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2 BIOCOMPTA® : EXPÉRIMENTATION DE VALORISATION FINANCIÈRE DE LA BIODIVERSITÉ

2.1 Fondamentaux et principes de l’outil

Avec la BioCompta®, Gaïadomo se plie aux hypothèses de base qui s’accordent avec la démarche de l’évaluation économique vue au premier chapitre. Globalement, nous retiendrons que la valeur de la biodiversité n’est ni infinie ni nulle et elle peut être estimée par l’étude des marchés des comportements humains ou encore des préférences individuelles. C’est en s’appuyant sur ces principes fondamentaux que Gaïadomo a défini sa démarche et son approche méthodologique propre, à l’égard de la valorisation financière de la biodiversité.

La BioCompta® est destinée à fournir une valeur monétaire annuelle d’un terrain, à titre indicatif. Il s’agit, non pas de déterminer un prix négociable sur le marché, mais d’évaluer la valeur écologique minimum d’un foncier à travers les usages actuels et futurs de la biodiversité ainsi que par sa valeur d’existence. Ainsi, les résultats de la BioCompta® exprimés sous forme d’un rendement économique qui donne une idée du potentiel des actifs naturels en termes financier mais également en termes de ressources. En effet, le terme de rendement économique (ou écosystémique), choisi par le bureau d’étude, renvoie à la notion économique de rentabilité des capitaux employés (Larousse, 2014). En d’autres termes, le rendement écosystémique évalue la production de B&SE fournis par un site, en termes monétaires et rappelle la vision anthropocentrée. Ce rendement s’exprime en Euros par an et résulte de la somme du rendement écosystémique de l’habitat, de la faune et de la flore, dans un cadre spatio-temporel précis. (Gaïadomo, 2013a)

Cet indicateur monétaire peut servir à plusieurs finalités (sensibilisation, comptabilité d’entreprises, prise de décision, etc.) qui sont abordées dans le détail au chapitre 5.

2.1.1 Approche méthodologique

La méthodologie utilisée dans le cadre de la BioCompta® se décompose en quatre à cinq étapes. Une première phase est consacrée à la définition d’un foncier. Il s’agit de délimiter le terrain et de réaliser une recherche bibliographique préliminaire afin de déterminer les principaux intérêts liés au cas d’étude (historique, protection, inventaires passés, mode de gestion, etc.). En second lieu, les inventaires naturalistes sont réalisés au regard de la faune, de la flore et des habitats. Cette étape de caractérisation des milieux naturels assure une conformité optimale de la valeur au cas d’étude. Les étapes suivantes consistent en la compilation d’informations et la manipulation des données. Les valeurs économiques compilées dans la base de données (BD) BioCompta®, nommées valeurs brutes, serviront de ressource pour l’évaluation monétaire de la parcelle. Néanmoins, une vérification des valeurs disponibles dans le programme BioCompta® peut révéler

un manque de valeurs pour certains habitats ou certaines espèces spécifiques. Malgré toute l’énergie investie dans la recherche bibliographique de valeurs, il se peut qu’une phase de recherche de données s’avère tout de même nécessaire, du moins pour les premières études (Gaïadomo, 2014a). Vient ensuite l’étape du calcul de la valeur financière des habitats, de la faune et de la flore à travers l’actualisation et l’ajustement des valeurs, extrêmement facilité par l’outil Excel BioCompta®. Cette étape de valorisation monétaire est détaillée dans les paragraphes suivants. Enfin, la phase finale consiste à l’analyse du résultat fourni par l’outil sous la forme d’un rendement écosystémique annuel en euros.

La détermination du rendement écosystémique à travers le logiciel se fait en quatre étapes. La première est la recherche de valeurs à partir d’une revue de la littérature. Dans le cas des espèces, ce peut être n’importe quel type de valeur, notamment des valeurs justes issues de la jurisprudence, des valeurs marchandes ou bien des valeurs issues de la préférence des utilisateurs. Ainsi, la recherche de valeurs d’espèces s’effectue au sein d’études déjà effectuées ou directement sur le marché (selon le prix de vente par exemple). Afin de pouvoir valoriser par individu, lorsque la valeur est issue d’un consentement à payer (CAP), la notion de taille minimale pour une population viable (Minimum Viable Population Size) intervient pour déterminer une valeur brute. Selon la règle de Franklin et Soule (Franklin et autres, 1980), la taille minimale pour qu’une population ait 90 % de chance de survie dans les 100 prochaines années s’élève à 50 individus. Le CAP, en euros par foyer et par an, est alors multiplié par le nombre de foyers interrogés puis divisé par 50. Concernant les habitats, ce sont les valeurs de chaque service écosystémique relié à chaque type d’habitat qui sont recherchées. Ces valeurs sont déterminées à partir de diverses méthodes d’évaluation, toutes abordées à la section 1.3.3. Des banques de données regroupant les études faites sur l’évaluation économique des SE existent. L’annexe 2 en fait la liste, mise à jour au début de l’année 2014. La banque de données mondiale EVRI, par exemple, regroupe déjà un certain nombre d’études (EVRI, 2014; Olivier, 2013). Ces valeurs de référence font ensuite l’objet d’un transfert de bénéfice simple pour les adapter au cas d’étude. En effet, le site d’étude doit ressembler sensiblement au cas d’application et des ajustements doivent être réalisés pour une représentativité optimale de la valeur finale. Ce transfert de bénéfice ajuste la valeur trouvée dans la bibliographie selon les dimensions d’espace et de temps ainsi que selon les caractéristiques biophysicochimiques : c’est ce qui est appelé l’actualisation et l’ajustement de la valeur.

