dossier du patient qui n'est pas complet, le matériel manquant (N=3). Une mauvaise anticipation de la part de l'anesthésiste est aussi relevée : allergies du patient non évaluées à la consultation, intubation difficile non prévue, examens complémentaires non consultés (N=13). Tout ce qui est du ressort du patient (métabolisme particulier, réaction imprévisible : changement soudain du rythme cardiaque, salivation excessive, etc.) (N=9). Et enfin, ce qui est du ressort du médecin (e.g. IADE en formation qui tente une intubation, N=1).

Si l'on s'intéresse maintenant aux problèmes qui surviennent lors de la maintenance de l'anesthésie, 5 catégories peuvent être distinguées. Il y a tout ce qui concerne une mauvaise anticipation de l'anesthésiste (e.g. le patient se réveille durant l'intervention, N=14). De fausses alarmes peuvent également apparaître. Celles-ci sont dues à la sensibilité des moniteurs utilisés (N=13). La troisième catégorie est relative au patient : les constantes vitales peuvent chuter de façon impromptue (N=18). On observe ici aussi des problèmes liés à la préparation du patient. Ainsi, certains patients arrivent en salle alors qu'ils n'ont pas reçu les médicaments demandés lors de la consultation (N=6). Ce problème est double car non seulement le patient a été mal préparé par les infirmiers du service mais l'anesthésiste n'a pas non plus vérifié ces informations lors de la prise en charge. Enfin, nous avons également relevé un problème au niveau de la chirurgie (e.g. durant une des observations, le chirurgien a malencontreusement coupé dans la rate du patient. Ce problème a une influence sur le travail de l'anesthésiste, principalement au niveau post-opératoire) (N=1).

Enfin, les problèmes qui ont été relevés en fin d'observation portaient sur une mauvaise estimation temporelle de l'anesthésiste (au niveau de la synchronisation). En effet, le chirurgien a fini l'intervention alors que l'anesthésiste a de nouveau injecté une dose d'anesthésiant au patient (N=2). La seconde catégorie de problème est relative à une mauvaise anticipation de l'anesthésiste (e.g. le patient se met à régurgiter au moment de l'extubation) (N=1).

3.4.2 Le type de détection

La figure 12 reprend les différents types de détection observés. Ainsi, on s'aperçoit que la majorité des problèmes sont détectés suite à une prise d'informations fortuites (c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'antécédent à cette prise d'information : pas d'alarme, etc.) de l'anesthésiste (42%). Comme nous l'avons déjà vu, l'équipe médicale présente dans la salle d'opération joue un rôle dans le maintien de la sécurité. Ainsi, 30% des détections passent par des communications entre les différents membres. Majoritairement, ces communications ont lieu entre le chirurgien et l'anesthésiste (65%). Enfin, les anesthésistes détectent également des erreurs par le biais des alarmes. Cela signifie que dans 28% des cas, l'anesthésiste est amené à chercher de plus amples informations suite à l'audition d'une alarme du moniteur. Cependant, nous verrons dans la prochaine sous-partie que toutes les détections de problème ne mènent pas à une action de récupération.

3.4.3 Le type d'actions de récupération

Nous avons vu précédemment à quel type de problème l'anesthésiste pouvait être confronté. Nous allons maintenant analyser quel type d'action de récupération est apporté aux différents problèmes.

Six catégories d'actions ont été répertoriées. Il y a tout d'abord le cas où l'anesthésiste récupère le problème en utilisant un protocole de gestion recommandé (e.g. technique d'intubation appropriée, injection d'un certain médicament selon le

Prise Information 42%

Communication pertinente 30% Alarme 28%

Figure 12: Répartition en pourcentages des différents types de détection toutes phases confondues

problème, etc.) (79%). Ensuite, on note également des actions du type « réglage du monitoring » (20%). Par exemple, l'anesthésiste modifie les réglages du moniteur pour que celui-ci s'adapte aux constantes vitales du patient. L'anesthésiste peut également décider d'attendre, il ne récupère pas le problème et attend de voir l'évolution (12%). Cette attente peut ainsi amener à prendre des risques. Dans ce cas, ce sont des risques pris délibérément en toute connaissance de cause. La quatrième catégorie concerne les actions de récupération qui sont confiées à autrui, en l'occurrence à l'infirmier ou au pneumologue (5%). Enfin, les deux dernières activités concernent d'une part une évaluation supplémentaire qui peut être réalisée afin de modifier la prise en charge (e.g. mise en évidence de problèmes allergiques importants à l'entrée du bloc opératoire) (2%) et d'autre part, des modifications du plan post-opératoire qui avait été établi à la consultation mais qui doit être modifié compte tenu d'un problème lors de la chirurgie (3%).

Ces pourcentages indiquent que les problèmes ne sont pas directement récupérés, ils nécessitent généralement plusieurs actions de récupération avant que le problème soit géré efficacement. En moyenne, 1,21 actions sont nécessaires.

Ainsi, nos résultats mettent tout d'abord en évidence l'apparition de problèmes relatifs à la gestion temporelle de l'intervention. En effet, plusieurs défauts d'anticipation qui sont observés. Ces défauts sont dus à une évaluation incomplète ou à une mise en application erronée ou inexistante. On observe également des défauts de synchronisation temporelle. Il s'agit par exemple du cas où l'anesthésiste endort à nouveau le patient sans tenir compte de l'avancement de la chirurgie. On note également des problèmes « imprévisibles » relatifs aux constantes vitales du patient qui fluctuent au cours du temps et en fonction des injections réalisées. Enfin, une part importante des problèmes est relative à des fausses alarmes. Celles-ci peuvent influencer l'anesthésiste qui ne lancera pas la bonne procédure de récupération si le problème est mal identifié. De plus, elles constituent des éléments qui permettent de détecter un problème. L'anesthésiste doit alors interpréter et différencier les vraies alarmes des « fausses ».

La majorité des problèmes est détectée fortuitement. Cela signifie que l'anesthésiste prend des informations sans savoir qu'il y a un problème. Les détections sont également réalisées à travers des communications mettant alors en évidence l'influence de l'équipe dans la gestion des risques au bloc opératoire.

recommandés par la spécialité. En dehors de ces récupérations, deux éléments nous semblent importants à retenir. Il y a d'une part les réglages apportés par l'anesthésiste. Une analyse approfondie des actions apportées aux fausses alarmes met en évidence que l'anesthésiste, pour éviter de se laisser méprendre, va modifier les réglages du moniteur pour ne plus être confronté à de fausses alarmes. D'autre part, il arrive également qu'un problème soit détecté mais qu'il ne soit pas automatiquement récupéré. Dans certains cas, il peut s'agir d'une décision collective (e.g. le taux infectieux du patient est élevé mais le chirurgien décide de continuer l'intervention). C'est là une prise de risque connue. On note également le cas où l'anesthésiste préfère attendre l'évolution des données pour agir. Enfin, plusieurs actions de récupération peuvent être apportées afin de gérer adéquatement le problème.