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Génération de térahertz par voie optoélectronique

Génération et détection de térahertz

1.1.3 Génération de térahertz par voie optoélectronique

L’objectif de la génération de térahertz par voie optoélectronique est de combiner les possibilités des mondes électronique et optique. Les composants électroniques ne permettent pas encore d’atteindre le térahertz ou avec des puissances relativement faibles. Les lasers approchent la gamme térahertz par les fréquences supérieures mais sont dépendants d’un refroidissement à l’azote ou à l’hélium liquide et la puissance s’effondre à l’approche de 1 THz.

Dans les systèmes optoélectroniques, le composant électronique sert de transducteur pour convertir le rayonnement optique en signal électrique qui va à son tour être rayonné par une antenne. Le rayonnement optique peut être continu ou impulsionnel. Le système est donc composé d’une source optique, d’un photodétecteur rapide et d’une antenne pour rayonner le signal électrique. La source optique impulsionnelle est un laser impulsionnel femtoseconde et la source continue est composée de deux lasers de longueurs d’ondes très proche afin de créer un battement de fréquence.

L’utilisation d’une source continue permet d’obtenir un rayonnement monochromatique et facilement accordable. La génération de fréquence par cette méthode s’appelle le photo-mélange.

La génération de térahertz à partir d’une source impulsionnelle nécessite l’utilisation d’un composant rapide afin de transformer cette impulsion optique de forme gaussienne en une impulsion électrique également de forme gaussienne. En pratique les composants électroniques ne sont pas suffisamment rapides et l’impulsion gaussienne est déformée par le temps de réponse du composant. Dans le domaine fréquentiel, cette impulsion s’étend sur une large gamme de fréquence et nécessite une antenne large bande pour le rayonnement.

1.1.3.1 Le photomélange

La technique du photomélange est utilisée pour générer un rayonnement monochroma-tique dans la gamme du térahertz. Les applications sont surtout dans le domaine de l’imagerie et de la spectroscopie. La faible largeur spectrale du signal émis permet d’obtenir une excel-lente résolution lors de l’analyse spectroscopique.

Le photomélangeur est un dispositif composé d’un photodétecteur et d’une antenne pour le rayonnement de l’onde térahertz. En amont du photomélangeur se trouvent deux lasers de

longueurs d’ondes très proches (figure 1.7). Le dispositif est conçu de manière à rayonner le battement de fréquence entre les 2 lasers.

Laser 1

Laser 2

Photodétecteur (photocommutateur)

Antenne

Sources laser Photomélangeur

Fig. 1.7 – Schéma de principe d’une source térahertz par photomélange.

Le premier laser émet à une pulsation ω1 = ωet le deuxième à ω2 = ω + ∆ω. La condition nécessaire pour obtenir un battement de fréquence est que les deux faisceaux lasers aient la même polarisation et qu’ils soient parfaitement superposés. Nous écrirons les deux ondes respectives des lasers comme deux ondes TEM10 de polarisation identique :

−→

E1(~r, t) = E1cos(ω1t−k1 · ~r + φ1) ~ux (1.8) −→

E2(~r, t) = E2cos(ω2t−k2 · ~r + φ2) ~ux

où E1 et E2 sont les amplitudes crêtes du champ électrique, ω1 et ω2 les pulsations, k1 et k2

sont les vecteurs d’onde et φ1 et φ2 les éventuels déphasages à l’origine du temps.

La clé du photomélange se trouve dans la réponse du photodétecteur qui est proportion-nelle à la puissance optique, elle-même proportionproportion-nelle au carré du champ électrique par l’intermédiaire du vecteur de Poynting11. La puissance optique instantanée sur le

photodé-10Transverse électromagnétique

11P = ~~ E× ~H =| ~E|2

tecteur à la position −r0 et à l’instant t est donnée par : P (−→r0, t) = E ( ~r0, t)2 η0 = |E1( ~r0, t) +−→ E2( ~r0, t)|2 η0 = 1 η0 h |E1|2cos21t−k1 · ~r0+ φ1) +|E2|2cos22t−k2 · ~r0+ φ2)i +E1E2 η0 cosh2− ω1)t− (k2k1)· −r0 + (φ2− φ1)i +E1E2 η0 cosh1+ ω2)t− (k1 +−→ k2)· −r0 + (φ1+ φ2)i avec η0 ≈ 377Ω l’impédance caractéristique du vide.

