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VI. D ISCUSSION GÉNÉRALE

6.3 Forces et limites de l’étude

La présente étude comporte des forces et des limites qui doivent être prises en compte afin de mieux interpréter les résultats. Les différentes limites de l’étude seront traitées, ainsi que leurs effets potentiels sur les résultats et les conclusions.

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6.3.1.1 Validité interne

Un potentiel biais de sélection, issu par la bonne santé des travailleurs, se doit d’être envisagé. En étant possiblement en meilleure santé que la population générale, les participants à cette étude ont potentiellement introduit un biais de sélection dont, il est impossible de quantifier l’effet. Les travailleurs, qui sont en meilleure santé que la population générale, peuvent venir sous-estimer l’effet de la variable indépendante, l’IM et sa gravité, sur les variables dépendantes que sont les ressources et les coûts observés. Il est possible d’étayer cette hypothèse en observant le nombre de patients inclus dans l’échantillon. Sur la période d’étude de 26 ans, 310 patients ont correspondu aux critères d’inclusion et d’exclusion sur les 8 781 personnes susceptibles d’y correspondre. Ce qui nous permet d’estimer un taux d’incidence de 0,7 cas par 1000 personnes-année de développer un IM sur toute la période d’étude, ce résultat est largement inférieur à l’incidence que l’on retrouve dans la population québécoise (22). Ceci est potentiellement explicable par le fait que la population de la cohorte était en moyenne plus jeune en début d’étude que la population générale du Québec. Un autre aspect de cette étude est son haut taux de participation. Le taux de participation initial de la cohorte de 89%. En 2015-2018 98.1% des patients initiaux ont été retracés. Il est impossible de nier le fait que les non participants soient différents des participants à la cohorte, mais le haut taux de participation, permet de croire qu’une grande partie des caractéristiques de cette population a été capturée, limitant ainsi le risque de biais.

Cette étude fondée sur des données observationnelles et l’utilisation de données médico administrative, n’est pas à l’abri de biais d’information. Les erreurs de codification au niveau des registres ou des bases de données médico-administratives sont les principales difficultés pouvant être rencontrées avec l’analyse de banque de données. Quoique le Canada et le Québec aient des bases de données médico-administratives de qualité, il n’est pas possible d’exclure des erreurs de codifications (76, 88). L’impact de cet éventuel biais est difficile à estimer, tout comme il est impossible de déterminer dans quelles directions: sous ou surestimations, nos résultats peuvent être affectés. Par exemple, des actes médicaux peuvent avoir été réalisés auprès des patients sans avoir été répertoriés et codifiés dans les banques de données de la RAMQ. Cet exemple peut amener une potentielle sous-estimation des coûts. À l’inverse, des erreurs peuvent avoir été commises lors de l’entrée des informations dans les banques de données. Certains actes médicaux peuvent possiblement avoir été inscrits plus d’une fois, ce qui peut éventuellement entraîner une surestimation des coûts. Les erreurs de codification sont difficiles à reconnaître et impossibles à prévoir.

Un potentiel biais d’information peut s’être glissé dans notre étude lors de la création des regroupements temporels. L’année de la date index a été utilisé afin de catégoriser les événements d’IM, dans une des catégories d’année issue de l’évolution des recommandations de la SCC. Toutefois, un temps d’adaptation est nécessaire entre la diffusion des recommandations et leur adoption dans les pratiques médicales quotidienne.

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Ce biais pourrait induire une sous-estimation de l’effet des changements de lignes directrices observées par la fréquence des interventions dans cette étude. Ce laps de temps nécessaire à l’adoption des nouvelles pratiques médicales est abordé dans le consensus de la SCC de 1995 (58). Il y est mentionné que les recommandations issues du consensus de l’automne 1995 ne sont visibles dans les pratiques médicales qu’en 1997. Par ailleurs, puisque ce projet a un horizon temporel long, les modifications des méthodes de pratiques sont certes observées, mais avec une précision temporelle potentiellement altérée. Dans une version subséquente de l’article scientifique qui fait l’objet de ce projet, une analyse de sensibilité pourrait s’avérer pertinente afin de prendre en compte ce biais.

Une troisième source de biais d’information est les coûts attribués aux différentes ressources de l’étude. Les coûts attribués aux consultations de service d’urgence et à une journée d’hospitalisation ont été systématiquement établis en valeur du dollar canadien de 2018. Par ailleurs, une autre possibilité aurait été d’utiliser les archives des rapports financiers annuels des établissements en santé concernés pour chacune des années d’étude. En raison de la crise sanitaire et de la complexification qu’elle a amenée à ce projet de recherche, l’approche du coût moyen a été conservée. Ultérieurement, pour la soumission pour publication de l’article scientifique issu de ce projet l’approche du coût d’hospitalisation pour chaque année de la période de suivi sera privilégiée. Il est impossible de définir quel est l’impact, sur ou sous-estimation que ce potentiel biais pourrait avoir sur les résultats. D’autre part, il est possible d’émettre l’hypothèse que les coûts reliés aux journées d’hospitalisation aient été sous-estimés, du fait que le même coût de 1 031,49$ a été attribué, peu importe dans quelle unité de soins un patient se trouvait. Or, une journée d’hospitalisation aux soins intensifs n’a pas le même coût qu’une journée dans une unité de soins régulière (89). Il est possible d’émettre l’hypothèse que ce biais d’information ait sous-estimé nos résultats reliés aux coûts directs de la prise en charge d’un premier épisode de soins.

