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Température corporelle

II. 4.2.2.2 Exposition nocturne ou continue à la lumière

II.4.2.3. Gènes circadiens et cancer

Plusieurs études expérimentales ont montré que les gènes circadiens semblaient jouer un rôle au cours des processus cancéreux. Il apparaît maintenant que plusieurs mutations des gènes de l’horloge pourraient favoriser le développement de cancers ou accélérer leur progression. Le système circadien des souris dont le gène Per2 présente une mutation ou une délétion (Per2m/m et Per2-/-) est profondément altéré (Zheng et al., 1999). En outre, ces souris présentaient à partir de six mois une hyperplasie spontanée des glandes salivaires et développent des cancers spontanés avec une fréquence anormale (Fu et al., 2002; Lee et al., 2010). Ainsi, 30 % des souris Per2m/m mourraient avant 16 mois, la moitié avec un lymphome, alors que les souris sauvages ne développaient pas de lymphome avant 20 mois. Les souris

Per2m/m présentaient aussi une hypersensibilité aux rayons γ, qui provoquaient un blanchiment et une perte des poils prématurés, ainsi qu’une augmentation très significative de l’incidence de cancers par rapport aux souris sauvages irradiées. En fait, la même dose d’irradiation γ (à ZT10) provoquait un lymphome chez 71% des souris Per2m/m et seulement 5% des souris sauvages (Fu et al., 2002). A l’échelle moléculaire, la mutation Per2 favorisait la cancérogenèse radio-induite en réduisant le taux de l’apoptose suite à la répression de la transcription de P53 dans les thymocytes. En outre, l’expression circadienne hépatique des ARNm de c-Myc est augmentée, alors que celle de P53 est significativement réduite chez les souris Per2m/m par rapport aux souris sauvages. Le proto-oncogéne c-Myc joue un rôle-clé dans la prolifération cellulaire et l’apoptose. Les gènes cycline D1 et GADD45alpha, qui sont sous le contrôle de c-Myc, présentaient une expression circadienne chez les souris normales

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qui disparaît chez les souris Per2m/m. En effet, le gène de l’horloge Bmal1 agit directement sur la boîte E du promoteur P1 de c-Myc en inhibant sa transcription. Ces résultats ont conduit à proposer Per2 comme un gène suppresseur de tumeur (Fu et al., 2002).

Les souris porteuses de la mutation hétérozygote APCmin/+ développent des polypes et cancers colorectaux spontanés. La combinaison de la mutation Per2 avec celle de APCmin/+ doublait le taux de tumeurs colorectales par rapport à la mutation APCmin/+ seule. Le mécanisme fait intervenir une augmentation de l’expression de β-caténine et de la Cycline D (Wood et al., 2008).

En accord avec ces résultats obtenus in vivo, la surexpression du gène Per2 a réduit la prolifération cellulaire et accru l’apoptose dans plusieurs lignées tumorales en culture. Au contraire, la diminution de l’expression de Per2 par des siARN (Si-Per2) a accéléré la prolifération maligne en culture (Gery et al., 2005; Hua et al., 2006; Wood et al., 2008; Miyazaki et al., 2010; Sun et al., 2010; Gu et al., 2012). Dans des lignées cellulaires de leucémie humaine (K562), et de carcinome pulmonaire ou mammaire murins, la surexpression de Per2 arrêtait le cycle cellulaire et augmentait l’apoptose en accroissant notamment l’expression de p53 et de Bax et en diminuant celle de c-Myc, de Bcl2 et de la

Cyclin B1. Au contraire, l’extinction du gène Per2 par utilisation de Si-Per2 a provoqué des

effets inverses (Hua et al., 2006; Sun et al., 2010). De plus, la diminution de l’expression de

Per2 dans les lignées tumorales coliques (HCT116, SW480) a augmente la croissance

cellulaire et a induit une surexpression de la β caténine et de la Cycline D (Wood et al., 2008). Cependant, contrairement à tous les résultats précités en faveur du rôle suppresseur de tumeur de Per2, une étude récente a rapporté l’absence de différence pour la cancérogenèse radio-induite selon l’existence ou non d’une mutation de Per2 (Antoch et al., 2013).

Pourtant, d’autres études montrent que les souris dont les gènes Per2 et Per1 ont été inactivés (Per2m/mPer1-/-) développaient aussi davantage de cancers spontanés. Ainsi un lymphome spontané survenait à l’âge de 20 mois chez 17.5% des souris porteuses de la double mutation

Per1/Per2, et seulement 5% chez les souris sauvages. L’exposition à une dose unique de

rayons γ doublait ce pourcentage dans les 2 génotypes (Lee et al., 2010).

La mutation homozygote Bmal1-/- n’exerce aucun effet sur la cancérogenèse spontanée ou radio-induite. Cependant les souris hétérozygotes Bmal1+/- étaient significativement plus sensibles au développement de tumeurs spontanées ou induites par irradiation. Ainsi un lymphome spontané survenait chez 12% des souris Bmal1+/- et chez 33% de ces animaux

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après irradiation γ alors que l’irradiation ne provoquait de lymphome que chez 10 % des animaux sauvages (Lee et al., 2010). Les modèles in vitro suggéraient aussi une fonction suppresseur de tumeur pour Bmal1. En effet, La suppression de l'expression de Bmal1 dans des cellules murines de cancer du colon (C26) a augmenté la prolifération tumorale et réduit l'apoptose (Zeng et al., 2010). Très récemment, il a été montré que la sous-expression de

Bmal1 par utilisation d’ARN interférents, a diminué l’invasion des cellules tumorales issues

de cancer du poumon humain, en association avec une activation de la voie de signalisation PI3K-Akt-MMP-2 (Jung et al., 2013).

Enfin Lee et collègues ont montré que la double délétion Cry1/Cry2 augmentait la susceptibilité des souris à développer des cancers spontanés ou radio-induits. Les souris porteuses de la double délétion Cry1-/-Cry2-/- développent une faible incidence spontanée de lymphomes (13%) et de tumeurs hépatiques (6%). Ces taux sont doublés pour ces 2 types de tumeurs après l’exposition des animaux aux rayons γ. Des résultats similaires ont été trouvés chez les souris Cry1-/-Cry2+/+ (Lee et al., 2010). A l’inverse, la double délétion Cry1/Cry2 n’aurait aucun effet sur la cancérogenèse radio-induite tant in vivo qu’in vitro (Gauger et al., 2005). Les souris P53-/- portant la double délétion Cry1-/-Cry2-/- développent moins de tumeurs spontanées que les souris P53-/- (Ozturk et al., 2009). Dans des lignées tumorales humaines, la combinaison de la double délétion Cry1/Cry2 avec une mutation P53, induit l’apoptose par activation du gène P73 après exposition aux rayonnements ultraviolets ou à l’oxaliplatine, médicament anticancéreux largement utilisé en cancérologie digestive. La croissance des tumeurs Cry1-/-Cry2-/- P53-/- greffées est réduite par rapport aux tumeurs P53-/- chez des souris exposées à l’oxaliplatine (Lee et al., 2011).

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PROBLEMATIQUE

ET

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III. PROBLEMATIQUE ET OBJECTIFS