Le photoconducteur ayant un temps de réponse τ, il ne peut suivre les variations du signal optique ayant une pulsation supérieure à ω0 = 1/τ >> ω2 − ω1. Le photocourant ne peut être modulé qu’aux pulsations inférieures à ω0, les autres composantes fréquentielles, ω1, ω2, ω12, sont intégrées et donc nulles. Toute la difficulté dans la réalisation du photoconducteur réside dans le temps de réponse τ du composant qui doit être le plus court possible afin de générer du térahertz.

Finalement, la puissance optique moyenne responsable de la modulation du photocourant dans le photodétecteur est donnée par l’expression suivante :

< P (−→r0, t) > = 1 τ Z τ 0 P (−→r0, t) dt = |E1( ~r0, t)|20 + |E2( ~r0, t)|20 + E1E2 η0 cos h (ω2− ω1)t− (k2k1)· −r0 + (φ2− φ1)i = P0+ 2pP1P2cosh2− ω1)t− (k2k1)· −r0 + (φ2− φ1)i avec P0 = P1+ P2, P1 = |E1( ~r0,t)|2 2η0 et P2 = |E2( ~r0,t)|2 2η0 .

De cette équation, nous voyons tout l’intérêt du photomélange si au moins une deux sources lasers 1 et 2 est accordable : il est alors possible de générer un rayonnement balayant toute la gamme térahertz à une fréquence précise. La stabilité fréquentielle et la pureté spectrale de ce rayonnement sont directement liées à la stabilité des deux lasers en fréquence (ω2− ω1) et en phase (φ2− φ1). Les sources lasers bi-fréquences ont l’avantage de cette stabilité puisque les variations de fréquence ou de phase sont identiques sur les deux faisceaux contrairement à l’utilisation de deux sources indépendantes.

Le tableau 1.7 regroupe quelques résultats obtenus et publiés dans la littérature par la technique du photomélange.

Photodétecteur [Référence] longueur d’onde (µm) Fréquence (THz) Puissance (µW) GaAs-BT[36] - 0,910 1,1 GaAsSb-BT[37] 1,06 0,7 ≈0,01 UTC-PD[38] 1,55 1,04 2,3 InGaAs irradié[39] 1,55 1 0,01 Tab. 1.7 – Puissance de sortie obtenue par photomélange. 1.1.3.2 Régime impulsionnel

La génération de térahertz par la méthode impulsionnelle permet de générer des impul-sions électro-magnétiques très courtes de l’ordre de la picoseconde voire de la sub-picoseconde. La densité spectrale de puissance de ces impulsions s’étend jusqu’au térahertz.

La méthode impulsionnelle dans le cadre de la spectroscopie a l’avantage de donner très rapidement un résultat mais avec une moins bonne résolution que le photomélange (résolution suffisante pour l’étude de solide). Le domaine d’application de l’impulsionnel se trouve plutôt dans l’imagerie, la télédétection et la télécommunication de type Ultra Large Bande (ULB ou UWB12

en anglais).

La possibilité de créer des impulsions électriques très courtes à l’aide d’un laser picose-conde et d’un photocommutateur a été démontrée par Auston[40] en 1975. Dans son dispositif expérimental, il a pu commuter une centaine de volts en quelques picosecondes.

Le système utilisé pour la génération de ces impulsions est composé d’un laser pico-seconde, d’un photodétecteur et d’une antenne large bande pour rayonner l’impulsion. Le spectre rayonné est fixé par la constante de temps du photodétecteur et la durée des impul-sions.

Le photocommutateur utilisé est un semiconducteur à forte résistivité polarisé par une tension extérieure (figure 1.8). Le faisceau optique du laser femtoseconde crée des paires électron-trou dans le semiconducteur suite à l’absorption de photons par celui-ci. Les électrons et trous ainsi créés sont accélérés par le champ électrique de la polarisation extérieure, et ce mouvement de charges crée un courant transitoire (photocourant). Ce photocourant est tout simplement la conséquence de la création de ces porteurs libres qui vont augmenter la conductivité du semiconducteur et donc diminuer sa résistivité. La durée de ce courant transitoire est fixée soit par le temps de vie des porteurs, soit par leurs temps de transit à travers la zone de champ. Pour les matériaux à temps de vie court que nous verrons plus en détail dans le chapitre 2, la durée de vie des porteurs est de l’ordre de la picoseconde.