L’actualisation, deuxième étape de la démarche, consiste à transposer la valeur déterminée dans le cas d’étude à une valeur actuelle. En économie, l’actualisation est le procédé qui permet de comparer la valeur d’un bien ou d’un service qu’il rend à différentes périodes dans le temps (CGDD, 2010a). La détermination du taux d’actualisation se fait à travers un arbitrage entre un investissement dans un capital et un même placement, cette fois-ci sur les marchés financiers (CGDD, 2010b). Les investissements réalisés par les administrations, les entreprises ou encore les particuliers visent à améliorer leur avenir de telle sorte qu’une dépense actuelle doit permettre un bénéfice ultérieur. Dans le système actuel, un investissement s’avère intéressant que s’il rapporte au moins autant qu’un placement à taux fixe à la banque. Ainsi le taux d’actualisation suit celui du taux d’intérêt pour un futur proche. Au-delà d’un horizon de 30 ans, le taux d’intérêt est limité et

devient insuffisant pour juger de la pertinence d’un projet touchant à l’environnement. Pour cela, le taux d’actualisation appliqué est identique à celui employé pour d’autres calculs socio- économiques et s’élève à 4 % pour une période inférieure à 30 ans (ibid.; TEEB, 2010b). L’actualisation se fait par la pondération de la valeur avec un coefficient de la forme 1/(1+r)n avec r le taux d’actualisation annuel, soit 0,04, et n le nombre d’année d’écart entre l’année d’étude et l’année en cours (Salles, 2010). L’actualisation est éventuellement précédée d’un changement de devise qui s’effectue à l’aide du convertisseur de devise nommé OANDA (OANDA, 2014). Le travail d’actualisation de la valeur est réalisé en amont, afin que toutes les valeurs contenues dans le programme soient prêtes à être manipulées. Cette étape permet d’obtenir l’unité de valeur écologique actualisée qui s’exprime en Euros (€)/ha/an pour les habitats et en €/individu/an pour les espèces. Il est nécessaire de préciser que dans le cas des habitats, la valeur brute d’un service écosystémique ne s’exprime pas toujours en €/ha/an dans la littérature. Le renseignement d’attributs spécifiques au site d’étude, appelés paramètres spécifiques, est alors requis. Il peut s’agir de caractéristiques écologiques ou physico-chimiques propres au milieu, telles que le nombre moyen d’arbres à l’hectare ou l’abondance de lombrics, ou bien de données socio- économiques, telle que la fréquentation du milieu ou la surface exploitée.

La troisième étape est l’ajustement de la valeur grâce à des paramètres généraux, définis à la section 2.2.2. Ces paramètres ou attributs de conservation, comme le statut de protection ou encore la connectivité du milieu pour les habitats, sont préétablis pour la majorité d’entre eux (il y a une liste déroulante de propositions) et sont pris en compte pour tous les habitats et toutes les espèces. Ainsi tous les habitats sont jugés sur les mêmes critères, tout comme toutes les espèces entre elles. Ce nouvel ajustement de la valeur fait en sorte que les caractéristiques (écologiques, physiques, réglementaires, etc.) les plus importantes soient comptabilisées, et ce de manière équitable. Cette étape aboutit à la formulation d’une valeur écologique ajustée.

La dernière étape est la modulation de la valeur par l’intermédiaire de paramètres supplémentaires. Ceux-ci sont spécifiques : ils peuvent varier d’un cas à l’autre tel que la nidification pour les oiseaux ou le nombre de pieds pour les végétaux. Pour les habitats c’est là qu’intervient, notamment, la surface de la parcelle afin de déterminer la valeur en €/an. Cette étape permet de définir le rendement écosystémique pour les habitats, la faune et la flore. La somme de ces trois valeurs donne le rendement écosystémique total en €/an.

La description de la méthodologie, résumée au tableau 2.1, montre un effort certain d’adaptation et d’ajustement de la valeur économique au cas d’étude. La succession d’injection des paramètres divers et variés dans le calcul permet de se rapprocher au plus près de la réalité et rajoute une exigence en terme de connaissances sur le milieu à valoriser. Cela rend le bureau d’étude le mieux placé pour réaliser l’exercice.