La survenue d’IM est multifactorielle et certains de ses facteurs de risque sont également associés à l’utilisation de ressources en santé et aux coûts. Les analyses réalisées avec les modèles de régressions linéaires multivariés nous ont permis d’ajuster pour plusieurs d’entre eux notamment : le sexe, l’âge, l’année de l’incidence de l’IM, le statut tabagique ainsi que le statut lipidique. Il aurait été souhaitable d’ajuster pour d’autres facteurs confondants potentiels tels que le diabète, la pratique d’activité physique, la consommation d’alcool, l’indice de masse corporelle ou encore le rapport tour-hanche. Malheureusement, la faible taille d’échantillon a limité la puissance statistique de ce projet. Il n’a pas été possible d’ajuster les modèles de régression pour tous les facteurs confondants potentiels souhaités. Néanmoins, les analyses stratifiées présentées en supplémentaires réalisées en fonction du sexe et du sous-type d’IM ont permis de vérifier la différence statistique

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entre des variables spécifiques. Ces dernières ont permis de démontrer l’impact de ces variables sur les ressources et les coûts d’un premier épisode de soins pour IM.

6.3.1.2 Validité externe

La question de recherche de cette étude s’intéresse aux coûts d’un premier épisode de soins pour IM, au sein d’une population de travailleurs cols blancs et retraités de la région de Québec. Cette réalité ne correspond évidemment pas à la réalité de toute la population québécoise. Cependant, dans les pays industrialisés, dont le Canada, il est estimé que les travailleurs cols blancs représentent 70% de la population en âge de travailler. De plus, la forte validité externe de la cohorte PROQ est assurée par le large éventail de statut socio-économique de ses participants, 10,4% des participants travaillent en tant que haut fonctionnaire, 35,5% sont des professionnels, 20,8% des techniciens et 30,6% des employés de bureau. Il n’est pas possible d’exclure que ces informations n’aient pas changé dans le temps, ce qui peut éventuellement être une source de facteur de confusion potentiel. D’autre part, la prévalence de maladies cardiovasculaires mesurée au moment du recrutement était de 8%. Celle-ci est comparable à ce qui est observé dans la population canadienne et américaine, en fonction de l’âge (3, 6).

La population source de cette étude est la cohorte PROQ. Au moment du recrutement entre 1991 et 1993, la cohorte PROQ était composée de 49,9% de femmes et de 50,1% d’hommes. Ces proportions permettent une capacité d’extrapolation de nos résultats à la population cible, soit l’ensemble des travailleurs cols blancs du Québec. Par ailleurs, à l’issue des critères d’inclusions et d’exclusions appliqués, notre échantillon d’étude est composé de seulement 53 femmes, 17%. La moyenne d’âge au moment de l’incidence de l’IM est de 60 ans. Il est important de noter que les femmes ont en moyenne leur premier IM neuf ans plus tard que les hommes (23). Il est difficile avec un échantillon aussi petit de femmes d’avoir une représentativité adéquate de la population et tirer des conclusions significatives sur l’effet du sexe sur les ressources et les coûts de la prise en charge hospitalière, d’un premier IM.

Il est difficile d’extrapoler nos résultats sur l’ensemble de la population du Québec, en raison de la petite taille de notre échantillon. Certes, la population de la cohorte était représentative de la population québécoise en âge de travailler, mais le risque d’IM chez celle-ci demeure faible vu leur âge. Néanmoins, il est possible d’extrapoler sur l’ensemble de la population des travailleurs cols blancs. Par contre, nous aurions potentiellement eu besoin d’une période de suivi plus longue pour que notre taux d’incidence d’IM se retrouve plus proche de celui de la population générale. Cependant, il est important de rappeler qu’il s’agit d’une étude à visée exploratoire, la

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première à s’intéresser au volet économique des données médico administratives des participants de la cohorte PROQ.

6.3.2 Forces de l’étude

Dans cette partie de la discussion, les différentes forces au niveau méthodologiques seront discutées. Tout d’abord, l’horizon temporel et le devis longitudinal à long terme nous permettent d’observer les tendances d’utilisation des ressources et des coûts engendrés lors d’un premier épisode d'IM. L’horizon temporel de 26 ans est de loin le plus long que nous ayons pu retrouver dans la littérature. Le devis longitudinal, a permis d’observer les facteurs de risques en santé et les comorbidités dont souffraient les patients avant la survenue de l’IM.

Une autre force de ce projet réside dans le taux de participation élevé au recrutement de la cohorte entre 1991 et 1993 (75%), ainsi que les taux de participations au premier et deuxième temps de suivis, respectivement 90% et 81% des patients éligibles. De plus, le pourcentage d’accès aux données médico-administratives des participants est très élevé, 96%. Ces derniers éléments nous permettent d’éviter un biais de sélection induit par les sujets perdus de vu. Les participants perdus de vue peuvent éventuellement être différents des participants.

Dernièrement, le jumelage des données sociodémographiques de la cohorte PROQ et des données médico administratives permet un profil complet des patients inclus dans l’échantillon d’étude. Ce projet n’a pas utilisé tout le potentiel offert par le jumelage des sources d’informations. Étant le premier à s’intéresser au volet économique des données médico-administratives de la cohorte PROQ, ce projet a permis d’explorer les différentes possibilités offertes par ces dernières. Fondé sur l’utilisation de données secondaires de la cohorte PROQ, ce projet est le premier à s’intéresser à l’aspect économique des données récoltées par les participants. Ce projet a permis d’explorer le potentiel des données médico-administratives de la cohorte PROQ et à maximiser le potentiel d’utilisations des celles-ci.

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