Fig.1.8 – Photocommutateur.

Un modèle simple pour décrire la physique de la variation de la conductivité sous l’effet de l’illumination d’un semiconducteur par un laser femtoseconde est présenté ci-dessous. La conductivité du matériau en l’absence d’éclairement est donnée par la relation suivante :

σ0 = n0n+ p0p

Sous éclairement, la création de paires électron-trou modifie la densité de porteurs libres (n = n0+ ∆n et p = p0 + ∆p) dans le semiconducteur et modifie sa conductivité de sorte que σ = σ0+ ∆σ. La variation de conductivité ∆σ suite à l’éclairement s’écrit :

∆σ = e(∆nµn+ ∆pµp) = eµn(1 + µp µn

)∆n

La mobilité des électrons µn dans un semiconducteur est en général bien supérieure à la mobilité des trous µp; la condition µpn<< 1est vérifiée d’où la variation de la conductivité suite à l’éclairement du semiconducteur :

∆σ ≈ eµn∆n

Cette augmentation de la conductivité (ou diminution de la résistivité) du semiconducteur va permettre, sous polarisation, l’augmentation du courant le traversant. La durée de ce courant transitoire est régi par l’équation de continuité par l’intermédiaire de ∆n :

∂∆n ∂t = 1 e ∂jn ∂x + G(t)∂∆n τ (1.9)

semiconduc-teur avec jn la densité de courant des électrons et G(t) le taux de génération d’électrons. En l’absence d’éclairement, G(t) = 0, les électrons sont balayés par le champ extérieur afin d’être collectés, mais surtout, ils se recombinent très rapidement afin que le matériau retrouve sa faible conductivité σ0. Le temps de vie typique des porteurs libres τ dans un semiconducteur à temps de vie court est de l’ordre de la picoseconde (0,1ps - 10ps).

Le terme G(t) dans le cas d’une illumination par un laser femtoseconde peut être modélisé par une gaussienne dont la largeur à mi-hauteur est de l’ordre de la centaine de femtose-condes :

G(t) = Aexp(−t2/σ)

La variation brusque de la conductivité grâce à l’impulsion optique puis un retour rapide à l’état d’équilibre suite au temps de vie court des porteurs permettent de générer une impul-sion très courte sur une ligne de transmisimpul-sion. Cette impulimpul-sion est rayonnée par une antenne large bande.

L’association d’un matériau à temps de vie court et d’une antenne s’appelle une antenne photoconductrice. Sur la figure 1.9, nous pouvons voir différentes topologies d’antennes pho-toconductrices. La technologie de fabrication et les résultats expérimentaux de ces dispositifs sont suffisamment matures pour être commercialisés. Le matériau utilisé est le GaAs épitaxié à basse température (GaAs-BT). Des exemples d’allures temporelles et fréquentielles des impulsions térahertz détectées par l’antenne sont présentés sur la figure 1.10. L’impulsion té-rahertz détectée est de l’ordre de la sub-picoseconde avec une fréquence de coupure d’environ 1 THz à -3dB. Le laser femtoseconde utilisé est un titane/saphir dont les impulsions optiques sont à une longueur d’onde de 780nm et possèdent une largeur à mi-hauteur de 80 fs.

Les derniers résultats obtenus par la génération large bande de fréquence térahertz sont regroupés dans le tableau 1.8. Les puissances moyennes atteintes par cette technique sont supérieures à ce que l’on obtient par photomélange.

Photodétecteur [Référence] longueur d’onde (µm) Bande passante (GHz) Puissance moyenne (µW) GaAs-BT[41] 0,780 750 11 GaAs-BT[42] 0,780 280 44

(a) Antenne dipôle photoconductrice (b) Antenne bow-tie

(c) Ligne photoconductrice strip-line

Fig. 1.9 – Vue schématique d’antennes photocondutrices[41].

(a) Impulsion térahertz générée par l’antenne dipôle et détectée par la ligne photoconductrice strip-line.

(b) Transformée de Fourier de l’impulsion térahertz.

Fig.1.10 – Impulsion térahertz détectée par l’antenne et sa transformée de Fourier[41].

1.2 Détection du rayonnement térahertz