Tableau 2.1 : Méthode de détermination du rendement écosystémique total établi par Gaïadomo (Tiré de : Gaïadomo, 2014, p. 14)

2.1.2 Interface Excel et mode d’utilisation

Les informations permettant au programme de fonctionner sont toutes contenues dans le fichier Excel dédié à la BioCompta® (Gaïadomo, 2013b). Elles sont organisées de manière logique dans les feuilles Excel et il est possible de basculer de l’une à l’autre à l’aide d’onglets. Les premiers onglets de l’outil Excel sont la page d’accueil, qui illustre le principe de la BioCompta®, et la page de garde, qui fait un récapitulatif des principaux résultats de l’analyse.

Les feuilles contenant le cœur de l’information sont celles des bases de données, des listes déroulantes et des feuilles à compléter à chaque utilisation : habitat, valorisation habitat, faune et flore. Les BD se retrouvent dans les onglets qui portent respectivement le nom du sujet des données stockées : BD habitat, BD valorisation habitat, BD flore et BD faune. De manière générale, les BD contiennent les formules reliant les cellules entre elles, les mises en page ainsi que les attributs standards s’il en existe, pour chaque ligne. L’onglet BD valorisation habitat héberge les données relatives aux SE : valeurs brutes, liens bibliographiques, paramètres spécifiques, détails des calculs, etc. Les BD constituent donc les ressources sur lesquelles s’appuient les feuilles à compléter. L’onglet « listes déroulantes » contient les plages nommées utilisées par le programme et permet une modification des constantes.

La feuille habitat est à remplir par l’utilisateur du programme. Ce dernier rentre chaque parcelle les unes après les autres et renseigne les paramètres généraux et spécifiques qui lui sont demandés. Ces données sont copiées dans la feuille valorisation habitat pour l’actualisation et fournit une valeur d’habitat en €/ha/an, qui est la somme des SE. Cette valeur est à son tour retournée dans l’onglet habitat où elle est ajustée selon les paramètres spécifiques, afin d’obtenir une valeur économique totale de l’habitat ou rendement des SE en €/an. Les feuilles flore et faune sont également à compléter par l’utilisateur qui renseigne l’espèce à aller chercher dans la BD

ainsi que les paramètres de pondération qui permettront d’obtenir la valeur finale des populations.

Les onglets synthèse et analyse graphique fournissent respectivement le rendement économique des parcelles et les caractéristiques relatives à cette valeur (valeur prise en compte, participation relative, etc.). Enfin, le programme héberge la bibliographie liée aux valeurs brutes.

Il existe plusieurs modes d’utilisation du logiciel permettant l’affichage des seuls onglets et paramètres nécessaires selon l’objectif de la manipulation. L’onglet Pilotage programme permet de basculer entre les différents modes. Le mode modification du programme affiche toutes les composantes décrites ci-dessus. Les spécialistes peuvent ainsi modifier ou compléter les paramètres fondamentaux de l’outil et le remanier. Le mode démonstration client permet de conserver seulement les éléments nécessaires à la compréhension du programme et masque les détails techniques pour une meilleure lisibilité. Le mode étude de site, utilisé pour un cas d’étude concret masque les onglets BD, les barres de formule et les autres aspects qui permettraient de modifier l’interface. Un mode réglage d’étude permet de modifier une étude déjà réalisée ou en cours de réalisation. Enfin, une dernière option est la réinitialisation du programme qui efface les données renseignées pour l’étude précédente et permet d’en débuter une autre, avec une interface vierge.

L’interface du programme Excel se veut instinctive et claire. Le déroulement d’une utilisation basique en mode étude de site, illustré à la figure 2.1, se fait de la manière suivante. Après avoir renseigné la page de garde, l’utilisateur se place sur l’onglet habitat où il ajoute les parcelles une à une. À chaque entrée de parcelle, une fenêtre modale est à remplir par l’utilisateur avec les caractéristiques de la parcelle, le code de l’habitat, les paramètres généraux puis spécifiques. Il est possible de revenir sur cette fenêtre en tout temps afin de modifier ou supprimer les informations. Les paramètres spécifiques des habitats peuvent également être visualisés et modifiés dans l’onglet valorisation habitat. Une fois les habitats renseignés, l’utilisateur peut entrer la faune et la flore en se positionnant sur les onglets correspondants. De la même manière que pour l’habitat, l’utilisateur remplit les caractéristiques de l’espèce et les paramètres requis dans une fenêtre modale, à chaque ajout. Le calcul se fait alors automatiquement, même si certaines données sont manquantes. En outre, le programme est censé être capable de s’assurer de la cohérence des données entrées (bonne syntaxe, ensemble des informations nécessaires pour le calcul, etc.). Finalement, le programme fait automatiquement la somme des valeurs obtenues dans chacun des onglets (habitat, faune et flore) afin de déterminer le rendement écosystémique par parcelle puis le rendement total.

Ajouter parcelle

Ok (Calcul valeur écologique)

Ajouter flore / animal

Ok (Calcul valeur écologique)

Figure 2.1 : Schématisation du déroulement d’une utilisation simple en mode étude de site